Flambées de violences à Paris : la France souffrante, entre « jacquerie » et « chienlit »

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Emmanuel Macron, le 20 novembre, depuis Bruxelles en réponse aux manifestations des Gilets Jaunes :

« Nous sommes un pays qui se cabre car nous n’aimons pas le changement imposé, mais qui sait mener des transformations profondes quand le sens de l’histoire est là et que le projet est plus grand que lui. »

Le même jour, à Plounéour-Ménez(Finistère), 1 250 habitants, le maire, Jean-Michel Parcheminal, ancien militant des gauches syndicales et politiques a revêtu, seul, un gilet jaune sous son écharpe tricolore. Et il dit pourquoi au Monde :

« Pour le symbole, pour leur montrer ma solidarité. En tant qu’élu, nous vivons leurs souffrances. Ce n’est quand même pas normal que nos enfants n’arrivent pas à vivre décemment de leur travail. On sent aujourd’hui sourdre un ras-le-bol général. Les taxes sur le carburant n’ont été que le déclencheur d’un malaise profond, qui s’exprime en dehors de toute organisation, de manière spontanée. » 

Douze jours plus tard, aube du 2 décembre, Le Monde :

« Gilets jaunes » : à Paris, des destructions, des violences et un mot d’ordre, ‘’Macron démission’’ »

L’Arc de Triomphe souillé, des scènes hier encore inimaginables en divers points de la capitale. 133 personnes, dont 23 membres des forces de l’ordre, blessées. Des murs tagués qui parlent comme il y a, précisément, cinquante ans. Et Chanel pillé faute de Fauchon. Télévisions et radios amplifiant en boucle un phénomène sans cesse exponentiel sur les réseaux sociaux. La quasi-totalité d’un gouvernement aux abonnés absents. Des responsables politiques aux abris. Une exaspération sans fond et des revendications insaisissables. Et le monde qui regarde Paris :

  « Escalade de la violence à Paris » (Die Welt)« La manifestation des gilets jaunes sème le chaos à Paris » (El Pais), « Gilets jaunes, l’heure de la violence : Paris brûle entre agressions et pillages » (Corriere della Sera), « L’une des manifestations antigouvernementales les plus violentes à frapper Paris depuis des décennies » (The Wall Street Journal).

On se retourne, et on ouvre la trop secrète bibliothèque du Centre national de ressources textuelles et lexicales :

Jacquerie : Soulèvement des paysans contre les seigneurs pendant la captivité de Jean le Bon, en 1358.

P ext. Insurrection populaire, notamment paysanne.« J’ai reçu une lettre lamentable de MmeSand. Il y a une telle misère dans son pays, qu’elle redoute une jacquerie » (Flaubert., Corresp.,1870, p. 136) ;

« Les émeutes serviles, les jacqueries, les guerres des gueux, les révoltes des rustauds » (Camus, Homme rév.,1951, p. 139) ;

« (…) quand il souffrait trop, Jacques Bonhomme se révoltait. (…) la jacquerie arme les laboureurs de leurs fourches et de leurs faux, quand il ne leur reste qu’à mourir (…). Après quatre cents ans, le cri de douleur et de colère des Jacques, passant encore à travers les champs dévastés, va faire trembler les maîtres, au fond des châteaux. (Zola, Terre,1887, p. 80.)

Chienlit : Subst. masc. ou fém. Celui, celle qui défèque au lit ; Celui, celle qui laisse passer par derrière un morceau de chemise malpropre ; Personne ridiculement accoutrée, grotesque ;  Personnage répugnant ; Personne masquée de carnaval populaire.

Subst. fém. Mascarade désordonnée et gueuse : « On en est à la chienlit, monsieur… On en est à la mascarade, au corso carnavalesque. On se déguise en pierrot, en arlequin, colombine ou en grotesque pour échapper à la mort. On se masque… » (Giono, Le Hussard sur le toit,1951, p. 270.)

