Après l’addictologie, le ministre Guillaume rattrapé par son appétit pour la tauromachie

Bonjour

Traitant de l’alcool il avait eu cette sortie mémorable : « Je veux lutter contre l’alcoolisme et lutter contre l’addictologie ». C’était en janvier dernier. Nous sommes en août et le ministre Guillaume fait à nouveau parler de lui. Didier Guillaume, 60  ans : ancien agent du Trésor Public, longtemps élu socialiste, annonce son abandon de la politique puis abandonne l’idée, devient le ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation d’Emmanuel Macron.

A la veille de la fête de l’Assomption il assistait à une corrida de Bayonne, aux côtés de sa collègue Jacqueline Gourault (Cohésion des territoires). Didier Guillaume, également en charge du « bien-être animal »… C’est une « affaire privée », a-t-il évacué deux jours plus tard  interrogé par la radio France Bleu Drôme Ardèche, d’où il est originaire. « Je ne réponds pas aux réseaux sociaux », a-t-il également lancé. Pourquoi ?

La polémique est née d’un cliché publié sur Twitter dès mercredi par un journaliste de Sud Ouest : on y voyait Didier Guillaume assis au premier rang au côté du maire UDI de Bayonne, Jean-René Etchegaray, et de Jacqueline Gourault, ministre MoDem. Six mille personnes étaient présentes ce soir-là dans les arènes de Bayonne pour acclamer Daniel Luque (considéré comme l’un des meilleurs matador encore en piste), et le voir affronter six taureaux. Ces derniers ont bien été mis à mort et le torero est reparti avec quatre oreilles et une queue. Applaudissements.

Au-delà du scandaleux et de l’écœurement!

« Aucune limite dans l’indécence », a commenté la Fondation Brigitte Bardot, qui rappelle que le ministre de l’Agriculture a fait de la « lutte contre la maltraitance animale » une priorité de son action. « C’est au-delà du scandaleux et de l’écœurement! », a sobrement ajouté l’association.

Sur Europe 1, le porte-parole de la Fondation, Christophe Marie, indique que Brigitte Bardot va demander à Edouard Philippe de retirer la responsabilité de la « protection animale » du maroquin de M. Guillaume. Même ligne pour le collectif L214, qui diffuse régulièrement des vidéos pour dénoncer la maltraitance animale. Sa co-fondatrice, Brigitte Gothière, a ainsi demandé sur BFMTV à ce que ce sujet soit « sorti du ministère de l’Agriculture ».

Plusieurs élus politiques condamnent également les deux ministres macronistes. A commencer par les écologistes : « Didier Guillaume ‘’s’en branle’ » de la souffrance animale! Lamentable! » a commenté, tout en nuances, l’eurodéputé EELV Yannick Jadot. « Le ministre ne peut pas défendre la cause animale et d’un autre côté s’asseoir dans une arène de corrida, se divertir face à la torture d’un être vivant, sensible et innocent », a ajouté sa collègue écologiste Karima Delli. « En assistant à une corrida, Didier Guillaume affiche son mépris pour la condition animale », a ajouté Manuel Bompard, chef des élus Insoumis au Parlement européen. 

 Invité de la matinale d’Europe 1, mercredi 23 janvier, Didier Guillaume déclarait: « une molécule de vin et une molécule de whisky ont le même degré d’alcool, sauf que moi je ne bois pas des molécules, je bois des verres. » Que voit précisément le ministre du « bien-être animal » quand il se régale de la mort du taureau ?

A demain @jynau

«PMA pour toutes», argent et politique : à quoi sert au juste le Comité national d’éthique ?

Bonjour

Les dés politiques sont jetés : l’actualité des prochains mois sera centrée sur les principales questions soulevées par la révision de la loi de bioéthique.  A commencer par celle de l’ouverture de la pratique de l’Insémination artificielle avec sperme de donneur (IAD) aux couples de femmes et aux femmes seules (« PMA pour toutes »). Il s’agissait, jusqu’ici, de conquérir un nouveau droit. Il s’agit désormais, sur les ondes des médias , de lutter contre une « dicrimination ».

Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé a, dimanche 16 juin, étrangement déclaré sur Europe 1 que l’affaire était en réalité, pour le gouvernement, moins idéologique que financière.  « Ce qui bloque aujourd’hui les couples de femmes qui veulent avoir des enfants, ce sont les moyens, fait valoir la ministre. L’idée c’est que celles qui n’ont pas les moyens d’aller en Belgique puissent en bénéficier [sic]. À titre personnel, je souhaite le remboursement (…) sinon, ce sera un droit formel mais pas un droit réel ». C’est donc cette option qui est retenue dans le texte de l’avant-projet de loi actuellement examiné par le Conseil d’État – et qui ne sera officiellement connu qu’à la fin juillet.

Rembourser ou pas via l’assurance maladie, une pratique qui n’est en rien une thérapeutique de la stérilité ne va pas de soi. Et la question ne manquera pas de faire débat. De ce point de vue il n’est pas sans intérêt de revenir à l’analyse que le Comité national d’éthique avait réalisée, à la demande du gouvernement – analyse rendue publique il y a très précisément deux ans dans son avis N° 126 : « Avis du CCNE sur les demandes sociétales de recours à l’assistance médicale à la procréation (AMP) ».

Au chapitre des « demandes d’AMP par des couples de femmes ou des femmes seules » (« insémination artificielle avec donneur (IAD), pour procréer sans partenaire masculin, en dehors de toute infécondité pathologique ») le Comité observait qu’elles s’inscrivaient « dans une revendication de liberté et d’égalité dans l’accès aux techniques d’AMP pour répondre à un désir d’enfant ». Il poursuivait en ces termes :

« Cette demande induit une disjonction évidente entre sexualité et procréation, entre procréation et filiation ; elle modifie profondément les relations de l’enfant à son environnement familial, en termes de repères familiaux, d’absence de père institutionnalisée ab initio. Elle fait émerger plusieurs interrogations sur la relation des enfants à leurs origines puisqu’en France le don est anonyme et gratuit ou sur le fait de grandir sans père. Aussi sur ces points, il serait pertinent de pouvoir s’appuyer sur des recherches fiables sur l’impact de cette situation, leur absence constitue un point de butée. »

Où sont, aujourd’hui, ces « recherches fiables » ?

