Michael Schumacher : entre l’espoir de Rom Houben et les affres de Vincent Lambert

Bonjour

C’est la nouvelle équation de l’affaire Schumacher : que dire aux médias quand on ne peut rien dire ? Quand on ne peut rien dire parce que dire serait immanquablement devoir imaginer le pire. Michael Schumacher  est maintenant hospitalisé depuis la fin décembre au CHU de Grenoble. Michael Schumacher n’intéresse plus les médias parce que l’on ne leur dit rien sur son état. Et on ne leur dit rien parce que cet état n’évolue pas, ou pratiquement pas.

Combat

Et puis hier 4 avril  un communiqué de presse. Pour ne rien dire, ou presque : « Michael fait des progrès sur son chemin. Il montre des moments de conscience et d’éveil. Nous sommes à ses côtés pendant ce long et difficile combat, avec l’équipe du CHU de Grenoble, et restons confiants » écrit Sabine Kehm, porte-parole de la famille, dans un communiqué vendredi. Pas plus de détails sur l’état de santé de l’ancienne star de la Formule 1. « C’est absolument nécessaire pour respecter l’intimité de Michael et de sa famille, et pour laisser travailler l’équipe médicale en toute sérénité » explique la porte-parole. L’occasion  de couper court à toutes les rumeurs. L’occasion, aussi, d’adresser « des remerciements pour tous les messages de sympathie reçus de manière ininterrompue ».

Coulisses

Des envoyés spéciaux redisent, devant la façade du CHU, ce que tout le monde sait.  Michael Schumacher, 45 ans, a violemment heurté un rocher de la tête, le 29 décembre, en skiant en compagnie de son fils et d’un groupe d’amis à Méribel (Savoie). Lors de son admission à l’hôpital, il souffrait de lésions crâniennes « diffuses et sérieuses ». Après avoir été plongé dans un coma artificiel, il a été placé le 30 janvier en phase de réveil. Dire aussi ce qui ne change pas : il n’est d’ailleurs pas prévu de déplacer Schumacher de l’hôpital de Grenoble dans un futur proche. Dire enfin qu’il n’y avait personne dans les coulisses : le 17 février, la justice avait classé sans suite l’enquête sur son accident, excluant toute responsabilité d’un tiers, la famille conservant la faculté d’agir au civil. Ce qu’elle n’a pas fait à ce jour.

Compte-gouttes

Pour le reste que du laconique. Les médias se reprennent en boucle : l’entourage du septuple champion du monde communique au compte-gouttes (sic) sur l’état de santé de Michael via des communiqués de Sabine Kehm ; des communiqués qui démentent souvent des informations parues dans la presse  (allemande, britannique et italienne) – des communiqués qui  demandent de s’en tenir aux seules informations émanant de la famille ou de l’équipe médicale grenobloise. Et l’équipe médicale ne dit rien. Ce qui est déjà beaucoup.

Patience

La dernière rumeur en date fait état de travaux entrepris dans la résidence suisse des Schumacher, à Gland. Il s’agirait de lui aménager une « chambre médicalisée ». Une autre rumeur  (émanant d’un « ancien médecin délégué sur les Grands Prix de F1 ») fait état du pessimisme médical quant à l’avenir du champion traumatisé. « Nous sommes et restons confiants que Michael va s’en sortir et se réveiller. Il y a quelquefois des petits signes encourageants. Mais nous savons également que nous devons être patients », avait fait savoir l’entourage du champion le 12 mars. Que dire de plus le 5 avril ?

Angoisse

Plus le temps passe plus l’angoisse monte. Immanquablement on en vient à se souvenir des cas exceptionnels. Comme celui de Rom Houden. Rom Houden était un étudiant ingénieur belge, par ailleurs amateur de sports de combat. En 1983 il a 20 ans et il est victime d’un accident de la circulation. Inconscient, ce citoyen belge est aussitôt pris en charge dans un établissement hospitalier de Liège. Diagnostic: «état végétatif». Puis on comprend que cette situation n’a plus aucune chance d’évoluer favorablement et va s’installer dans le temps de manière irréversible. «Etat végétatif permanent» ou «Etat végétatif chronique». Pendant vingt-trois ans.

