Premiers humains génétiquement modifiés : le Frankenstein chinois va faire une « pause »

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28 novembre 2018. Quelques lignes mandées depuis Hongkong par l’AFP. Et une question centrale : l’a-t-il ou non véritablement fait ?  He Jiankui, chercheur de la Southern University of Science and Technology (SUSTech) à Shenzhen a-t-il commis l’irréversible : a-t-il, comme il l’avait affirmé à l’Associated Press, modifié pour la première fois dans l’histoire le patrimoine héréditaire d’embryons humains ?

Cette annonce avait suscité d’innombrables interrogations au sein de la communauté scientifique spécialisée. Puis quelques indignations. Mercredi 28 novembre dans le cadre du « Second International Summit on Human Genome Editing » (sic) He Jiankui a annoncé faire une « pause » dans ses essais cliniques – et ce « compte tenu de la situation actuelle ». Le scientifique a déclaré devoir « présenter des excuses pour le fait que ce résultat ait fuité de façon inattendue » (re-sic). Pour autant il semble être fier de son exploit, financé sur ses propres deniers nous dit la BBC.

« He Jiankui est également revenu sur les conditions dans lesquelles son expérience s’était déroulée, précise l’AFP. Il a ainsi expliqué lors d’une table ronde qui se tenait dans un amphithéâtre bondé que huit couples composés d’un père séropositif et d’une mère séronégative s’étaient portés volontaires avant que l’un d’entre eux ne se rétracte. »

Nous sommes en novembre 2018. Que se passera-t-il ensuite ?

A demain

@jynau

Alerte éthique : la Chine aurait fabriqué des nouveau-nés humains génétiquement modifiés 

Bonjour

Un moment historique ?

Ce sont des informations du MIT Technology Review (Antonio Regalado) et d’AP/Washington Post : « AP Exclusive: First gene-edited babies claimed in China ». « Une équipe chinoise serait sur le point de révéler avoir réimplanté des embryons humains modifiés par la technique CRISPR, reprend le site The Conversation (Guillaume Levrier). L’annonce pourrait en être faite demain, au Deuxième Sommet International sur l’Edition du Génome Humain, à Hong Kong. De quoi s’agit-il ? D’un essai clinique visant à modifier le gène CCR5, dans le but d’immuniser une personne contre le VIH. » Associated Press :

« Un chercheur chinois affirme avoir contribué à la création du premier bébé au monde génétiquement modifié – des jumelles nées ce mois-ci dont il a modifié son ADN avec un nouvel outil puissant, capable de réécrire le modèle même de la vie. Si cela est vrai, ce serait un pas de géant en science et en éthique.

« Un scientifique américain a déclaré qu’il avait pris part aux travaux en Chine, mais ce type de modification génétique est interdit aux États-Unis car les modifications de l’ADN peuvent être transmises aux générations futures et risquent de nuire à d’autres gènes. Une majorité de scientifiques pensent qu’il est trop dangereux d’essayer, et certains ont qualifié l’essai chinois d’ »expérimentation humaine ».

« Le chercheur, He Jiankui de Shenzhen, a déclaré avoir modifié des embryons pour sept couples au cours de traitements de fertilité, avec une grossesse obtenue jusqu’à présent. Il a déclaré que son objectif n’était pas de guérir ou de prévenir une maladie héréditaire, mais bien d’essayer de conférer un trait caractéristique de peu de gens naturellement – une capacité à résister à une éventuelle infection par le VIH.

« Il a ajouté que les parents concernés ne souhaitaient ni être identifiés ni interrogés – qu’il ne dirait pas où ils habitent ni où cette expérience a été menée. ll n’y a pas de confirmation indépendante de ses dires, et ce travail n’a pas été publié dans une revue qui, via des pairs, aurait pu attester de son authenticité. »

Pour l’heure seuls quelques médias internationaux semblent avoir pris la mesure de cette annonce. Il ne s’agit pourtant pas ici, comme il y a un an, d’une réédition du génome d’embryons humains surnuméraires destinés à être détruits – mais bien d’un modification délibérée du génome d’embryons conçus in vitro puis implantés in utero dans le but de les faire naître porteurs d’une mutation transmissible à leur descendance.

« Cette nouvelle fracassante est une brusque accélération dans une controverse à la fois économique et éthique qui oppose la Chine à l’Occident au sujet d’une technologie qui va sans aucun doute révolutionner l’agriculture, la médecine, et peut-être l’espèce humaine » prévient The Conversation. Nous y reviendrons.

A demain

@jynau

Réduction de la nicotine dans les cigarettes américaines ; boulevard pour les électroniques

Bonjour

« Coup de froid sur les marchés financiers » annoncent, en tremblant, Les Echos. La Food and Drug Administration américaine vient d’annoncer ce vendredi 28 juillet 1 vouloir réduire le pourcentage de nicotine dans les cigarettes et ce jusqu’à atteindre « un niveau non-addictif » (sic).

