Le médecin aux mains d’or qui ne parvenait pas à comprendre ses pulsions sexuelles

Bonjour

06/09/2020. De la richesse de la presse quotidienne régionale. L’affaire vient d’être rapportée dans le détail par L’Indépendant (Laure Moysset). Celle d’un médecin des Pyrénées-Orientales reconnu coupable jeudi 3 septembre de harcèlement sexuel. Un médecin spécialiste en réadaptation fonctionnelle et père de trois enfants. Il passait en jugement devant le tribunal correctionnel de Perpignan pour des faits « d’atteinte et harcèlement sexuels » commis entre 2012 et 2017 – et ce sur sept femmes, infirmière, personnel médical mais aussi sur une patiente. Trois d’entre elles étaient présentes face à lui.

« Sept longues années de procédure à nier farouchement les accusations, raconte L’Indépendant. Et une poignée de secondes à la barre du tribunal hier – après le refus d’un huis clos exceptionnel demandé par son avocat pour préserver sa dignité- avant que ce médecin spécialiste en réadaptation fonctionnelle et père de trois enfants, change tout à coup de ligne de défense. L’homme, tenue classique en polo pâle et pantalon en toile, casier vierge, jette ses yeux noirs par-dessus ses lunettes rectangulaires. Demande à faire une déclaration, qu’il a préalablement consignée sur un bout de papier. Et, caché derrière son masque, reconnaît tout. Tout… ce que ces femmes avaient toujours maintenu. »

Où l’on apprend le harcèlement, durant des années ; les propos et comportements déplacés ; les caresses sur la hanche, le bras, le bas du dos, la main sur la cuisse ; les tentatives répétées pour embrasser sur la bouche les soignantes des établissements spécialisées où il travaillait, en les enlaçant, les bloquant dans l’ascenseur ou derrière une porte. « Il assume aussi l’agression d’une de ses patientes, précise L’Indépendant. Les commentaires humiliants sur son maquillage et sa prise de poids, sa proposition d’aller boire un verre à l’extérieur ou encore ces quelques mots dérangeants : ‘’toi un jour je t’aurai’’… »

« En contestant les faits, j’ai contesté ma propre intégrité »

Le médecin : « Je tiens sincèrement et profondément à m’excuser devant toutes les victimes présentes ou non, pour le mal que j’ai fait à cette époque. Je demande pardon. Je ne minimise pas mes responsabilités. Mais c’était la période la plus difficile de ma vie (…) J’ai aujourd’hui conscience de la nécessité de suivre une thérapie spéciale pour aller mieux. J’ai besoin d’être accompagné. Je n’agis pas avec calcul, ni préméditation. J’avais des pulsions que je n’arrivais pas à comprendre. Oui, j’en souffre encore mais j’essaye de les maîtriser de toutes mes forces. C’étaient des horreurs. J’étais très pervers. J’étais dans le déni. En contestant les faits, j’ai contesté ma propre intégrité ».

Des propos d’une particulière intensité mais nullement convaincants pour les avocats des trois victimes présentes – et moins encore pour le procureur : « Il est inadmissible de venir devant nous sans avoir mis en place de mesures de soins, à part des séances de yoga ou de méditation. En outre, ce sont des faits qui portent atteinte à l’image d’une profession car il rompt le lien de confiance ».

L’avocat de la défense évoque « un médecin aux mains d’or qui a commis des actes stupides ». Le tribunal s’en remet alors à l’Ordre des médecins mais, pour autant condamne : 18 mois de prison avec sursis probatoire, assorti d’une obligation de soins et d’indemniser les victimes. Sans oublier 20 000 € d’amende et l’inscription au fichier des délinquants sexuels. Et, conclut L’Indépendant, un message clair : « Réglez vos pulsions tout de suite. Cette décision ne vous donne plus le droit à aucune erreur ».

A demain @jynau

Contraception féminine : savez-vous à partir de quel âge elle est désormais gratuite ?

Bonjour

29/08/2020. Jadis l’affaire aurait déclenché l’une de ces polémiques qui , depuis la loi Neuwith (1968), opposait partisans et adversaire du droit des femmes à pouvoir dissocier la sexualité de la procréation (« Un enfant quand je le veux ! »).

Aujourd’hui, dans les médias généralistes, ce sont à peine quelques lignes glissées sous mille et un papiers traitant de la pandémie, de la fonte des pôles et de l’interdiction de la chasse à la glu. Un demi-siècle plus tard, la polémique est épuisée. Qui s’en plaindrait ?