Vivant

En 2006 on découvre que son état ne correspond  pas exactement au diagnostic que l’on avait cru pouvoir porté en 1983. Cette découverte est le fruit des travaux et de l’obstination d’une équipe dirigée par le Pr Steven Laureys (Centre de recherche Cyclotron, Université de Liège). Ce spécialiste renommé de neurologie et d’imagerie cérébrale a mis au point une méthode permettant d’établir une cartographie fonctionnelle cérébrale qui conduit à remettre en cause bien des certitudes. Ainsi, le recours a des techniques sophistiquées (par résonance magnétique nucléaire ou émission de positons) permet de conclure que Rom Houben n’était pas dans un «état végétatif chronique», qu’il ne souffrait pas des graves lésions cérébrales correspondant à un tel état. Puis en 2009 ce dossier est rendu public : revenu d’un néant qui n’en était pas un Rom Houben est vivant et peut communiquer avec les vivants  (voir notre chronique  du 26 novembre 2009 parue sur Slate.fr)

Conscience minimale

Où l’on découvre l’existence du  concept d’«état de conscience minimale» (MCS) qui diffère de celui d’état végétatif. L’équipe médicale de Liège estime que près de la moitié des personnes tenues pour être en «état végétatif chronique» ont, à des degrés divers, conscience de leur environnement et d’elles-mêmes. «L’état de conscience minimale  se caractérise, contrairement à l’état végétatif, par un certain degré de conscience, précise le Dr Laureys (PDF).

Peine

C’est ce même état de conscience minimale que l’on retrouve dans le dossier médical de Vincent Lambert, aujourd’hui au centre d’une série de conflit familiaux, médicaux, philosophiques et juridiques. Avec les deux mêmes questions, celle de la « définition de la vie » et celle de la « définition de la vie qui vaut la peine d’être vécue ».  Deux questions qui rôdent autour des caméras placées devant le CHU de Grenoble. Deux questions qui n’émergent pas encore dans les propos journalistiques.

Bahreïn

On raconte que des proches viennent faire écouter à Michael Schumacher des enregistrements sonores des Grands Prix de Formule 1 du temps de sa gloire. Aujourd’hui, et pour la dixième fois consécutive, une Mercedes a dominé une séance d’essais ou partie de qualification, à Sakhir. A l’occasion des essais libres 2 du Grand Prix de Bahreïn, Lewis Hamilton a dominé le peloton, cette fois en gomme « tendre » et par une température plus fraîche. Il a bouclé un tour en 1’34″325, sous les projecteurs. Vainqueur dimanche dernier du Grand Prix de Malaisie, le Britannique, déjà le plus rapide en essais libres 1 en « medium », a battu son coéquipier Nico Rosberg de 0″365.

A demain

Affaire Vincent Lambert : les trois experts répondront-ils au Conseil d’Etat ?

Bonjour

Où en est l’affaire Vincent Lambert ? Mi-février février dernier, le Conseil d’Etat rendait ordonnait une nouvelle expertise médicale de ce cas hors des normes. Sur proposition de trois institutions médicales et éthiques il nommait trois experts en charge de ce travail. Le 26 février ces trois experts prêtaient serment.

Il s’agissait,  sur proposition de l’Académie nationale de médecine,  de Mme Marie-Germaine Bousser, professeur émérite des universités, chef de service honoraire à l’hôpital Lariboisière de l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP) ; sur la proposition du Comité consultatif national d’éthique, de M. Lionel Naccache, professeur des universités – praticien hospitalier, neurologue à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière de l’AP-HP ; et sur la proposition du Conseil national de l’Ordre des médecins, de M. Jacques Luauté, professeur des universités – praticien hospitalier, chef de service à l’hôpital Henry Gabrielle du centre hospitalier universitaire de Lyon.