Cette décision est justifiée par des raisons de santé publique et économiques. Selon la FDA, le tabac est responsable, chaque année, de la mort prématurée de 480.000 Américains, engendre une chute de la productivité et coûte plusieurs centaines de milliards de dollars par chaque année en soins médicaux.

Attaque nicotinique

« Réduire les niveaux de nicotine fait partie de notre plan pour lutter contre une addiction qui menace les familles américaines, vient d’expliquer Scott Gottlieb, nouveau patron de la FDA. A moins que nous ne rectifiions le tir, 5,6 millions de jeunes mourront prématurément à cause de leur consommation de tabac. » Impact immédiat sur les marchés financiers : en quelques heures le titre de Altria Group (anciennement Philip Morris) perdait 10% à Wall Street, tandis que British American Tobacco cédait près de 7%.

Réduire le pourcentage de nicotine ? « C’est la première fois que les autorités fédérales tentent d’encourager les Américains à arrêter de fumer en s’attaquant directement à la substance addictive, explique l’AFP. Jusqu’à présent, les mesures anti-tabac consistaient en des mises en garde contre les dangers du tabagisme sur les paquets de cigarettes, des taxes sur le tabac et des campagnes de dissuasion visant surtout les jeunes.» Scott Gottlieb :

 « Comme la nicotine est au cœur de tout le problème et que la solution est une question d’addiction, une partie de la stratégie de la FDA doit se concentrer sur les niveaux d’addiction de la nicotine dans les cigarettes combustibles (…) Notre approche de la nicotine doit s’accompagner d’une base sérieuse de règles et standards pour les produits nouvellement régulés. Pour y arriver avec succès, toutes les étapes doivent être franchies en concertation et non de façon unilatérale 

 « Envisager un monde où les cigarettes ne créeront ou n’entretiendront plus l’addiction – et où les adultes qui ont encore besoin ou souhaitent de la nicotine pourront l’obtenir de façon alternative et moins nocive – c’est la pierre angulaire de nos efforts. »

Décourager le public

On peut le dire plus simplement, comme le fait l’AFP : « les mesures dévoilées vendredi 28 juillet font partie d’un plan plus étendu visant à décourager le public de fumer des cigarettes conventionnelles et ce en faveur de produits contenant de la nicotine, mais moins nocifs, comme les cigarettes électroniques ». La FDA a d’autre part  décidé de faire conduire des études permettant de situer le rôle que peut jouer la cigarette électronique pour faire réduire la nocivité de l’acte de fumer. Comment ne pas saluer l’initiative ?

 « Précisons, souligne le site des buralistes français, que les États-Unis connaissent, ces dernières années, une baisse de la prévalence tabagique à un niveau sans précédent, avec seulement 15 % des adultes qui fument. Sans paquet neutre. » Agnès Buzyn lit-elle ce site ?

A demain

1https://www.fda.gov/NewsEvents/Newsroom/PressAnnouncements/ucm568923.htm

 

Las Vegas : son cannabis désormais en vente libre, la soirée d’Emmanuel Macron dans le désert

Bonjour

2 juillet 2017. L’actualité a ses surprises qui, soudain, braque les projecteurs sur une scène non prévue. Aujourd’hui cela devait être Liège (Belgique), deuxième étape du Tour de France. Cela sera Las Vegas (Nevada), temple du jeu et du vice fondé par les mormons au milieu du désert.

« L’usage récréatif de la marijuana est devenu légal, samedi 1er juillet, dans le Nevada, nous explique l’Agence France Presse. Des milliers d’habitants et d’étrangers se sont rués sur les trente-huit points de vente ouverts à Las Vegas, la plus grande ville de l’Etat, qui attire chaque année des millions de touristes dans ses hôtels casinos.

Certains sont restés plus de trois heures dans la file d’attente pour acheter du cannabis en toute légalité, rapporte le quotidien local Las Vegas Sun’La file d’attente du samedi matin à The Source – waouh’’, a tweeté le sénateur démocrate Tick Segerblom, avocat de longue date de la légalisation de cette substance psychotrope.

En pratique les adultes de 21 ans et plus peuvent acheter jusqu’à 28 grammes de cannabis par jour ou 3,5 grammes de « concentré ». Pragmatique, la police de Las Vegas a dressé la liste de ce qui reste interdit : vendre à des jeunes de moins de 21 ans, fumer du cannabis dans la rue, ou conduire sous l’emprise du cannabis.

Las Vegas et ses casinos ont attiré plus de 40 millions de touristes en 2016. Les autorités locales estiment que ceux-ci constitueront 63 % de la clientèle, pronostique l’agence de presse AP. Le Nevada pourrait ainsi devenir le plus important marché du cannabis légal des États-Unis . Selon le groupe Arcview (un réseau d’investisseurs qui a publié un rapport annuel sur l’industrie légale du cannabis) les Nord-Américains ont dépensé 6,7 milliards de dollars en 2016 en cannabis légal, soit une hausse de plus de 30 % par rapport à l’année précédente. L’amorce d’un cannabisness assez éloigné des lointaines imaginations californiennes

James Bond ou Frédéric Dard

« L’opération Las Vegas » : cela pourrait être un James Bond ou un Frédéric Dard. C’était une manifestation centrée sur Emmanuel Macron, alors ministre français de l’Economie organisée dans le désert du Nevada lors du Consumer Electronics Show – « grand-messe mondiale réunissant des entreprises américaines et françaises du secteur des hautes technologies ». Elle est aujourd’hui à la Une du Journal du Dimanche qui, après Libération, fait des révélations assez embarrassantes pour le gouvernement du président Macron ; plus précisément pour Muriel Pénicaud, ministre du travail du gouvernement Philippe II.

