Un détenu âgé de 17 ans s’est suicidé par pendaison à la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis

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C’est une tragédie en 300 caractères diffusés par l’AFP :

« Un détenu mineur de 17 ans incarcéré à la maison d’arrêt de Fleury-Mérogis (Essonne), plus grande prison d’Europe, s’est suicidé lundi soir dans sa cellule, a-t-on appris mercredi auprès du parquet d’Evry. Le corps sans vie de ce jeune mineur isolé marocain a été retrouvé lundi vers 22H00 par les surveillants, pendu dans sa cellule avec ses draps, a indiqué la source. »

Le suicidé avait été condamné le 5 février par un juge des enfants parisien « pour des vols avec violence et maintenu en détention. » Comme à chaque décès en prison, une enquête a été ouverte en «recherche des causes de la mort». Ce décès a représenté «un choc pour les équipes en place», a expliqué à l’AFP la direction de l’administration pénitentiaire.

Les suicides de mineurs en détention sont «rares» précise l’Agence. Il y en a eu un, en France, en 2019. Et le suicide de ce mineur isolé marocain est le premier en 2020. Depuis le 1er janvier, au total, 21 détenus ont mis fin à leurs jours dans les prisons françaises, une hausse importante par rapport à la même période l’année dernière, marquée par onze suicides. Au 1er janvier, il y avait, en France, 804 mineurs détenus sur un total de 70.651 prisonniers.

A demain @jynau

L’urgentiste de Vire est condamné à dix mois de prison: son jeune patient s’était suicidé

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Lu dans La Manche Libre du 22 janvier 2020 : « Un homme de 55 ans a été jugé pour non-assistance à personne en danger. Urgentiste à l’époque, il n’avait pas pris assez rapidement le patient suicidaire en charge. Le jeune homme s’est effectivement suicidé dans la nuit sans que sa fuite du centre hospitalier ne soit signalée.

Dans la nuit du 18 au 19 octobre 2012, un homme se présente aux urgences de l’hôpital de Vire, en faisant part de ses envies suicidaires. Le médecin urgentiste de garde choisit néanmoins de finir de remplir ses dossiers administratifs en cours. Lorsqu’il veut s’en occuper, le patient est parti de l’hôpital sans que sa fuite soit signalée à qui de droit. Il se suicidera en sautant sur les voies ferrées au passage d’un train. Le 17 décembre 2019, le tribunal correctionnel de Caen a traité cette affaire de non-assistance à personne en danger, et l’a mise en délibéré au 16 janvier 2020.

L’ancien urgentiste de 55 ans écope de dix mois de prison avec sursis, peine qui ne figurera pas sur son casier judiciaire B2. »

Il y a un an on pouvait retrouver l’hôpital de Vire dans La Voix-le-bocage : « Une page se tourne à l’hôpital de Vire Normandie. Cette fois, les choses sont claires, Vire Normandie (Calvados) n’a plus d’hôpital général. C’est la filière gériatrique qui va notamment se développer. » Un an plus tard, à lire son annuaire, il ne semble pas que ce soit vraiment le cas.

A demain @jynau

Affaire Kulik. Tentative de suicide et découverte d’un poison interdit mais toléré : le Temik®

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Un cas hors du quotidien des salles de justice. Le 6 décembre 2019, quelques secondes après l’énoncé du verdict par la présidente de la cour d’assises d’Amiens le condamné Willy Bardon avale du Temik®, (Bayer). L’enquête ouverte par le parquet doit notamment déterminer comment il a pu se procurer cette substance, et  «si c’est un acte qui avait été prémédité, organisé et de quelle manière». Il avait confié à un proche qu’il «attenterait à ses jours s’il était condamné».

Cet accusé de 45 ans comparaissait libre. Il  avait toujours clamé son innocence – mais venait d’être condamné à 30 ans de réclusion pour l’enlèvement et la séquestration suivis de mort et le viol d’Elodie Kulik, une employée de banque de 24 ans, en janvier 2002 à Tertry (Somme). Comateux le condamné a aussitôt été transféré dans le service de réanimation du CHU de la ville.