Jusqu’à présent, en France, seules les jeunes filles âgées de 15 ans et plus pouvaient bénéficier d’une contraception intégralement prise en charge par la collectivité. Désormais le frais liés à la contraception des jeunes filles de moins de 15 ans seront désormais également pris en charge à 100 % par l’Assurance-maladie, selon un décret publié jeudi 27 août au Journal officiel.

Cette mesure était certes inscrite dans le budget de la Sécurité sociale pour 2020 – mais elle restait suspendue à la parution de ce décret. Les mineures de moins de 15 ans n’auront désormais plus à s’acquitter du « ticket modérateur » pour les consultations de médecins ou sages-femmes, les examens biologiques, les médicaments et les dispositifs contraceptifs.

Gratuité du préservatif ignorée

Pourquoi une telle extension de la prise en charge ? Le gouvernement avait fait savoir fin 2019 que « chaque année, près de 1 000 jeunes filles de 12 à 14 ans sont enceintes en France » et que « parmi ces grossesses, 770 se concluent par une IVG ». Or il apparaît que pour les jeunes filles âgées de 15 à 18 ans le taux de recours à l’IVG a nettement baissé depuis qu’elles ont accès à une contraception gratuite, passant de 9,5 à 6 pour 1 000 entre 2012 et 2018.

Comment dès lors justifier que celle âgées de moins de 15 ans devaient supporter financièrement  le coût des contraceptifs, des consultations médicales et des éventuels examens biologiques ? On observera, en amont, que la question de la gratuité du préservatif (apparue il y quarante ans avec l’émergence du sida) n’a jamais été véritablement posée. Et que le fait qu’il ne le soit pas permet à certains de justifier qu’il en aille de même pour les masques scolaires … Du détournement de la logique à des fins politiques …

« Dans les années 1940, la moitié des femmes avaient connu une première expérience sexuelle à 22 ans, contre 18 ans pour les hommes, soit quatre années d’écart, dit l’Ined à ceux et celles qui l’ont oublié.. Dans les années 1960 et 1970, l’âge médian au premier rapport sexuel a baissé, en particulier chez les jeunes femmes : l’écart avec les garçons s’est réduit. Une stabilisation a été observée dans les années 1980 et 1990. Dans les années 2000, une nouvelle baisse s’est amorcée. »

A demain @jynau

RU486: polémique, en Italie, sur l’assouplissement de l’utilisation de la «pilule abortive»

Bonjour

08/08/2020. Qui, en France, se souvient encore de la violente polémique sur le « RU486 » (mifépristone) cette « pilule abortive » ? Quatre décennies plus tard, dans une Europe que l’on présente comme unie, voici que la polémique émerge de l’autre côté des Alpes.

Le gouvernement italien a décidé d’assouplir ses conditions d’utilisation a annoncé samedi 8 août le quotidien (centre-gauche) La Repubblica. Selon cette information exclusive en une du journal de centre-gauche, les nouvelles recommandations du ministère de la Santé permettront aux femmes souhaitant avorter d’avoir recours à la pilule RU486 en ambulatoire – alors que jusqu’ici trois jours d’hospitalisation étaient recommandés.

Interrogé par La Repubblica (et cité par l’AFP) le ministre de la Santé Roberto Speranza a défendu son choix : «Les arguments scientifiques sont très clairs. Le Conseil supérieur de la Santé et les sociétés de gynécologie et d’obstétrique ont exprimé un avis favorable. Ces nouvelles recommandations représentent un progrès important».

En Italie, pays où la tradition catholique résiste, le recours à l’avortement, légalisé en 1978, est compliqué par le fait que 70% des gynécologues invoquent l’objection de conscience pour ne pas pratiquer d’IVG. « La pilule abortive représente actuellement 20% des avortements, la méthode chirurgicale étant la plus répandue. Cette décision permet aussi de mettre fin aux disparités entre régions, qui en Italie sont compétentes en matière de santé, résume l’AFP.  En juin, une polémique avait éclaté lorsque la présidente de la région Ombrie, Donatella Tesei, membre de la Ligue (extrême droite), avait interdit le recours à la pilule abortive sans hospitalisation. Cette décision, condamnée par les partis de gauche et des intellectuels comme Roberto Saviano, avait entraîné des manifestations de protestation de milliers de femmes. » 