Dans un courrier électronique daté du 11 décembre 2015, Fabienne Bothy-Chesneau, alors directrice de la communication de Business France (organisme dirigé à l’époque par la ministre) écrit que cette dernière a été « briefée » par l’équipe de communication en amont sur les problèmes financiers liés à l’organisation de la soirée à Las Vegas en l’honneur d’Emmanuel Macron. Or celle qui est ministre n’aurait pas, alors, pas agi en conséquence. « Elle gérera aussi quand la CdesC [Cour des comptes] demandera des comptes à BF [Business France], ce ne sera pas faute d’avoir dit et redit », poursuit Fabienne Bothy-Chesneau dans son courrier électronique.

Il faut, pour comprendre, savoir que l’événement festif du 6 janvier 2016 a coûté 289 000 euros en fonds publics, qui ont été versés à l’agence Havas, et 45 000 euros de frais d’hôtel. Sans appel d’offres ; un montant revu à la baisse après appel à l’Inspection générale des finances. Une enquête judiciaire, ouverte par le parquet de Paris pour « favoritisme », suspecte Business France, organisme public, de ne pas avoir organisé de mise en concurrence. Selon les révélations du JDD, Business France aurait davantage servi d’intermédiaire dans une opération lancée par le cabinet du ministre Emmanuel Macron.

Le 28 juin Christophe Castaner, porte-parole du gouvernement et du Président demandait instamment à la presse de « ne pas chercher à affaiblir » la ministre du Travail Muriel Penicaud visée par une enquête judiciaire. Pourquoi cette menace ? « Car nous sommes dans un moment important pour la réforme du travail » a-t-il expliqué. Et après ? Qui retrouvera, intacte, la mémoire du désert ? Qui l’emportera à Liège ?

A demain

L’épidémie de burkini n’existe pas. C’est une mascarade doublée d’une fantasmagorie

 

Bonjour

« D’habitude l’étrange circule discrètement sous nos rues. Mais il suffit d’une crise pour que, de toutes parts, comme enflé par la crue, il remonte du sous-sol, soulève les couvercles qui fermaient les égouts et envahisse les caves, puis les villes. Que le nocturne débouche brutalement au grand jour, le fait surprend chaque fois ? Il révèle pourtant une existence d’en dessous, une résistance interne jamais réduite. Cette force à l’affût s’insinue dans les tensions de la société qu’elle menace. » 1

 Il y eu les « Possédées de Loudun » Nous avons le burkini. A Loudun Urbain Grandier fut brûlé. Nous inventons le burkinisées, nos nouvelles pestiférées. Loudun sur la fracture protestante. Aujourd’hui une France qui, devant ses écrans, cherche la bagarre et ses identités,  Des politiques qui s’époumonent à tweeter. Guy Debord réincarné.

Fumet des égouts

Pour Michel de Certeau l’étrange « remontait du sous-sol » et « soulevait les couvercles » qui fermaient les égouts. Aujourd’hui le burkini est sur les plages. Il ne sort pas de l’eau mais entend pouvoir y entrer. Et pourtant les couvercles se soulèvent. On perçoit déjà, ici et là, le fumet des égouts, ceux d’un été avarié.

Aujourd’hui à Paris, conclave des hermines du Conseil d’Etat pour dire si le burkini peut être interdit sur le sable enchanteur de quelques bourgades méditerranéennes. Dire le droit administratif même si ce droit est sans objet. Ce qui est le cas puisque le burkini n’existe pas. Il n’a jamais existé à Cisco, en Corse, comme vient de le démontrer Le Canard Enchaîné (24 août 2016). Il est introuvable, en France comme en témoignent, sur Slate.fr, (Fanny Arlandis) les meilleurs photographes des agences de presse : «On écrit pas mal de choses sur le burkini mais nous n’en avons pas vu beaucoup».

Absurde et édifiant :

 « Reuters met à disposition trois images réalisées en 2007, en Australie. L’AFP propose des photos prises en Tunisie, en Algérie ou également en Australie, sur des plages ou dans une boutique de vêtements. Et Associated Press n’a qu’une image prise en France, une capture d’écran d’une vidéo prise en août à Marseille.

