Covid-éthique : après la rumeur d’Orléans, le voile se lève sur les mystères des clusters

Bonjour

14/08/2020. Nous évoquions hier un scoop que, dans le Loiret, France Bleu peinait à confirmer (Antoine DenéchèreNoémie PhilippotFrance Bleu Orléans). Question centrale : pourquoi les responsables de l’Agence Régionale de Santé (ARS) Centre Val-de-Loire  se refusaient-ils à confirmer ou à infirmer les éléments avancés par les journalistes : « plusieurs dizaines de cas positifs au Covid-19 liés à un rassemblement conséquent à Orléans » ?

« Selon nos informations, ce foyer épidémique est consécutif à un mariage célébré le dimanche 1er août, quartier de la Source, annonçait France Bleu. Et il y a, à ce jour, plus de cinquante cas testés positifs.  Ce mariage a donné lieu à une grande fête avec un nombre très important d’invités (plus de 250 convives selon nos informations). Selon plusieurs sources, les gestes barrières ont été peu ou pas respectés lors de ce mariage. Il s’agissait d’une fête dans des conditions normales. »  

Silence à l’ARS. Pourquoi ? A quel titre ? De quel droit ? La réponse nous est, peut-être, fournie aujourd’hui par Libération (Emma Donada)Libé qui observe, concernant les clusters, que très peu d’informations précises sont délivrées au public, en dehors de leur nombre. Au niveau national, ce nombre est quotidiennement mis à jour par Santé publique France (SpF). Au 12 août, cette agence recensait, par exemple, en France, 217 clusters en cours d’investigation, hors Ehpad et milieu familial restreint, soit 25 de plus que la veille.

Des effets délétères, comme la stigmatisation et l’anxiété

« Pour obtenir un peu plus de détails sur ces foyers, il faut consulter un tableau de bord de Santé publique France, qui n’est qu’hebdomadaire, conseille Libé. On y retrouve le nombre de clusters en cours d’investigation, la répartition de ces derniers par «type de collectivité» (événements privés, entreprises ou encore écoles), mais aussi la répartition des clusters en cours d’investigation par département. Mais la localisation précise des clusters n’est pas renseignée. »

Pourquoi ? A quel titre ? De quel droit ? Cela s’explique, assure SpF, par le respect de la confidentialité exigée par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil). Selon SpF la communication de la localisation exacte de tous les clusters entraînerait «des effets délétères, comme la stigmatisation et l’anxiété, qui n’ont pas lieu d’être. Cela pourrait aussi faire baisser la garde à des personnes constatant qu’un cluster est identifié mais éloigné de leur domicile».

«Le système d’information MONitorage des Clusters (Monic), développé par Santé publique France, est un outil de signalement à visée d’alerte, avec un traitement à finalité épidémiologique. Le traitement de ces données […] s’appuie sur une autorisation permanente [délivrée] par la Cnil pour les traitements de données à caractère personnel dans le cadre des investigations urgentes. Santé publique France est ainsi garante de la confidentialité des informations du système»,

Libé note encore que la transparence « est parfois plus grande au niveau régional ». Certaines ARS donnent ainsi davantage de détails dans leurs communications. Mais si les pratiques demeurent hétérogènes, la seule constante est qu’aucune information strictement personnelle n’est, jamais, divulguée. Faudrait-il, à la réflexion, s’en indigner ?

A demain @jynau

Le Conseil constitutionnel nous rappelle que non, tout n’est pas permis contre une épidémie

Bonjour

12/05/2020. Le Conseil constitutionnel vient de valider la loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire 1. C’était attendu. Mais, ce qui l’est moins, c’est qu’il prononce deux « censures partielles ». La première pour limiter le nombre de personnes pouvant accéder aux données sur les malades à des fins de traçage ; la seconde pour qu’un juge des libertés puisse effectuer un « contrôle » si le malade ne peut pas sortir plus de douze heures de son lieu d’isolement. Une manière de rappeler que, dans notre démocratie, la lutte contre une épidémie ne donne pas tous les droits aux pouvoirs exécutif et législatif.

Concernant le régime des mesures de mise en quarantaine. Le placement et le maintien en isolement des personnes susceptibles d’être affectées par la maladie est prévu pour une durée initiale de quatorze jours, renouvelable dans la limite d’une durée maximale d’un mois. Le Conseil constitutionnel juge que constituent des « mesures privatives de liberté » celles consistant en un « isolement complet », lequel implique une interdiction de « toute sortie ». « Il en va de même lorsqu’elles imposent à l’intéressé de demeurer à son domicile ou dans son lieu d’hébergement pendant une plage horaire de plus de douze heures par jour » ajoute-t-il.

Sur le fondement de l’article 66 de la Constitution il rappelle que la liberté individuelle (dont la protection est confiée à l’autorité judiciaire) « ne saurait être entravée par une rigueur non nécessaire ». » Les atteintes portées à l’exercice de cette liberté doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées aux objectifs poursuivis ».

L’autre abcès était fixé sur l’article 6 de la loi – article créant un système d’information destiné à permettre le traitement de données destinées au « traçage » des personnes atteintes par le covid-19 et de celles ayant été en contact avec ces dernières. Un système soulevant, à l’évidence,  des problèmes d’éthique par rapport au respect du secret médical et à celui de la vie privée. Explications de la leçon faite au gouvernement et au Parlement :

1 Le Conseil constitutionnel rappelle qu’il résulte du droit constitutionnel au respect de la vie privée que la collecte, l’enregistrement, la conservation, la consultation et la communication de données à caractère personnel doivent être justifiés par un motif d’intérêt général et mis en œuvre de manière adéquate et proportionnée à cet objectif. De plus il juge « pour la première fois » que, lorsque sont en cause des données à caractère personnel de nature médicale, « une particulière vigilance doit être observée dans la conduite de ces opérations et la détermination de leurs modalités ».