Sans attendre le CCNE (« s’appuyant sur la reconnaissance de l’autonomie des femmes et la relation de l’enfant dans les nouvelles structures familiales ») proposait « d’autoriser l’ouverture de l’IAD à toutes les femmes ». Il considèrait alors que cette ouverture à des personnes « sans stérilité pathologique » pouvait se concevoir « pour pallier une souffrance induite par une infécondité résultant d’orientations personnelles ». Cette souffrance devait selon lui  « être prise en compte car le recours à une technique déjà autorisée par ailleurs n’implique pas de violence dans les relations entre les différents acteurs ».

Il suggérait toutefois  « que soient étudiées et définies des conditions d’accès et de faisabilité, notamment en distinguant la situation différente des couples de femmes et des femmes seules, en maintenant le principe actuel de gratuité des dons et en étudiant les modalités (remboursement refusé ou différencié) pour que l’assurance-maladie ne supporte pas les charges financières correspondantes ».

Où sont, aujourd’hui, ces « études » ?

Mieux encore le Comité soulignait que cette « demande d’ouverture » devait être « confrontée à la rareté actuelle des gamètes [spermatozoïdes] qui risque de provoquer un allongement des délais d’attente ou une rupture du principe de gratuité des dons ». « Cela pourrait ouvrir des perspectives de marchandisation des produits du corps humain et remettre en cause le système de santé français fondé sur des principes altruistes » mettait solennellement en garde le Comité d’éthique. Evoquant les inévitables sujet de conflits à venir (conséquences pour l’enfant, risque de marchandisation accrue, conditions de faisabilité) l’avis précisait qu’une partie minoritaire des membres du CCNE 1 souhaitait qu’en ce domaine le statu quo soit maintenu.

Où l’on voit que ce sujet majeur de bioéthique dépasse de beaucoup une simple question de « moyens » et de voyages en Belgique.

 A demain @jynau

1 Mmes et MM Christiane BASSET, Yves CHARPENEL, Sophie CROZIER, Pierre-Henri DUÉE, Anne DURANDY-TORRE, Jean-Noël FIESSINGER, Florence GRUAT, Jean-Pierre KAHANE, Frédérique KUTTENN, Dominique QUINIO, Jean-Louis VILDÉ.

Les révélations d’Agnès Buzyn : remboursement de la PMA, donneurs anonymes ou pas, etc.

Bonjour

Révision de la loi de bioéthique : après celle, récente, du calendrier politique par Edouard Philippe, une autre annonce vient d’être faite par Agnès Buzyn. La ministre des Solidarités et de la Santé, invitée du Grand rendez-vous, dimanche 16 juin sur Europe 1, a ainsi dévoilé un petit secret qui ne surprendra guère le citoyen qui s’intéresse aux relations entre ce gouvernement et le dossier dit de la « PMA pour toutes » – Agnès Buzyn avait tenu des propos équivalents il y a un an sur RTL. Puis en mars dernier elle avait semblé hésiter sur France Info.

« Ce qui bloque aujourd’hui les couples de femmes qui veulent avoir des enfants, ce sont les moyens, postule la ministre. L’idée c’est que celles qui n’ont pas les moyens d’aller en Belgique puissent en bénéficier [sic]. À titre personnel, je souhaite le remboursement (…) sinon, ce sera un droit formel mais pas un droit réel ». C’est donc cette option qui est retenue dans le texte de l’avant-projet de loi actuellement examiné par le Conseil d’État – et qui ne sera officiellement connu qu’à la fin juillet.

Autre révélation sur l’anonymat des donneurs de sperme. « Le don restera anonyme, mais nous souhaitons donner le droit aux enfants nés par PMA de pouvoir accéder à l’identité du donneur à l’âge de 18 ans, si celui-ci est d’accord, précise Agnès Buzyn. Ça permet de lever un secret de famille qui est parfois lourd à porter. On n’est pas forcément, quand on est donneur, dans le même état d’esprit quand on donne ses spermatozoïdes à 25 ans et quand, vingt ans plus tard, on est éventuellement sollicité, à 45 ou 50 ans ».

 Interrogée sur l’ampleur d’un éventuel mouvement d’opposition à cette loi, la ministre se montre confiante. « Il y aura la mobilisation de personnes très organisées autour de la ‘’Manif pour tous’’, mais je pense que ça n’aura pas le même écho, le même impact que le mariage pour tous ». Agnès Buzyn évoque ici « une loi de raison », pas « une loi de combat ». Ce qui ne manquera pas de choquer ceux qui, précisément, voient dans l’obtention de ces nouveaux droits la résultante d’un combat.

A demain @jynau

Liberté de la presse : pourquoi Nathalie Loiseau ne dit-elle pas quel est le prix de sa peau ?