 « Nous avons envoyé des photographes sur les plages, notamment à Cannes et à Nice, «mais jusqu’à présent, aucun d’eux n’a pu voir de femmes en burkini. Et nous ne pouvons pas mettre des photographes en permanence sur toutes les plages», explique Fancis Kohn, directeur de la photo à l’AFPAssociated Press met en avant la même raison: il faut «être très chanceux pour trouver une femme se baignant en burkini», explique Laurent Rebours, chef du service photo de l’Associated Press à Paris. (…)

« Certain(e)s photographes ont cependant réalisé des reportages sur le sujet. C’est le cas de France Keyser, envoyée par Libération à Marseille le 16 août. Cette dernière raconte s’être rendu «sur la plage des Catalans. C’est une plage où tout le monde va, avec une vraie diversité de personnes. Comme pour n’importe quel reportage, je vais discuter avec les gens avant de faire les photos car je photographie au 35 mm. Des femmes ont accepté que je les photographie sur la plage et lorsqu’elles se baignaient en burkini». (…)

« France Keyser a publié sur le site de l’agence Myop cinquante-neuf photos issues de ce reportage (les images sont visibles ici), mais ces femmes n’étaient que «trois, sur des centaines de personnes». »

Huiles politiques

 Le burkini n’existe pas mais avec toutes ces huiles politiques sur le feu médiatique il pourrait bien vite exister. Une nouvelle version, millésime 2016, de la prophétie épidémique auto-réalisatrice.  Une fantasmagorie en somme, cet art de faire voir des fantômes par illusion d’optique. On peut aussi y voir une farce, comme avec ce formidable papier (texte et photos) du Daily Mail :  :“Get ’em off! Armed police order Muslim woman to remove her burkini on packed Nice beach – as mother, 34, wearing Islamic headscarf is threatened with pepper spray and fined in Cannes”.

Une farce ou une mascarade, cette mise en scène fallacieuse(« Seul il marchait tout nu dans cette mascarade Qu’on appelle la vie » – Alphonse de Musset). On raconte qu’à la fin du règne d’Henri IV (et sous Louis XIII) la mascarade se confondit avec le ballet-mascarade, puis avec le ballet à entrées, tout en s’en distinguant par son caractère burlesque. C’est à cette époque que l’étrange, enflé par la crue d’une crise, commença à soulever les couvercles, à envahir les caves.

C’est alors qu’il fallu, pour calmer les Possédées, brûler le prêtre Urbain Grandier.

A demain

 Michel de Certeau en introduction de « La possession de Loudun » (Gallimard/Julliard):

Allergies et religions : les Amish vont-ils commercialiser les poussières de leurs étables ?

 

Bonjour

C’est une étude peu banale que publie aujourd’hui le prestigieux New England Journal of Medicine : “Innate Immunity and Asthma Risk in Amish and Hutterite Farm Children”. Une étude originale associée, qui plus est, à un éditorial : « Innate Immunity in Asthma » signé  du Dr Talal A. Chatila, du nom moins prestigieux Boston Children’s Hospital. Une affaire aussitôt reprise par The New York Times: “Health Secrets of the Amish”.

Ce travail suggère, en substance, que les poussières présentes dans les maisons amish aideraient à développer le système immunitaire des enfants de ces communautés qui, on le sait, vivent à l’écart de la société moderne. Et ce qui vaut pour les Amish ne vaut pas pour les Hutterites.

Cette hypothèse prend racine dans un constat immunologique et épidémiologique : grandir dans une ferme peut, ou pas, protéger contre l’asthme. Un constat né des comparaisons entre deux communautés assez semblables : des Amish vivant dans l’Indiana et des Hutterites résidant dans le Dakota du Sud. Les deux groupes sont d’origine européenne et possèdent des patrimoines génétiques assez  similaires. Ils partagent aussi (rien à voir, a priori, avec la génétique) des croyances religieuses de type protestant-anabaptiste. Toutefois les Amish exploitent des fermes familiales où les enfants jouent pieds nus à proximité des étables, tandis que les Hutterites utilisent des outils agricoles plus modernes et sont moins étroitement en contact avec leur bétail.

Pieds nus près des étables

L’étude a porté sur trente enfants Amish âgés de 7 à 14 ans : pas un seul ne souffrait d’asthme. Or, dans la communauté hutterite, ils étaient six sur trente à en souffrir. Des analyses biologiques  ont établi les bases immunitaires cellulaires permettant de dire qu’il n’y avait là aucun hasard. L’étude ne tranche pas quant à la fatalité ou à la prédétermination, deux concepts assez éloignés de la rigueur de Boston et du New England.

Ce n’est pas tout. Les auteurs de l’étude ont également mené des tests assez sophistiqué sur les poussières présentes  à l’intérieur des maisons des deux communautés. Dans le cas des Hutterites, la poussière provoquait chez des souris des difficultés respiratoires, à la différence, notable, des poussières des Amish.  Et ce travail établit que les poussières des Amish contiendraient un germe  issu de vaches laitières ; c’est l’exposition chronique à ce germe bovin qui renforcerait le système immunitaire enfantin. Au final les foyers des Amish seraient, du fait de la proximité des étables et des absences de chaussures, protégés des risques allergiques et asthmatiques.

