Bonjour
C’est la nouvelle alcoolique du jour : les Français ont de plus en plus tendance à réduire leur fréquence de consommation de boissons alcooliques. Ils ne sont que 10% à boire de l’alcool quotidiennement. Ils étaient encore 14% il y a deux ans. C’est du moins ce que nous indique aujourd’hui le baromètre annuel des entreprises du secteur. Un baromètre bien fragile, sensible à bien des pressions, atmosphériques ou pas.
Un fois tous les trois mois
Ce baromètre a pour nom Entreprise & Prévention, une association qui regroupe vingt-quatre entreprises productrices de boissons alcooliques (1). Le temps a venir nous est donné via une enquête de l’IFOP réalisée auprès d’un échantillon représentatif de 965 personnes. On verra ici ce qu’il en est de ce baromètre.
Les consommateurs quotidiens de boissons alcoolisées seraient principalement des personnes âgées (21%) et des hommes (18%). La grande majorité des Français ne boiraient de l’alcool qu’une fois par semaine (34%) voire une fois par mois (35%). Et 11% des Français déclarent même en consommer encore moins souvent (tous les deux ou trois mois), voire pas du tout (19%).
Neknominations
Ceci ne surprend nullement Alexis Capitant, directeur général d’Entreprise & Prévention : « Les tendances observées depuis plusieurs années se confirment, les Français sont devenus des consommateurs occasionnels, qui boivent moins mais mieux en privilégiant la qualité à la quantité »
Comment avoir confiance dans le baromètre alors que les indicateurs de veille sanitaire nous parlent des orages à venir ? Comment interpréter les éclairs du binge drinking, la foudre des neknominations (qui inquiètent la police), sans parler des gros grêlons de l’alcoolo-tabagisme ?
Whiskies tourbés
Et à quoi servent donc, à proximité des canapés, les bars incorporés toujours bien achalandés ? Le comportement d’achat des ménages, analysé par KantarWorldPanel à partir d’un échantillon représentatif de 12 000 foyers, montre que la quasi-totalité de ces foyers (96 %) achètent des boissons alcooliques. Mais les quantités achetées auraient tendance à se réduire depuis plusieurs années (- 1,4 litre par an en moyenne depuis 2008). On observerait une certaine« montée en gamme » des achats alcoolique avec un « panier annuel global » en hausse de 24,5 euros depuis 2008. En hausse de 24,5 euros par rapport à quoi ? On ne nous le dit pas. Montée en gamme des whiskies tourbés ? Disparition programmée des distillats pour socio-économiquement défavorisés ? Légères ivresses de bien meilleure qualité ?
Hectopascals
« Cette diminution de la consommation individuelle d’alcool serait également observée lors des sorties dans les cafés, bars, restaurants et établissements de nuit » nous disent les traducteurs des hectopascals barométriques anticycloniques.
Avec un baromètre du Vieux Continent : selon un sondage mené auprès d’un échantillon représentatif de 14 000 personnes au niveau européen, les Français fréquentent moins ces lieux que les Espagnols ou les Anglais, avec 20 visites en moyenne en 2013 contre respectivement 48 et 33. Et lorsqu’ils y sont, moins d’un client français sur deux (44 %) commande de l’alcool, contre 55,2 % qui le font en Espagne et 48,3 % en Allemagne. Cette diminution de la consommation individuelle d’alcool serait également observée lors des sorties dans les cafés, bars, restaurants et établissements de nuit.
Dénis
Somme-nous ici dans un déni collectif et professionnel né de la somme des dénis et autres mensonges individuels ? Sans passer sa vie à enquêter sur le sujet un citoyen averti peut, gratuitement, observer ce qu’i en est des consommations aux terrasses des cafés. Chacun peut voir les achats de ses contemporains dans les chariots à roulettes des grandes surfaces.
Chacun peut observer les groupes d’adolescents qui, le soir venu achètent dans les petits supermarchés de quartier une ou deux bouteilles de mauvais alcool avec deux ou trois bouteilles de Coca-Cola. Et chacun peut écouter les adolescents et les jeunes adultes raconter l’essentiel des consommations de leurs soirées qui ne sont plus véritablement des parties de surprises.
Points de suspension
Au-delà de son baromètre officiel Entreprise & Prévention doit bien avoir vent de tout cela. Elle écrit ceci, en conclusion de son sondage barométrique : « La diminution régulière de la consommation quotidienne souligne la nécessité d’orienter les messages de prévention sur les repères de consommation occasionnelle, comme le seuil à ne pas dépasser de 4 unités d’alcool en une seule occasion, et sur les situations à risque (conduite, grossesse…).
On appréciera les points de suspension.
A demain
(1) Fondée en 1990, Entreprise & Prévention regroupe vingt-quatre entreprises du secteur des boissons alcoolisées en France. Neuf entreprises sont adhérentes en France métropolitaine : Bacardi-Martini, Brasseries Kronenbourg, Brown Forman, Heineken Entreprise, Société des Produits Marnier Lapostolle, Moët Hennessy Diageo, Pernod Ricard, Rémy Cointreau, William Grant & Sons. Neuf entreprises au sein d’Entreprise & Prévention Réunion : Brasseries de Bourbon, Diageo Réunion, Isautier, Mascarin, Rhums Réunion, Rennie & Thony, Sogim, Sorebra, Distillerie Chatel. Six entreprises au sein d’Entreprise & Prévention Nouvelle-Calédonie: Cocogé, Grande Brasserie de Nouvelle-Calédonie, Nouméa Gros, Rabot, Société Le Froid, Sullivan.