2 Il relève que les dispositions contestées (autorisent le traitement et le partage, sans le consentement des intéressés, de données à caractère personnel relatives à la santé des personnes atteintes par la maladie du covid-19 et des personnes en contact avec elles) « portent atteinte au droit au respect de la vie privée ».

3 Pour autant le Conseil constitutionnel juge toutefois qu’en adoptant ces dispositions contestées, le législateur a entendu renforcer les moyens de la lutte contre l’épidémie de covid-19, par l’identification des chaînes de contamination. Il a ainsi « poursuivi l’objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé ».

4 Question : y a-t-il « adéquation et  proportionnalité » des dispositions contestées au regard de l’objectif poursuivi ?  La collecte, le traitement et le partage des données personnelles ne peuvent être mis en œuvre que dans la mesure strictement nécessaire à quatre finalités déterminées. De plus le champ des données de santé à caractère personnel susceptibles de faire l’objet de la collecte, du traitement et du partage en cause, a été restreint par le législateur aux seules données relatives au statut virologique ou sérologique des personnes à l’égard de la maladie covid-19 (ou aux éléments probants de diagnostic clinique et d’imagerie médicale).  

5 Mais le Conseil constitutionnel juge que, « sauf à méconnaître le droit au respect de la vie privée », l’exigence de suppression des nom et prénoms des intéressés, de leur numéro d’inscription au répertoire national d’identification des personnes physiques et de leur adresse, dans les parties de ces traitements ayant pour finalité la surveillance épidémiologique et la recherche contre le virus, « doit également s’étendre aux coordonnées de contact téléphonique ou électronique des intéressés ».

6 S’agissant du champ des personnes susceptibles d’avoir accès à ces données à caractère personnel, « sans le consentement de l’intéressé », le Conseil juge  que si la liste en est particulièrement étendue, cette extension est rendue nécessaire par la masse des démarches à entreprendre pour organiser la collecte des informations nécessaires à la lutte contre le développement de l’épidémie.

7 En revanche il censure « comme méconnaissant le droit au respect de la vie privée » la deuxième phrase du paragraphe III de l’article 11 incluant dans ce champ les organismes qui assurent l’accompagnement social des intéressés. Il estime en effet que « s’agissant d’un accompagnement social qui ne relève pas directement de la lutte contre l’épidémie, rien ne justifie que l’accès aux données à caractère personnel traitées dans le système d’information ne soit pas subordonné au recueil du consentement des intéressés. »

A demain @jynau

1 « Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 11 mai 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 11 mai 2020. » JORF n°0116 du 12 mai 2020, texte n° 2
ECLI:FR:CC:2020:2020.800.DC

Que dire de l’affaire du «Divan des médecins» ? Non, l’«humour carabin» ne justifie rien

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9 janvier 2019. La triste affaire a soudain pris une nouvelle dimension. Extrait du discours des vœux 2020 prononcé par le Dr Patrick Bouet, président du Conseil national de l’Ordre des médecins : « Concernant le groupe privé Facebook ‘’Le Divan des médecins » » nous mettons en demeure le régulateur du groupe s’agissant du contrôle des contenus, et nous signalerons ces contenus au Procureur de la République. »

Connue du cénacle le sujet a été révélé il y a quelques jours par L’ObsLouise Auvitu et Béatrice Kammerer) ». « ‘’Quand les seins tombent, je refuse la consultation’’. Sur Facebook, des médecins violent leur serment ». Une bien affaire reprise et analysée par Le Quotidien du Médecin (Sophie Martos) : « Accusé de graves dérapages en ligne, le « Divan des médecins » se défend et divise la profession ». Deux titres qui disent beaucoup des divergences de lecture et des incompréhensions pouvant exister sur un tel sujet.

« Depuis plusieurs jours, le groupe Facebook privé « Le Divan des médecins » est sous les feux de la rampe, résume Le Quotidien. Propos sexistes ou diffamatoires, dérapages, dénigrement : dans une enquête publiée le 5 janvier, L’Obs a dévoilé, à la lumière de plusieurs témoignages, le côté sombre de ce groupe de praticiens parfois accusé de violer le secret médical. » De bien méchants feux, une bien triste rampe.

« Divan » ? Il s’agit ici d’un groupe fermé est composé de plus de 11 000 médecins. « Il a été créé en 2017 par les Drs Elsa Fayad et Christophe Poyer et se définit comme un espace d’entraide médicale entre confrères mais aussi d’échanges pour s’interroger sur la pratique et le quotidien avec bienveillance. Tout y passe : demande d’avis sur des cas cliniques, remplacement, CARMF, installation, posologie, gestion du coup de blues du praticien, soutien moral… » ajoute encore Le Quotidien.

Photos mal floutées de patients, noms mal anonymisés

« Bienveillance » ? Interrogés par L’Obs, plusieurs membres actuels ou anciens dénoncent des photos mal floutées de patients, des noms mal anonymisés, mais aussi des blagues obscènes sous couvert « d’humour carabin » – mais aussi et surtout des propos sexistes, homophobes, racistes ou grossophobes.

Plusieurs captures d’écran ont été diffusées par L’Obs. On peut y lire des commentaires tels que « peut-on mettre un coup de pelle au patient qui termine sa partie sur son smartphone ? » ou « Et hop ! Un certif de sport chez CMU ! Désolée, faut payer… ba j’peux pas ! Moi non plus ! Et je suis à l’heure ! Merci Madame CMU ». 

Le Syndicat national des jeunes médecins généralistes (SNJMG) et l’Association nationale des étudiants en médecine de France (ANEMF) ont condamné les propos diffusés « Le SNJMG condamne les agissements en ligne du groupe #divandesmedecins révélés par @lobs.