Chienlit, donc, étroitement attaché au Carnaval de Paris. Puis, avant et après Jean Giono vint Charles de Gaulle : en tant que substantif féminin, le terme entra en politique lors de son utilisation d’abord en août 1944 lorsque, s’adressant à Georges Bidault, pendant la descente de l’Avenue des Champs-Élysées, de Gaulle lui dit « Alors, Bidault, c’est la chienlit ! ». Puis en mai 1968 avec le célèbre « La réforme, oui ; la chienlit, non ! ».

C’était il y a un demi-siècle, le dimanche 19 mai, au Palais de l’Elysée. S’adressant à ses ministres le président de la République entendait ainsi qualifier la profusion débridée des événements et désordres concomitants. On connaît la suite des événements.

Dimanche 2 décembre 2018. La situation est critique et la France attend les mots du président de la République.

A demain

@jynau

Burkinis interdits à la plage : la France va-t-elle devenir la risée du monde entier ?

 

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Cannes, Villeneuve-Loubet, Sisco. Comment, en trois jours, a-t-on pu en arriver là ? Comment peut-on, raisonnablement, sur des plages ouvertes aux quatre vents, interdire  « un vêtement de bain destiné aux femmes musulmanes qui veulent profiter de la baignade en conformité avec leur interprétation des préceptes de l’islam » ? Quel scaphandrier des profondeurs de la psyché nationale nous dira de quoi de qui et d’où l’on parle ? Quelle métaphore filer pour, sans lasser, dire au plus juste la vérité ?

Dès le samedi 13 août l’édition internationale du New York Times se gaussait, en Une, d’un pays qui voit dans le burkini une menace pour sa sécurité intérieure  – une interdiction qui « peut parfois sembler étrange pour les étrangers »:

« Aux Jeux olympiques de Rio, plusieurs femmes musulmanes ont participé à des épreuves avec des vêtements qui couvrent leurs cheveux et leur cou. Des maillots de bain couvrant le visage, portés par des baigneurs inquiets d’une exposition trop forte au soleil, ont également été repérés en Chine et dans d’autres endroits ».

Albion

La perfide Albion n’est pas en reste. Le Guardian (Remona Aly) avance ainsi « cinq raisons de porter un burkini – et pas seulement pour embêter les Français » : « Rendre fou les médias », « économiser de la crème solaire », « diversifier la libération de la femme », « souligner le ridicule de la situation » et « célébrer la liberté ».

Pour sa part, la BBC met en garde les autorités françaises. Elles « devront distinguer les nageuses en burkini et les nageurs en combinaison de plongée ». La chaîne britannique a également demandé à des femmes de confession musulmane ce qu’elles pensaient de l’interdiction du port du burkini sur certaines plages françaises. Pour Aysha Ziauddin, de Norfolk, à l’est de l’Angleterre, ces arrêtés municipaux « sont une attaque islamophobe contre les musulmans ». « Le burkini me donne la liberté de nager et d’aller à la plage sans avoir l’impression de compromettre mes croyances », poursuit-elle. Avait-elle lu, sur Mediapart,  Edwy Plenel ?

Régime théocratique

Le Telegraph se montre également d’une particulière  virulent contre les interdits du birkini  :

« Les vrais ennemis de la liberté ne sont pas les femmes qui portent des burkinis, mais les politiques qui veulent les interdire.  Comme un régime théocratique, l’interdiction du burkini à Cannes oblige les femmes musulmanes à choisir entre leur religion et leur identité nationale, et suggère pernicieusement que leur choix du vêtement est une déclaration politique, que ce soit le cas ou non. »

Jusqu’à l’Espagne qui vient, ici, nous donner des leçons de démocratie et de savoir vivre ensemble. Sur le site d’El Pais, la journaliste et écrivaine Berna Gonzalez Harbour s’en prend aux arguments avancés pour interdire le port de ce vêtement. « Si c’est un problème d’hygiène, comme le justifie si bien le maire [de Villeneuve-Loubet], il faudrait peut-être alors réfléchir à l’interdiction des maillots, des lunettes de plongée et des combinaisons thermiques pour les frileux », plaide-t-elle – hommage fait au naturisme qui a tant fait rire M et Mme Emmanuel Macron à Biarritz.