Reste que l’échantillon étudié est de bien petite taille et que le germe n’a pas (encore) été identifié. Les auteurs (en partie financés par la St Vincent Foundation) espèrent qu’à terme, leur découverte pourrait contribuer à lutter contre l’asthme et les allergies des enfants qui ne connaissent pas le bonheur de vivre pieds nus près des étables.

A demain

 

Attentats de Paris : « Monstres psychopathes », l’oxymore diplomatique de M. John Kerry

Bonjour

Temps de guerre ou temps de paix, les diplomates parlent rarement de « psychopathie ». Codifié à l’extrême le langage diplomatique est allergique aux mots de la psychiatrie – des mots qui nous parlent d’un autre univers, d’autres souffrances.

John Kerry, 71 ans, est secrétaire d’Etat américain depuis février 2013. Il connait le sens et le poids des mots des diplomates. C’est, aussi, un francophile averti. M. Kerry est arrivé à Paris hier, lundi 16 novembre. Il est venu témoigner du soutien des États-Unis envers la France après les attaques terroristes du vendredi 13. Les mesures de sécurité entourant M. Kerry ont été considérablement renforcées. Interdiction faite aux journalistes l’accompagnant de parler de sa visite en Europe avant que l’avion ne se pose sur le sol français. Il semble que ce soit la première fois qu’une telle interdiction soit prononcée.

Zéro civilisation

Dans sa première allocution  M. Kerry a déclaré que la France et les États-Unis n’étaient pas «seulement des amis ». « Nous sommes de la même famille» a-t-il précisé. Le secrétaire d’État s’est également engagé à continuer le combat contre le groupe armé État islamique, qui a revendiqué les attentats de Paris. M. Kerry a fait valoir que ces affrontements n’avaient rien « d’une guerre de civilisations ». « Ils sont en fait des monstres psychopathes. Il n’y a rien de civilisés chez eux», a-t-il déclaré, repris par Associated Press.

Extraits de la BBC :  «« Your American sisters and brothers will stand with you shoulder to shoulder as we have stood together throughout history. Tonight we are all Parisians, » he said. Mr Kerry added that the fight against IS was not a clash of civilisations. « They are in fact psychopathic monsters. There’s nothing civilised about them, » he said. After he spoke the building was illuminated in the blue, white and red of the French flag.” »

Nous ne sommes donc pas, pour M. Kerry, dans une « guerre de civilisations », formule utilisée en juin dernier par Manuel Valls et qui donne lieu à d’innombrables interprétations. La formule « monstres psychopathes » pourra, elle aussi, soulever bien des questions biologiques, philosophiques, éthiques. Parfois utilisée par les médias (généralement pour désigner des meurtriers  d’une particulière cruauté) cette expression prend, dans le champ diplomatique, une dimension plus que troublante. Ne serait-ce que parce que l’on se plait à imaginer le diplomate comme débarrassé des passions humaines.

Psychopathes inhumains

Résumons le trouble. Comment le « monstre » (par définition hors de l’humanité) pourrait-il souffrir d’une pathologie psychiatrique ? Sa monstruosité même interdit d’imaginer qu’il souffre et soit accessible à une thérapeutique. On peut le dire autrement : « monstre » ou « psychopathe », il faut choisir. Un choix qui renvoie à la question de  la destruction.  La guerre contre les « monstres »  peut aisément être justifiée au nom même de leur inhumanité devenue menace mortelle. Les choses sont éminemment plus complexes, pour des Etats de droit, avec  les « psychopathes ». Faut-il revoir notre conception génétique du monstre ou nier toute humanité au malade psychopathe ?

Troubles. Nous sommes désormais en guerre contre un « Etat » dont on nous dit qu’il n’en est pas vraiment un, contre une entité que nous dénommons désormais « barbarie », contre des « barbares » qui ne sont plus ceux que le mot désignait jadis. Nous redessinons nos frontières. Nous vivons, en somme, des temps  incertains. « Le Rivage des Syrtes » ou « 2084 » en témoignent : il n’est jamais rassurant de ne pas avoir  les mots qui nomment,  précisément, l’ennemi.

A demain

COP 21: l’inquiétante frilosité du Comité national d’éthique vis-à-vis du «climatoscepticisme»

Bonjour

On avait (presque) oublié que le Comité consultatif national d’éthique  existait. Il vient de publier, sur son site internet, un document  étonnant intitulé : « Repenser la place de l’humanité dans la nature ». C’est, tout simplement, sa « contribution du à la réflexion dans le contexte de la 21ème conférence sur les changements climatiques (COP21) ». On observera que les « sages » du ‘’CCNE’’ ont jugé utile de ne pas mettre de majuscule à la Nature. Une volonté consubstantielle de désacraliser ? Une erreur de relecture ?