 « Le respect est la base d’une relation saine avec les patients et de tels propos peuvent entraîner une défiance légitime », commente Romain Levesy, 1er vice-président de l’ANEMF.  Contactée par Le Quotidien,  l’une des fondatrices, le Dr Elsa Fayad, affirme que de tels dérapages concernent une poignée d’individus, « parfois occasionnellement et parfois de façon répétée ».  Elle reconnaît quelques « rares cas » de non-anonymisation des cas cliniques, rapidement « signalés et corrigés ». Même constat pour les propos sexistes, homophobes ou grossophobes pointés par L’Obs. Le Dr Fayad souligne qu’un à deux « signalements » en moyenne sont effectués chaque semaine et qu’« un à deux membres sont expulsés du divan par trimestre ». Pour elle encore, ces incidents « isolés » discréditent et déshonorent cette communauté médicale « animée, par un esprit de partage, d’entraide et de confraternité, parfois aussi de détente et non pas sur le dos des patients ».

« Pas d’éthique sans médecins, pas de médecins sans éthique »

Également joint par Le Quotidien le Conseil national de l’Ordre national assurait n’avoir reçu aucun signalement concernant le groupe. Tel n’est plus le cas, grâce aux médias. Le Dr Jean-Marcel Mourgues, vice-président de l’Ordre condamne déjà certains propos jugés « effarants ». « Qu’il s’agisse d’un groupe privé ne change rien dans la mesure où la diffusion est massive, dit-il . Quant à la question de l’humour carabin, s’il y a pu avoir un temps une certaine tolérance, elle n’a plus lieu d’être dans le contexte actuel. » 

Au-delà de l’affaire du « Divan » il restera à l’Ordre des Médecins une mission urgente et d’importance : définir « l’humour carabin » et fixer les nouvelles frontières de la tolérance. Extrait du discours des vœux 2020 prononcé le 9 janvier par le Dr Patrick Bouet, président du Conseil national de l’Ordre des médecins : « Il n’y a pas d’éthique sans médecins, et pas de médecins sans éthique. Là est notre légitimité à s’exprimer ».

A demain @jynau

Nouveau en France: comment, en un clic, obtenir un véritable arrêt de travail (trois jours max)

Bonjour

Aucun conflit d’intérêts – simple relais d’une information fortement disruptive à caractère sanitaire et hautement promotionnel :

 « Paris, le 07 janvier 2020 – Le site www.arretmaladie.fr est désormais disponible en France. À l’issue d’une  téléconsultation avec un médecin français et sous réserve de pouvoir effectuer un diagnostic fiable, le patient peut  obtenir un arrêt maladie de quelques jours (2 à 3 max) pour des pathologies simples et courantes : coup de froid, stress, douleurs menstruelles, gastro-entérite, etc. ».

On nous explique qu’en arrivant sur le site, « le patient est invité à remplir un questionnaire qui  permet de décrire ses symptômes et qui prépare la téléconsultation qui s’ensuivra ». Puis, « une fois que le patient accepte que ses données soient transmises à son médecin traitant ou à un autre praticien disponible il peut immédiatement prendre rendez-vous grâce à une plateforme de téléconsultation ». Suite :

 « À l’issue de la téléconsultation et en fonction du cas, le médecin prescrit (ou pas) un arrêt maladie et dépose trois exemplaires sous forme de fichiers PDF dans l’espace sécurisé du patient. Le patient règle la consultation en ligne (25€); il peut ensuite récupérer les 4 fichiers PDF en les téléchargeant depuis son espace de données. Grâce au site ameli.fr, il envoie à son employeur et à la CPAM les documents habituels. » 

Prière de ne pas trop exagérer

Attention : les patients ne peuvent bénéficier que « d’un nombre limité d’arrêts par an » – et ce uniquement à un intervalle d’au moins trois semaines et pour des arrêts d’une durée maximum de 2 à 3 jours. Pourquoi ? On ne nous le dit pas.

 S’inquiéter de la confidentialité non respectée ? Le service www.arretmaladie.fr nécessite la transmission de données personnelles de santé (questionnaire, numéro de sécurité sociale, téléconsultation, etc.). Aussi « pour garantir une sécurisation optimale de ces échanges, le service travaille en partenariat avec des sites de téléconsultation ».

 Pour information : « Le service www.arretmaladie.fr a été lancé par Dr Can Ansay, avocat de Hambourg qui a créé ce concept il y a un an en Allemagne. Sous le nom au-schein.de, le service a vu le jour en décembre 2018 en Allemagne et a permis de générer 30 000 arrêts maladie pour des pathologies dites du quotidien. Aucune erreur de diagnostic n’a été reportée. Au-schein.de est l’entreprise de télémédecine la plus prospère d’Allemagne. »  

Dr Can Ansay, aux futurs patients français : « Nous souhaitons résoudre le problème des nombreuses visites chez le médecin en raison d’un simple arrêt de travail de courte durée. Pour résoudre ce problème, la Norvège a autorisé les salariés à “s’auto-arrêter”pour quelques jours, ce qui a réduit le nombre de jours d’absence pour cause de maladie. Notre solution offre les mêmes avantages, mais prend en compte les préoccupations de toutes les personnes impliquées. En tant qu’avocat, après consultation auprès de confrères français spécialisés, je me suis assuré que les arrêts maladies délivrés par notre service sont 100% valables (sic). »

Silence, pour l’heure, d’ameli.fr. Ici aucun conflit d’intérêts. Etes-vous bien rassurés ?

 A demain @jynau

Retour sur le suicide du Pr Christophe Barrat et l’accusation de violation du secret médical

Bonjour

Qui peut s’autoriser à lever le secret médical ?