«Le produit ingéré (…) est un pesticide appelé le Temik®. C’est un produit extrêmement dangereux dont la commercialisation est extrêmement réglementée sur le territoire français et européen et qui a des effets à la fois sur le système nerveux et le système cardio-vasculaire», a peu après indiqué le procureur d’Amiens Alexandre de Bosschère. Il a des effets en une dizaine ou une quinzaine de minutes. Il n’est normalement pas en accès pour des personnes qui ne correspondent pas à la réglementation.»

Interdit mais autorisé pour des usages « sur betteraves »

Autorisé pour la première fois en 1970 le Temik® a pour principe actif l’aldicarbe – famille chimique des carbamates –  effet insecticide et nématicide ; essentiellement utilisé dans la culture de la betterave. Ce pesticide du géant allemand Bayer a progressivement été interdit dans les années 2000.

Aujourd’hui, en France, cette substance active n’est pas autorisée dans la composition de préparations bénéficiant d’une AMM. Un délai dérogatoire est toutefois accordé pour des usages « sur vignes et betteraves ». Selon un avis paru au Journal Officiel du 18 avril 2003, cette dérogation s’applique au produit Cardinal®, à base d’aldicarbe et de fipronil, pour des utilisations sur betterave, au produit Témik® 10 G, à base d’aldicarbe, pour des utilisations sur betterave et vigne,

Il ne doit pas être très difficile de parvenir à se procurer ce poison. Notamment dans le nord de la France, pays de betteraves. Le Figaro rappelle ainsi que le Temik® a été évoqué dans des affaires d’empoisonnement d’animaux. En 2013, une dizaine de chats en avaient été victimes à Haisne (Pas de Calais). En 2018, les deux chiens d’une famille d’Emmerin (Nord) avaient également été empoisonnés au Temik : seul l’un des deux avait pu être sauvé.

A demain @jynau

Québec : autoriser l’«aide médicale à mourir» aux personnes «inaptes» à la demander ?

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Froid dans le dos ? Les médias généralistes n’ont pas encore, de ce côté de l’Atlantique, fait écho à ce qui se passe au Québec. Danielle McCann y est ministre de la Santé et des Services sociaux de Québec. Elle vient d’annoncer être favorable à l’ouverture d’un débat sur l’ouverture de « l’aide médicale à mourir » aux personnes « inaptes » 1. Entendre par là qui ne sont pas ou plus capables de donner leur consentement à l’acte euthanasique : personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, mais aussi toutes les personnes « souffrant de diverses formes de démence et de pertes cognitives », un phénomène « grandissant avec le vieillissement de la population ».

Au Québec, en vertu d’une loi adoptée en 2014, une personne apte à donner son consentement souffrant d’une maladie incurable et qui est en fin de vie peut obtenir une « aide médicale à mourir ». Mais une personne souffrant d’Alzheimer ou de démence qui se retrouve dans la même situation ne peut l’obtenir au motif qu’elle est incapable d’exprimer son consentement.

L’affaire est notamment rapportée par le Huffington Post (Jocelyne Richer) et par   La Presse.ca (Tommy Chouinard) :

Lesdéclarations de la ministre de la Santé et des Services sociaux font suite à une décision de justice : « la juge Hélène Di Salvo a envoyé Michel Cadotte derrière les barreaux pour deux ans moins un jour pour l’homicide involontaire de sa femme Jocelyne Lizotte. M. Cadotte disait avoir agi ‘’par compassion’’, afin de mettre fin aux souffrances de sa femme atteinte de la maladie d’Alzheimer ».

Danielle McCann n’a pas voulu commenter l’affaire Cadotte. Elle a néanmoins tenu à dire qu’’’il faut être sensible à ce que met en lumière cette situation-là et voir que, vraiment, nous devons avancer dans [le] dossier’’ de l’élargissement de l’aide médicale à mourir. ‘’ Le Québec est rendu à se pencher sur cette question-là : comment nous allons le faire, à quel moment nous allons le faire. Ce sont évidemment avec les recommandations du groupe d’experts qu’on va travailler’’, a-t-elle expliqué. Créé il y a quelques mois, le comité doit remettre son rapport prochainement. ‘’C’est sûr qu’on entend beaucoup dans la population qu’on souhaite qu’on élargisse. On entend ça, et je pense qu’on ne peut pas le nier. Mais on ne va pas s’avancer davantage sans attendre les recommandations du groupe d’experts.’’ .