Visites à deux reprises

Leurs travaux devront être achevés avant mai. Pour l’heure ces trois expertsse sont rendus à deux reprises auprès de Vincent Lambert ainsi que de l’équipe soignante du CHU de Reims : le 5 mars et le 25 mars.

La tâche de la mission fixée par le Conseil d’Etat est considérable. Elle consistera à :

–          décrire l’état clinique actuel de M. Lambert ;

–          se prononcer sur le caractère irréversible des lésions cérébrales dont il souffre et sur le pronostic clinique ;

–          déterminer s’il est en mesure de communiquer, de quelque manière que ce soit, avec son entourage ;

–          apprécier l’existence éventuelle de signes manifestant une volonté d’interruption ou au contraire de prolongation du traitement qui le maintient en vie.

Lumières de la science

Les magistrats du Palais-Royal estimaient en effet que «  les éléments médicaux figurant au dossier qui lui était soumis ne lui fournissaient pas, notamment en raison de l’ancienneté de certains documents et d’indications médicales contradictoires données au cours de l’instruction et à l’audience de référé, une information suffisamment complète pour lui permettre de statuer sur le litige ». Bref, les juges avaient besoin pour juger des lumières de la science et de la médecine.

Au-delà de leur notoriété et de leurs compétences ces trois experts pourront-ils à eux seuls répondre aux questions d’une incroyable complexité qui leur sont soumises ? Rappelons que de leurs réponses (unanimes ou contradictoires) dépendra la vie ou la mort de Vincent Lambert. Soit maintien des soins/traitements actuels ; soit arrêt de la nutrition/hydratation de cet homme dont on ne connaît toujours pas le « niveau de conscience ». Un arrêt de nutrition/hydratation qui sera maintenu (plus ou moins associé à une sédation) jusqu’à la mort.

Hypothèse réfutée

La situation ainsi créée est à ce point paradoxale que l’on peut soutenir que plus encore que les magistrats de Conseil d’Etat, ce seront ces trois médecins qui, en amont, prononceront le jugement terminal. Nous avions avancé cette hypothèse lors d’un « échange avec la presse » organisé place du Palais-Royal – hypothèse bien évidemment totalement balayée par Jean-Marc Sauvé, vice-président du Conseil d’Etat.

En toute hypothèse une question pratique d’importance se pose aujourd’hui. Elle concerne la demande que pourrait faire les trois experts à une autre expertise, de renommée internationale, celle du Coma science group de l’Université de Liège dirifé par le Pr Steven Laureys et qui avait déjà été amenée Vincent Lambert comme l’avait détaillé M. Rémi Keller, rapporteur public dans ses conclusions.

Rapport public :

« M. Vincent Lambert a été examiné en juillet 2011 par le Coma science group de l’université de Liège. Les experts ont conclu qu’il se trouvait dans un état de conscience minimale« plus », un terme qui a été repris par le tribunal et qui correspond à une classification propre, semble-t-il, aux experts de Liège, établie en fonction des réactions aux différents tests effectués sur le patient, écrivait M. Keller.

A l’issue de ce bilan, les experts ont suggéré à l’équipe de Reims d’essayer d’établir un code de communication avec M. Vincent Lambert, consistant par exemple à fermer les yeux pour la réponse « oui » ou bouger la tête pour la réponse « non ». Dans ce but, 87 séances ont été organisées au CHU de Reims par une orthophoniste entre avril et septembre 2012. 69 % des séances n’ont fait apparaître aucune « participation active ». Dans 31 % des cas, on a constaté une « participation active », qui se caractérisait notamment par « des yeux très ouverts et un regard intense avec déplacement donnant le sentiment de suivre activement ce qui est proposé ». Mais dans le même temps, l’orthophoniste ne constatait aucune cohérence dans ces réactions car « l’intensité du regard ne se reproduisait pas pour une même stimulation ». Et finalement, aucun code de communication n’a pu être établi.