C’était le 3 février dernier, un dimanche : le Pr Christophe Barrat, 57 ans, chirurgien, se suicidait On apprenait rapidement, de sources concordantes, qu’il s’était donné la mort par défenestration au sein des locaux de l’hôpital Avicenne (Assistance Publique – Hôpitaux de Paris). Ce praticien était chef du service de chirurgie bariatrique et métabolique du groupe hospitalier Hôpitaux universitaires Paris Seine-Saint-Denis (Avicenne, Jean-Verdier et René-Muret). Cette fin tragique n’était pas sans rappeler celle du Pr Jean-Louis Mégnien, cardiologue à l’Hôpital européen Georges-Pompidou (AP-HP) – il s’était lui aussi défenestré sur son lieu de travail le 17 décembre 2015. Une mort qui avait rapidement mis en lumière la somme des conflits internes au sein de cet établissement hospitalier réputé. 

Dans le cas du Pr Barrat la polémique prit une autre forme – avec notamment la dénonciation de la « communication désastreuse » de l’AP-HP et l’hypothèse d’une violation du secret médical. Puis l’AP-HP répondit via un communiqué signé Didier FRANDJI, Directeur des Hôpitaux Universitaires Paris Seine Saint Denis; Pr Nathalie CHARNAUX, Directrice et Doyen de la Faculté Santé, médecine et biologie humaine ; Pr Yves COHENPrésident de la Commission médicale d’établissement locale. Extraits :

« Nous regrettons d’avoir à nous exprimer publiquement et de sortir du recueillement plus opportun en cette période de deuil. Toutefois, les circonstances nous obligent à le faire et ce en plein accord avec la famille du Professeur Christophe Barrat, afin d’apporter les précisions suivantes : nous avons fait référence, dans le message diffusé au sein du groupe hospitalier et des instances de l’AP-HP,  à l’état de santé du Professeur Christophe Barrat afin, selon l’expression même de son épouse, « d’apporter un éclairage au geste de son mari ». Nous n’avons donc en rien rompu le secret médical mais avons été autorisés à porter cet élément à la connaissance de  notre communauté selon la  volonté et le plein accord de la seule personne légitime à nous délier de ce secret : son épouse, qui a validé ce message avant qu’il soit diffusé (…) »

Les différentes analyses que nous avions alors sollicitées convergeaient avec la lecture que fait l’Ordre des textes en vigueur : rien ne permettait, en l’espèce, de justifier le non-respect du secret médical. Les spécialistes de déontologie médicale font notamment observer qu’un membre de la famille (en l’espèce l’épouse du chirurgien) ne pouvait en aucun cas délier des médecins du secret professionnel qui s’imposait à eux. Le principe (parfois difficile à comprendre) est qu’il n’existe pas de dérogation, le patient lui-même ne pouvant délier les médecins du secret médical.

Deux courriers évoquant l’état de santé du chirurgien

Dix mois plus tard, l’affaire connaît un nouveau prolongement -rebondissement. Le Quotidien du Médecin (Anne Bayle-Iniguez) nous apprend que le conseil départemental de l’Ordre des médecins de Paris a, mardi 3 décembre, tenu une séance de conciliation. Entre d’une part le président de la commission médicale d’établissement (CME) de l’hôpital Avicenne et la doyenne de l’UFR de santé, médecine et biologie humaine Paris 13 – et d’autre part la veuve du Pr Christophe Barrat.  Le Pr Yves Cohen et le Pr Nathalie Charnaux sont accusés d’avoir violé le secret médical dans deux courriers évoquant l’état de santé du chirurgien de 57 ans adressés à la communauté hospitalière et à la presse. Les deux médecins font aussi l’objet d’un dépôt de plainte pour le même motif auprès du procureur de la République du TGI de Bobigny – un plainte qui vise également Didier Frandji, directeur d’Avicenne à l’époque des faits, lui aussi signataire des deux courriers.

La plainte ordinale a été déposée le 23 septembre auprès de l’Ordre de Seine-Saint-Denis, tableau où le Pr Barrat était inscrit. Les « ordinaux du 93 » souhaitant éviter tout conflit d’intérêts, la plainte a été délocalisée à Paris. « La séance en commission de conciliation ordinale de ce mardi est l’étape préalable à la mise en œuvre d’une procédure disciplinaire, explique Le Quotidien. En cas d’accord entre les deux parties, l’affaire en restera là sauf si le conseil départemental se saisit du dossier. En cas de non-conciliation, la plainte sera transmise à la chambre disciplinaire de première instance dans un délai de trois mois. Contactées, ni l’AP-HP, ni la faculté de médecine de Paris13 n’ont répondu à nos sollicitations du Quotidien. »

Finalement la conciliation entre les deux parties a échoué. Le dossier sera étudié par la chambre disciplinaire de première instance en janvier. 

 A demain @jynau

Malades mentaux : prédire leur passage à l’acte pour prévenir les fusillades de masse

Bonjour

Aux portes de la folie politique, en écho de « 1984 » ou de « Minority Reports ». C’est un papier de Slate.fr (Claire Levenson) : « Trump veut faire surveiller les personnes atteintes de troubles mentaux » qui développe un sujet du Washington Post (William Wan) : « White House weighs controversial plan on mental illness and mass shootings ». Slate.fr :

« Après les récentes fusillades d’El Paso et de Dayton (trente-et-un morts au total), Donald Trump a préféré évoquer la question du rôle des troubles psychiatriques plutôt que celle de l’accès aux armes à feu. Le président américain avait déclaré juste après les événements: «C’est la maladie mentale et la haine qui appuient sur la gachette. Pas l’arme à feu.» Depuis, l’un de ses proches, l’ancien président de la chaîne NBC, Bob Wright, a proposé de lancer un programme de recherche sur la façon dont l’intelligence artificielle pourrait prédire le passage à l’acte violent de ce type de personnes.