La ministre n’a pas voulu donner son opinion personnelle – mais elle fait valoir que ses fonctions font qu’elle est « au service de la population ». « Et je sais que la population a des attentes par rapport à ce dossier. Nous avons une Commission sur les soins de fin de vie, des experts, et je dis à la population qu’on va s’occuper de ce dossier-là. Ce sera un dossier majeur pour nous, et nous serons à l’écoute de la population ».

Que dira « la population » ? Et qui décidera que l’on peut « aider à mourir » les personnes (de plus en plus nombreuses) qui n’auront pas les capacités de le demander ? Froid dans le dos ?

A demain

@jynau

1 « Inapte » 

« Suicidez-vous ! » : partie de Paris, l’épidémie a atteint la gendarmerie de Landivisiau

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Jusqu’où ? Des tags aux « messages explicites » ont, le dimanche de Pâques, été trouvés  sur les murs de la gendarmerie de Landivisiau –  information révélée par Le Télégramme. On pouvait lire « suicidez vous », « flics suicidés ; flics à moitié pardonnés » ou encore « ACAB » (all cops are bastards,  « tous les policiers sont des salauds »).

« Laurence Claisse, la maire de la commune bretonne a été prévenue en début de matinée, vers 9 h. Elle s’est rendue sur place et ne cache pas sa colère, rapporte FR3 Bretagne (Emilie Colin).  Jointe par téléphone elle se dit « scandalisée ». « Les gendarmes sont des humains, ils sont là pour nous servir, nous protéger. Je suis solidaire évidemment. » Elle ajoute avoir croisé plusieurs habitants. Tout comme elle, ils n’ont pas caché leur écœurement. Des enquêteurs d’investigation criminelle se sont rendus sur les lieux. Les services techniques municipaux ont ensuite entrepris le nettoyage dès le matin. »
Soutien des plus hautes autorités

Interrogé, le commandant du groupement de gendarmerie du Finistère, le colonel Duvinage reste réservé quant aux motivations du ou des auteurs. « Il peut s’agir soit d’un individu isolé, soit d’un groupe d’individus. La seule chose qu’on peut dire c’est qu’il y a une signature anarchiste, souligne-t-il (notamment les mentions « ACAB »). Ces faits « inacceptables » ont suscité chez les gendarmes « dans un premier temps de la surprise – ce n’est pas habituel d’avoir des tags dans ces termes – et une très grande détermination à identifier les individus et les présenter devant la justice. Nous avons reçu le soutien des plus hautes autorités, ce qui nous renforce dans notre détermination et dans notre action. Ce n’est pas comme cela qu’on impressionne des gendarmes. Des gendarmes ne se laissent pas impressionner par quelques tags. »

Après ses propos de samedi sur l’ « ignominie » Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur, a une nouvelle fois vivement réagi  : « Ces faits sont d’une extrême gravité. Les banaliser, ce serait donner raison à leurs auteurs qui doivent être identifiés et livrés à la Justice. J’y veillerai. Indéfectible soutien à nos policiers et gendarmes à qui nous devons -tous- respect et gratitude ».

Le parquet de Brest a ouvert une enquête pour « dégradations graves sur un bien d’utilité publique et outrages sur personnes dépositaires de l’autorité publique ». Et une nouvelle fois cette question : pourquoi ne pas ouvrir pour « incitation au suicide » ?

A demain

@jynau

PS Un Gilet Jaune âgé de 69 ans a été placé en garde à vue à la gendarmerie de Caussade (Tarn-et-Garonne) révèle France Bleu Occitanie. Il avait affiché sur la lunette arrière de sa camionnette le slogan « flic suicidé, à moitié pardonné ». Il devait être présenté le 23 avril devant le parquet de Montauban pour « outrage à personnes dépositaires de l’autorité publique » et risque un an de prison.

Gilets Jaunes et «ignominie»: les auteurs seront-ils poursuivis pour provocation au suicide ?