Bonjour

Parfaitement à l’aise avec les médias le président de la République ne goûte guère les journalistes. Et les relations se tendent, en France, entre la presse et le pouvoir exécutif. L’actualité en témoigne à l’envi avec une liste qui ne cesse de s’allonger : ce sont désormais huit journalistes et le président du directoire du Monde qui ont été ou vont être convoqués par la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), pour des soupçons d’atteintes au secret de la défense nationale, dans le cadre de deux enquêtes distinctes portant, d’une part, sur les armes utilisées au Yémen, de l’autre, sur les ramifications de l’affaire Benalla. Il s’agit:

d’une journaliste de Quotidien,Valentine Oberti, qui a révélé mercredi 22 mai avoir été convoquée en février par les policiers de la sécurité intérieure pour une enquête sur les ventes d’armes françaises à l’Arabie saoudite. L’ingénieur du son et la journaliste reporter d’images qui travaillent avec elle avaient eux aussi été convoqués, les 11 et 15 avril ; 
 

de la journaliste du Monde Ariane Chemin, qui a révélé la funeste affaire Benalla. « Cette enquête vise (…) notamment nos informations sur le profil d’un sous-officier de l’armée de l’air, Chokri Wakrim, compagnon de l’ex-chef de la sécurité de Matignon, Marie-Elodie Poitout », explique le directeur de la rédaction, Luc Bronner, dans un éditorial du quotidien vespéral. Le président du directoire du Monde, Louis Dreyfus, a également été convoqué le 29 mai, dans les mêmes circonstances ;

de trois journalistes ayant enquêté sur l’exportation d’armes françaises utilisées au Yémen – les deux fondateurs du nouveau média en ligne Disclose, Mathias Destal et Geoffrey Livolsi, et un journaliste de Radio France, Benoît Collombat – qui ont été convoqués par les services secrets français, le 14 et 15 mai. Ils ont été entendus sous le régime de l’audition libre – un régime moins contraignant que celui de la garde à vue –, un mois après que le média Disclose a publié une enquête journalistique comportant des informations et documents « confidentiels défense » ;enfin, Michel Despratx, un collaborateur du site Disclose, sera, lui, entendu comme témoin pour ses révélations dans l’affaire de la vente d’armes françaises au Yémen. Ce sera le 28 mai.

Atteinte à la liberté de la presse

Le gouvernement français est désormais accusé de porter atteinte à la liberté de la presse. Dans une tribune, une quarantaine de rédactions ont dénoncé « fermement ces convocations qui ressemblent à de nouvelles tentatives d’intimidation de journalistes qui n’ont fait que leur travail : porter à la connaissance des citoyens des informations d’intérêt public. »

« Nous rappelons une nouvelle fois que la protection des sources a été consacrée par la Cour européenne des droits de l’homme comme « l’une des pierres angulaires de la liberté de la presse » et que le secret-défense ne saurait être opposé au droit à l’information, indispensable à un débat public digne de ce nom, ni servir d’épée de Damoclès pour dissuader les journalistes d’enquêter et de publier. »

En écho le Syndicat national des journalistes (SNJ) a estimé qu’« il se passe quelque chose de très malsain dans ce pays. Nous y voyons la volonté d’intimider les journalistes et leurs sources, et c’est totalement scandaleux ». Le SNJ-CGT dénonce un « nouveau coup de canif insupportable contre le journalisme et la liberté d’informer ». La CFDT-Journalistes évoque « une procédure dont le but inavoué est de faire taire les journalistes dans l’exercice de leur mission d’informer. »

Face à ces inquiétudes légitimes et à ses accusations, que dit le pouvoir exécutif ? La réponse est venue jeudi 23 mai sur Europe 1 sur les ondes de laquelle la porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye a pris la parole. Pour elle, « les journalistes sont des justiciables 1 comme les autres », et « il est normal qu’un Etat protège un certain nombre de données nécessaires à des activités de défense extérieure et militaires. »

Les sources et leur secret

« Pour le Yémen, il y a eu une note classée secret-défense qui s’est retrouvée dans la nature, ce n’est pas normal, a déclaré Mme Ndiaye. Il est normal que ce gouvernement, que l’Etat français s’interroge sur le fait qu’il puisse y avoir des fuites en son sein ».

« Aujourd’hui, c’est envers des journalistes, mais demain, est-ce que ce n’est pas envers une puissance étrangère ? Il faut qu’on soit capable d’aller chercher les causes. Ça ne remet pas en cause notre attention portée au secret des sources, c’est un droit important pour les journalistes, fondateur de leur activité, mais pour autant, l’Etat, c’est l’Etat. Et il y a des secrets qu’on doit aussi protéger. »

Et puis, pour compléter, Nathalie Loiseau, tête de liste LREM pour les européennes : elle a reconnu que la convocation d’une journaliste du Monde devant la DGSI, « ça fait beaucoup » – tout en se félicitant qu’« en France on a la chance d’être dans un Etat de droit ». « Il faut garder la tête froide, je ne sais pas l’objet de la convocation, a commenté Mme Loiseau sur France Inter. Ma conviction c’est qu’il y a un devoir de vigilance extrême sur la protection de la liberté de la presse, des sources, et ce danger existe aujourd’hui clairement en Europe, en Hongrie, en Pologne, où les extrémistes veulent la peau de la liberté de la presse ».

Mme Loiseau n’a malheureusement pas précisé quel était le prix de cette peau

A demain

@jynau

1 « Justiciable » : [En parlant d’une pers.] Qui est responsable devant la justice, qui a des comptes à rendre à la justice.  « Je ne m’opposerais pas (…) à ce qu’ils [les ambassadeursne devinssent justiciables qu’après une décision préalable d’une réunion des ministres et des hauts dignitaires de l’Empire » (Las Cases, Mémor. Ste-Hélène, t. 1, 1823, p. 812).

«Intrusion» ou «invention» : l’affaire de La Pitié-Salpêtrière rattrape Christophe Castaner

Bonsoir

C’est une affaire, celle « de l’intrusion de manifestants au sein de la Pitié-Salpêtrière »,  qui évolue à grande vitesse. On avait entendu la cacophonie de l’exécutif. Désormais, après la publication, jeudi 2 mai sur Facebook, d’une vidéo contredisant les propos de Christophe Castaner au sujet des incidents survenus à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière lors des manifestations du 1er-Mai à Paris, l’opposition a accusé le ministre de l’intérieur de mentir et a demandé sa démission.

