Nos sénateurs et députés vont-ils autoriser la création d’embryons humains transformés ?

Bonjour

Les médias en ont-ils beaucoup « trop fait » sur l’extension à « toutes les femmes » de l’accès aux techniques de PMA ? Au lendemain de la manifestation parisienne contre ce projet gouvernemental c’est ce que pensent, dans les colonnes de Libération,  Philippe Meirieu, professeur émérite en sciences de l’éducation à l’université Lumière-Lyon II et Hélène Le Gardeur , formatrice en bioéthique .  Ils développent leur (dérangeant) propos dans une tribune intitulée « PMA, un (bel) arbre qui cache la forêt… ». Et rejoignent ici, peu ou prou, les voix de José Bové, Jacques Testart, Dominique Bourg ou Sylviane Agacinski.

Sans remettre en question le bien-fondé de la promesse présidentielle de l’extension des techniques de PMA « à toutes les femmes qui forment le projet d’avoir et d’élever un enfant », M. Meirieu et Mme Le Gardeur  rappellent une donnée malheureusement trop oubliée des médias généralistes  : la loi dite de «bioéthique», actuellement en débat entre l’Assemblée nationale et le Sénat, comporte trente-quatre articles dont trente traitent de sujets sur lesquels le débat public a été largement escamoté.

« Qui sait que cette loi, dans son article 14 (25-26), autorise l’implantation d’embryons humains dans un animal à des fins de gestation ? Qui a compris toutes les conséquences de la suppression de l’actuel article 17 du code de la santé publique («la création d’embryons transgéniques ou chimériques est interdite») et de son remplacement par un nouvel article qui autorise, de fait, la création d’embryons humains génétiquement modifiés avec la technique dite des «ciseaux ADN» ? Qui a vu l’impact de la possibilité (ouverte par l’amendement posé par le Sénat sur l’article 2) donnée à des structures à but lucratif de conserver et de commercialiser des gamètes, des ovocytes et des embryons ? »

Bienvenue chez Frankenstein et à Gattaca

Pour les deux auteurs de cette tribune, ce qui est en train de se décider sous nos yeux « change radicalement le rapport anthropologique de l’humain à la procréation ». « Même si la loi réserve pour le moment – mais pour combien de temps ? – cette possibilité à la recherche, il s’agit bien de pouvoir enlever tel ou tel gène ou d’en remplacer un par un autre pour modifier des embryons humains : rien d’autre que la possibilité de ‘’fabriquer’’ des enfants en manipulant les données génétiques selon notre bon vouloir » ajoutent-ils. Ce n’est pas tout.

« Il n’est plus seulement question de permettre aux femmes de choisir le moment de leur grossesse, il sera possible, dès maintenant et grâce à la congélation d’ovocytes (autorisée à l’article 2), d’améliorer la «performance» des femmes au travail et d’ouvrir la porte à leurs employeurs pour qu’ils décident à leur place de leur maternité. Il n’est plus seulement question de conserver dans des banques de sperme publiques les moyens offerts aux femmes et aux couples infertiles de procréer, il s’agit d’organiser un véritable marché des spermatozoïdes où les officines privées feront sans doute miroiter, moyennant finance, des enfants de meilleure qualité. »

Où l’on en revient, immanquablement, aux marchands et à l’entrée dans Gattaca.

« Comment ne pas voir qu’il s’agit là, tout simplement, de la marchandisation du vivant ? Comment ne pas déceler, dans les interlignes d’une loi qui s’avance masquée sous le vœu légitime de «la PMA pour toutes», la vieille songerie du docteur Frankenstein ? Comment ne pas s’inquiéter des risques d’eugénisme que font courir les techniques légitimées par cette loi : à quand l’élimination systématique des embryons qui ne correspondraient pas exactement à nos vœux ? Et comment ne pas imaginer que nous ouvrons la porte, grâce au recueil systématique des données génétiques (auquel la loi fait référence à de nombreuses reprises), à la mise en place de fichiers dont l’usage par un pouvoir politique ou par des «industries de l’humain» pourrait s’avérer terrifiant ? »

Pour M. Meirieu et Mme Le Gardeur, cette loi dite de «bioéthique» n’est «ni faite ni à faire», le débat sur la bioéthique « a été confisqué ». Entreprises capitalistes et laboratoires de biotechnologie « y trouveront leur compte ». Et « sans un sursaut de démocratie » c’est « l’humain même, dans sa précieuse spécificité, qui est menacé ». Résumons : les sénateurs et les députés français vont-ils, demain, autoriser la création d’embryons humains transformés ?

A demain @jynau

Malades mentaux : prédire leur passage à l’acte pour prévenir les fusillades de masse

Bonjour

Aux portes de la folie politique, en écho de « 1984 » ou de « Minority Reports ». C’est un papier de Slate.fr (Claire Levenson) : « Trump veut faire surveiller les personnes atteintes de troubles mentaux » qui développe un sujet du Washington Post (William Wan) : « White House weighs controversial plan on mental illness and mass shootings ». Slate.fr :

« Après les récentes fusillades d’El Paso et de Dayton (trente-et-un morts au total), Donald Trump a préféré évoquer la question du rôle des troubles psychiatriques plutôt que celle de l’accès aux armes à feu. Le président américain avait déclaré juste après les événements: «C’est la maladie mentale et la haine qui appuient sur la gachette. Pas l’arme à feu.» Depuis, l’un de ses proches, l’ancien président de la chaîne NBC, Bob Wright, a proposé de lancer un programme de recherche sur la façon dont l’intelligence artificielle pourrait prédire le passage à l’acte violent de ce type de personnes.