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Pâques 2019. Comprendre comment et pourquoi ? En rester au constat ?   Ignoble, honteuxabject : Après l’ignominie de Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur, les mots manquent aux représentants de la classe politique pour dire leur indignation après les « Suicidez-vous ! Suicidez-vous ! » lancés aux forces de l’ordre samedi 20 avril à Paris durant de l’acte XXIII des Gilets Jaunes.

Dans le désordre :

François-Xavier Bellamy, jeune tête de liste LR pour les élections européennes :  « Ils crient : “suicidez-vous”. Depuis janvier, 28 policiers se sont suicidés. Deux fois plus que l’an dernier. Autant de familles détruites, auxquelles ce cri inhumain doit retourner le cœur… Aucun de ceux qui ont crié cela ne doit rester impuni. Aucun ».

Christian Estrosi, maire LR de Nice : « Ignoble et abject ».

Eric Ciotti :  « Honteux et indigne ».

Nathalie Loiseau, tête de liste LRM et ancienne ministre des Affaires européennes : « Comment tenir de tels propos là où si souvent les Français se sont rassemblés dans la dignité et en hommage à la République ? Cette foule n’est pas le peuple. Condamnons ensemble ces paroles révoltantes ».

Marine Le Pen, dirigeante du Rassemblement national : « Comment peut-on scander suicidez-vous aux forces de l’ordre ? ! C’est honteux enfin ! Cette haine de la police est idéologique et hélas systématique dans les rangs des anarchistes ».

Emmanuel Grégoire, premier adjoint de la maire PS de Paris Anne Hidalgo : « Il n’est pas acceptable que des gens crient suicidez-vous à la police place de la République ».

Pâques 2019. L’incitation au suicide ?  Dans le code pénal français on peut lire ceci :

Section 6 : De la provocation au suicide.

Article 223-13 : Le fait de provoquer au suicide d’autrui est puni de trois ans d’emprisonnement et de 45000 euros d’amende lorsque la provocation a été suivie du suicide ou d’une tentative de suicide. Les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 75000 euros d’amende lorsque la victime de l’infraction définie à l’alinéa précédent est un mineur de quinze ans.

Article 223-14 modifié par Ordonnance n°2000-916 du 19 septembre 2000 – art. 3 (V) JORF 22 septembre 2000 en vigueur le 1er janvier 2002 : La propagande ou la publicité, quel qu’en soit le mode, en faveur de produits, d’objets ou de méthodes préconisés comme moyens de se donner la mort est punie de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.

Article 223-15 : Lorsque les délits prévus par les articles 223-13 et 223-14 sont commis par la voie de la presse écrite ou audiovisuelle, les dispositions particulières des lois qui régissent ces matières sont applicables en ce qui concerne la détermination des personnes responsables. »

Pâques 2019. Au moins 52 personnes ont été tuées dimanche 21 avril au Sri Lanka dans une série d’explosions dans des hôtels et des églises où était célébrée la messe de Pâques. 280 personnes ont été blessées dans ces explosions, a par ailleurs annoncé le directeur de l’hôpital national de Colombo. Deux déflagrations se sont notamment produites dans l’église Saint-Anthony de Colombo et l’église Saint-Sébastien de Negombo, une localité au nord de la capitale. Au moins 160 personnes blessées dans l’explosion de l’église Saint-Anthony ont été admises à l’hôpital national de Colombo, a déclaré à l’AFP un de ses responsables.

A demain

 

 

 

 

Aujourd’hui, 20 avril 2019 place de la République: pourquoi une telle ignominie ?

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Il faudra bien comprendre comment et pourquoi on peut en arriver à une telle extrémité ? 20 avril 2019, place de la République à Paris, en marge du XXIIIème acte des Gilets Jaunes. Des violences, des flammes. Puis l’impensable.

« Suicidez-vous, suicidez-vous, suicidez-vous ! » ont hurlé certains manifestants aux forces de l’ordre. Des vidéos les montrent vêtus de gilets jaunes ou non, scander ces paroles face à des forces de l’ordre que l’on peut voir, casquées, à plusieurs mètres.