Que peut nous dire ici l’éthique, cette morale en marche, sur les changements climatiques ? Tout est exprimé entre les lignes de l’introduction :

« La multiplication des évènements météorologiques et climatiques extrêmes fait prendre conscience des changements de l’environnement à l’échelle planétaire et de leurs liens avec les activités humaines.  Mais cette prise de conscience demeure le plus souvent focalisée sur le seul changement climatique, sans prendre en compte l’ensemble des conséquences négatives des dégradations de l’environnement sur les conditions de vie, les inégalités sociales et la santé humaine. »

Bien-être humain

C’est un texte étonnant par sa brièveté, ses généralités hors-sol, son absence de propositions concrètes. Conclusion :

« Il y a urgence à intensifier les efforts de l’humanité pour réduire les inégalités entre les pays et entre les personnes au sein d’un même pays, en adoptant des mesures qui préservent le bien-être humain et protègent  l’environnement au-delà de sa seule composante climatique.

Pour le CCNE l’acuité des problèmes écologiques nécessite de repenser nos relations au sein de l’humanité, et celles de l’humanité au sein de la nature, en élaborant de nouveaux concepts de solidarité, de responsabilité et d’équité, dans une démarche d’anticipation et de prévention privilégiant la préservation des ressources naturelles au bénéfice de l’ensemble de l’humanité. »

Avides de comprendre

Cette initiative apparaît d’autant plus désincarnée que le CCNE avait, avec les controverses sur le réchauffement climatique (le « climatoscepticisme ») un vaste champ de réflexions dont il pouvait s’autosaisir pour éclairer les responsables politiques et les citoyens soucieux, parfois avides, de comprendre.

Il aurait pu, notamment, répondre à la question provocatrice soulevée dans Le Monde du4 novembre : « Le climatoscepticisme  relève-t-il de la science ? ». Une question soulevée par  Philippe Huneman (directeur de recherche, Institut d’histoire et de philosophie des sciences et techniques CNRS/université Paris-I-Panthéon-Sorbonne). Un texte repris et complété sur Slate.fr. Poser le débat en ces termes c’est, déjà, répondre. De fait M. Huneman ne surprend pas. Il apporte sa voix à celles qui, dans ce même quotidien, ont clairement pris position dans cette nouvelle guerre.

Architecture argumentaire

Il faut bien évidemment lire la totalité de la tribune de M. Huneman. La conclusion permet toutefois de se faire une bonne opinion sur l’architecture argumentaire qui se met en place dans cette dispute : Voici la fin de cette contribution :

« (…) Pour conclure, les positions climatosceptiques sur le fait du changement climatique relèvent souvent de la non-science. Peu ou prou, elles ressemblent à l’avis de l’homme ordinaire soutenant qu’il n’y a aucun ­réchauffement car il a fait singulièrement froid en novembre 2014 à Paris (aucune prédiction climatique – par nature probabiliste et à grande échelle – n’est ­infirmée ni même concernée par un tel fait ­local instantané).

Le discours climatosceptique sur la cause de ce fait, lui, relève souvent davantage de la science fausse, comme dans mon exemple des perturbations solaires. Il est donc réfutable, à condition de l’isoler des éléments non scientifiques qui, comme tels, restent irréfutables.

Le mouvement climatosceptique est difficile à saisir car, par certains côtés, il est effectivement non scientifique, tandis que par d’autres il défend des thèses scientifiques fausses. Il est à la fois dans la science et en dehors d’elle. Ce statut ambigu lui ­confère une singulière aptitude à fuir les critiques  : là où on vient réfuter une thèse fausse, le climato­sceptique peut se replier vers une position où il ­rejette en bloc la science et ses procédures usuelles, auxquelles souscrivent la majorité des climatologues, et là où on lui reproche d’être antiscientifique, il peut facilement se défendre en montrant qu’il use des mêmes méthodes que les scientifiques du ­climat, donc que le consensus scientifique que politiques et journalistes présentent comme un fait n’en est pas un… »

Journalisme idéal

On relit cette dernière phrase et ses points de suspension. Et on ne peut manquer d’être troublé par l’idée que  « politiques et journalistes présentent comme un fait » un « consensus scientifique » – consensus par ailleurs contesté. On pourrait imaginer, dans un monde idéal, une plus grande liberté d’action pour le journaliste. Songer à une époque où le sceptique, interrogeant sans cesse le niveau de véracité, demandent plus de preuves, stimulant ainsi le scientifique dans sa quête perpétuelle de déchiffrage du réel. On pourrait même, dans ce monde parfait, imaginer que le journaliste joue le rôle du sceptique.

« L’agence de presse Associated Press a récemment décidé de remplacer le terme de «sceptique», jugé péjoratif, par celui de personne qui doute («doubter»), nous apprend Slate.fr. Réhabiliter les sceptiques comme des interlocuteurs dignes d’être écoutés ou estimer que leur présence apporte au débat scientifique plus qu’elle ne lui nuit est cependant valable dans un monde où chaque participant est de bonne foi, et recherche vraiment la vérité, fait remarquer dans The Guardian, le spécialiste de l’environnement Dana Nuccitelli. En un mot, quand les règles de l’éthique de la discussion  résumées par le philosophe Jürgen Habermas sont respectées. »

Est-ce, ici, le cas ? Chacun peut en débattre, mais, malheureusement,  sans les lumières du Comité national d’éthique français. Un CCNE qui a préféré, ici, la stratosphère à la dispute, cette « discussion sur un point de théologie, de philosophie ou de science ». Ou d’éthique.