« Afin de mener ces études à bien, des volontaires autoriseraient l’accès aux données de leurs smartphones. Il ne s’agit à ce stade que d’un projet, qui a été présenté au président Trump, à sa fille Ivanka et au ministre de la Santé, mais l’idée est déjà critiquée par plusieurs spécialistes. Interviewée par The Washington Post, une ancienne psychologue des services secrets américains explique que ce genre de technologie donnerait un nombre très élevé de fausses alertes et qu’il serait impossible de déceler les personnes potentiellement dangereuses. Elle ajoute que les recherches actuelles ne permettent pas d’établir de lien direct entre maladie mentale et fusillades de masse. »

Que dire de plus ? Que des études ont montré qu’un quart seulement des responsables de ces tueries était atteint d’un trouble psychiatrique ? Que d’autres facteurs sont partagés par ce genre d’individus: l’impression d’être victime d’injustice, le désir d’être célèbre, la volonté de copier d’autres massacres, un passé de violence conjugale, le narcissisme et l’accès aux armes à feu ? Qu’une étude sur la tuerie de Fort Hood en 2009, au cours de laquelle un commandant militaire avait tué quatorze personnes sur une base au Texas, avait conclu que les tentatives de prédiction de ce genre d’incidents étaient presque impossibles ?

L’intelligence artificielle pour prédire le « passage à l’acte » des « malades mentaux » et prévenir ainsi les « fusillades de masse » ? Et les enfermer pour plus de sûreté ? On pourra toujours soutenir qu’il ne s’agit ici que d’une opération comme une autre de réduction des risques. Combien de temps nous reste-t-il avant que l’exécutif d’outre-Atlantique puisse, sans frein, passer à l’acte ?

A demain @jynau

Face à Agnès Buzyn, les « servantes écarlates » de la petite maternité condamnée du Blanc

Bonjour

Gilets Jaunes, territoires et dystopie. « La servante écarlate » (The Handmaid’s Tale) est un roman du tonnerre. Ecrit par Margaret Atwood ,publié en 1985 et traduit en français il y a trente ans. Livre bientôt devenu film  sous le même titre grâce à Volker Schlöndorff avant de trouver la bénédiction commerciale de la série télévisée.

« La religion domine la politique dans un régime totalitaire et où les femmes sont dévalorisées jusqu’à l’asservissement. Elles sont divisées en classes : les Épouses, qui dominent la maison et sont les seules femmes ayant un semblant de pouvoir, les Marthas qui entretiennent la maison et s’occupent aussi de la cuisine, les Éconofemmes, les épouses des hommes pauvres et les Tantes enfin qui forment les Servantes habillées d’amples robes écarlates dont le rôle est la reproduction humaine. Toutes les autres femmes  sont déportées dans les Colonies où elles manipulent des déchets toxiques. Dans ce futur, le taux de natalité est très bas à cause de la pollution et des déchets toxiques de l’atmosphère. Les rares nouveau-nés sont souvent déclarés ‘’ inaptes’’ ».

Où l’on perçoit sans mal la résonance avec l’affaire de la petite maternité (jadis condamnée par Agnès Buzyn) de la petite cité du Blanc (ancien territoire de l’Indre). Et voici que grâce à une mise en scène hier encore impensable, l’affaire prend soudain une nouvelle dimension politique. On peut en prendre la mesure dans mille et un médias et réseaux – dont Le Figaro (Marie Boetti) :

« Une centaine de membres du collectif créé en réaction à la fermeture de la maternité du Blanc, dans l’Indre, se sont mobilisés ce mercredi au cœur de Paris. Devant l’enceinte du Congrès national des maires et l’Assemblée nationale, ces habitants ont reçu le soutien de plusieurs élus.

 «  C’est dans le silence que le collectif «C pas demain la veille», constitué d’habitants du Blanc dont la maternité est vouée à la fermeture, a manifesté ce mercredi matin devant le Parc des expositions qui accueille le Congrès national des maires à Paris. Vêtues de capes rouges et de bonnets blancs, à l’image du roman de Margaret Atwood. des dizaines de femmes ont défilé sur la place Porte de Versailles. Elles ont ensuite formé un cercle au sein duquel des manifestants se sont allongés, couverts de pancartes en tissu avec des inscriptions telles que ‘’les bébés ne naissent pas dans les choux, mais en sécurité dans notre maternité’’ (…) ».