« Honte à ceux qui se sont livrés à une telle ignominie!  a réagi en début de soirée sur Twitter le ministre de l’Intérieur. Soutien total à nos forces mobilisées, et à leurs familles. L’immense majorité des Français sait ce qu’elle leur doit. »

Anatole France, l’état d’urgence

La veille les syndicats de forces de l’ordre appelaient à une mobilisation pour alerter sur le nombre élevé et croissants de suicides dans leurs rangs. Le même jour Eric Morvan, 62 ans,  directeur général de la police nationale (DGPN), dans une lettre envoyée à tous les policiers invitait la profession au dialogue et à la libération de la parole face ce phénomène – un sujet longtemps tabou chez les forces de l’ordre. Aujourd’hui Le Monde consacrait sa manchette au phénomène : « Suicides dans la police : l’état d’urgence »,

« Ignominie  : Action, parole basse et déshonorante. ‘’Nous vivons dans un âge fréquent en lâchetés, abondant en ignominies, fertile en crimes’’. » Une phrase signée Anatole France ; extraite de « Sur la pierre blanche », roman philosophique, à la fois historique et d’anticipation. L’œuvre traite dans son ensemble de l’évolution de l’Humanité et esquisse la possibilité d’une création des États-Unis du monde. Elle se termine par la description d’un idéal socialiste/communisme en l’an 2270, et par une remarque sur les limites biologiques et temporelles de l’espèce humaine, qui ont pour conséquence que non seulement l’Humanité disparaîtra, mais que d’autres espèces, peut-être plus intelligentes, prendront la suite.

L’ouvrage fut publié en 1905. Nous sommes en 2019, place de la République, à Paris.

A demain

@jynau

Suicides : le courage atypique du directeur général de la police nationale ; silence à l’hôpital

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Il se nomme Eric Morvan, 62 ans. Né à Nevers, haut fonctionnaire, carrière ascendante exemplaire, occupe depuis près de deux ans le poste à haut risque de directeur général de la police nationale (DGPN) Fait sans précédent, il invite dans une lettre envoyée à tous les policiers, vendredi 19 avril, la profession au dialogue et à la libération de la parole face à la vague de suicides dans l’institution, un sujet tabou chez les forces de l’ordre.

Dans sa lettre aux 150 000 fonctionnaires de police français (et dont l’Agence France-Presse a eu copie) Eric Morvan enjoint à parler du suicide – une démarche atypique qui ne va pas nécessairement de soi dans l’institution.

« Plusieurs de nos collègues ont mis fin à leurs jours. Certains penseront peut-être que ce dramatique enchaînement relève d’un facteur mimétique 1  et que, plus on parle du suicide, plus on prend le risque d’en susciter, dans un contexte rendu encore plus difficile par la charge opérationnelle ».

« Il faut en parler. Sans crainte d’être jugé. Il faut se confier, se persuader qu’avouer un mal-être n’est jamais une faiblesse (…)  La responsabilité humaine que l’on doit reconnaître à celui ou celle qui prend cette terrible décision ne nous exonère pas de la nôtre »

Le DGPN, qui évoque « un devoir collectif », y compris et surtout des chefs, dont le management est, nous dit l’AFP, « souvent pointé du doigt par les organisations syndicales de gardiens de la paix ».

Intérieur, Solidarités et Santé

Le Monde pascal, qui consacre sa manchette au phénomène : « Suicides dans la police : l’état d’urgence », donne la parole (Louise Couvelaire) à Sebastian Roché, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique et « spécialiste de la police ». Il a notamment publié De la police en démocratie (Grasset, 2016). Pour ce chercheur, le nombre important de suicides de policiers enregistrés depuis le début de l’année est un phénomène alarmant, mais difficile à analyser, faute d’études sur le sujet. Extraits :

«  Le taux de sur-suicides des policiers se maintient à un niveau élevé depuis longtemps. Cela fait quarante ans que l’on sait qu’il y a davantage de suicides chez les policiers que dans le reste de la population à structure égale, c’est-à-dire entre 35 ans et 45 ans et majoritairement masculine. En juin 2018, un rapport du Sénat pointait un taux de suicides dans la police supérieur de 36 % à celui de la population générale. Mais ce qui est certain, c’est que l’année 2019 est très mal partie, et c’est alarmant. Si le rythme se maintient, on pourrait atteindre le record de l’année 1996, ‘’ année noire ‘’ qui avait enregistré soixante-dix suicides.