C’est à partir de la fin de l’année 2012 que les constatations peu à peu unanimes de l’équipe soignante sur d’apparents refus de soins ont conduit à engager la réflexion collégiale sur l’interruption du traitement.

Eux ou pas

L’examen de Vincent Lambert  à près de trois ans de distance par la même équipe de spécialistes, avec les mêmes appareils et les mêmes procédures fournirait une pièce précieuse, indispensable, pour situer ce qu’il en est de l’évolution de l’état de ce malade et, plus précisément, de son niveau de conscience.

On imagine mal que les trois médecins experts français puissent, sans cela, répondre justement aux magistrats du Conseil d’Etat. Et que ce soit eux ou pas qui « jugent », on sait d’ores et déjà ce qui résultera de leurs réponses.

A demain

 

Non-euthanasie de Vincent Lambert : la mortelle approximation du quotidien Libération

Etat pauci-relationnel  et embrouillaminis.  Contrairement à ce qu’une doxa médiatique voudrait laisser entendre, l’état « pauci-relationnel » a une signification bien réelle. Pourquoi ne pas vouloir l’entendre ? Cela peut aider à comprendre.    

Cette chute, dans Libération de ce jour, à propos de Vincent Lambert (mémoire-blog).  :

« En attendant, Vincent restera sur son lit, noyé de silence, avec juste des soins de nursing et une alimentation artificielle. Totalement aphasique, il est cliniquement dans un état pauci-relationnel, c’est-à-dire dans un état de conscience minimale. On ne sait pas trop ce que cela veut dire. Il ne répond pas. Jusqu’à quand ne sera-t-il pas entendu ? »

L’affaire est trop grave, le sujet trop emblématique, la médiatisation habituelle trop confusionnelle pour que l’on en reste ici aux règles du non-dit confraternel. Car c’est, au minimum une erreur. Et comme il s’agit d’une vie cela pourrait aussi, demain, être qualifié de faute majeure. Comme celle commise par le Dr Jean Leonetti :faire une exégèse (appliquée à ce cas) de la loi qui porte son nom avant même que la justice se prononce. Cela pourrait ici s’appeler vouloir faire pression.  Il nous semble,  émotion ou pas, que  la séparation des pouvoirs est un principe qu’un élu se doit de garder en mémoire.

Etat pauci-relationnel : « On ne sait pas trop ce que cela veut dire ». Ce n’est pas parce que les choses sont complexes qu’il ne faut pas tenter de les comprendre. Et ce n’est pas parce que les définitions sont longues qu’il ne faut pas les donner. Et rien de plus aisé que de les connaître. Et de les faire connaître. Y compris par un simple lien, comme ici.

Et connaître cette définition est essentiel  pour comprendre la décision collégiale prise hier 16 janvier par les juges du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne (mémoire-blog). Une décision de justice contestée par certains médecins – comme par le Dr Véronique Fournier (toujours dans Libération de ce jour)  qui juge en l’espèce que le droit n’a pas, ici sa place.  Ce qui est une conception de circonstance peu compatible avec l’idée que l’on peut se faire de la démocratie. Nous y reviendrons.

Etat pauci-relationnel (EPR). Accessible à tous la définition est donnée (en français) par les spécialistes de l’un des meilleurs groupe au monde sur les profondeurs inconscientes humaines. Il s’agit du Coma Science Group de Liège animé notamment par le Pr Steven Laureys. On la trouvera ici, en annexe, avec celles également essentielle de coma et d’état végétatif  (1). On peut se satisfaire de l’incompréhension de Libération. On peut aussi ouvrir Le Monde vespéral :

« Des équipes de pointe, telle celle du Pr Steven Laureys (à Liège) ou celle du Pr Lionel Naccache (La Pitié-Salpêtrière, à Paris), ont mis au point des protocoles qui permettent de rechercher par tous les moyens des signes de conscience. Au Coma Science Group de Liège, qui accueille des cas du monde entier, le bilan dure une semaine entière et consiste en une palette d’examens, du plus simple au plus sophistiqué : tests cliniques de stimulation, électro-encéphalogram-mes, imagerie cérébrale, notamment par IRM fonctionnelle. Mais la formation du personnel est aussi importante que les moyens matériels : l’un des premiers signes de conscience est la poursuite visuelle, qui peut être détectée simplement en passant un miroir devant les yeux de la personne.