A soir du 1er mai soir, le ministre de l’intérieur avait tweeté : « Ici, à la Pitié-Salpêtrière, on a attaqué un hôpital. On a agressé son personnel soignant. » Une trentaine de personnes avaient ensuite été placées en garde à vue à la suite de cette intrusion pour « attroupement en vue de commettre des dégradations ou des violences ». Avant d’être relâchées dans la soirée de ce 2 mai. L’enquête, ouverte par le parquet de Paris, se poursuit .

Or, d’après les différents témoignages recueillis notamment par Le Monde et Libération  l’intrusion d’une foule hétérogène dans la cour de l’hôpital, tout comme la tentative d’une partie des manifestants de pénétrer dans le service de réanimation, semble avant tout le fruit de la cohue liée à l’intervention des forces de l’ordre.

Ces dernières ont fait usage de gaz lacrymogène en quantité importante, entraînant un mouvement de foule. Plusieurs manifestants interrogés par Le Monde affirment dès lors être entrés non pas pour attaquer l’hôpital, mais pour se réfugier dans sa cour, ce qui est cohérent avec les images filmées depuis l’intérieur.

Lacrymogènes, enfumage et huile sur le feu

« M. Castaner est un menteur, en plus d’être un incompétent », a déclaré le chef de file des « insoumis », Jean-Luc Mélenchon, sur Franceinfo, accusant le ministre de l’intérieur d’avoir « inventé » l’attaque de l’hôpital parisien. Pour Adrien Quatennens, député La France insoumise du Nord, « après cet acte-là, M. Castaner ne peut pas rester et doit démissionner ». Et de poursuivre, au micro d’Europe 1 :

« C’est extrêmement grave : dans une démocratie, un ministre de l’intérieur qui instrumentalise à ce point la presse et fait porter le chapeau à un mouvement social (…) ne peut pas rester, ça a le mérite d’être clair. »

« S’il s’agit d’un mensonge délibéré dans le seul et unique but de disqualifier et salir une mobilisation sociale, le ministre de l’Intérieur doit être démis de ses fonctions sans délai », a aussi estimé Benoit Hamon (Génération·s), demandant que « le gouvernement produise les preuves de ce qu’il affirme ».

Pour le porte-parole des députés communistes, Sébastien Jumel, « M. Castaner se sert de la parole ministérielle comme d’un LBD [lanceur de balles de défense]. Mais par Pitié-Salpêtrière que le ministre garde son sang froid, tienne des propos mesurés sur des infos circonstanciées et arrête de dégoupiller des grenades verbales d’enfumage politique ! »

« Le ministre de l’Intérieur doit cesser de mettre de l’huile sur le feu et doit maintenant s’expliquer sur ses déclarations démenties par les faits », a écrit Bruno Retailleau, président du groupe Les Républicains au Sénat sur Twitter.

« Le gouvernement pris en flagrant délit de #FakeNews, assez de cette propagande ! Castaner a manipulé les faits pour discréditer ses opposants : il doit démissionner. Il y a suffisamment de violences à condamner pour ne pas en inventer », a jugé de son coté Nicolas Dupont-Aignan.

Prudence remarquable d’Agnès Buzyn

« Les détenteurs de la parole publique ne sont-ils pas tenus à plus de prudence et de sérieux dans leurs déclarations ? Ce gouvernement se discrédite chaque jour davantage », a déclaré Philippe Olivier, conseiller de Marine Le Pen et candidat sur la liste Rassemblement national aux élections européennes.

De son côté, Yannick Jadot, tête de liste d’Europe Ecologie-Les Verts aux européennes, a demandé une « commission d’enquête parlementaire » sur les incidents à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, accusant Christophe Castaner et le gouvernement de « souffler en permanence sur les braises de la violence ».

Dans ce contexte la ministre de la santé, Agnès Buzyn, a été interpellée au Sénat par le président du groupe socialiste, Patrick Kanner : « Faut-il suivre les conclusions de M. Castaner ou faut-il plutôt vous suivre, puisque vous avez été beaucoup plus prudente ? », a-t-il demandé. « Il y a une enquête en cours (…) et je pense qu’il y a eu différents temps », a répondu la ministre – Agnès Buzyn qui fait preuve ici d’une remarquable prudence.

A demain

@jynau

 

Des Gilets Jaunes ont bel et bien été «fichés» par l’AP-HP : qui va devoir démissionner ?

Bonjour

Le Canard enchaîné a fait mouche : à peine était-il, ce matin, dans les kiosques que la Direction générale de l’AP-HP prononçait un mea culpa – ce qui, en jargon administratif se dit : « SI-VIC : identification de cas d’utilisations inappropriées ». Où l’on voit, une nouvelle fois ,cette administration hospitalière tenter de rester dans le champ de l’entre-soi.

« Comment l’AP-HP pourra-t-elle encore continuer à nier ? » écrivions-nous il y a quelques heures  au sujet du fichage des Gilets Jaunes hospitalisés lors des manifestations dans la capitale – une affaire d’importance qui avait conduit, fait remarquable, le Conseil national de l’Ordre des médecins à saisir la CNIL.

La Direction générale de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) avait au départ rejeté les accusations de « fichage » avant que la Direction Générale de la Santé ne la désavoue, reconnaissant que le système avait « été activé »  sur l’ensemble du territoire national les 8 et 15 décembre 2018 – puis, ponctuellement selon la situation locale par les agences régionales de santé ou les SAMU.  »

Puis le  20 avril dernier la même direction générale se défendait via un communiqué de presse intitulé « Mise au point sur un prétendu ‘’fichage’’ de patients ». Or Le Canard enchaîné de ce 23 avril rapporte que la méthode a été à nouveau utilisée le samedi 20 avril lors de l’acte XXIII du mouvement des Gilets Jaunes. « Le 20 avril, en pleine manifestation, la directrice de cabinet du patron de l’AP-HP, Martin Hirsch, avait même relancé les responsables d’hôpitaux : ‘’Nous vous rappelons qu’il convient de renseigner SI-VIC (système d’information pour le suivi des victimes) pour la régulation sanitaire’’. »

« Chaussettes vertes à petits pois, manque orteil pied droit »… 

Dans un premier temps, la direction générale de l’AP-HP avait tenté de rassurer tout le monde en affirmant que les informations recueillies ne contenaient pas le nom des patients. Puis de reconnaître plus tard que les documents contiennent bien le nom, l’âge, le sexe et les adresses des manifestants. Toutefois, ‘’dans le respect du secret médical’’, il ne comporterait ‘’aucune donnée sur la nature des blessures prises en charge’’. Le Canard enchaîné d’aujourd’hui démontrait le contraire – preuve à l’appui avec des extraits du fameux fichier.