« Afin de mener ces études à bien, des volontaires autoriseraient l’accès aux données de leurs smartphones. Il ne s’agit à ce stade que d’un projet, qui a été présenté au président Trump, à sa fille Ivanka et au ministre de la Santé, mais l’idée est déjà critiquée par plusieurs spécialistes. Interviewée par The Washington Post, une ancienne psychologue des services secrets américains explique que ce genre de technologie donnerait un nombre très élevé de fausses alertes et qu’il serait impossible de déceler les personnes potentiellement dangereuses. Elle ajoute que les recherches actuelles ne permettent pas d’établir de lien direct entre maladie mentale et fusillades de masse. »

Que dire de plus ? Que des études ont montré qu’un quart seulement des responsables de ces tueries était atteint d’un trouble psychiatrique ? Que d’autres facteurs sont partagés par ce genre d’individus: l’impression d’être victime d’injustice, le désir d’être célèbre, la volonté de copier d’autres massacres, un passé de violence conjugale, le narcissisme et l’accès aux armes à feu ? Qu’une étude sur la tuerie de Fort Hood en 2009, au cours de laquelle un commandant militaire avait tué quatorze personnes sur une base au Texas, avait conclu que les tentatives de prédiction de ce genre d’incidents étaient presque impossibles ?

L’intelligence artificielle pour prédire le « passage à l’acte » des « malades mentaux » et prévenir ainsi les « fusillades de masse » ? Et les enfermer pour plus de sûreté ? On pourra toujours soutenir qu’il ne s’agit ici que d’une opération comme une autre de réduction des risques. Combien de temps nous reste-t-il avant que l’exécutif d’outre-Atlantique puisse, sans frein, passer à l’acte ?

A demain @jynau

Michael Schumacher serait soigné à l’AP-HP : le traitement secret et le Pr Philippe Menasché.

Bonjour

Comment voyager sans danger aux frontières du secret médical ? C’est une exclusivité du Parisien/Aujourd’hui en France (Jean-Michel Décugis et Ronan Folgoas, avec Vincent Gautronneau) :« Michael Schumacher soigné à Paris pour un traitement secret. Le septuple champion du monde de Formule 1, grièvement blessé en décembre 2013, a été pris en charge ce lundi après-midi à l’Hôpital européen Georges-Pompidou à Paris. Il y suit un traitement dans le plus grand secret. » Extrait :

« Il est 15h40 ce lundi 9 septembre lorsqu’un brancard arrive au premier étage de l’Hôpital européen Georges-Pompidou (Paris XVème). Plus précisément au sein de l’unité de surveillance continue du service de chirurgie cardiovasculaire. Le brancard du patient est enserré dans une housse bleu marine qui masque totalement son corps et son visage. Un important dispositif de sécurité composé d’une dizaine de personnes accompagne la progression du brancard. Certaines d’entre elles portent des oreillettes. Les vigiles de l’établissement, mobilisés sur cette opération spéciale, s’assurent que les curieux passent leur chemin.En-tête du cortège, le professeur Philippe Menasché ouvre la voie et conduit son célèbre patient à destination. Michael Schumacher, le septuple champion du monde de Formule 1, âgé aujourd’hui de 50 ans, vient d’arriver quelques minutes plus tôt à bord d’un camion ambulance jaune et bleu, immatriculé à Genève en Suisse. »

On se souvient de l’accident du célèbre champion et, depuis, des innombrables interrogations. « Le Parisien-Aujourd’hui en France est en mesure de révéler que Michael Schumacher est hospitalisé depuis ce lundi après-midi dans le service de chirurgie cardio-vasculaire de l’hôpital. L’ex-pilote allemand aux 91 victoires et 68 pole positions est entre les mains du professeur Philippe Menasché, un éminent chirurgien cardiaque âgé de 69 ans, pionnier de la thérapie cellulaire pour soigner l’insuffisance cardiaque. Il siège également au conseil d’administration de l’Institut du cerveau et de la moelle épinière, sur le site de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris.

Elogieux portrait du praticien

Et le quotidien de brosser un élogieux portrait élogieux portrait du praticien parisien bien connu pour l’intérêt qu’il porte depuis longtemps aux possibles vertus thérapeutiques des cellules cardiaques d’origine embryonnaires.

 « Michael Schumacher est-il hospitalisé à l’Hôpital européen Georges-Pompidou pour profiter de ces recherches ? Ou pour un autre traitement ? Selon nos informations, l’ex champion bénéficie de perfusions de cellules-souches qui sont diffusées dans l’organisme afin d’obtenir une action anti-inflammatoire systémique, c’est-à-dire dans tout l’organisme. Le traitement devrait démarrer ce mardi matin, le patient devant quitter l’hôpital en principe mercredi. Contactés, le professeur Menasché et la direction de l’hôpital se retranchent derrière le secret médical, sans confirmer, ni infirmer nos informations. »

Interrogé sur le même sujet par France Info Martin Hirsch, directeur général de l’AP-HP a formulé la même réponse. Toujours selon Le Parisien- Aujourd’hui en France et « de sources concordantes », Michael Schumacher aurait effectué au moins deux passages à l’Hôpital européen Georges-Pompidou, au printemps dernier. Lors de son premier séjour à Paris, il aurait fait l’objet d’examens médicaux pratiqués à la Pitié-Salpêtrière. Fin juillet dernier il  devait revenir pour une nouvelle séance à l’Hôpital européen Georges-Pompidou. Mais un problème de santé imprévu l’en aurait empêché. « Le traitement a été repoussé à ce début de semaine, date du retour de vacances du professeur Menasché ».

A demain @jynau

Polémique éthique : les «mères lesbiennes» seront-elles, en France, «montrées du doigt» ?