Les causes de ce taux de « sur-suicides » ?

« On ne le sait pas justement. Et c’est bien le problème. Il n’existe aucune étude de fond du ministère de l’intérieur permettant d’analyser le phénomène. Il y a un défaut de volonté de comprendre. C’est une lacune historique et structurelle de Beauvau. Résultat, nous n’avons toujours pas réussi à identifier le problème ni été capables de mesurer l’efficacité des mesures mises en place jusqu’à présent. (…)

« La qualité de la relation avec la population joue probablement un rôle important. En 2016, elle était meilleure que les années précédentes, ce qui peut aider les policiers à donner un sens à leur engagement.

« Sur ce terrain, 2019 est une année conflictuelle et donc difficile. Les policiers sont mis en cause par une partie de la population qui jusque-là les soutenait. Pour répondre à leur détresse, il ne suffit pas d’ouvrir une ligne téléphonique, comme le prévoit le plan antisuicides, il faut multiplier les portes d’entrée pour appeler à l’aide, comme l’a fait la police de Montréal, au Canada, en formant la hiérarchie, les syndicats et des pairs référents. »

« Aucune étude de fond du ministère permettant d’analyser le phénomène … un défaut de volonté de comprendre ». Ce sont là des propos que l’on peut appliquer au ministère des Solidarités et de la Santé confronté aux suicides des soignants hospitaliers. Qui dira pourquoi le pouvoir exécutif se refuse à multiplier les portes d’entrée pour que l’on entende mieux ces agents salariés qui nous appellent à l’aide ?

A demain

@jynau

1 Le DGPN fait ici notamment référence à « l’effet Werther » ,phénomène qui tire son nom d’une spectaculaire vague de suicides s’étant produite en Europe après la parution (1774) du célèbre roman de GoetheLes Souffrances du jeune Werther, roman centré sur le suicide d’un jeune homme à la suite d’amours déçues

Policiers : vingt-huit suicides depuis le début de l’année. Christophe Castaner et la «fatalité»

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Christophe Castaner est ministre de l’Intérieur. Vendredi 12 avril il visitait, à Paris, l’Hôpital des Gardiens de la Paix (35, boulevard Saint Marcel ; établissement de soins de suite et de réadaptation composé de 19 lits de soins de suite indifférenciés et 36 lits dans le secteur de prise en charge de l’appareil locomoteur et de 10 places d’hôpital de jour. » Une occasion de parler du suicide des policiers et des gendarmes. Des suicides qui, a affirmé le ministre de la République, ne sont pas une « fatalité ».

C’est là un phénomène inquiétant et en progression 1 vis-à-vis duquel le ministre s’est engagé à « mettre les bouchées doubles ». Il a insisté sur l’importance de la hiérarchie dans la prévention du suicide, estimant qu’elle devait être « une vigie attentive et bienveillante ». Une approche dont pourrait s’inspirer Agnès Buzyn confrontée, elle, aux suicides des soignants dans le monde hospitalier.

« La police et la gendarmerie ne sont pas malades du suicide », a encore affirmé Christophe Castaner, promettant un nouveau programme de lutte et de prévention des suicides – et une accélération dans la mise en œuvre du plan lancé en 2018 par son prédécesseur. Création, notamment, d’une « cellule alerte prévention suicide » pour la police nationale. Cette cellule sera pilotée par Noémie Angel, membre de l’Inspection générale de l’administration. Un numéro de téléphone dédié, disponible 24h/24, « permettra de signaler les risques et de mettre les personnes en souffrance en relation avec des psychologues. »

Vendredi 19 avril. Hasard ou fatalité ? Une semaine seulement après ces annonces l’ensemble des syndicats de police appelle à des rassemblements  et demande à être reçu « en urgence » par Christophe Castaner. La cause : deux nouveaux suicides de policiers, jeudi 18 avril – une capitaine de Montpellier et un policier de Paris.