A demain

Toxicomanie: la morphine produite dans sa cuisine vient d’entrer dans les champs du possible

Bonjour

‘’« Home-brewed morphine » made possible’’ titre la BBC (James Gallagher). Home, sweet home … Référence faite, dans Nature Chemical Biology, à un travail dirigé par John E Dueber (Université de Californie, Berkeley). Les auteurs y expliquent dans le détail avoir découvert  un procédé permettant de synthétiser des substances opioïdes à partir de sucre et de levures génétiquement modifiées. Soit une production de dérivés du pavot sans le pavot. Point n’est besoin d’être consommateur, trafiquant ou policier des stups pour percevoir la révolution que pourrait constituer cette petite affaire de cornues domestiques.

Betterave

L’équipe des six chercheurs, américains et canadiens (Université Concordia, Montréal) explique avoir découvert qu’en introduisant  un gène de betterave dans le génome de Saccharomyces cerevisiae (levure de bière ou levure du boulanger) la tyrosine (un acide aminé dérivé du sucre) – se transformait en réticuline – une protéine qui est l’un des chaînon moléculaire de la construction  de la morphine, codéine et autres antalgiques majeurs. Il pourrit s’agir là du chaînon manquant pour la maîtrise simple (à domicile) de cette synthèse chimique.

La porte semble ainsi ouverte à la production d’analgésiques moins coûteux. Induiront-ils moins de dépendance ? Quelle sera la rentabilité des fermenteurs ? Pour l’heure il semble qu’il ne faut pas moins de   300 litres d’une culture de levure génétiquement modifiée pour  synthétiser  300 milligrammes de morphine. Les chercheurs  se donnent deux ans pour parvenir  augmenter la rentabilité d’un facteur 1000.

Dynamite

Ces mêmes chercheurs sont conscients de détenir de la dynamite : ils mettent en garde sur la portée de leur découverte utilisée par les narcotrafiquants. « Le moment est venu de réfléchir à des moyens d’encadrer ces recherches et de prévenir de possibles abus », explique ainsi John E. Dueber. On pourrait lui rétorquer qu’il est peut-être déjà un peu trop tard.  Trois universitaires de l’Institut de technologie du Massachusetts et de l’université de l’Alberta (Canada) en appellent, dans Nature, à une régulation de l’usage qui pourrait être fait de ce nouveau savoir. « “Drugs: Regulate ‘home-brew’ opiatesKenneth A. Oye, J. Chappell H. LawsonTania Bubela ».

Dealers

En pratique ils réclament le renforcement de la sécurité des laboratoires et la limitation de la production des souches de levure pour empêcher les dealers de s’en procurer. Ces souches pourraient par exemple être élaborées  de telle sorte qu’elles nécessitent des conditions spécifiques (et secrètes) d’utilisation. Un mirage ? Selon le Réseau mondial d’informations sur les drogues (Ginad – Global Information Network About Drugs) il existerait entre quinze et vingt et un millions de consommateurs d’héroïne dans le monde. Que se passera-t-il, à l’échelon géopolitique notamment,  si les équilibres financiers occultes issus de la culture du pavot volent en éclat ?

Saint-Antoine

Dépendance moindre ? « Je ne vois pas très bien pourquoi une morphine fabriquée selon une modalité complètement différente, à partir d’une levure génétiquement modifiée, n’aurait pas les mêmes propriétés addictives que la morphine naturelle sur le système nerveux central, a déclaré au Quotidien du Médecin le  Dr Bertrand Lebeau, spécialiste d’addictologie à l’hôpital Saint-Antoine (Paris). Les propriétés addictives ne sont pas liées au pavot lui-même, elles sont liées à la structure de la molécule de morphine. Que ce soit de la morphine produite à partir du pavot, ou que ce soit de la morphine produite par cette nouvelle technique – qui semble apparemment relativement simple à mettre en œuvre – je ne vois pas ce que ça change en terme de dépendance. Et si la molécule est modifiée, ce n’est plus de la morphine. »

Reste la possibilité des productions, sinon au domicile du moins dans des zones voisines de celles où vivent les consommateurs toxicomaniaques. Home, sweet home ?

A demain

Inde : comment peut-on accepter d’être stérilisée, à la chaîne, pour 23 euros ?

Bonjour

Depuis quelques jours les médias occidentaux parlent de l’Inde. Images elliptiques et fortes émotions à la clef. Indignation généralisée.  On apprend brutalement que dans ce pays plus d’une dizaine de femmes ont, ces derniers jours trouvé la mort. Soixante sont hospitalisées, dans un état parfois grave. Toutes participaient, volontairement, à une campagne  de stérilisation.