« Zéro dialogue »

«Il y a zéro dialogue et on ne nous entend pas. Nous avons non seulement l’impression d’être méprisés parce qu’ils ont fermé notre maternité, mais aussi parce qu’ils ont décidé de ne pas nous recevoir. S’ils ne veulent pas venir au Blanc, c’est nous qui allons venir à Paris», a expliqué au Figaro Jérémie Godet, l’un des membres du collectif. Les manifestants n’ont pas pu rentrer dans le Congrès. Ils ont donc mené leur manifestation silencieuse et non-violente devant l’enceinte. Puis, peu après l’Angélus le collectif écarlate s’est dirigé vers l’Assemblée nationale. Avec une supplique : rencontrer Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé qui a, publiquement dénoncé la dangerosité de cette petite maternité.

Supplique restée sans réponse. Le député Maxime Minot (Oise, LR) a dit aux journalistes avoir fait cette demande à plusieurs reprises, mais en vain. La maire du Blanc ne comprend pas ce silence. «Est-ce qu’elle se sent mal et pense que notre combat est juste ? Elle serait alors embêtée d’être en face de nous ? Moi, je commence à me poser la question.» Elle n’est pas la seule. Et cette petite maternité condamnée préfigure peut-être la condamnation prochaine de l’hôpital de Vierzon. Le Figaro :

« Pour Judith, une mère résidant dans la ville du Blanc, la fermeture de la maternité s’apparente à une véritable injustice. ‘’Les femmes (rurales) devraient avoir les mêmes droits que les autres Françaises qui vivent en ville. Parce que nous habitons dans un milieu rural, nous avons l’impression d’être condamnées’’ ». L’affaire est loin d’être terminée . Le collectif « C pas demain la veille » lancera bientôt  « La marche des oreilles» (afin de se faire entendre par Agnès Buzyn et  le gouvernement). Un pèlerinage qui s’achèvera à Paris. Peu avant la Noël.

Gilets Jaunes, territoires et usage politique de la dystopie.

A demain

@jynau

 

 

 

Voici les nouveaux salariés : avec une puce RFID sous-cutanée, greffée entre pouce et index

Bonjour

C’est une information à faire froid dans le dos. Après la BBC  ou Le Figaro on la retrouve  développée, dans Le Monde, par Corinne Lesnes.  A partir de demain, 1er août 2017, les employés salariés de la compagnie Three Square Market de River Falls (Wisconsin) évolueront plus librement dans leur espace de travail ; du moins celles et ceux qui auront accepté l’offre (gratuite) de leur employeur : se faire implanter une puce électronique sous la peau, entre le pouce et l’index. Cinquante employés sur quatre-vingt ont ainsi signé pour être greffés.

« La puce, de la taille d’un grain de riz, leur sera gratuitement introduite entre le pouce et l’index, par un personnel médical « qualifié », lors d’une « chip party » au siège de la compagnie, précise Le Monde. Après quoi, un simple mouvement suffira au porteur pour ouvrir les portes, payer la cantine, débloquer son ordinateur et utiliser les photocopieuses. ’L’implantation élimine le besoin de transporter des données’’, résume la bienveillante direction. » La légèreté, nouvelle définition de la liberté : légèreté des données ingérées.

Prolétaires-cobayes

La puce-cyborg coûte, à l’unité, 300 dollars (255 euros). Elle est développée par le fabricant suédois Biohax qui est déjà passé à l’acte en Suède. Sa puce a été approuvée par la Food and Drug Administration américaine. C’est une identification par radiofréquence (RFID, Radio Frequency Identification), une technologie courante pour suivre les livraisons en transit, et qui repose sur l’utilisation de champs électromagnétiques de capturant automatique les données 1.

C’est la première fois, souligne Le Monde, qu’aux Etats-Unis une entreprise propose à ses employés de servir de cobayes aux puces RFID. Donald Trump ou pas, nous sommes toujours en démocratie : les salariés hésitants pourront bénéficier d’une « bague » ou d’un « bracelet » en lieu et place de l’implant. On ajoutera, cela ne s’invente pas, que Three Square Market est une entreprise qui commercialise un logiciel pour les distributeurs de snacks dans les entreprises.

Cette firme pionnière espère bénéficier de la publicité gratuite que lui vaut son initiative. Conscient des risques, son directeur tente toutefois de dissiper les inquiétudes relatives aux atteintes à la vie privée. La puce ne sera dotée d’aucun « dispositif de traçage de type GPS ». On se demande pourquoi. Quant aux données, elles sont cryptées comme pour les cartes de crédit. Un souci ? Un regret ? Le « microchip » pourra être retiré à tout moment « en deux secondes, comme une écharde ».

 Sisyphe et son mythe

Echarde est le mot : petit corps effilé et pointu, de bois ou de métal, qui se fiche accidentellement dans la peau ou dans la chair. Car que faire d’une écharde à moins qu’on ne cherche à l’extraire ? Une vieille affaire littéraire :

« Il n’est pas un de ses personnages [de Dostoïevski] qui ne porte cette écharde dans la chair, qui ne l’irrite ou qui n’y cherche un remède dans la sensation ou l’immoralité ». Camus, Le Mythe de Sisyphe,1942, p. 151.

Sisyphe avec RFID entre pouce et index ? Certains ne veulent voir là que la déclinaison de la technique de la carte de « paiement-contact ». Interrogé par KSTP-TV, Todd Westby, le directeur de Three Square Market, affirme que l’implantation de puces électroniques sous la peau humaine est «la prochaine grande avancée inévitable » et entend bien que lui et son entreprise ne soient pas les derniers. Cette dystopie à portée de main sera-t-elle intégrée dans la refonte du Code du Travail français ?