Dans bien des cas, ces explorations permettent d’établir qu’un patient considéré comme en état végétatif a en fait des signes de conscience. La distinction n’est pas anodine : les chances de récupération sont plus élevées en cas d’état de conscience minimale qu’en cas d’état végétatif. Par ailleurs, les patients en état de conscience minimale peuvent ressentir des émotions, des douleurs… qui doivent être prises en compte. Enfin, la présence ou non d’indices de conscience peut être déterminante pour les prises de décision concernant la poursuite des soins et la fin de vie. »

A suivre : « La non-euthanasie de Vincent Lambert :  heureusement, les médecins ne disent pas le droit »

(1) Voici les définitions fournies par le Coma Science Group

 « Coma »

Les patients comateux ne présentent pas d’éveil.  Ils ne présentent pas de rythme sommeil-veille.  Les yeux restent continuellement fermés.  Il n’y a pas d’interaction avec l’environnement.  Il peut arriver que les patients comateux réagissent à des stimuli douloureux.

Les critères diagnostiques sont décrits comme suit:

  • Absence d’ouverture des yeux, ni de façon spontanée ni par le biais d’une stimulation;
  • N’effectue pas de tâche;
  • Pas de langage ou d’expressions reconnaissables;
  • Absence d’affirmations intentionnelles (uniquement réflexologie, comme par exemple, un retrait en réaction à la douleur, rire involontaire);
  • Pas de mouvements complets des yeux;
  • Non induit par la médication.

Il arrive rarement qu’un état comateux persiste au-delà de 4 semaines; si les patients n’ont pas repris conscience, ils évoluent vers un état neurovégétatif.

« Etat végétatif »

Cet état diffère du coma par le fait que les patients peuvent avoir des périodes d’ouverture des yeux spontanées ou résultant d’une stimulation.  Les mouvements oculaires sont possibles, mais pas les mouvements de poursuite. Les réactions restent des réflexes.

Le diagnostic de l’état végétatif est établi sur la base des critères suivants:

  • n’a pas de conscience de soi-même ou de l’environnement et incapacité d’interagir avec les autres;
  • pas de réponse maintenue reproductible dirigée volontaire à des stimuli visuels, auditifs, tactiles ou douloureux;
  • n’a pas de forme quelconque de langage, que cela soit au niveau de la compréhension ou de l’expression ;
  • peut présenter un éveil intermittent, démontré par la présence de cycles de veille/sommeil;
  • les fonctions hypothalamiques ou tronculaires sont suffisamment préservées pour permettre une survie avec des soins médicaux et de nursing;
  • présente une incontinence urinaire et fécale;
  • présente de façon variable les réflexes crâniens (réflexes oculocéphalique, cornéen, oculovestibulaire, réflexe de vomissement) et spinaux.

L’état végétatif persistant est, par définition, un état végétatif persistant après un mois de lésion traumatique ou non-traumatique aiguë et qui évolue, au cours du mois suivant l’accident, vers un état comateux avec les yeux fermés.
Il est question d’état végétatif permanent (EVP) après 3 mois de lésion cérébrale non traumatique et après 12 mois de lésion cérébrale traumatique, lorsque la probabilité d’amélioration est réduite au minimum.