« En plus de données permettant d’identifier les personnes blessées dans les rassemblements, il contient parfois des détails de contexte : « arrivé avec pompiers, traumatisme main gauche » ; « tir flashball, plaie arcade » ; « intoxication lacrymogène, chaussettes vertes à petits pois, manque orteil pied droit »… Le fichier est en outre actualisé en temps réel et consultable par un grand nombre de services, bien au-delà du ministère de la Santé.

Extrait du premier mea culpa de l’administration de l’AP-HP (nous soulignons):

« Comme cela avait été fait dans d’autres circonstances où SI-VIC a été déclenché et comme dans d’autres hôpitaux, tous les services de l’AP-HP ayant reçu des victimes ont renseigné la base SI-VIC, ce qui a permis de pouvoir comptabiliser le nombre de blessés, de les localiser et de pouvoir mobiliser les services d’accueil d’urgences en fonction de l’afflux ou non de blessés. Au cours des premiers mois 2019, SI-VIC a été déclenché onze fois, trois fois pour des manifestations « gilets jaunes » et huit fois pour des incendies, explosions (rue de Trévise), intoxications dans une école (Créteil)…

« L’application SI-VIC ne comporte sur la page principale aucune ligne qui aurait pour objet ou pour effet de recueillir des informations médicales. Dans l’immense majorité des cas, les informations renseignées dans SI-VIC comportent comme commentaire le mode d’entrée (« amené par les pompiers ») ou le mode de sortie (« retour à domicile ») ou des éléments évitant les erreurs d’identification des victimes. Cependant, à la suite des investigations conduites pour vérifier certains éléments parus dans la presse, il apparaît que les onglets « commentaire » de l’application ont pu être utilisés pour mentionner des éléments de nature médicale. Cette pratique n’a été identifiée que de façon marginale ; à ce stade de nos investigations (trois services concernés un ou deux samedis) la case « commentaires » a été remplie de manière inappropriée pour rajouter des informations que les équipes pensaient utiles sur la nature de la blessure.

Cette situation peut s’expliquer par le fait que le « mémo SI-VIC », élaboré par l’AP-HP dans le souci de pouvoir disposer des informations permettant d’une part de dimensionner et d’orienter le patient vers les ressources spécialisées disponibles (ex : ophtalmologie, service de prise en charge des polytraumatisés), d’autre part, faisant suite au retour d’expérience de situations sanitaires graves, de faciliter l’identification des victimes, comporte un élément, sur la case commentaires « l’onglet commentaires permet d’ajouter toutes les informations utiles concernant la pathologie ou le type de blessure, l’intitulé exact du service… ». Cette précision, qui avait été mentionnée dans un souci de bonne prise en charge des patients, n’aurait pas dû apparaître ; au contraire, il aurait dû être rappelé qu’aucune information médicale ne devait être saisie. 1 »

Et ensuite ?

On explique au citoyen que des  instructions sont actuellement données pour corriger ces éléments. Et que l’ARS et l’AP-HP « diligentent une inspection pour objectiver de façon transparente l’utilisation qui a été faite de l’application dans ces dernières semaines ». Une transparence diligentée par les administrations directement concernées…

On attend désormais les explications que devra apporter, sur ce dossier, Agnès Buzyn. La ministre des Solidarités et de la Santé, « exaspérée » par le sujet,  avait affirmé, le 7 février dernier sur Europe 1 (à partir de 7’) : « Je ne demanderai jamais aux soignants de ficher les malades qui arrivent ! Connaître le nombre de personnes hospitalisées qui seraient soit des “gilets jaunes”, soit des forces de l’ordre, ça n’est pas comme ça que fonctionnent les hôpitaux, et heureusement ! ». Malheureusement il apparaît que parfois les choses sont un peu plus compliquées. Et inappropriées.

A demain

@jynau

1 François Crémieux, directeur général adjoint de l’AP-HP a, mercredi 24 avril, reconnu sur Europe 1 qu’il ne s’agissait pas de fautes individuelles mais bien d’une erreur de la direction générale.

Gilets Jaunes : aux urgences de l’AP-HP, les blessés sont-ils oui ou non secrètement fichés ?

Bonjour

17 avril 2019. C’est un papier-document bien mordant que publie le volatile satirique. Page 3, signé Jérôme Canard : « Les blouses blanches face à un drôle de fichage des gilets jaunes ». Où l’on apprend que les établissements de l’Assistance Publique- Hôpitaux de Paris (AP-HP) ont « noté avec zèle le nom des blessés de certaines manifs ».

Illustration : une note « urgent » de la Direction générale datée du samedi 16 mars dernier et signée de l’administrateur de garde comportant cette mention ainsi libellée : « Attention : il est indispensable de saisir les identités dans victimes en temps rééel dans SI-VIC » (sic) 1. A l’heure actuelle (17h15) elles ne sont pas toutes saisies. Merci d’avance ».

Copie de cette note, par mail, à Anne Rubinstein, directrice de cabinet de Martin Hirsch, directeur général ou encore Arnaud Poupard, son « conseiller pour la sécurité ».