Comment ne pas voir que nous sommes là aux premières frontières du transhumanisme, aux marches du Temple des « hommes augmentés » ? Comment ne pas entendre Philip K. Dick et ressentir comme une sorte de froid dans le dos ?  Pour le Washington Times il faut voir là une nouvelle étape dans l’accès des êtres humains à une nouvelle liberté : celle de payer. C’est assez bien résumé.

A demain

1 Sur ce thème on peut se reporter avec grand intérêt à l’ouvrage de notre confrère Michel Alberganti : « Sous l’œil des puces : la RFID et la démocratie » Éditions Actes Sud.

Le « paquet de tabac bientôt à dix euros » ne verra pas le jour avant la fin du quinquennat

Bonjour

Toujours se méfier du politique, du novlangue consubstantiel à l’exécutif. On se souvient encore de l’enthousiasme soulevé, chez les officiers de santé, par l’annonce du paquet de cigarettes bientôt à dix euros. C’était le 4 juillet dernier -il y a trois jours. Edouard Philippe II, devant des députés énamourés : « Ne rien faire est exclu. Nous porterons progressivement le prix du paquet de cigarettes à 10 euros ». Et plus précisément :

« En matière de lutte contre le tabac, là encore, il nous faut assumer des choix courageux. Chaque année, le tabac, en France, est la cause de 80 000 décès par an. C’est la première cause de mortalité évitable et la consommation quotidienne de tabac augmente chez les adolescents.

« Ne rien faire est exclu. Nous porterons progressivement le prix du paquet de cigarettes à 10 euros en luttant sans merci contre les trafics qui minent cette politique de santé, autant qu’ils fragilisent ceux qui respectent la loi ».

Enthousiasme, vraiment, que d’entendre un Premier ministre donner le chiffre de 80 000 décès (il aurait dû ajouter « prématurés »), de reprendre à son compte le formule « la première cause de mortalité évitable » tout en reconnaissant l’incurie absolue reflétée par les chiffres de consommation des adolescents. « Finalement nous avons là la démonstration que nous avons, collectivement, fait du bon boulot » nous confiait un haut responsable de la santé publique persuadé que la situation qui prévalait depuis cinq ans avec Marisol Touraine et François Hollande allait, enfin, se débloquer. C’était pécher par naïveté.

Négociations avec les buralistes

 Novlangue ? Agnès Buzyn était l’invitée de RTLce jeudi 6 juillet. Et voici ce qu’elle a déclaré (lisant son texte) quant à la hausse du prix du tabac :

« Les négociations débutent. Nous allons recevoir les buralistes. Il est évident que cette mesure n’est pas faite pour pénaliser cette profession. Bien au contraire, il faut les accompagner dans une diversification. Nous allons travailler. Mais ce qui est clair pour la santé publique c’est que pour que la hausse du tabac soit efficace et que les gens arrêtent de fumer il faut que cette hausse soit importante ; ça ne peut pas être des hausses de dix centimes.

 « Tous les pays qui ont vu une baisse importante de leur tabagisme sont passé par des hausses notables de leur prix du tabac. L’Angleterre par exemple. Les Anglais fumaient autant que nous ; 30% de prévalence du tabagisme en 2005. Ils sont maintenant à moins de 20%, nous sommes encore à 29%. Et ils sont passés par un prix à 11 euros. Il y aura une hausse du prix en 2018. Dix euros quand ? Tout cela est en négociation. Dix euros quand ? J’espère y arriver en trois ans. Tout cela sera négocié. »

Toujours rien sur la cigarette électronique

 « Les hausses doivent être importantes pour qu’elles aient un impact de santé publique, dira encore la ministre.  La France fait partie des plus mauvais élèves au monde pour ce qui est de la prévalence du tabagisme des jeunes et des femmes. Donc nous avons besoin de mesures spécifiques [par rapport aux pays frontaliers]. »

Ce n’est certes pas le novlangue de George Orwell 1 mais c’est tout aussi désespérant. Ainsi donc voilà une ministre qui sait tout du dossier, qui avait (timidement mais publiquement), réclamé des hausses drastiques de prix quand elle était en charge de la lutte contre les cancers. Et nous la retrouvons déjà dans une position identique à celle de Marisol Touraine, corsetée entre Bercy, Matignon, l’Elysée et le lobby des buralistes-Big Tobacco. Et venir à RTL pour confier des espérances menacées par les futurs arbitrages du chef de son gouvernement – sans parler de l’Elysée.

Cinq ans …. Cinq longues années pour espérer parvenir à augmenter (au mieux) de trois euros le prix du paquet de cigarettes, seule mesure efficace pour réduire le nombre de morts prématurées causées par le tabagisme. Où est le drastique ? Sans oublier que, comme depuis cinq ans, rien n’est dit quant à une possible ouverture politique sur le levier anti-tabac que constitue la cigarette électronique. Et ce à la différence, notable, du remarquable exemple britannique. Quel est le pouvoir de cette ministre ? Il suffira, pour cela, d’observer l’évolution du prix du tabac durant ce quinquennat.