Le terme persistant réfère à une certaine chronicité et implique un pronostic pessimiste quant à la possibilité d’amélioration de cet état.  Le terme suggère à tort une ‘irréversibilité’, car de nombreux patients ne restent pas dans un état végétatif.  La terminologie actuelle confond le diagnostic et le pronostic et cela induit potentiellement le risque que certains soins, comme par exemple, le réadressage vers un centre de réadaptation fonctionnelle, soient refusés, parfois à tort, aux patients diagnostiqués ‘en état végétatif persistant’.  Il a été recommandé d’éviter le terme ‘persistant’ et de parler d’‘état végétatif’, jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de perspectives d’amélioration, et ensuite d’utiliser le terme ‘permanent’.

« Etat de conscience minimale ou état pauci-relationnel »

La distinction entre état végétatif permanent (EVP) et état pauci-relationnel (EPR) revêt une grande importance, et ce en raison des implications en termes de pronostic et des décisions thérapeutiques qui y sont liées.
Le terme ‘état de conscience minimal’ est préférable à ‘état pauci-relationnel’, afin de ne pas créer la confusion avec des ‘réponses’ réflexe des patients végétatifs.  La différence cruciale entre le patient en état végétatif est l’état de conscience.
La personne en état pauci-relationnel (EPR), présente des réactions comportementales minimales mais précises, lesquelles semblent témoigner de la conscience que le patient a de lui-même ou de l’environnement.  Il y a présence d’une interaction significative avec l’environnement.  Ce comportement est incohérent, mais il se distingue nettement du comportement réflexe en raison de sa reproductibilité ou du fait qu’il est maintenu pendant une durée suffisante; il est généralement provoqué par un stimulus externe.

Pour pouvoir établir le diagnostic EPR, il faut la présence d’un ou de plusieurs comportements suivants:

  • effectuer de petites tâches;
  • réagir par oui/non (par le biais de signe ou par le biais du langage), sans tenir compte de la précision de la réaction;
  • des verbalisations compréhensibles;
  • un comportement orienté c’est-à-dire qu’il existe un lien significatif entre le comportement et les stimuli environnementaux précis, ce comportement ne faisant donc pas partie des comportements-réflexes, comme par exemple:
    • des rires ou des pleurs exprimés de façon adéquate;
    • des vocalises ou des gestes en réponse directe au contenu d’une question;
    • l’orientation vers des objets (rapport explicite entre la localisation de l’objet et la direction du mouvement);
    • le toucher ou la préhension adéquate d’objets, ce qui montre une adaptation par rapport à la taille et à la forme de l’objet;
    • la poursuite oculaire ou la fixation prolongée en réponse directe à des stimuli visuels (qui se déplacent);

Ce comportement doit être reproductible ou maintenu suffisamment longtemps pour de pouvoir établir le diagnostic d’EPR.

Par conséquent, il faut pouvoir établir clairement

  • la présence d’une réaction comportementale significative faisant suite à un ordre, à une question ou à un stimulus environnemental spécifique; OU
  • le fait qu’une éventuelle réaction comportementale significative se produise nettement moins souvent en l’absence d’ordres, de questions ou de stimuli environnementaux spécifiques; ET
  • le fait que cette réaction comportementale ait été observée au moins une fois au cours d’un moment d’évaluation formelle.

Par ailleurs, il importe également de pouvoir déterminer à quel moment des patients ne se trouvent plus en état de conscience minimal.  A cet égard, des critères diagnostiques ont également été élaborés de façon consensuelle.
Lorsque les comportements suivants sont cohérents et crédibles, il n’est plus question d’EPR:

  • communication fonctionnelle interactive: les paramètres sont des réponses oui/non exactes à 6 questions de base sur 6 concernant l’orientation situationnelle (p.ex. suis-je assis tout près? Est-ce que je montre le plafond?) pendant deux évaluations consécutives;
  • utilisation fonctionnelle de deux objets différents (pour ce faire, il faut pouvoir discriminer les objets): Les paramètres y afférents sont l’utilisation correcte de deux objets différents au cours de deux évaluations consécutives (p.ex. se peigner les cheveux, écrire sur du papier avec un stylo).