1 400 roupies

Le Dr R.K. Gupta, le chirurgien qui a conduit les opérations a été arrêté le 12 novembre. Une enquête est en cours. L’émotion est très vive dans le dans l’Etat du Chhattisgarh  au centre de l’Inde, là où les faits se sont produits.  Les interventions sont pratiquées  à la chaîne dans le cadre d’un programme de stérilisation financé par l’Etat pour limiter la croissance démographique. Les femmes y sont indemnisées à hauteur de 1 400 roupies (environ 23 euros).

On apprend que le 8 novembre le chirurgien a pratiqué (ou « supervisé », les informations divergent) quatre-vingt trois interventions stérilisatrices en quelques heures – et ce dans une unité mobile. Les femmes concernées étaient de jeunes villageoises (la plus âgée avait 32 ans) chez lesquelles des ligatures des trompes étaient pratiquées par voie laparoscopique. Deux jours plus tard plusieurs de ces femmes étaient hospitalisées présentant des symptômes d’infection ou d’intoxication. A ce jour douze ou treize d’entre elles (les informations divergent) sont mortes.

Trente ligatures quotidiennes

Interrogé, le Dr Kupta  nie ne pas avoir respecté les règles d’hygiène et accuse les médicaments utilisés (1). Des autopsies ont été pratiquées dont les résultats ne sont pas encore connus des médias. Le Dr Kupta aurait été assisté de deux médecins. Le guide des bonnes pratiques fixe ici à trente le nombre des femmes pouvant être stérilisées quotidiennement par une équipe. Le 8 novembre il en aurait été  pratiqué, selon CNN,  quatre-vingt trois en six heures. Plusieurs médias indiquent que le personnel qui participe à ces campagnes de stérilisation reçoit des primes en fonction des chiffres.

Au-delà de l’émotion qu’elle génère cette affaire conduit à s’intéresser aux conditions dans lesquelles sont pratiquées ces interventions dans le pays. En 2012, l’ONG Human Rights Law Network (HRLN) avait révélé que dans l’Etat de  Bihar (au nord de l’Inde) des soixante femmes avaient été stérilisées dans une école sans électricité, ni eau, et à l’aide de lampes torches. Les femmes étaient ensuite laissées à même le sol. On avait découvert à cette occasion que l’une d’entre elles  était enceint – alors que chaque patiente doit, régulièrement, subir un test de grossesse avant l’intervention.

« En enquêtant dans les autres Etats, nous avons réalisé que la situation est à peu près la même partout. Les droits des femmes ne sont pas respectés, elles ne sont pas informées sur les autres méthodes de contraception et les conditions sanitaires sont déplorables » explique  HRLN.

Dix euros suffiront

« Les autorités indiennes ne manquent pas d’imagination pour attirer les femmes, rapporte Le Monde depuis New Dehli (Julien Bouissou).  Dans les régions les plus récalcitrantes, des voitures sont promises aux candidates à la stérilisation, et dans les plus pauvres, les moins alphabétisées, les primes de 10 à 20 euros suffisent. Certaines familles se voient refuser des prestations sociales si elles refusent l’opération. L’Institut international des sciences de la population, basé à Bombay, a ainsi révélé en 2012 que les jeunes couples dont l’épouse subissait une stérilisation étaient prioritaires pour recevoir certaines aides. »

La stérilisation féminine est, de loin, la méthode de contraception la plus répandue en Inde. La vasectomie ne concerne qu’une fraction très faible des hommes, pour des raisons «culturelles» expliquent les observateurs – généralement sans plus de précision. En théorie les femmes indiennes sont libres de leur choix contraceptif. En pratique la plupart n’ont pas de choix. Le ministre de la Santé, Jagat Prakash Nadda évoque quant à lui un « malentendu» quant aux objectifs chiffrés de stérilisation: « Il s’agit d’un programme de promotion [de la stérilisation] sans objectif chiffré et fondé uniquement sur la demande ».

1,4 milliard d’habitants

On estime que près de 4,6 millions de femmes ont, en Inde, été stérilisées en 2012. La plupart d’entre elles sont pauvres, illettrées et vivent dans les campagnes. Il existe ainsi bien des éléments qui peuvent, en Occident, susciter l’indignation. Il faut aussi rappeler qu’entre 2001 et 2011, la population indienne (actuellement de 1,25 milliard d’habitants) a augmenté de 17,6 %. Elle devrait dépasser la population chinoise d’ici vingt ans.

A demain

(1) Vendredi 14 novembre l’Agence France Presse indiquait que la police indienne venait d’arrêter le patron du laboratoire Mahawar Pharma et son fils, soupçonnés d’avoir détruit des preuves en lien avec la mort des femmes stérilisées. Les enquêteurs s’intéressent à la qualité des médicaments administrés.  Les deux hommes ont été arrêtés après une perquisition organisée jeudi soir par les autorités sanitaires au siège de leur société dans la capitale de l’État, Raipur.

Une perquisition a été conduite dans les locaux d’un autre fabricant pharmaceutique, Kavita Pharma, dans le district de Bilaspur. Le gouvernement du Chhattisgarh a suspendu cinq médicaments utilisés lors de ces opérations de stérilisation de masse, dont un anesthésiant et un antalgique.