A demain

1 Remarquable : « Avoir raison avec Orwell », par Brice Couturier, sur France Culture

«Réconciliation sur la vaccination»: serions-nous déjà dans le «Meilleur des Mondes» ?

Bonjour

Dans un billet d’une particulière virulence 1 Anne Chailleu, membre du Formindep dénonce les conditions dans lesquelles a été réalisée la « Concertation nationale sur la vaccination » voulue par Manuel Valls, alors Premier ministre et Marisol Touraine ministre de la Santé :

« La concertation sur les vaccins, dont la feuille de route était de relever le niveau de confiance dans les vaccins et le taux de couverture vaccinale, s’avère un échec complet. Le rapport final est un exemple de médiocrité intellectuelle, de déontologie approximative, de transparence douteuse, et sa rédaction est la négation d’un exercice démocratique. Avec de tels défenseurs, la vaccination n’a hélas pas besoin d’ennemis. »

Cette analyse-dénonciation vaut d’être lue. L’auteure observe que la perte de confiance dans les vaccins est « pour partie un des symptômes d’une perte de confiance plus générale dans les institutions ». Elle estime que l’un des moteurs de la défiance envers les vaccins tient au fait que « les recommandations vaccinales sont édictées de façon non transparente, et fréquemment grevées de conflits d’intérêts ». Et elle soutient que
pour répondre à cette critique, légitime dans une démocratie, il faut « des institutions irréprochables dans leur transparence et leur indépendance ». Qui ne signerait ces prolégomènes ?

Triple fiasco

Suivent une série d’éléments tendant à démontrer que cette entreprise aura, in fine, été un triple fiasco :  déontologique, scientifique et démocratique. Ce qui fait beaucoup.

« Cet exercice est un échec complet qui peint un tableau alarmant de notre ‘’démocratie sanitaire’’, écrit l’auteure. Le dernier clou du cercueil de la confiance dans la vaccination étant apporté par la représentation des usagers. Le CISS, représentant monopolistique des usagers et patients en France, qui co-présidait cette concertation, affirme dans un communiqué de pure novlangue orwellienne que l’obligation c’est l’autonomisation du patient ».

Il s’agit ici d’un communiqué du Collectif interassociatif sur la santé (CISS) 2. On connaît les ravages du novlangue (la rigueur impose le masculin) inventé en 1948 et prophétisé pour l’année 1984 : « La guerre, c’est la paix. La liberté, c’est l’esclavage. L’ignorance, c’est la force. ».

Idées subversives

Nous sommes en 2016 et l’éclairant Wikipédia est là :

« Plus on diminue le nombre de mots d’une langue, plus on diminue le nombre de concepts avec lesquels les gens peuvent réfléchir, plus on réduit les finesses du langage, moins les gens sont capables de réfléchir, et plus ils raisonnent à l’affect. La mauvaise maîtrise de la langue rend ainsi les gens stupides et dépendants. Ils deviennent des sujets aisément manipulables par les médias de masse tels que la télévision.

« C’est donc une simplification lexicale et syntaxique de la langue destinée à rendre impossible l’expression des idées potentiellement subversives et à éviter toute formulation de critique de l’État, l’objectif ultime étant d’aller jusqu’à empêcher l’« idée » même de cette critique. »

Chacun jugera

Le communiqué du CISS qualifié d’orwellien est ici : « Conciliation sur la vaccination : une recommandation de compromis ». Le grand George Orwell/Eric Arthur Blair  est-il de retour parmi nous ? On pourrait, sous les lignes, parfois le penser. A chacun de juger :

« La recommandation retenue par le Comité d’orientation de la concertation citoyenne sur la vaccination – présidé par le Pr Alain Fischer et Claude Rambaud et dont le rapport a été rendu public ce mercredi 30 novembre – répond à l’impératif de santé publique comme à la volonté d’autonomisation du choix revendiquée par les usagers/citoyens.

 Le contexte français rend particulièrement risquée la levée immédiate de toute obligation vaccinale : les projections indiquent qu’elle aurait de grandes chances de se traduire par une baisse dangereuse de la couverture vaccinale à des niveaux qui pourraient voir se développer des foyers épidémiques graves. Tout en préservant cet objectif à terme d’une levée générale de l’obligation vaccinale, la voie étant apparue comme la plus cohérente à une majorité de membres du comité consultatif consiste à passer par une étape intermédiaire pendant laquelle l’obligation sera maintenue, et même étendue aux principales vaccinations aujourd’hui recommandées… mais en permettant à ceux qui le souhaitent, de façon assumée et transparente, de s’opposer individuellement à cette obligation pour leur(s) enfant(s).