Fichage politique

« Joint par CheckNews (Jacques Pezet, Libération) le Dr Gérald Kierzek dit avoir été témoin de ces consignes le samedi 13 avril à l’hôpital Hôtel-Dieu, à Paris: «J’étais de garde pour la première fois un samedi. J’ai entendu un coup de fil, où la cadre de santé, c’est-à-dire l’infirmière en chef, disait « comme d’habitude, vous appelez l’administrateur de garde quand c’est un gilet jaune ».» 

 « Le médecin s’est alors renseigné pour connaître les raisons de ce signalement et découvre que l’administrateur de garde doit entrer les données de ces patients ‘’dans le fichier SI-VIC, qui est un fichier de traçabilité en cas d’attentats ou d’événements graves.’’  CheckNews a pu constater que des gilets jaunes avaient été enregistrés dans ce fichier de gestion des victimes, le 22 mars 2019, au motif de l’événement ‘’violences urbaines’’Pour Gérald Kierzek, ce ‘fichage politique’’, débuté au mois de décembre, ‘’contrevient au code déontologique des soignants et vient rompre la base de la relation médecin-malade, qui est le secret professionnel’’. Il se défend de toute indignation à but politique, estimant qu’il trouverait tout aussi choquant qu’on enregistre des données personnelles, telles que la préférence sexuelle ou la couleur de peau des patients.

« Le 11 janvier 2019, Médiapart avait révélé que la Direction Générale de la Santé avait ‘’activé le dispositif SIVIC, normalement prévu pour les situations d’attentat afin d’assurer un suivi des victimes et aider à la recherche de personnes’’ lors des manifestations du 8 et 15 décembre, et notait déjà les réactions indignées de l’Association des médecins urgentistes de France (AMUF). Irrité, son porte-parole, le Dr Christian Prudhomme expliquait alors que ‘’le patient a le droit au secret médical. Sauf qu’il est référencé dans un fichier que le ministre de l’Intérieur aurait le droit de consulter !’’.

Exaspération et trombinoscope

« Selon un décret pris par le gouvernement le 9 mars 2018, «seuls les agents des agences régionales de santé, du ministère chargé de la santé et des ministères de l’intérieur, de la justice et des affaires étrangères nommément désignés et habilités à cet effet par leur directeur sont autorisés à accéder aux données mentionnées […] dans la stricte mesure où elles sont nécessaires à l’exercice des missions qui leur sont confiées.» En théorie, les agents du ministère de l’intérieur pourraient donc avoir accès aux données de ce «système d’information pour le suivi des victimes» (SIVIC). »

Contacté par CheckNews, Martin Hirsch, Directeur général de l’AP-HP s’étonne de la réaction du Dr Gérald Kierzek: «En fait, on a une procédure SIVIC qui est appliquée systématiquement pour les grands événements, où il peut y avoir un nombre important de blessés. On y enregistre aussi bien les manifestant que les forces de l’ordre, et comme ça, on peut faire remonter le nombre de blessés dans le cadre des manifestations, mais on ne transfère rien de nominatif. Je suis surpris qu’il ne découvre ça qu’aujourd’hui.»  Comme la Direction générale de la santé, il assure que les données personnelles ne sont pas transmises au ministère de l’intérieur, «sauf en cas d’attentats ou quand il y a l’accord de la famille».

Le Dr Kierzek est-il surpris de la surprise de son Directeur général ? Pour sa part, « exaspérée »  par ce sujet Agnès Buzyn avait affirmé, le 7 février dernier sur Europe 1, qu’un tel fichier relevait de la fiction. « Je ne demanderai jamais aux soignants de ficher les malades qui arrivent ! » avait-elle déclaré avec emphase.

Elle venait de recevoir le prix « trombinoscope » de la meilleure ministre de l’année. Pourquoi ? « Je fais de la politique à manière, a-t-elle répondu. Visiblement cela a été reconnu. »

A demain

@jynau

1 On verra ici ce qu’est le dossier en question : « Délibération n° 2016-208 du 7 juillet 2016 autorisant le ministère des affaires sociales et de la santé à mettre en œuvre un traitement automatisé de données à caractère personnel ayant pour finalité l’établissement d’une liste unique des victimes d’attentats pour l’information de leurs proches par la cellule interministérielle d’aide aux victimes, intitulé ‘’SIVIC’’ ».

Médicaments, supermarchés et concurrence : Agnès Buzyn confrontée à ses incohérences

Bonjour

Jadis la pilule en vente dans les Monoprix. Demain les médicaments sans ordonnance dans les Grandes Surfaces ? C’est une polémique débutante. Agnès Buzyn, s’est dite opposée, vendredi 5 avril, à l’autorisation donnée à la grande distribution de vendre ces médicaments disponibles en vente libre dans les pharmacies. Or cette autorisation est désormais ouvertement prônée par l’Autorité de la concurrence .

Hier cette dernière a recommandé d’élargir la vente de ces médicaments aux parapharmacies et à la grande distribution. Une telle évolution devrait avoir pour cadre des espaces dédiés au sein des supermarchés, avec la présence « obligatoire et continue d’un pharmacien »responsable, selon l’Autorité. Mais elle a aussi souligné que l’installation de ces nouveaux lieux de dispensation devrait être encadrée par les autorités pour ne pas affaiblir le maillage territorial des pharmacies – « l’une des craintes majeures des syndicats du secteur » rappelle l’AFP.

Le conseil national de l’Ordre national des pharmaciens ? Aucune surprise. Ce serait « casser un modèle qui garantit la sécurité sanitaire des patients ». Selon Carine Wolf-Thal, sa présidente, le système actuel permet à la population de « bénéficier, en tout point du territoire, d’un accès, dans un lieu de santé, à des médicaments et des actes de biologie médicale sûrs et de qualité. Veillons à ne pas mettre en péril une organisation qui a toujours su s’adapter et répondre aux attentes de la population ! Elle garantit une proximité dont les Français ont plus que jamais besoin pour répondre aux difficultés d’accès à l’offre de soins ».