Tradition catholique ? L’assouplissement du recours à la pilule abortive a suscité de nombreuses réactions. Le journal de la conférence épiscopale italienne Avvenire a dénoncé «une annonce surprise, dévoilée seulement à La Repubblica», qui «ouvre la voie à l’avortement pharmacologique à domicile».  Le Parti démocrate (PD, centre-gauche, au pouvoir) a salué une décision «juste» en faveur de «l’avortement pharmacologique, sûr et moins invasif que par voie chirurgicale», tandis que le parti Fratelli d’Italia (extrême droite) a fustigé «une décision absurde et dangereuse».

C’est ainsi qu’aujourd’hui, faute d’harmonie, qu’une Europe, cahin-caha, se construit.

A demain @jynau

«Violences conjugales» : fallait-il vraiment faire une nouvelle exception au secret médical ?

Bonjour

22/07/2020. Un vote que l’on aurait jadis qualifié de soviétique. Unanimité absolue, trop belle pour ne pas interroger. Dans un dernier votre au Sénat, le Parlement a adopté définitivement, mardi 22 juillet, la proposition de loi destinée à mieux « protéger les victimes de violences conjugales »– et ce en introduisant notamment une exception au secret médical en cas de « danger immédiat ». Déjà approuvée la semaine dernière par l’Assemblée nationale ce texte de loi autorise dorénavant le médecin ou tout autre professionnel de santé à déroger au secret professionnel – et ce lorsqu’il « estime en conscience » que les violences mettent la vie de la victime « en danger immédiat » et qu’il y a situation d’emprise.

Contexte 1 : cette loi  constitue le deuxième volet législatif, en quelques mois, d’un arsenal ouvertement offensif et qui a fait l’objet d’un accord sans difficultés majeures entre députés et sénateurs en commission mixte paritaire (quand bien même des élus comme des associations souhaiteraient aller plus loin). Il fait suite au «  Grenelle des violences conjugales » piloté à l’automne 2019 par Marlène Schiappa, alors secrétaire d’Etat à l’égalité femmes-hommes et à la lutte contre les discriminations.

Le texte alourdit d’autre part les peines en cas de harcèlement au sein du couple, les portant à dix ans d’emprisonnement lorsque le harcèlement a conduit la victime à se suicider ou à tenter de se suicider. Il réprime la géolocalisation d’une personne sans son consentement et crée une circonstance aggravante en cas de violation du secret des correspondances par un conjoint ou ex-conjoint, pour mieux lutter contre les « cyberviolences conjugales ».

Contexte 2 : cette adoption définitive du 2e volet législatif s’inscrit dans un contexte polémique après la double nomination comme ministre de l’Intérieur de Gérald Darmanin, visé par une plainte pour viol 1, et d’Eric Dupond-Moretti, très critique envers le mouvement #metoo, à la justice. C’est ainsi que dans la « bronca des féministes », la sénatrice PS Laurence Rossignol (ex-ministre des droits des femmes) a dénoncé « une grande claque lancée à toutes les femmes et à toutes les victimes de violences sexuelles et sexistes ». Cette « claque » sera-t-elle suivie de plaintes ?

Y avait-il un danger à modifier les dispositions relatives au secret médical et à sa possible levée ? Etrangement l’Ordre des médecins ne le pense pas qui a donné son feu vert au Parlement. Pour autant il faut sur ce sujet lire la tribune publiée (un peu tard) dans Le Monde et signé par Anne-Marie Curat, présidente du Conseil national de l’Ordre des sages-femmes : « Violences conjugales : ‘’Lever le secret médical sans accord contribuerait à la perte d’autonomie de la patiente’’ ». « Cette mesure, prévue pour les cas d’emprise et de danger immédiat, revient à positionner le soignant en sauveur alors qu’il doit éclairer le consentement de la victime » dénonce-t-elle.

« Rompre le lien de confiance et ne pas respecter le choix des femmes »

Sur le constat, aucune divergence :  les violences conjugales sont un fléau. Chaque année, en France, plus de 120 femmes meurent sous les coups de leurs conjoints. La lutte contre les violences conjugales est une question sociétale et de santé publique qui appelle une réponse politique cohérente. Et la place des professionnels de santé est déterminante au quotidien pour dépister et accompagner ces femmes.

