Bonjour
Acte V, scène 4. Elle a commencé par un communiqué de presse des Laboratoires Boiron daté du 17 mai 2019. Où l’on voit la firme confirmer des informations qui avaient fuité dans la presse (Libération, France Info) – peut-être avec l’aide d’Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé. Et où l’on voit, aussi, que l’ire lyonnaise demeure ; de même que les ronds de fumée peine voilés à destination de Bercy et du Palais de L’Elysée. Cela donne ceci :
« Les
laboratoires Boiron ont reçu le premier avis de la commission de la
transparence de la Haute autorité de santé (HAS), jeudi 16 mai 2019 en fin de
journée, soit bien après sa fuite dans un média. La diffusion par la presse de
ce premier avis, censé être confidentiel, cause un réel préjudice aux salariés,
clients et actionnaires du groupe.
Dans ce premier avis,
la commission de la transparence émet une recommandation défavorable au
maintien de la prise en charge par l’Assurance-maladie des médicaments
homéopathiques.
La procédure
d’évaluation en cours prévoit qu’après réception de ce premier avis, les
laboratoires Boiron disposent de 10 jours pour transmettre des commentaires
écrits ou pour demander une audition auprès de la HAS. Cette procédure
permettra aux laboratoires de présenter leurs arguments quant au bien-fondé de
la prise en charge des médicaments homéopathiques. A l’issue de cette procédure,
la HAS rendra un avis définitif qui sera transmis à la ministre des Solidarités
et de la santé pour décision.
74% des Français qui
ont recours aux médicaments homéopathiques les jugent efficaces et sont contre
l’arrêt de leur remboursement (Ipsos, octobre 2018). Un déremboursement
éventuel aurait des conséquences négatives pour les patients, pour les finances
publiques et pour l’économie française.
La France génère 60%
du chiffre d’affaires du groupe Boiron et un éventuel déremboursement
menacerait un millier d’emplois. La cotation des actions des laboratoires
Boiron, suspendue jeudi 16 mai 2019 en raison de la diffusion par un média
d’une information confidentielle, reprendra lundi 20 mai à l’ouverture de la
Bourse. »
Extraits précieux
Le même jour Le Monde (Paul Benkimoun) avait publié de précieux extraits du texte, en particulier l’analyse sur laquelle la HAS a fondé son avis. Cela donnait cela :
« Le
Monde a consulté le projet d’avis adopté le 15 mai
par la commission de la transparence(CT)
de la HAS (…) Dans ce document de 85 pages (plus une bonne
cinquantaine de pages d’annexes), la commission précise le contexte de
l’évaluation qui lui a été demandée. Celle-ci porte sur ‘’les
médicaments à nom commun (hors préparations magistrales) soumis à la procédure
d’enregistrement auprès de l’ANSM [Agence nationale de sécurité du
médicament] et bénéficiant actuellement d’une prise en charge à
30 % par l’Assurance-maladie’’. Après une présentation des
principes de l’homéopathie – dont elle rappelle qu’ils ‘’ne sont pas
soutenus par les données actuelles de la science’’ –, et une description
de son utilisation en France, la CT détaille les documents sur l’analyse
desquels elle fonde son avis.
‘’Près
de 1 000 études ont été identifiées et près de 300 ont été
sélectionnées sur la base de critères de sélection détaillés dans le
présent avis.’’ La commission a examiné ‘’23 revues
systématiques de la littérature et méta-analyses, 10 essais contrôlés
randomisés et 6 études concernant la consommation médicamenteuse, dans
25 indications ou symptômes.’’ Après analyse, la CT souligne qu’’’au
total aucune étude n’a démontré la supériorité en termes d’efficacité
(morbidité) de l’approche homéopathique par rapport à des traitements
conventionnels ou au placebo.’’
Dans la conclusion de son projet d’avis,
la commission met en balance les arguments. D’un côté, elle pointe l’absence de
gravité de certaines affections ou symptômes bénins, spontanément résolutifs,
pour lesquels ‘’le recours aux médicaments (dont l’homéopathie) n’est
pas nécessaire’’, ‘’l’absence de démonstration d’efficacité’’ des
médicaments homéopathiques, ‘’l’absence de démonstration de leur
impact sur la santé publique’’, ‘’l’absence de place définie dans
la stratégie thérapeutique’’. A l’inverse, elle reconnaît ‘’la
gravité et/ou l’impact potentiel sur la qualité de vie des patients de certains
symptômes/affections étudiés pour lesquels il existe un besoin médical à
disposer d’alternatives thérapeutiques ou de médecines complémentaires’’ et ‘’la
très bonne tolérance et le profil de sécurité des médicaments
homéopathiques.’’ »
C’est sur cette base que la CT donne « un avis défavorable au maintien de la prise en charge par l’Assurance-maladie des médicaments homéopathiques ». Or Agnès Buzyn a déjà (de manière étrangement apolitique) assuré qu’elle « suivrait l’avis de la Haute Autorité de Santé. Il restera à cette ministre d’expliquer aux citoyens pourquoi la collectivité ne devrait pas prendre en charge les possibles vertus du placebo et de ses effets. A quel titre et de quel droit ?
A
demain
@jynau