Le concept sacralisé de la concurrence

Ce matin la ministre des Solidarités était invitée à s’exprimer au micro d’Europe 1 :

« Quand on parle de la désertification médicale, de l’abandon des territoires, fragiliser les petites pharmacies en zone rurale qui sont souvent le premier recours pour les personnes malades, je pense que ça serait une très mauvaise idée et un très mauvais signal (…) considérer que les médicaments, ça s’achète comme n’importe quel produit de consommation alimentaire, je trouve ça problématique (…) Il y a toujours des effets secondaires quand on prend des médicaments, ça nécessite toujours un conseil et les pharmaciens sont là pour donner des conseils, orienter les gens. »

Ce sont là des arguments que l’on peut entendre, même si l’expérience montre quotidiennement que les officines (avec leurs espaces dévorants dévolus à la publicité, à la cosmétologie et à la parapharmacie) sont loin de toujours « conseiller » et « orienter les gens ».

Mais la polémique ne se borne pas là. Dans son avis, l’Autorité de la concurrence a également recommandé d’assouplir les modalités de vente sur Internet de ces fameux médicaments sans ordonnance.  Agnès Buzyn :

« Nous y travaillons, parce qu’il y a une demande, un besoin, nous avons un groupe de travail qui se réunit avec les pharmaciens.Mais là encore, pour moi, l’enjeu, c’est la sécurité (…) Il  faut que les pharmaciens, notamment de proximité, puissent bénéficier de cette vente en ligne et que ça ne soit pas au détriment de ce maillage territorial extraordinaire et du travail que font les pharmaciens au quotidien pour la santé publique ».

Des « pharmaciens de proximité » bénéficiant des ventes en ligne sur la Toile ? Internet facilitant le maillage territorial…. On bute ici sur les limites du célèbre « en même temps ». Comment, idéologiquement, défendre avec la Macronie, le concept sacralisé de concurrence et, politiquement, maintenir le privilège commercial de la pharmacie d’officine ? Moins qu’un paradoxe c’est une incohérence.

A demain

@jynau

 

Christophe Castaner et le gendarme de l’Isère : questions sur la «vie privée» et ses frontières

Bonjour

Deux « faits divers »bien différents mais, sur le fond, une même question.

L’affaire parisienne de Christophe Castaner. Les magazines Voici et Closer viennent de publier (« exclusivité ») des clichés du ministre de l’Intérieur. Christophe Castaner « en train de danser avec une jeune femme non identifiée » dans un célèbre « restaurant-club » du VIIIe arrondissement de Paris – le Noto. « Il aurait enchaîné les shots de vodka et embrassait une inconnue ». « Pour oublier ». C’était dans la nuit du 9 au 10 mars, quelques heures après l’acte XVII des Gilets Jaunes.

Closer affirme que le ministre de l’Intérieur « n’était pas escorté par ses gardes du corps » – une information qui n’a pas été confirmée ; a supposer qu’elle puisse, un jour, l’être. La plupart responsables politiques se sont encore abstenus de commenter cette sortie. A l’exception du secrétaire général délégué des Républicains, Guillaume Larrivé, qui a ironisé sur Twitter : « Le vrai problème n’est pas que M. Castaner s’amuse en discothèque, mais qu’il occupe le bureau du ministre de l’intérieur, en France, en 2019. » A l’exception, aussi, de Benoît Hamon, ancien collègue socialiste de Christophe Castaner qui en a appelé, sur RTL, à « un peu de tenue ».

« Il s’agit de ma vie privée et de ma famille, qui peut être respectée. J’ai rejoint une soirée, dans un cadre totalement privé, entre 23h30 et deux heures du matin » a réagi le 14 mars Christophe Castaner dans les colonnes du Parisien. Et aussitôt, en écho, Edouard Philippe, Premier ministre, de déclarer sur Europe 1 : « Je n’ai aucun commentaire à faire sur la vie privée de Christophe Castaner, et le ministre de l’Intérieur a toute ma confiance ».

L’affaire du gendarme alcoolisé de Bourgoin-Jallieu (Isère). Le mardi 26 février, il n’était pas en service. Son véhicule a percuté en pleine vitesse par l’arrière celui d’un couple de retraités de 69 et 71 ans qui morts sur le coup. Agé de 35 ans ce gendarme a aussitôt été placé en garde à vue au commissariat de police de Bourgoin-Jallieu. Jugé en comparution immédiate le 28 février pour « homicide involontaire », aggravé de deux circonstances (« dont l’alcool – 2,54 grammes») il a été condamné à 18 mois de prison ferme avant d’être immédiatement incarcéré.

Pour les enfants des victimes, l’affaire n’est pas close. « On se bat pour que justice soit faite » a confié l’un d’eux à RTL. Ils pointent du doigt la responsabilité des autres gendarmes, présents au bar : « Ces gendarmes connaissent forcément, de par leur profession, les conséquences d’une telle alcoolisation. Pourtant, ils ont laissé repartir leur collègue au volant de sa puissante voiture » observent-ils dans Le Parisien.

« Ces personnes étaient des gendarmes, ils auraient dû être, mieux que quiconque, au courant de la gravité de la situation, de l’importance de retenir cette personne et du carnage que ça allait fatalement engendrer potentiellement pour les autres personnes qui étaient sur la route, expliquent-ils. Ils auraient dû essayer de retenir leur collègue. »

Jusqu’où remonter dans la chaîne des causalités et des conséquences alcooliques? La justice doit-elle être plus sévère, pour l’exemple, quand il s’agit de condamner un gendarme alcoolisé – alors même que ce dernier n’est pas en service et qu’il peut faire valoir qu’il s’agit de sa vie privée ? Quelles sont les frontières de cette dernière quand on est au service de l’Etat ? Et que reste-t-il de cette vie privée dès lorsqu’elle est, justice pénale ou pas, rendue publique ?