« Mais peuvent-ils agir à leur place, interroge Mme Curat. Cette question est essentielle : elle définit la relation de soin et l’autonomie des femmes. Or, la proposition de loi visant à protéger les victimes de violences conjugalesremet en cause cet équilibre fragile. ‘’Il n’y a pas de soins sans confidences, de confidences sans confiance, de confiance sans secret’’, affirme Bernard Hœrni, professeur émérite de cancérologie à l’université de Bordeaux et auteur de plusieurs ouvrages sur l’éthique médicale. »

Faudrait-il encore rappeler que le secret médical est un droit fondamental « pour les patients », et un fondement essentiel du soin qui permet d’établir la confiance entre le patient et le professionnel de santé ? Et que sa levée (aujourd’hui strictement définie) doit donc absolument rester strictement encadrée et limitée.

« La relation patient-soignant doit être équilibrée et fondée sur la confiance. Le professionnel de santé ne doit pas décider pour le patient en omniscient, mais éclairer le consentement du patient et le conseiller sans jugement, écrit encore Mme Curat. Laloi Kouchner du 4 mars 2002, sur ce sujet, a été une avancée majeure. Ne retombons pas dans un modèle paternaliste du soin. Maintenir le secret médical est essentiel pour que les femmes puissent continuer à se confier aux soignants, mais aussi à consulter les professionnels de santé. »

Mme Curat le dit autrement : « Lever le secret médical en cas de violences conjugales sans accord de la patiente, c’est donc rompre le lien de confiance et ne pas respecter le choix des femmes. C’est considérer la femme comme incapable et positionner le soignant en sauveur. Une telle mesure contribue à la perte d’estime de soi et d’autonomie de la femme, alors que c’est notamment là l’objectif de l’homme violent. »

De plus la levée du secret médical sans le consentement peut être dangereuse : aujourd’hui, après un signalement effectué au procureur, si la femme nie les faits, le dossier est classé. Cette dernière se retrouve ainsi sans protection, tandis que l’auteur des violences est, lui, alerté et pourra se retourner contre la femme. C’est pourquoi le Conseil national de l’ordre des sages-femmes s’opposait à la proposition de loi actuellement étudiée au Sénatde lever le secret médical « en cas d’emprise et de danger immédiat ».  Le Parlement, nourri de clichés et de bonnes intentions, en a décidé autrement. Au grand bénéfice des hommes devenus (pourquoi ?) violents…

A demain @jynau

1 Sur ce thème on lira non sans délectation un échange journalistique d’une violence toute masculine : « Je ne soutiens pas Monsieur Darmanin, quoi qu’en écrive Monsieur Schneidermann » de Claude Askolovitch (Slate.fr,  21 juillet 2020) – mais seulement après avoir pris connaissance de « Gérald Darmanin et ses soutiens » de Daniel Schneidermann (Libération 19 juillet 2020).

Polémiques politiques: Mmes Royal et Bachelot ; Gérald Darmanin versus Elisabeth Moreno

Bonjour

19/07/2020. Chaleur. Les médias généralistes se languissent tandis quenombre de politiques s’agitent. Ce sera au plus offrant. Ségolène Royal par exemple, qui décoche une flèche écologique via Twitter. L’ancienne candidate socialiste à l’élection présidentielle de 2007 tente d’étriller Roselyne Bachelot.

L’ancienne des « Grosses Têtes » de RTL, nouvelle ministre de la Culture a jugé bon de se rendre par la voie des airs (où elle fut photographiée) au chevet de la cathédrale de Nantes, victime d’un incendie le samedi 18 juillet. L’ancienne ministre de l’Écologie reproche à l’ancienne ministre de la Santé son « bilan carbone » et le fait qu’elle ne porte pas de masque, geste barrière contre la propagation de l’épidémie de coronavirus. « Pour Nantes, il y a le TGV. Faites ce que je dis mais pas ce que je fais », tonne Mme Royal pour la galerie médiatique.

Comme prévu la flèche twittesque a fait réagir sur les réseaux sociaux. On y rappelle la volonté réaffirmée par Emmanuel Macron lors de son discours du 14 juillet de supprimer certains trajets en avion en métropole, là où des dessertes rapides en train existent. « Partout où nous avons déployé du TGV dans notre pays et où telle ou telle ville est à deux heures de Paris, 2h15, est-ce que les lignes [aériennes] intérieures qui sont d’une heure, 1h10, se justifient encore ? Non » avait-il déclaré.