Bonjour

Non, le débat ne « s’apaise pas ». En marge de la polémique sur la destruction des stocks de gamètes et d’embryons, un collectif de responsables associatifs, dans une tribune militante publiée par Le Monde 1, juge injustifiable que la « déclaration anticipée de volonté », prévue par le projet de loi bioéthique, ne soit pas étendue « à tous les enfants conçus par don » de cellules sexuelles ou d’embryon. A quel titre ? De quel droit ?

A priori l’apaisement était là : le projet de loi ouvre la pratique de l’insémination artificielle avec sperme de donneur « à toutes les femmes » et  il propose un dispositif permettant aux couples de femmes d’établir la filiation à l’égard des enfants conçus par don de gamètes – et ce via une « déclaration anticipée de volonté » signée par le couple dès le consentement au don de sperme. Objectif :  sécuriser la double filiation avant même la naissance de l’enfant, ne pas établir de hiérarchie entre la mère qui accouche et la femme qui n’accouche pas.

Refaire l’histoire

« Appelée de nos vœux, cette déclaration commune de volonté permettra de reconnaître l’engagement parental comme fondement commun de la filiation des deux mères, écrivent les signataires. En portant la mention sur l’acte intégral de naissance de l’enfant, l’Etat signifie à celui-ci qu’aux yeux de notre droit ses deux mères sont parfaitement à égalité de statut et de droits. »

Dès lors pourquoi cette tribune ? Tout simplement parce que le gouvernement n’a pas « étendu ce dispositif aux couples de sexe différent » ? Pour ne pas « toucher au dispositif actuel pour les parents hétérosexuels ». Et les signataires de refaire l’histoire de leur grief :

« On se souvient que, en cas de recours au don, la filiation a été instaurée en 1994 selon les modalités de la filiation dite « charnelle », dans le but avoué de permettre aux parents de se faire passer pour les géniteurs de l’enfant. Le recours au don de gamètes était alors marqué du sceau du secret médical, considéré comme relevant de la vie privée des parents. Mais, aujourd’hui, la société a évolué et chacun reconnaît que l’enfant a droit à la vérité de son histoire et de son identité personnelle. »

Ils ajoutent que « certains poussent des cris d’orfraie » en affirmant que les enfants conçus par don seraient « stigmatisés » si la mention de cette déclaration était portée sur l’acte intégral de naissance. Ces militants visent notamment, sans les nommer, les médecins, pharmacien·es, psychologues et spécialistes des métiers de la santé des Centres d’étude et de conservation des œufs et du sperme humains (Cecos) 1.

Ces soignants ont d’ores et déjà exprimé avec force  leur «opposition à toute proposition de loi» qui les «rendrait complices d’une discrimination et d’une stigmatisation des enfants conçus par don au travers de l’inscription sur l’acte de naissance intégral du mode de conception».Estimant qu’une telle disposition les rendrait «complices de discrimination» et de «stigmatisation» des enfants conçu·es à partir d’un don de cellules sexuelles, ces spécialistes ont saisi le Conseil national de l’Ordre des médecins.

Au départ le gouvernement hésitait entre deux scénarios. Le premier prévoyait une mention à l’état civil de la manière dont la filiation de l’enfant a été établie pour tous les couples ayant recours à une procréation médicalement assistée avec tiers donneur de cellules sexuelles. Il s’agissait d’établir une «déclaration commune anticipée de filiation» devant un notaire. Le document était ensuite transmis à l’officier d’état civil et mentionné sur la copie intégrale de l’acte de naissance –  et ce qu’il s’agisse d’enfants né·es au sein de couples homosexuels ou hétérosexuels.

Secret, mensonge, sentiment factice de honte

Le second scénario prévoyait que ce dispositif ne concernerait que les couples de femmes, afin de laisser la possibilité ultérieure aux couples hétérosexuels de dévoiler (ou non) son mode de conception à l’enfant. Après passage de l’avant-projet de loi devant le Conseil d’Etat c’est cette dernière option qui a été retenue et qui sera proposée au vote du Parlement. Et c’est ce qui a déclenché l’ire des signataires de la tribune:

« La réalité est que le stigmate a été entièrement construit, artificiellement, par la logique toujours en place du secret et du mensonge. Voilà comment créer un sentiment factice de honte. Il est temps de sortir de cet héritage d’allégeance au modèle ‘’biologique ‘’ qui n’a fait que du mal [sic], et de revendiquer que les familles issues de don sont des familles tout aussi dignes que les autres.

« Aujourd’hui, les personnes conçues par don sortent de l’ombre où elles étaient maintenues. Lorsqu’une centaine d’entre elles témoignent nominativement dans une tribune publiée dans Le Monde daté du 5 juin, soutenues par leurs proches et par 150 personnalités, elles disent haut et fort qu’elles ne portent aucun stigmate et qu’elles veulent connaître leurs origines. Un point c’est tout. »

Il est injustifiable que le dispositif de « déclaration anticipée de volonté » ne soit pas étendu à tous : pour le même geste médical, le dispositif de filiation variera en fonction de l’orientation sexuelle des parents ! Seuls les enfants des familles composées de deux mères auront une garantie d’accès à leur histoire et à leurs origines. Le maintien du dispositif d’établissement de la filiation à l’égard des parents hétérosexuels a pour but, de l’aveu même du Conseil d’Etat, de permettre de ne pas révéler le recours au don à l’enfant, pourtant premier concerné.

C’est là faire bien peu de cas des arguments des professionnels des Cecos – arguments développés auprès de Slate.fr 2 par la Pr Nathalie Rives, présidente de leur Fédération. Por elle il s’agit d’une opposition essentielle, fondamentale, de nature éthique et démocratique:

«Comment peut-on imaginer faire figurer, sans grands dangers, un mode spécifique de conception d’une personne sur les registres d’état civil, demande-t-elle. Si le recours à un donneur de sperme est implicite pour les couples de femmes, il en va différemment pour les PMA réalisées pour les couples hétérosexuels –des PMA qui sont pratiquées pour des raisons médicales ayant à voir avec la stérilité, l’hypofertilité ou la transmission d’une pathologie génétique.»