La capitaine de police de la sûreté départementale de l’Hérault s’est suicidée dans son bureau à Montpellier avec son arme de service. Le suicide serait intervenu vers 8 heures à l’hôtel de police de Montpellier. Aucune détonation n’a été entendue, mais des collègues ont été alertés par une odeur de poudre. Ils ont alors découvert vers 9 heures cette femme de 48 ans, mère de deux fillettes, inanimée, une balle en plein cœur. La direction départementale de la sécurité publique de l’Hérault n’a pas souhaité communiquer à ce stade.

Un autre policier a été retrouvé mort jeudi en début d’après-midi à son domicile à Villejuif (Val-de-Marne). Agent de la direction de l’ordre public et de la circulation de la préfecture de police de Paris, ce policier de 25 ans s’était suicidé avec son arme à feu. Il appartenait à la division régionale de la sécurité routière et intervenait dans les écoles.

« Le plan de lutte contre les suicides dans la police doit devenir une cause nationale et être décrété priorité ministérielle », réclame l’intersyndicale de la police dans un communiqué :

« DEUX NOUVEAUX FLICS NOUS ONT QUITTÉ DEPUIS CE MATIN

« Depuis le début de l’année 2019, 28 de nos collègues ont choisi d’en finir avec la vie et ont commis le geste irréparable. Les journées dramatiques s’enchaînent à un rythme insoutenable et jamais connu. Face à ce fléau, l’intersyndicale de tous les corps de la Police Nationale ne supporte plus de perdre autant de collègues. Des mesures fortes et immédiates doivent être prises sans délai. Malgré les propos du Ministre le 2 avril dernier, après le plan de 2009, celui de 2015, un troisième plan de mobilisation a vu le jour mais, de plans en réunions, nous en sommes toujours au même point.

« L’intersyndicale appelle, ce jour, l’ensemble des personnels, sans clivage syndical ni de corps, à se rassembler le vendredi 19 avril 2019, de 11h 30 à midi, en silence, devant leurs services respectifs en hommage à nos collègues. L’Intersyndicale demande à être reçue en urgence par le MINISTRE de l’INTÉRIEUR. Le plan de lutte contre les suicides dans la Police doit devenir une cause nationale et être décrété PRIORITÉ ministérielle. »

A demain

@jynau

1 « Pourquoi gendarmes et policiers se suicident-ils désormais beaucoup plus que par le passé ? » Journalisme et santé publique, 17 novembre 2018.

 

 

 

Suicides : quelques mots à propos des médecins hospitaliers et des personnes emprisonnées  

Bonjour

L’hôpital et la prison. Deux centrales syndicales hospitalières Action praticiens hôpital (APH) et Jeunes Médecins ont annoncé qu’elles saisiront désormais  « systématiquement » la justice après un suicide d’un confrère afin de mettre « les pouvoirs publics face à leurs responsabilités ».

JEUNES MEDECINS@JeunesmedecinsF Ça suffit. Dorénavant, « nous saisirons la justice » #suicides cc @Dr_moji @DrSabrinaaurora @gkierzek @EgoraInfo @leQdM @HOSPIMEDIA @lemondefr @EmanuelLOEB @F_Verdonk @Etienne_Pot @ISNItwit @HAS_sante @MinSoliSante

Les deux structures, reprend Le Quotidien du Médecin (Sophie Martos) veulent mettre un terme à « l’omerta » qui règne selon elles autour de ces décès, qu’ils surviennent sur le lieu de travail ou à domicile. Le 3 mars 2019, le Dr Nicolas Siegler, un urologue de 37 ans exerçant dans le Gard, a mis fin à ses jours. Un mois plus tôt le Pr Christophe Barrat, chirurgien de 57 ans, s’est suicidé par défenestration dans les locaux de l’hôpital Avicenne (Assistance publique – Hôpitaux de Paris), à Bobigny. En 2018, un interne en psychiatrie  de 27 ans du centre hospitalier de Brive-la-Gaillarde et un jeune assistant orthopédiste exerçant à l’hôpital de Castres se sont donné la mort. Trois autres suicides ont eu lieu à Châteauroux, à Eaubonne et à Strasbourg.