Berna Gonzalez Harbour : « L’inquiétude de la population et les précautions prises par les autorités sont des réactions compréhensibles. Mais de la précaution et des ressources nécessaires à la lutte antiterroriste, à l’intolérance irrationnelle, il y a un pas que la France ne doit pas franchir. »

Marbres vénitiens

L’Italie, elle, reste de marbre.  La Nuova di Venezia revient également sur le sujet. Pour le quotidien local, les édiles de la côte vénitienne, à l’est du pays, « ne semblent pas particulièrement troublés » par le port du burkini sur leurs plages. Aucun n’a ainsi prévu de prendre des arrêtés. Valerio Zoggia, maire de la vieille cité de Jesolo, résume tout en un mot : « Je ne peux pas interdire à une femme de se baigner habillée ».

En France (fille aînée de l’Eglise), certains maires estiment qu’ils peuvent imposer aux femmes de se dévêtir si elles veulent mettre le pied sur le sable de la communauté.  Qu’en diront, rentrés de la plage, les magistrats du Conseil d’Etat, eux qui ne voient la vie que dictée par la loi ?

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Zika : un enfant microcéphale naît à Barcelone. Sombres prévisions statistiques pour l’Amérique

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Les responsables de l’hôpital Vall d’Hebron de Barcelone ont annoncé, lundi 25 juillet, la naissance d’un bébé atteint de microcéphalie due à l’infection de sa mère par le virus zika. Il s’agit du premier cas de ce type recensé en Europe. La mère avait été diagnostiquée porteuse du virus en mai,  mais elle avait choisi de continuer sa grossesse, selon les autorités de santé de Catalogne.

Ce cas avait été connu dès le moi de mai après une « fuite médiatique » sur 8TV (voir ici). Confirmée par  les autorités sanitaires de la Catalogne elle avait été reprise et développée par El Pais : « Detectado el primer caso de microcefalia por zika en un feto en España ». La femme enceinte était de retour d’un voyage en Amérique latine où elle avait été infectée à la vois par les virus zika et de la dengue. Aucune autre information n’a (encore) été donnée.Le ministre espagnol de la Santé avait alors fait savoir que son pays comptait 105 personnes ayant été infectées – dont 13 femmes enceintes. Tous les cas ont été détectés chez des personnes originaires ou qui ont visité des pays touchés. « Il s’agit donc de cas importés » prenait-il bien soin de souligner.

Un autre cas avait été détecté en Slovénie, mais les parents de l’enfant avaient décidé d’avorter. A New York, un premier cas d’enfant présentant une microcéphalie liée au virus a aussi été enregistré la semaine dernière. La mère de l’enfant avait voyagé dans l’une des zones d’implantation du virus, selon le département de la santé de New York.

Inquiétantes modélisations mathématiques

Simple hasard ou triste fatalité une étude parue ce lundi dans la revue Nature Microbiology : ‘’Model-based projections of Zika virus infections in childbearing women in the Americas’’. Les auteurs, dirigés T. Alex Perkins (Department of Biological Sciences and Eck Institute for Global Health, University of Notre Dame, Indiana) estime que par des « dizaines de milliers » de bébés pourraient naître avec des pathologies du type microcéphalie, en Amérique latine et aux Caraïbes.

Au total, 93,4 millions de personnes pourraient être infectées au cours de cette épidémie, dont 1,65 million de femmes enceintes. Dans 80 % des cas, cette infection, contre laquelle il n’existe ni vaccin, ni traitement spécifique, reste bénigne ou passe même inaperçue, rappellent toutefois les auteurs. Ces derniers précisent toutefois que leur prévision (fondée sur de nombreux paramètres) comporte une « énorme » part d’incertitude. Pour Alex Perkins et ses collègues c’est le Brésil (avec 37,4 millions d’infections qui devrait être en tête des pays les plus touchés, suivi du Mexique (14,9 millions) et du Venezuela (7,4 milllions).