 Le Conseil d’Etat use quant à lui d’autres mots : « La solution, qui fait coexister deux modes d’établissement de la filiation distincts, traduit deux philosophies différentes selon que le couple ayant recours au don est de même sexe ou non, la première reposant sur le rôle accru de la volonté, la seconde sur le mimétisme avec la procréation charnelle.»

Les signataires militants de la tribune ne veulent rien entendre : « Quand on défend un projet de loi qui maintient une filiation pseudo-charnelle pour les parents hétérosexuels qui recourent au don, on commet une double faute : on traite à part les mères lesbiennes et leur famille au risque de les montrer du doigt, on discrimine les enfants de parents hétérosexuels en leur refusant une garantie d’accès à leurs origines ». Il faut donc, selon eux, impérativement amender ce projet de loi et étendre la « déclaration anticipée de volonté » à tous les enfants conçus par don.

On pourrait aussi abandonner toute forme de déclaration anticipée... Non, et contrairement aux souhaits réitérés d’Emmanuel Macron, le débat n’est pas « apaisé ».

A demain @jynau

1 « Bioéthique et filiation : ‘’Ne montrons pas du doigt les mères lesbiennes’’ » Signataires : Anne Abrard, présidente de Les Cigognes de l’espoir ; Vincent Brès, président de PMAnonyme ; Jean-Bernard Geoffroy, président du Ravad ; Frédérick Getton, président de Centr’égaux ; Valérie Leux, présidente de Stop homophobie ; Larissa Meyer, présidente du Réseau Fertilité France ; Sandrine Ngatchou, présidente de l’Utasa ; Lennie Nicollet, président d’Homosexualités et socialisme ; Laëtitia Poisson-Deleglise, présidente de l’association MAIA ; Denis Quinqueton, codirecteur de l’Observatoire LGBT+, de la Fondation Jean-Jaurès ; Alexandre Urwicz, président de l’Association des familles homoparentales.

2 Lire : «  Loi ‘’PMA pour toutes’’, les mesures à l’origine de la colère du corps médical ». Le volet «De la filiation par déclaration anticipée de volonté» est vivement remis en cause par les membres des centres d’étude et de conservation des œufs et du sperme humains (Cecos). Slate.fr 25 juillet 2019

Respecter ou pas le secret médical: «Closer» Brigitte Macron et le Dr Laurent Alexandre

Bonjour

Buzz. « Brigitte Macron a été hospitalisée le 17 juillet dernier à l’hôpital américain de Neuilly-sur-Seine, afin d’y subir une opération de chirurgie esthétique ». Selon les informations du magazine people Closer (informations disparues du site après avoir été reprises par de très nombreux médias dont CNews), la Première Dame a été prise en charge par un « éminent et médiatique chirurgien esthétique».

« Elle l’a d’abord rencontré le 16 juillet, et s’est entretenue avec lui pendant une heure. Le lendemain elle aurait été opérée pendant trois heures, sous anesthésie générale. Emmanuel Macron se serait rendu à son chevet. L’opération se serait déroulée sans difficultés et Brigitte Macron a pu quitter l’hôpital le jour-même. L’ancienne professeure de français de 66 ans a ensuite passé quelques jours de convalescence à la Lanterne, l’ancien pavillon de chasse situé à Versailles qui sert de résidence d’Etat.

« Depuis le 25 juillet, le couple Macron s’est installé au Fort de Brégançon, la demeure de villégiature estivale des présidents français. Ils s’y sont installés pour quelques jours de calme et de repos, près de la Méditerranée. Le Président doit y préparer le G7, qui se déroulera à Biarritz, du 24 au 26 août prochain. »

Triste buzz. Sur Tweeter, @dr_l_alexandre : « La chirurgie esthétique est un acte chirurgical et donc un acte médical protégé par le secret médical ! Révéler le dossier médical d’un Français… de Brigitte Macron ou de n’importe qui est une faute. Si on accepte, demain VOTRE CANCER pourra être public »

On se souvient de ces lignes, glanées dans le flots des tweets également signées @dr_l_alexandre : « Je ne suis pas jaloux de @GretaThunberg. J’aimerais pas (sic) avoir des TOC graves, une dépression infantile, un mutisme sélectif, un Asperger avec monoideation et des troubles alimentaires graves me conduisant à être minuscule! Je respecte l’enfant malade mais regrette sa manipulation »

Une fraction de la Toile s’indigna. Réponse du Dr Laurent Alexandre : « Je rappelle que ce sont les parents de @GretaThunberg qui ont révélé son dossier psychiatrique (pas moi). Et je pense que cela devrait être un délit de révéler le dossier médical de son enfant mineur ! Je trouve cela dégueulasse ! Signalez les parents de @GretaThunberg ».

Buzz. Triste et pauvre buzz.

A demain @jynau

Feu vert d’Agnès Buzyn au croisement de fichiers policiers et des données psychiatriques

Bonjour

Psychiatres et policiers œuvrant la main dans la main au service de la lutte contre la radicalisation ? Tout commence en août 2017, comme ce blog le garde en mémoire. Gérard Collomb, alors ministre français de l’Intérieur, annonçait au micro de RTL qu’il explorait la piste d’une collaboration avec les services psychiatriques et psychiatres libéraux. Objectif : « repérer » les terroristes potentiels ; renforcer la détection des profils à risque, notamment des personnes développant des « délires autour de la radicalisation islamique ». Puis il précisa sa pensée : impliquer davantage les psychiatres dans la « prévention » des passages à l’acte terroriste. Le ministre s’exprimait ainsi sur RMC/BFMTV :

« Dans le fichier des signalements pour la prévention et la radicalisation (FSPRT), nous considérons qu’à peu près un tiers des personnes présentent des troubles psychologiques (…)  Il est clair que le secret médical, c’est quelque chose de sacré, mais en même temps, il faut trouver le moyen qu’un certain nombre d’individus, qui effectivement souffrent de troubles graves, ne puissent pas commettre des attentats ».