« La liste ne cesse de s’allonger, soulignent les deux syndicats de praticiens hospitaliers. Les réactions des pouvoirs publics comme des établissements concernés minimisent l’impact des conditions de travail conduisant à ces drames, le plus souvent par des communiqués lapidaires et insupportables. » Action praticiens hôpital (APH) et Jeunes Médecins dénoncent l’absence d’une instance spécifique où ils siégeraient afin de participer à l’examen des conditions de travail, de la sécurité et de la santé de tous les praticiens

Comment relativiser

On apprend, dans le même temps, qu’en France le nombre de suicides de personnes détenues a atteint en 2018 un pic jamais égalé depuis au moins dix ans avec 131 personnes décédées – contre 117 en 2017. Le plus jeune avait 22 ans, le plus âgé en avait 68. L’essentiel de ces passages à l’acte intervient au sein de l’établissement pénitentiaire (119 contre 103 en 2017), tandis qu’un plus petit nombre (12 contre 14) a lieu hors des murs (à l’hôpital, en permission de sortir, etc.).

Selon une étude interne extrêmement détaillée que Le Monde (Jean-Baptiste Jacquin) s’est procurée, la direction de l’administration pénitentiaire relativise néanmoins ce constat en observant que par rapport au nombre de détenus, qui a lui aussi atteint un record en dépassant les 70 000, le taux de suicide (16 pour 10 000) est inférieur à ceux de 2016 (16,3 pour 10 000) ou 2009 (18,3 pour 10 000).

« L’administration pénitentiaire a pris ce sujet très au sérieux notamment depuis le plan d’action ministériel de 2009 relatif à la prévention du suicide des personnes détenues, précise le quotidien vespéral. Un audit mené en 2015 par l’Inspection des Services Pénitentiaires, l’Inspection de la Protection Judiciaire de la Jeunesse et l’Inspection Générale des Affaires Sociales avaient formulé des recommandations qui ont été mises en œuvre depuis, mais sans grand effet sur le taux de suicide.

Ce constat d’échec est mis en lumière par un collectif d’associations (Caritas France, l’Observatoire international des prisons, les Petits frères des pauvres) qui, nous apprend Le Monde,  organisaient jeudi 28 mars à Paris pour la onzième année consécutive un hommage aux morts de la prison. Ces associations font valoir que l’une des explications de ces suicides (essentiellement par pendaison dans la cellule) est à rechercher dans la dégradation des conditions de détention liées à la surpopulation carcérale. Pour Alexis Saurin, président de la Fédération des associations de réflexion action prison et justice, « l’administration pénitentiaire doit changer de modèle : « chercher à donner aux gens envie de vivre plutôt que de se contenter d’essayer d’empêcher le passage à l’acte ».

« Accidentés de la vie »

Huit pays de la grande Europe – dont la France –, affichent toujours de « graves problèmes de surpopulation » carcérale, selon une étude du Conseil de l’Europe rendue publique mardi 2 avril et résumée par l’AFP.  Outre la Russie, parmi les pays affichant le plus grand nombre absolu de détenus figurent le Royaume-Uni (84 373), la Pologne (73 822) et la France (69 596). La France enregistre également le plus haut taux de suicide (12,6 pour 10 000 prisonniers) et le plus grand nombre d’évasions (611).

 « On ne pourra pas faire baisser significativement le nombre de suicides à l’intérieur [des prisons] tant que l’on ne fera pas baisser les suicides à l’extérieur qui font quelque 10 000 morts par an », explique étrangement la direction de l’administration pénitentiaire. française Autrement dit, si la France a l’un des taux de suicide en détention le plus élevé d’Europe (après la Norvège ), c’est que ce chiffre dans la population non détenue y est aussi nettement plus élevé qu’ailleurs.

Et la difficulté dans l’analyse du taux de suicide en détention, sept fois plus que dans la population générale, est de quantifier la part qui s’expliquerait par les caractéristiques de la population concernée – marquée par des fragilités psychologiques, voire psychiatriques, et de nombreux « accidents de la vie ».

Cette lecture vaudrait-elle également pour les suicides de soignants ?

A demain

@jynau