D’autres internautes rappellent que Ségolène Royal (alors ambassadrice chargée de la négociation internationale pour les pôles arctique et antarctique) avait fait un voyage express en juillet 2018, entre la France et l’Islande, sur une journée et en avion privé, pour inaugurer un paquebot de luxe.

Qui mesure les discordances entre les paroles et les actes des responsables politiques ?

« S’il est reconnu coupable, là, on en reparlera »

Autres propos, sans précédent, concernant deux ministres de l’actuel gouvernement : Gérald Darmanin, ministre l’Intérieur et Elisabeth Moreno,  ministre déléguée à l’égalité femmes-hommes, à la diversité et à l’égalité des chances. La seconde s’exprime dans Le Parisien (Christine Matteus et Marcelo Wesfreid). Le premier est, on le sait, visé par une plainte pour viol. ET Rachida Dati, ancienne garde des Sceaux, s’est insurgée contre la nomination du premier au ministère de l’Intérieur, Une réaction de la première ?

« Jusqu’à nouvel ordre, tant que vous n’êtes pas condamné par la Justice, vous êtes considéré comme innocent. Je me garderai bien de commenter cette affaire de M. Darmanin parce que ce n’est pas mon rôle et que je n’ai pas tous les éléments. Tout ce que je sais, c’est que la France est un Etat de droit et que nous pouvons lui laisser le bénéfice du doute. S’il est reconnu coupable, là, on en reparlera. (…) »

On lui rappelle qu’Emmanuel Macron, évoquant cette polémique, a déclaré publiquement, le 14 juillet : « J’en ai parlé d’homme à homme avec lui ». La formule a-t-elle choqué Mme Moreno ?

« Emmanuel Macron est un homme et Gérald Darmanin aussi. Qu’est-ce que vous vouliez qu’il dise d’autre ? Evidemment, j’ai parlé avec M. Darmanin. J’ai eu une conversation de femme à homme avec lui. Je lui ai dit : « Il faut qu’on se parle là parce qu’on est dans la même équipe. Ton sujet va être un boulet à porter pour moi, il faut que tu m’expliques ce qui s’est passé. » Et ce qu’il m’a dit me porte à le croire. Maintenant, je me mets aussi du côté des personnes dont j’ai la responsabilité, en l’occurrence les femmes, et si jamais il m’a menti, j’en tirerai toutes les conséquences. »

Lesquelles ?

A demain @jynau

Perversité ou pas, le pédophile tourangeau restera emprisonné loin des Philippines

Bonjour

Loin du Flore et de la littérature, c’est une scène de la justice ordinaire. Mandé depuis la chambre de l’instruction de la cour d’appel d’Orléans le papier est publié dans La Nouvelle République du Centre Ouest (Vincent Baranger). « Il avait filmé ses « ébats » avec une philippine de 9 ans » Pied de page 4, édition d’Indre-et-Loire.

L’affaire trouve ses racines antipodiques dans une cyber-enquête de la police australienne qui, en 2017 avait permis de remonter à deux hôtels ayant servi de lieu de tournage à des scènes de viol sur mineur. Sur une vidéo filmée avec un portable, les enquêteurs sont parvenus à identifier « un quadragénaire tourangeau ayant des relations sexuelles avec une fillette des Philippines, âgée de 9 ans ».

« Aujourd’hui âgé de 48 ans, l’homme soutient avoir accepté cette proposition d’exploitation sexuelle d’une mineure… par un souteneur, qui serait l’oncle de la victime, moyennant de l’argent ‘’pour subvenir aux besoins de la famille’’, rapporte le quotidien régional. Il ne conteste pas les faits mais les relativise :‘’J’étais attaché à cette jeune fille.’’ » On peut voir là un grand classique du déni.

Jusqu’ici jamais condamné, l’homme a subi deux expertises psychiatriques. On apprend que la première le présente comme « un déviant, un pervers », qui exploite sexuellement des mineurs vulnérables car défavorisés.  Quant à la seconde, plus nuancée, elle observe  « des tendances pédophiles mais pas de dangerosité psychiatrique ». Là encore, un grand classique pour qui s’intéresse à la définition de la perversité 1 et aux divergences idéologiques des experts de la psychiatrie médico-légale.