Les JO de Rio

L’un des paramètre essentiels est le taux d’embryofoetopathies cérébrales observées chez les enfants nés de mères infectées durant leur grossesse. Embryofaotopathies clairement identifiables où lésions plus fines et séquelles moins visibles. Or rien, ici, n’est clair. Une recherche récente suggère que jusqu’à 29 % des bébés de mères infectées développent des problèmes, relève ainsi le Dr Derek Gatherer, (Université de Lancaster). « Si cela se confirme, plus d’un demi-million d’enfants en Amérique latine pourraient finalement être touchés » ajoute-t-il, cité et repris par de nombreux médias.

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) précise depuis plusieurs mois qu’elle s’attendait à une propagation « explosive » dans les Amériques, avec 3 à 4 millions de cas cette année. Que se passera-t-il aux prochains Jeux Olympiques (5-21 août) de Rio ?

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Zika : un cas de microcéphalie en Espagne. Plus d’un millier au Brésil. La France en alerte d’été

Bonjour

Dernières nouvelles, factuelle, du front zika. Un premier cas de microcéphalie fœtale a été détecté en Espagne. Après une « fuite médiatique » sur 8TV (voir ici) l’information a été confirmée jeudi 5 mai par  les autorités sanitaires de la Catalogne. Elle est reprise et développée par El Pais : « Detectado el primer caso de microcefalia por zika en un feto en España ». La femme enceinte était de retour d’un voyage en Amérique latine où elle avait été infectée à la vois par les virus zika et de la dengue. Aucune autre information n’a (encore) été donnée.

Il s’agit du premier cas espagnol de microcéphalie associée au virus. Selon le ministre espagnol de la Santé le pays compterait aujourd’hui 105 personnes ayant été infectées – dont 13 femmes enceintes. Tous les cas ont été détectés chez des personnes originaires ou qui ont visité des pays touchés. « Il s’agit donc de cas importés » prend soin de souligner le ministère. Que se passera-t-il si une transmission autochtone devait être établie ?

Moustiques et Jeux Olympiques

Que se passera-t-il aux prochains Jeux Olympiques (5-21 août) de Rio ? Mercredi 4 mai le ministère brésilien de la santé a (officiellement) annoncé que 1 271 cas de nourrissons souffrant de microcéphalie avaient été recensés dans le pays depuis le début (officiel) de l’épidémie de virus Zika – en octobre 2015. Sur cette période, 57 bébés sont morts des suites de cette malformation. Cette nouvelle donne corrige les données précédentes, données controversées. Le dernier communiqué officiel des autorités (daté du 30 avril) faisait état de 3 580 cas suspects depuis le début des relevés à l’automne.

Des incertitudes demeurent, du fait notamment de l’absence de certitudes analytiques virologiques. Les autorités sanitaires brésiliennes font valoir « que la plupart des mères ayant accouché de bébés atteints ont été contaminées par le Zika ».  La sous-directrice générale de l’OMS, Marie-Paule Kieny, avait rapporté le 25 avril que l’épidémie était « clairement » en régression dans le pays probablement du fait de la fin de l’été austral et, corollaire, de la moindre prolifération du moustique-vecteur Aedes aegypti.

Vérité aux antipodes, erreur en deçà.  L’été approche à grand pas dans notre hémisphère. A Paris le Pr Benoît Vallet, Directeur Général de la Santé vient d’activer le dispositif de lutte contre Aedes albopictus (« moustique tigre ») et de surveillance des arboviroses.  C’est désormais, dans l’Hexagone, un rituel annuel du 1er mai au 30 novembre. On rappelle à cette occasion à la population que qu’Aedes albopictus est un moustique originaire d’Asie implanté depuis de nombreuses années dans les départements français de l’Océan Indien ; et qu’il est désormais implanté dans trente départements de la métropole, jusqu’en Isère, en Savoie et dans le Bas-Rhin.

Devenez entomologistes !