 Face à une question où l’on doit réussir à concilier choix individuel et enjeu collectif, il n’y a jamais de solution idéale. La méthodologie utilisée pour mettre à plat l’encadrement des pratiques vaccinales en France et cette recommandation à laquelle elle a abouti offrent différents avantages :

 

  • Cela nous a montré que les attentes de nos concitoyens sont très partagées entre souhait de voir l’obligation vaccinale levée ou maintenue.
  • Cela a souligné que le contexte actuel ne paraît pas le plus approprié pour un retournement radical des pratiques alors que l’hésitation vaccinale est particulièrement élevée dans un environnement polémique qui ne favorise pas une prise de décision sereine, tant individuellement que collectivement.
  • Cela permet d’appeler à la poursuite des recherches en matière de vaccination, qu’il s’agisse d’investiguer ses effets bénéfiques comme ses effets néfastes sur la santé du point de vue de l’individu comme de celui du groupe.
  • Cela permet en parallèle de demander que soit mise en œuvre une nette amélioration du niveau d’information des publics (grand public, mais aussi professionnels de santé) sur les tenants et aboutissants de la vaccination, sans en nier les possibles effets indésirables mais en cherchant à rétablir la confiance collective vis-à-vis de cette pratique médicale existant depuis près de 100 ans et qui nous a permis de faire un bond qualitatif colossal sur de nombreuses causes de mortalité liées aux maladies infectieuses.
  • Cela apporte les garanties, en l’état actuel, du maintien d’une couverture vaccinale suffisante pour réduire le risque d’une grave crise sanitaire.
  • Cela ouvre la voie vers l’autonomisation du choix des patients / usagers / citoyens en leur laissant la possibilité de contourner l’obligation vaccinale sans avoir à le faire de façon dissimulée et non traçable, dans l’intérêt des enfants concernés, de leurs parents et des professionnels de santé qui les accompagnent.
  • Cela permet de dépasser la distinction ambigüe et pernicieuse entre vaccination obligatoire et vaccination recommandée. Toutes les vaccinations prévues pour les enfants s’inscrivent dans le même cadre reposant a priori sur une obligation, avec la possibilité de la contourner en cas de refus convaincu et assumé des parents.
  • Cela oblige à ce que soit réévalué, à moyen terme, c’est-à-dire d’ici 2 à 3 ans, le cadre de la politique vaccinale française en fonction de l’évolution des pratiques et représentations en la matière.

 Par ailleurs, la mise en œuvre de cette recommandation devra s’accompagner de la prise en charge à 100% par l’assurance maladie obligatoire du coût d’achat des vaccins, ainsi que de la possibilité de recourir à un régime d’indemnisation pour les personnes qui souffriraient d’effets indésirables. »

5 décembre 2016. Cuba vient d’en finir avec  les obsèques de Fidel Castro. On peut lire, relire et faire lire, d’Orwell,  La Ferme des animaux.

 A demain

 1 « La guerre, c’est la paix. La liberté, c’est l’esclavage. L’ignorance, c’est la force. George Orwell, ‘1984’ L’obligation, c’est la décision éclairée. Le CISS, 2016 »

2  Le Collectif interassociatif sur la santé (CISS) regroupe quarante-trois  associations « intervenant dans le champ de la santé à partir des approches complémentaires de personnes malades et handicapées, de personnes âgées et retraitées, de consommateurs et de familles ». Son budget s’est, en 2015, élevé  à 3 173 013 €.

Il a été financé pour 86,70% par des fonds publics (Direction générale de la Santé, 60,00 % ; Assurance maladie, 25,40 % ; Fonds Développement Vie Associative : 1,30 %) ainsi que par le Conseil national de l’Ordre des Pharmaciens (0,50 %), Malakoff-Médéric  (0,80 %), le Crédit Mutuel (0,50 %), ADREA (0,30 %), d’autres subventions privées (0,35 %) et les cotisation des associations membres (0,80 %).
 

 

 

 

«Réécrire la vie»: vers la fin du destin génétique. Le risque de l’eugénisme face au PDG de Cellectis

 

Bonjour

Le « grand public » ne connaît pas André Choulika, et c’est bien dommage. Un jour, c’est sûr, il le  rencontrera. Fondateur et PDG de Cellectis (entreprise de biopharmacie) l’homme est un surprenant pédagogue, un enseignant en or qui vous raconte l’ADN comme s’il l’avait forgé. Ce n’est pas le cas, mais depuis trente ans il s’attache à le comprendre, à le disséquer, à le transformer. De lui son éditeur (Hugo Doc) dit qu’il est un « chercheur-entrepreneur » devenu « homme d’affaire avisé ». Il arrive, aussi, que les éditeurs disent vrai.

André Choulika présentait aujourd’hui, 21 septembre 2016, son ouvrage 1. Salon d’un hôtel de luxe, près de la place de la Madeleine. Une dizaine de journalistes, nourritures insipides, explications passionnées et souvent passionnantes de l’auteur. Ce docteur en virologie moléculaire n’a rien perdu de ses enthousiasmes de jeune chercheur. Il s’agit, tout simplement, de « réécrire la vie ». Le fil rouge est le même : l’ADN. Et la révolution est bien là : la compréhension du vivant progresse comme jamais, la biologie flirte avec le numérique, le transhumanisme frappe à nos portes et les libertariens se présentent aux élections démocratiques.