Pour la défense :  Me Louise Thome, assure que son client « a un sentiment de honte » et souligne que « l’incarcération actuelle n’est pas le seul moyen de réinsérer son client ». Et d’insister sur la nécessité de « soins plus poussés » en contrôle judiciaire. Il faut aussi tenir compte de son projet de sortie :un hébergement à La Riche (Indre-et-Loire), chez sa nouvelle compagne ; une promesse d’embauche. Ajoutons une caution de 30.000 € est proposée pour appuyer ses garanties de représentation et la remise de son passeport. 

Pour la partie civile : Me Emmanuelle Descot, conseil de la partie civile administrateur ad hoc « France Victimes 37 » craint une reprise de contact du suspect avec Internet « qu’il maîtrise ».

Pour l’avocat général : Alexandra Pethieu, s’oppose à la libération. Il entend prévenir « un renouvellement de l’infraction ». Il évoque une déviance pédophile « ancienne » (admise par le Tourangeau et par les deux experts psychiatriques) « déviance » qui s’est accentuée au fil du temps. Quant à la caution proposée, la magistrate aimerait détenir des garanties sur la situation financière. De plus, dans cette belle région de « tourisme sexuel » des Philippines, la dimension internationale de trouble à l’ordre public subsiste : « L’inconcevable a été réalisé ! » Elle requiert une confirmation de l’ordonnance de refus de liberté.

Le détenu : il clame sa volonté de rester en France et de ne pas récidiver, indiquant qu’« aux Philippines, c’est un contexte de prostitution ».

Loin des Philippines, du Flore, des médias nationaux et de toute forme de littérature la cour d’appel d’Orléans a rejeté la demande de mise en liberté.

A demain @jynau

1 Perversité(psychopathologie) : « Anormalité de la conduite générale et spécialement des comportements à l’égard d’autrui et de la Société conduisant à des actes asociaux et inhumains accomplis avec indifférence affective à l’égard de la souffrance d’autrui, absence complète de culpabilité et satisfaction personnelle » (Mucch. Psychol. 1969). « Il n’y a perversité véritable que dans une indifférence morale rebelle prolongée: il ne faut donc pas confondre avec les pervers, les impulsifs ou les nonchalants moraux » (Mounier, Traité caract.,1946, p.728).

− P. méton., rare. Action, pratique immorale ou contre nature d’une telle personne. « L’une des perversités (…) en usage au commencement de ce siècle, était le luxe des rats. Un rat, mot déjà vieilli, s’appliquait à un enfant de dix à onze ans, comparse à quelque théâtre, (…) que les débauchés formaient pour le vice et l’infamie » (Balzac, Splend. et mis., 1844, p.18).

La Suisse vient de voter: pour ou contre la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle ?

Bonjour

Tout peut changer. Même en Suisse. C’est fini : les restaurants, hôtels, entreprises de transports, cinémas ou piscines de la Confédération helvétique ne pourront plus refuser leur accès  en raison de l’orientation sexuelle d’une personne. Les Suisses ont largement approuvé dimanche 9 février, par référendum, une loi interdisant la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle – un texte combattu (sans surprise) par des formations conservatrices. Les résultats nationaux donnent 63 % de voix pour le « oui », avec des scores dépassant 70 % dans des villes comme Genève ou Bâle. A l’inverse, le « non » l’a emporté dans trois petits cantons germanophones du centre et de l’est.

Le texte prévoit des amendes ou des peines pouvant aller jusqu’à trois ans de prison. Cette réforme du code pénal « antihomophobie » élargit une législation déjà existante en matière lutte contre les discriminations et appels à la haine raciale ou religieuse – et ce en l’étendant à l’orientation sexuelle.

Adoptée en 2018, la loi s’était heurtée à l’opposition de milieux conservateurs et populistes (il en existe). Ces derniers ont lancé ce référendum dans l’espoir de faire barrage à une forme de « censure » et d’atteinte à « la liberté d’expression, de conscience et de commerce ». Les autres partis ont estimé que la protection contre la discrimination en raison de l’orientation sexuelle était insuffisante en Suisse, et appelé à voter « oui » au référendum.