  « Cette situation est sous surveillance car ce moustique peut, dans certaines conditions, transmettre le virus de la dengue, du chikungunya et du zika, rappelle la Direction Générale de la Santé. Depuis 2010, des cas autochtones de dengue et de chikungunya ont été déclarés en France métropolitaine, dans les régions de Provence-Alpes-Côte d’Azur et de Midi-Pyrénées-LanguedocRoussillon. L’épidémie de zika qui sévit actuellement dans les Antilles françaises et en Guyane ainsi que les cas récents de dengue identifiés en Martinique augmentent les risques d’importation de ces maladies en métropole. »

Il existe désormais, à l’attention des citoyens, un site de signalement de la présence de moustiques 1. Il existe aussi  une application pour smartphone (« i Moustique ») qui permettra aux particuliers d’effectuer ces signalements : « Photographiez et signalez la présence de moustiques. Apprenez à les identifier et à connaître les bons gestes de prévention ».

Les moustiques pullulent. Il ne reste plus qu’à former des entomologistes, métier d’avenir mais profession en voie de disparition. Comment susciter des vocations ?

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6 000 euros: l’immigrant refuse finalement de vendre son rein à un prédateur espagnol

Bonjour

« Desarticulada una banda que trató de comprar un riñón a un inmigrante » ( El País). Nous sommes en mai 2015. Cinq personnes viennent d’être arrêtées à Tarragone en Espagne. Elles tentaient d’acheter un rein à un immigrant sans ressources. C’est une information donnée à la presse par la police espagnole. Ces personnes répondaient à la commande formulée par un criminel qui dirige une organisation spécialisée dans les cambriolages, à la recherche d’un rein pour son fils.

Coûte que coûte

La police espagnole a travaillé ici en collaboration avec ses homologues belge et allemande ainsi qu’avec la Organización Nacional de Trasplantes. L’acheteur était prêt à payer 6 000 euros. L’immigrant tenu pour être vendeur d’une partie de son corps faisait l’objet d’examens cliniques quand il a fait savoir qu’il ne marchait plus. Il a, de ce fait, « été séquestré, frappé et menacé de mort afin qu’il accepte de donner son organe coûte que coûte. L’opération de la police a conduit à des arrestations ainsi qu’au démantèlement de la bande de cambrioleurs.

Corps marchandé

L’Espagne est l’un des pays au monde qui a le plus fort taux de prélèvements d’organes destinés à être transplantés. La pauvreté est l’un des moteurs les plus puissants pour ce genre de commerce que l’éthique occidentale (et l’OMS) condamne. L’arrivée massive d’immigrants plus que démunis sur le sol du Vieux Continent et la pénurie chronique et croissante de reins transplantables ne peut que pousser à ce genre de marchandisation d’éléments du corps humain. Même en Espagne.

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Ebola : l’incroyable retard à la prise en charge, à Madrid, de l’aide-soignante Teresa Romero

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Nous venons de voir ce qu’il avait pu en être, à Dallas (Texas) avec le citoyen (libérien) Thomas Eric Duncan qui vient de mourir. On découvre ce qu’il en fut à Madrid (Espagne) avec l’aide-soignante (espagnole) Teresa Romero. Et, pour le dire simplement, cela n’a rien de rassurant. Qu’en sera-t-il, le moment venu, en France ?

Fâcheux mystère

La nouvelle affaire espagnole fait suite à la contamination (toujours inexpliquée) de l’aide-soignante ayant été brièvement en contact avec un missionnaire placé en isolement à l’hôpital Carlos III de Madrid. A ce mystère bien fâcheux pour l’établissement s’ajoutent les conditions de prise en charge de la malade. Elles sont rapportées aujourd’hui par le Dr Juan Manuel Parra. (Une version complémentaire est donnée sur Slate.fr)

Ce médecin urgentiste, 41 ans, a soigné Teresa Romero. A ce titre il vient d’être placé en observation. Il dénonce dans un rapport, révélé jeudi 9 octobre par deux journaux espagnols, les conditions de la prise en charge de l’aide-soignante. Ce document est publié par El Mundo et El Pais . Le médecin espagnol raconte comment  il s’est occupé (pendant presque seize heures) de l’aide-soignante potentiellement  contaminée.

Arrivée à l’aube

Selon lui, lorsque l’aide-soignante est arrivée, à l’aube, à l’hôpital d’Alcorcon près de Madrid, où elle vit, elle fut d’abord placée dans un box séparé du reste des patients : elle avait indiqué clairement qu’elle craignait d’être contaminée. Le Dr Parra prend son service vers 8 heures du matin. L’aide-soignante présente déjà de premiers symptômes évocateurs : éruptions cutanées sur le torse et l’aine, myalgies et toux.