Interdits frôlés

« Réécrire la vie – la fin du destin génétique » : pédagogie et autobiographie. Engagements personnels et tentations futuristes. Il faudra, un jour prochain, revenir sur ses espoirs-travaux  thérapeutiques, sur ses champs de végétaux (soja, blé, pommes de terre etc.) dressés pour notre santé, sur la puissance de la science française et son impuissance à donner vie et argent aux concepts qu’elle forge, sur les liens qu’il entretient avec l’Agence nationale de sécurité du médicament…

André Choulika, 51 ans n’est pas philosophe. Mais la passion est là qui le pousse à prendre des risques, à frôler des interdits. Il en frôle plusieurs qui pourraient bien susciter de solides polémiques. Prenons la page 80. Il aborde un sujet qui lui est cher : les liens entre la médecine humaine et le darwinisme (la sélection darwinienne). Il pose que la médecine (celle que nous connaissons) est une succession d’actes anti-darwiniens puisque le médecin-biologiste pallie « toute une série de mutations qui, jusqu’alors, ne donnaient aucune espérance de vie ». Suit un scénario qui voit un « bébé-bulle » guéri et devenu adulte tomber amoureux d’une jeune femme porteuse de la mutation de mucoviscidose mais traitée elle aussi avec succès par thérapie génique.

Lignées germinales insensées

Ce couple de survivants a des enfants. L’un deux a les deux mutations parentales. Soit on l’a éliminé au stade embryonnaire (après diagnostic préimplantatoire) soit on le laisse se développer et naître. On le traite comme on a traité chacun de ses deux parents. Puis ce garçon se marie avec une fille porteuse  d’une myopathie de Duchenne et d’une maladie de Fabri. L’aventure se perpétue.

« Bref, au bout de x générations on peut se retrouver avec des parents qui auront des lignées germinales non viables, mais ces personnes seront tellement ‘’béquillées’’ par des réparations génétiques qu’elles pourront tout de même vivre normalement. Sauf qu’elles transmettront un génome qui aura subi tellement de mutations qu’il sera totalement à bout de souffle. Si on pousse le raisonnement à son maximum, la puissance de la médecine d’aujourd’hui et a fortiori celle de demain poussent à vider notre lignée germinale de son sens. »

Les « techno-nonnes »

Pour nous être déjà intéressé à un tel sujet (amplement abordé il y a un peu plus d’un siècle), on tremble quant aux conclusions que l’on pourrait tirer d’un tel extrait. L’auteur n’en tire pas de conclusions théorisées. « Nous ne nous rendons pas vraiment compte de la direction que nous prenons à long terme. Ce débat est sur la table et il faudra que l’on prenne une décision. De deux choses l’une : soit on fait de l’eugénisme et on sélectionne ; soit on accepte la thérapie au stade embryonnaire. (…) Actuellement la réponse que l’on apporte en France est tranchée : on ne touche pas à l’embryon humain. » Chacun en tirera la conclusion qu’il voudra.

Pour André Choulika l’heure est historique: « l’homme saisit pour la première fois entre ses doigts un stylo qui permet de réécrire le texte de la vie ». Certains n’en sont pas encore revenus qui ne parviennent pas à sortir d’une « incommensurable et troublante ivresse ». On est là dans l’alcool fort, à la lisière du religieux. On entend Rabelais, la science, la conscience, l’âme, la ruine, l’éternité.

L’auteur a des lignes assez réjouissantes sur les « techno-prêtres » et les « techno-nonnes » se posant en pythie du grand temple de la nouvelle génomique. Un temple où foisonnent les marchands. Ce sont, selon lui, ces nouveaux religieux qui réclament des « réflexions éthiques ». En est-il bien certain? Et où a disparu le politique ? Nous n’en savons rien. Mais, pour l’auteur, les dés sont jetés : un homme génétiquement (re)programmé va arriver. Ce ne sera pas en France. Faut-il le regretter ? André Choulika, lui, ne nous le dit pas.

A demain

1 « Réécrire la vie – la fin du destin génétique » André Choulika (avec la participation du journaliste-écrivain  Daniel Carton). Editions Hugo-Doc (253 pages, 17 euros).

 

Se reproduire sans cellules sexuelles féminines ? C’est désormais de l’ordre du possible

 

Bonjour

C’est l’inverse de notre parthénogenèse, cette économie du mâle dans la reproduction. Et c’est la dernière étape en date d’une révolution biologique en marche ; une révolution que nous ne voulons pas voir. On peut en prendre connaissance dans la dernière livraison de Nature Communications : “Mice produced by mitotic reprogramming of sperm injected into haploid parthenogenotes”. Le sujet, formidable, est repris par la BBC : “Making babies without eggs may be possible, say scientists”. Quelques secondes, sur le ton de la plaisanterie, sur France Culture.

Le résumé de l’affaire est simple : des chercheurs sont parvenus à créer des souris sans utiliser d’ovocytes. Nous frôlons ici les frontières d’un autre monde, d’une nouvelle dystopie. Ces chercheurs universitaires travaillent en Allemagne et en Angleterre.  L’astuce (car astuce expérimentale il y a) a consisté à utiliser des embryons de souris à peine constitué avant même la première division cellulaire – puis à leur administrer un traitement chimique de manière à ce qu’ils ne possèdent que la moitié de leur matériel génétique.  Ces « faux embryons » (on parle ici de « parthénogénotes ») sont connus pour ne pas être viables, incapables de poursuivre leur développement.