« Les partisans du texte se sont aussi appuyés sur le fait que la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle était déjà sanctionnée dans d’autres pays européens, et que le Conseil de l’Europe comme l’ONU avaient demandé à la Suisse de renforcer son arsenal contre l’homophobie, précise l’AFP. La nouvelle loi punit le dénigrement public et la discrimination de toute personne en raison de son orientation sexuelle, ou toute attitude visant à attiser la haine à son égard, par l’écrit, la parole, des images ou des gestes. Elle ne réprime pas en revanche des propos tenus dans le cercle familial ou entre amis. »

Mathias Reynard, le parlementaire socialiste à l’origine de cette réforme du code pénal helvétique, a salué sur la chaîne RTS-1 « un jour historique » et « un signal magnifique pour toutes les personnes concernées ». Marc Frueh, du petit parti défenseur des valeurs chrétiennes UDF, qui a lancé ce référendum avec le soutien de l’Union démocratique du centre (UDC, droite populiste), premier parti du pays, a estimé le recours au vote était justifié – et ce en dépit de son échec. Ce référendum « a permis au peuple suisse de prendre une décision », a-t-il déclaré sur la même chaîne.

Rien de plus beau que la démocratie, en somme. Tout particulièrement en Suisse.

A demain @jynau

Assistants sexuels pour personnes handicapées : le Comité d’éthique va-t-il enfin dire oui ?

Bonjour

Ce serait le « dernier tabou » d’une société qui s’est largement évertuée à tenter de les briser. Et c’est une exclusivité du JDD (Emmanuelle Souffi) . Où l’ on apprend que Sophie Cluzel, secrétaire d’Etat en charge des Personnes handicapées vient de saisir le Comité national d’éthique. Et ce « au sujet du droit aux relations intimes, dont sont souvent privées les personnes handicapées ». Et le JDD de donner des extraits de la lettre envoyée par Mme Cluzel à Jean-François Delfraissy, président de ce comité chargé de réfléchir à la morale en marche.

Dignité

« Force est de constater que certains de nos concitoyens, parce qu’ils sont en situation de handicap, en sont privés, pour certains à vie. Sans aucune solution adaptée, ils sont condamnés à vivre dans une abstinence non choisie, écrit la secrétaire d’État (…) » Où l’on est soudain replongé vers le passé. Sept ans et ce texte sur ce blog : « « Assistants sexuels » pour handicapés : le niet des gardiens de l’éthique tricolore ». Sept années et les mêmes questions :

– Quelles prestations la société serait-elle susceptible d’offrir pour atténuer les manques ressentis dans leur vie affective et dans leur vie sexuelle par les personnes handicapées et notamment celles « dont le handicap ne leur permet pas d’avoir une activité sexuelle sans assistance » et qui interrogent sur « la mise en place de services d’accompagnement sexuel ? »

– Quelle analyse faire alors sur la mise en place éventuelle de ces services par les professionnels du secteur sanitaire et médico-social, qu’en serait-il dans ce cadre du droit à la compensation ?

– Quel état des lieux et quelles propositions le CCNE pourrait-il faire sur les moyens susceptibles de promouvoir chez les personnels du secteur sanitaire et social les bonnes pratiques relatives à la vie privée, au respect de la liberté et de la dignité des personnes handicapées ?

Proxénétisme

Les réponses figuraient alors dans l’avis n° 118 intitulé « Vie affective et sexuelle des personnes handicapées ; question de l’assistance sexuelle ». Un avis ambigu, un refus de répondre clairement. En substance : la question posée est importante. Mais le Comité ne peut fournir aucune réponse. Il faudrait pour cela revoir la législation sur le proxénétisme.

« La déception est d’autant plus grande que l’interdit de facto de l’accès des personnes handicapées à des pratiques sexuelles  commence à soulever un vrai débat en France tant au sein des associations que des professionnels de santé concernés » écrivions-nous alors. Un débat qui entrait alors en résonance avec la diffusion du film américain The Sessions qui traite précisément de cette question question que nous venions de traiter dans ce blog    Et d’annoncer : « Nous y reviendrons ».

Sept ans après nous y voilà. Que pourront bien nous dire de différents les sages de l’éthique tricolore ? Que pense notre pouvoir exécutif du proxénétisme ?

A demain @jynau

Homosexuels et don du sang : pourquoi soudain reporter la date de l’assouplissement ?

Bonjour

Contretemps dans le don du sang. On savait depuis juillet que la période « d’abstinence » que doivent respecter les homosexuels allait passer d’un an à quatre mois 1. Et on savait aussi que cette modification (symboliquement importante) avait été fixée au 1er février 2020. Ce ne sera pas le cas comme on peut le lire dans un arrêté signé J. Salomon, Directeur général de la Santé, dans le Journal Officiel du lendemain de Noël : « Arrêté du 17 décembre 2019 fixant les critères de sélection des donneurs de sang ».