Il est le seul avec des infirmiers à entrer dans la chambre avec des combinaisons de protection basique : une blouse imperméable, des doubles gants, une cagoule et un masque chirurgical.

Manches trop courtes

Au fil des heures l’état de santé de Teresa Romero se détériore brutalement. C’est alors par la presse que l’urgentiste apprend le résultat du test, positif pour Ebola, concernant sa patiente. Ce n’est que vers 17 heures qu’il se fait confirmer par une source plus officielle la  possibilité  qu’elle soit porteuse du virus. Il utilise alors un équipement « de meilleur niveau de protection fourni par l’hôpital ». « Les manches étaient trop courtes » écrit-il. Et la patiente « présente des diarrhées abondantes, des vomissements, des douleurs musculaires et une fièvre jusqu’à 38° ».

Et situation proprement ahurissante : en dépit de son état l’aide-soignante tente de protéger ceux qui la soignent.

Transfert à minuit

A partir de 18 heures le Dr Parra demande le transfert de sa malade  à l’hôpital Carlos-III – hôpital de référence où elle travaille (et où elle s’est contaminée). Il décrit un état clinique « instable, avec un haut risque de complication et la nécessité d’une attention permanente avec des diarrhées, expectorations, vomissements et la présence de menstruations de la patiente ». Toutefois, selon lui, ce n’est qu’à minuit qu’arrivera l’ambulance pour transporter Teresa Romero. Elle était arrivée à l’aube.

A l’heure où nous écrivons ces lignes (9 octobre) on apprend que son état « se dégrade»..

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Ebola : L’aide-soignante espagnole se serait contaminée avec un gant infecté

Bonjour

Il faudra bien expliquer l’incompréhensible. Comment Teresa Romero, 44 ans (quatorze ans d’expérience d’aide-soignante) a-t-elle pu contracter l’infection Ebola ? Quelle faute a-t-elle commise en présence du missionnaire Manuel Garcia Viejo, rapatrié le 22 septembre de Sierra Leone avant, trois jours plus tard, de mourir à l’hôpital madrilène  La Paz-Carlos III ?

Changer des langes

Il faut trouver une explication face à une opinion qui gronde. Le Dr German Ramirez, l’un des membres de l’équipe médicale qui a pris en charge Teresa Romero vient d’avancer une hypothèse : l’hypothèse du gant contaminé. Teresa Romero, est entrée en contact à deux reprises avec le missionnaire Manuel Garcia Viejo. C’est une quasi certitude. D’abord pour changer ses langes du patient. Ensuite pour prendre ses effets après sa mort.

Le Dr Ramirez a précisé qu’il avait revu avec Teresa Ramiro toute la séquence de ses entrées et sorties de la chambre du missionnaire placé en isolement. Dans un premier temps Mme Romero avait affirmé au journal El Mundo « n’avoir aucune idée » de la façon dont la contamination par Ebola avait pu se produire. Puis le 8 octobre elle a déclaré à El Pais que la contamination avait pu avoir lieu « en ôtant la combinaison ».

Métier à très haut risque

Pour le Dr Ramirez « il est possible que ce ne soit pas une erreur en tant que telle ». « Il peut s’agir tout simplement d’un accident et logiquement, probablement, elle ne pouvait pas s’en souvenir au départ en raison de son état de santé, ajoute-t-il. Il semble que ce soient les gants. Les gants ont touchés le visage. » Ce médecin parle en expliquant  que l’aide-soignante l’avait autorisé à rendre cette information publique.

Résumons : cette aide-soignante aurait contracté le virus Ebola en touchant son visage avec un gant potentiellement infecté au moment d’enlever son équipement de protection. Co-découvreur du virus Ebola en 1976 le Pr Peter Piot rappelle, sur la BBC, que la plus petite erreur gestuelle peut avoir des conséquences fatales. Face à Ebola, aide-soignante devient un métier à très, très haut risque.

A demain