Humour anglais

Ici, l’équipe dirigée par Toru Suzuki  & Anthony C. F. Perry (Université de Bath) a injecté un spermatozoïde dans chacun des « faux embryons », puis ont implanté l’ensemble dans des souris « porteuses » et obtenu des souriceaux viables ayant toutes les caractéristiques de la normalité. Le taux de réussite était de 25%, ce qui est considérable. Rien (sauf l’éthique) n’interdit plus de tenter le même saut dans l’espèce humaine.  Un saut considérable qui bouleverse un large pan des savoirs et des dogmes dans le champ de la reproduction des mammifères.

Anthony C. F. Perry a confié à la BBC que l’une des perspectives ainsi ouverte consistera à utiliser des cellules somatiques (des cellules de peau par exemple) pour, après traitement chimique, les féconder in vitro et obtenir ainsi un embryon dont il ne restera plus qu’à assurer la gestation et la naissance. Deux hommes (voire un homme seul) pourrait ainsi procréer – en ayant toutefois recours à une mère porteuse (avant la mise au point de l’utérus artificiel). Bien évidemment le chercheur britannique assure qu’il ne s’agit là que de scénarios spéculatifs et quelque peu fantaisistes. Humour anglais.

Noces radieuses

Ce travail doit être replacé dans son contexte : en février dernier des chercheurs chinois révélaient avoir mis au point une technique permettant à partir de simples cellules souches de créer des pré-spermatozoïdes ayant toutes les caractéristiques fécondantes de spermatozoïdes « naturels ». Ces cellules sexuelles avaient permis de créer des souris présentant toutes les caractéristiques de la normalité. Ces chercheurs expliquaient alors que leur première constituait  une nouvelle étape sans la thérapeutique de la stérilité. On peut aussi, sans grand risque, postuler que c’est aussi une nouvelle étape vers des modifications génétiques transmissibles du patrimoine héréditaire de différentes espèces, dont l’humaine.

Pour l’heure les voix scientifiques ne veulent voir là que des apports fondamentaux ou l’espoir de sauver des espèces animales en voies de disparition. La vérité est, aussi, ailleurs ; elle est dans le vertige de la modification des conditions de fécondation et de procréation de notre propre espèce. Et plus encore dans les modifications des ses caractéristiques génétiques et transmissibles. Les noces radieuses, en somme, des libertariens et du transhumanisme.

A demain

Minority Reports : le procureur de la République n’aime vraiment pas. Nicolas Sarkozy, si.

 

Bonjour

Yeux bleus, accent catalan François Molins parle d’or. Le procureur de la République de Paris s’est confié au Monde daté du 3 septembre : « Rétention des ‘’fichés S’’ : le procureur de Paris rappelle le droit à des candidats de droite ».

François Molins dit simplement des choses simples. Plusieurs candidats à la primaire de la droite proposent de mettre en place une rétention préventive des personnes fichées « S » (pour « sûreté de l’Etat »). Réponse du procureur de la République de Paris :

« C’est absolument impossible. Il ne peut y avoir de détention préventive en dehors d’une procédure pénale. C’est le socle de l’Etat de droit. On ne peut pas détenir quelqu’un avant qu’il ait commis une infraction. »

Dedans-dehors

Depuis les attentats la proposition d’une « rétention administrative des fichés S » est régulièrement avancée  par des élus de droite. Laurent Wauquiez (Les Républicains) en fait une affaire personnelle. Nicolas Sarkozy, lui, a proposé après l’attentat de Nice, le 14 juillet, d’assigner à résidence avec bracelet électronique toutes les personnes « fichées ». Le député Guillaume Larrivé (Les Républicains, Yonne) a finement remarqué : « Pendant qu’ils [les individus fichés S] sont enfermés dans un centre de rétention, ils ne sont pas dehors ».

Eric Ciotti (Les Républicains) est de la partie. Alain Juppé s’est désolidarisé. Il refuse « un Guantanamo à la française où l’on enfermerait sans jugement des milliers de personnes, pour une durée indéterminée, et sur simple soupçon ».

Précognition

Le Conseil d’Etat avait déjà expliqué qu’il n’était pas possible « d’autoriser par la loi, en dehors de toute procédure pénale, la rétention, dans des centres prévus à cet effet, des personnes radicalisées ». On estime à plus de dix mille le nombre de personnes faisant l’objet d’une « fiche S » des services de renseignement pour « atteinte à la sûreté de l’Etat »: hooliganisme, appartenance à des groupes politiques  extrémistes et violents, radicalisation islamiste etc.

« On ne peut pas détenir quelqu’un avant qu’il ait commis une infraction » nous affirme le procureur François Molins. A-t-il lu Philip K. Dick et ses dystopies ? Dans Minority Report des êtres humains mutants, les « précogs », peuvent prédire les crimes à venir grâce à leur don de de précognition . La criminalité est éradiquée : on emprisonne les criminels avant qu’ils ne le deviennent. Il n’y a plus de procureur de la République. La suite est un peu plus compliquée.

Philip K. Dick a situé en 2054 cette horreur revendiquée en 2016 par Laurent Wauquiez. Qui sera, alors, président de la République française ?

A demain