Pour sa part le Dr David Gourion (psychiatre libéral, ancien chef de clinique à l’hôpital Sainte-Anne) soulignait dans une tribune parue dans Le Monde que « le lien entre maladie mentale et terrorisme n’est pas avéré », que « la loi sur le secret médical n’est pas compatible avec la mise en place d’une « collaboration » entre psychiatres et services de police » :

« M. Collomb a dit qu’il fallait travailler à repérer les personnes en voie de radicalisation. Il y a une réalité qui est la réalité psychiatrique qui est que la plupart des patients qui font des épisodes délirants ont l’impression que Dieu leur parle ; ça veut dire que les personnes de confession musulmane qui vont avoir un délire mystique pourraient être catégorisées comme ‘à risque’. Pour le coup, il ne faut absolument pas le faire, c’est dangereux. Le psychiatre n’a pas vocation à collaborer avec le ministère de l’Intérieur. Ce n’est pas son rôle. Nous sommes des médecins et pas des collègues des policiers ».

L’Ordre des médecins avait déjà travaillé ce délicat sujet. « Il sera du plus grand intérêt de connaître la position du Dr Agnès Buzyn, collègue de Gérard Collomb en charge de la Santé » écrivions-nous en août 2017.

Deux ans plus tard Gérard Collomb a laissé sa place à Christophe Castaner. Des médecins s’élèvent contre le fichage des personnes hospitalisées blessées lors de certaines manifestations contre la politique gouvernementale. Et Agnès Buzyn vient, pour le Premier ministre, de signer un décret qui permet le croisement de données médicales avec les fichiers policiers : Décret n° 2019-412 du 6 mai 2019 modifiant le décret n° 2018-383 du 23 mai 2018 autorisant les traitements de données à caractère personnel relatifs au suivi des personnes en soins psychiatriques sans consentement 

 « Publics concernés : agences régionales de santé (ARS) ; représentants de l’Etat dans le département ; personnes faisant l’objet de soins psychiatriques sans consentement. 
Objet : mise en relation, pour certaines finalités entre certaines informations enregistrées dans les traitements de données à caractère personnels dénommés HOPSYWEB d’une part et FSPRT d’autre part. 
Entrée en vigueur : le texte entre en vigueur le lendemain de sa publication. 
Notice : le décret autorise la mise en relation entre les données enregistrées dans les traitements HOPSYWEB et FSPRT. Cette mise en relation concerne uniquement les informations transmises au représentant de l’Etat dans le département sur les admissions en soins psychiatriques sans consentement prévues par le code de la santé publique et le code de procédure pénale et a pour objet la prévention de la radicalisation. »

« Le texte autorise un croisement, pour les noms, prénoms et dates de naissance, entre le Fichier de traitement des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT) – qui comptait début avril 20.904 individus inscrits, dont 11.152 fiches «actives» – et le fichier médical des personnes faisant l’objet de ‘’soins psychiatriques sans consentement’’, résume Le Figaro  (Jean Chichizola).  Si un individu du second fichier se trouvait également dans le FSPRT, le décret prévoit qu’en soit averti le représentant de l’État dans le département en question (le préfet ou le préfet de police de Paris). Pour les services de l’État, c’est une nécessité pour repérer des individus qui sont à la fois des personnes souffrant de réels troubles psychiatriques et qui, dans le même temps, trahissent un comportement radicalisé visible lors de crises mais aussi au moment où les patients sont ‘’stabilisés’’ par leur traitement. La mesure est en revanche critiquée par nombre de médecins psychiatres. »

En août 2017 le Conseil national de l’Ordre des médecins avait clairement pris position contre ce dispositif  : Risque terroriste : l’Ordre rappelle les principes fondamentaux de l’exercice médical :

 « Suite aux déclarations du ministre de l’Intérieur Gérard Collomb, au sujet d’une éventuelle coopération entre les autorités policières et les services psychiatriques pour lutter contre la radicalisation, l’Ordre national des médecins tient à rappeler sa position sur le risque terroriste et le secret professionnel du médecin.

Pleinement conscient, comme l’ensemble de la société, des dangers liés à la radicalisation, l’Ordre des médecins a pris des positions précises et détaillées sur le sujet depuis plusieurs mois, positions dont les autorités ne s’étaient jusqu’à présent pas saisies.

L’Ordre des médecins rappelle la nécessité absolue de préserver les principes fondamentaux de l’exercice professionnel, en particulier celui du secret médical. En effet, le code de déontologie est très clair : la confidentialité entre le médecin et le patient est absolue. C’est un principe essentiel dans la relation de confiance qui lie les professionnels à leurs malades.

Toutefois, dans certaines circonstances exceptionnelles, la loi permet aux médecins de passer outre au secret médical en cas de danger probable. C’est pourquoi l’Ordre préconise la pleine application des textes en vigueur, et en particulier ceux du code pénal qui s’adressent à tout citoyen, plutôt que de créer de nouvelles dérogations au sujet desquelles on ne peut mesurer les possibles dérives ultérieures. Enfin, dans un régime de libertés, la coopération des médecins ne peut se faire qu’avec les autorités de justice. Il en va du respect des principes fondamentaux de notre République. »

Mai 2019 : ainsi donc, au nom de la « prévention de la radicalisation », le Dr Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé n’a pas entendu le rappel  solennel de l’Ordre des médecins.

A demain

@jynau