Tout est expliqué dans l’Annexe II

« Pour les hommes, rapport(s) sexuel(s) avec un autre homme : Dans le cas d’un don de sang total et d’aphérèse : Contre-indication de quatre mois après le dernier rapport sexuel considéré (sic). Dans le cas d’un don de plasma par aphérèse pour préparer du plasma sécurisé par quarantaine ou du plasma pour fractionnement : Contre-indication de 4 mois pour les hommes ayant eu plus d’un partenaire sexuel dans les quatre derniers mois après la fin de cette situation (re-sic). »

Or le présent arrêté n’entrera en vigueur que le 2 avril 2020, date à laquelle celui du 5 avril 2016 modifié sera abrogé. Pourquoi le 2 avril et non le 1er février comme l’avait annoncé, après Marlène Schiappa, Agnès Buzyn en juillet 2019.

Officiellement en raison …. du délai nécessaire pour imprimer la nouvelle version du questionnaire que doivent remplir tous les les candidats au don, explique la Direction générale de la santé (DGS), qui dépend du ministère. C’est dans ce questionnaire que figurent les critères sur l’activité et l’orientation sexuelles. Ainsi donc cinq mois n’auront pas suffit pour assurer l’impression de la nouvelle version. Ce qui pourrait laisser douter des capacités en matériel de la haute administration sanitaire française. «La date de fin de consultation des parties prenantes sur les projets définitifs d’arrêté et de questionnaire pré-don était mi-décembre, ce qui explique la publication de l’arrêté ce jour» temporise-t-elle auprès de l’AFP.

Lors de son officialisation en juillet, Agnès Buzyn avait présenté la réduction de cette période d’abstinence comme «une première étape» vers un alignement des conditions du don pour les homosexuels sur celles des hétérosexuels, envisagé « à l’horizon 2022 ». Une date que l’administration peut d’ores et déjà surligner dans ses calendriers.

A demain @jynau

1 Rappel synthétique. De 1983 à 2016, les hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH) étaient exclu du don du sang en raison des risques de transmission du virus du sida. Ces conditions ont été assouplies en 2016 avec l’instauration d’un délai d’abstinence d’un an. Ce dernier avait toutefois suscité les critiques de certaines associations homosexuelles qui y voyaient une forme de discrimination injustifiée à l’agard des HSH.

Chaque année en France, 1,7 million de personnes donnent leur sang, générant 3 millions de dons. Et chaque année, il faut en moyenne recruter 170.000 nouveaux donneurs pour assurer les 10.000 dons par jour nécessaires pour répondre aux besoins des malades. Un million de patients par an sont soignés chaque année avec des produits sanguins. L’appel au don est tout particulièrement pressant en fin d’année : « Décembre…l’occasion d’une pause solidaire !»

Personnes intersexuées : les écouter, les informer, les soigner, ne jamais plus les mutiler

Bonjour

Longtemps la médecine les ignora. L’intersexualité n’avait de place que dans la mythologie, sous les traits d’Hermaphrodite et des androgynes. Ou dans les religions monothéistes avec les anges et les discussions éternelles quant à leur sexe. Puis, bien après la Renaissance, les considérables avancées de l’anatomie, de la chirurgie et de l’endocrinologie bouleversèrent progressivement la donne.

On redessina les frontières du normal et du pathologique; on entreprit de corriger ce qui était désormais perçu comme insupportable; on postulait qu’il y avait urgence à modifier l’apparence corporelle de personnes que l’on ne pouvait classer dans l’un des deux genres; que ces interventions leur permettraient de retrouver l’une des deux identités dont elles étaient privées depuis la naissance, privation qui ne pouvait être que source de souffrances.

Mais tout cela, c’était avant que l’on ne découvre, assez récemment, qu’en réalité tout était nettement plus compliqué, que la correction médico-chirurgicale était loin d’être la panacée, que l’on n’avait pas assez écouté les premièr·es concerné·es. Et que l’heure était venue de mieux entendre, collectivement, les différences.

A lire, sur Slate.fr : « Personnes intersexes: informer et soigner, sans jamais plus mutiler »

A demain @jynau