Paris et Bourgoin-Jallieu ; deux « faits divers » bien différents mais, sur le fond, une même question.

A demain

@jynau

 

 

Calvitie :  MSD va-t-il rembourser les effets secondaires sexuels et suicidaires du Propecia®

Bonjour

Justice sans limite. Après le Levothyrox®, voici le Propecia® (finastéride) du géant pharmaceutique MSD. Bien connu des médias Me Charles Joseph-Oudin lancera prochainement une procédure judiciaire. C’est une information d’Europe 1.

« Alors qu’il est toujours autorisé sur le marché français et européen, le Propecia – un médicament contre la calvitie aux nombreux effets indésirables – une dizaine de victimes lance une procédure judiciaire contre lui. Le laboratoire MSD, et les autorités de santé, ont tardé à informer les patients et les médecins des effets indésirables et notamment de leur caractère irréversible. 

« Le Propecia, un médicament contre la calvitie qui contient du finastéride, provoque des baisses de libido, des problèmes d’érection ou encore des idées suicidaires. Autant d’effets secondaires souvent irréversibles dont les patients sont peu, voire pas, informés. C’est pourquoi une dizaine d’hommes lancent une procédure judiciaire pour défaut d’information, selon les informations d’Europe . »

Chutes de cheveux des hommes

Une vieille histoire, déjà que le Propecia® présent depuis vingt ans sur le marché français. Données officielles :

« Propecia® est préconisé dans le traitement des stades peu évolués de la chute des cheveux chez l’homme âgé de 18 à 41 ans (connue sous le nom d’alopécie androgénétique). Si après avoir lu cette notice, vous avez des questions sur la chute des cheveux chez l’homme, demandez plus d’informations à votre médecin. L’alopécie, fréquente chez l’homme, serait due à une combinaison de facteurs génétiques et d’une hormone spécifique, appelée dihydrotestostérone (DHT). La DHT contribue à réduire la phase de repousse du cheveu et à diminuer son volume.

 « Au niveau du cuir chevelu, Propecia® diminue sensiblement le taux de DHT, en bloquant une enzyme (5-alpha réductase type II) qui transforme la testostérone en DHT. Seuls les hommes à des stades peu évolués de l’alopécie, sans calvitie complète, peuvent espérer une amélioration après traitement par Propecia®. Après cinq ans de traitement, la progression de la perte de cheveux s’est ralentie chez la plupart des patients et au moins la moitié d’entre eux a présenté une amélioration plus ou moins importante de la repousse des cheveux. »

L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) avait alerté sur d’éventuels effets indésirables en 2012 :

« Propecia® (finastéride 1mg) est commercialisé en France depuis 1999, ainsi que dans plusieurs pays européens. En France, la consommation est stable depuis plusieurs années à un peu moins de 30 000 unités par mois (une boîte équivalant en moyenne à un mois de traitement).

« Les effets indésirables sexuels (baisse de la libido, troubles de l’érection, troubles de l’éjaculation) ont été observés dans des études cliniques ayant conduit à l’autorisation de mise sur le marché (AMM), chez 1 à 10 patients pour 1000 patients traités. Ces effets sont considérés comme transitoires ou réversibles à l’arrêt du traitement et figurent dans le résumé des caractéristiques du produit et la notice initiale du médicament.

« Toutefois, des cas de troubles de l’érection persistant après l’arrêt du traitement et de cancer du sein chez l’homme ayant été rapportés au décours de la commercialisation et sans qu’un lien de cause à effet ait pu être établi, ces effets potentiels ont été ajoutés à ces documents d’information respectivement en 2009 et en 2010.   A ce jour, en France, seuls deux cas de troubles sexuels persistants après l’arrêt de Propecia® ont été enregistrés dans la base nationale de pharmacovigilance.

Piqûre de rappel de l’ANSM en 2017 (dépression et idées suicidaires). Puis en février 2019 avec une « lettre aux professionnels ».

« Propecia®, Chibro-Proscar®, génériques. Des effets indésirables, tels que des symptômes et des troubles psychiatriques ainsi que des troubles de la fonction sexuelle ont été signalés pendant et après l’utilisation du finastéride. Les patients doivent être informés du risque de survenue de ces troubles :

o TROUBLES PSYCHIATRIQUES : Anxiété, changements de l’humeur, notamment humeur dépressive, dépression et moins fréquemment des pensées suicidaires. L’apparition éventuelle de ces symptômes doit être surveillée étroitement.

o TROUBLES SEXUELS : Dysfonction sexuelle (y compris dysfonction érectile, troubles de l’éjaculation et diminution de la libido). Les troubles de la fonction sexuelle, dans certains cas, peuvent persister après l’arrêt du traitement. »

Représentants des patients concernés

Mieux encore l’ANSM annonçait « s’engager à mettre à la disposition des patients traités ou envisageant un traitement par finastéride un document d’information supplémentaire afin, notamment d’assurer un meilleur niveau d’information sur les bénéfices et les risques du finastéride ». « Ce document sera élaboré en collaboration avec les représentants de patients concernés » ajoutait-elle.

Trop ? Trop tard ? Ces informations, depuis sept ans, ont-elles été correctement diffusées auprès des premiers concernées ? Me Charles Joseph-Oudin annonce à la presse qu’il lancera prochainement une procédure judiciaire. La première audience aura lieu au mois d’avril au tribunal de Nanterre, dans les Hauts-de-Seine. « Nous considérons que le laboratoire MSD, et les autorités de santé, ont tardé à informer les patients, mais aussi les médecins, des effets indésirables et notamment de leur caractère irréversible, a-t-il déclaré sur Europe 1. Et c’est ce que nous démontrerons devant le juge. C’est ce qui doit appeler de leur part une indemnisation ».

Aucun montant n’a encore été évoqué. Me Joseph-Oudin aurait, sous le coude, soixante-dix dossiers. L’affaire Propecia® ne fait-elle que commencer ?

A demain