Qui abonnera à la «Revue du Praticien» le président du Comité économique du médicament ?

Bonjour

Nous évoquions il y a peu l’opacité antidémocratique du Comité économique du médicament – et la nécessité d’offrir une attachée de presse à son président. Complétons notre suggestion avec un abonnement à l’excellente Revue du Praticien. Dans sa dernière livraison (février 2017) elle consacre à la colère des professionnels de la cancérologie une tribune qui vaut d’être lue. Tribune signée de trois voix fédératrices 1. Au chapitre de la transparence on y lit ceci concernant la fixation des nouvelles et insupportablement coûteuses molécules anticancéreuses :

« L’élément notable de ce processus complexe est que l’étape pratique et ultime de fixation du prix se fait dans un face-à-face entre l’administration publique et l’industriel sous le sceau de l’opacité la plus totale : opacité sur les coûts de R&D du médicament candidat, opacité sur les termes de la négociation, et en l’absence de tout représentant des médecins et des patients.

« L’un des éléments clefs de toute réforme à venir est donc l’obtention de la part des industriels de la transparence sur les coûts de R&D des médicaments. Cette information permettrait de prendre en compte les investissements réels dans ce domaine, mais aussi la contribution d’un financement public lorsque celui-ci a participé à la recherche ou à des étapes du développement thérapeutique, et donc d’aboutir à la définition d’un prix juste et équitable.

Colère montante

« Il faut noter qu’une telle approche, loin d’être maximaliste, est actuellement sérieusement considérée par de nombreux États des États-Unis, certains proposant même de rendre publics les profits effectivement réalisés par les compagnies pharmaceutiques, pour rendre l’évaluation encore plus transparente. La transparence doit également concerner la procédure permettant de définir les prix en y associant des représentants des médecins et des patients. La tenue récente d’un débat public autour de cette question, le 28 janvier 2016 à l’institut Paoli-Calmettes de Marseille, a permis de constater l’intérêt d’une confrontation démocratique sur le sujet. »

On rappellera que plusieurs spécialistes en onco-hématologie ont, ces dernières années, collectivement exprimé leur crainte que les prix exorbitants des nouveaux anticancéreux puissent menacer l’accès universel aux progrès thérapeutiques émergents. En France, un appel de 110 professeurs des universités, cancérologues et hématologues, a été suivi par plusieurs pétitions et campagnes d’interpellation publique portées par la Ligue contre le cancer ou plus récemment (et de manière spectaculaire) Médecins du Monde.

La colère monte. Elle a, ici, de nobles raisons médicales et éthiques. Il serait bon qu’on le sache au sein bunker du Comité économique des produits de santé .  Il est grand temps d’offrir un abonnement à la Revue du Praticien à son président,  Maurice-Pierre Planel. Demain il sera trop tard.

A demain

1 « Médicaments du cancer : les raisons de la colère » Anthony Gonçalves, Dominique Maraninchi (Département d’oncologie médicale et centre de recherche sur le cancer, institut Paoli-Calmettes, Inserm U1068, CNRS 7258, Aix-Marseille Université, Marseille) Jean-Paul Vernant (Service d’hématologie clinique, hôpital Pitié-Salpêtrière, université Pierre-et-Marie-Curie, Paris –  jean-paul.vernant @aphp.fr). Revue du Praticien, février 2017.

L’auteur de ces lignes tient une chronique dans La Revue du Praticien Médecine Générale.

Méningocoque : deux morts à Dijon. Qui refusera la campagne de vaccination ?

 

Bonjour

Les anti-vaccinaux sont cois. Le site du célèbre Pr Henri Joyeux ne dit rien. Il y a pourtant urgence sur le front vaccinal, avec cette alerte lancée par l’Agence Régionale de Santé (ARS) Bourgogne-Franche-Comté : « Cas d’infection invasive à méningocoque à Dijon : Les professionnels de santé appelés à la vigilance ». Alerte suivie d’une décision : après les décès de deux étudiantes par méningite à l’Université de Dijon, une campagne de vaccination sera lancée dès la rentrée de janvier 2017 à destination des élèves de la faculté de droit.

Les deux décès sont intervenus entre fin octobre et fin décembre. Un troisième cas n’a pas connu d’évolution fatale. Trois cas isolés mais une même souche de méningocoque W relativement rare en France pour laquelle il existe un vaccin, d’où la décision de l’Agence Régionale de Santé de lancer une campagne de vaccination auprès les étudiants dès la rentrée

Mourir avant le diagnostic

Dès le premier signalement, et pour chacun des cas d’infection, l’ARS explique avoir  procédé à la recherche des personnes ayant eu des contacts proches et répétés avec les étudiants – et ce pour leur recommander une prophylaxie antibiotique et une vaccination. Les professionnels de santé ont « été informés de cette situation, en vue d’une vigilance particulière vis-à-vis de patients présentant des signes évocateurs de la maladie » précise encore l’ARS.

Le méningocoque est un germe très fragile qui peut toutefois se transmettre via des gouttelettes de mucus lors de contacts assez proches. Malgré l’efficacité remarquable des antibiothérapies adaptées en cas de méningite il subsiste une mortalité de 10 à 15 %  due surtout aux méningococcémies fulminantes. La mort peut survenir en quelques heures, avant même que le diagnostic et le traitement puissent intervenir. C’est dire la nécessité et l’intérêt des campagnes de vaccination. Celle qui va commencer dans les premiers jours de janvier ne sera pas obligatoire 1. Quelles consignes donneront les militants anti-vaccinaux ? S’inquièteront-ils de la nature des adjuvants ? Quelles seront les recommandations du Pr Joyeux ?

A demain

1 Sur le thème de l’obligation vaccinale, de la médecine générale et du carnet de vaccination électronique lire l’entretien avec le Dr Luc Martinez, vice-président de la Société française de médecine générale dans le dernier numéro de La Revue du Praticien Médecine Générale (décembre 2016). Lire aussi : « Vaccinations : les préconisations de la SFMG ».

Alzheimer, ANSM, antibiotiques : abécédaire et dernier inventaire de Marisol Touraine

 

Bonjour

Entretien à la Prévert de Marisol Touraine dans Le Monde daté du 18 novembre  (Laetitia Clavreul, Paul Benkimoun, François Béguin). Comme un inventaire avant soldes. Essai ce classement.

Affaire de l’essai clinique de Rennes et des possibles manquements de l’ANSM. Il s’agit là d’un abcès loin d’être vidé. Et ce d’autant que la direction de l’Agence de sécurité du médicament cherche à faire pression sur des journalistes du Figaro et de Mediapart. Marisol Touraine est-elle en phase avec l’Agence dont elle a la tutelle ? Le sujet n’est malheureusement pas abordé directement dans Le Monde. « Des articles ont mis en cause l’autorisation de l’essai de Rennes par l’ANSM, l’accusant aussi d’avoir édulcoré sa responsabilité. Y-a-t-il eu des manquements de l’ANSM ? » demande le quotidien du soir à la ministre de la Santé. Réponse :

« L’Inspection générale des affaires sociales (IGAS), que j’ai missionnée après le drame, a pointé des failles du côté de l’industriel BIAL, du centre de recherche BIOTRIAL, mais pas de manquements du côté de l’ANSM, seulement des besoins de réorganisation. Des médias (sic) ont fait état de ce que la direction de l’ANSM aurait transmis une version modifiée des conclusions de ses experts. J’ai donc demandé à l’IGAS si le contenu de ces articles remettait en cause les conclusions de son rapport. Elle m’a dit que non. Je ne dispose donc d’aucun élément qui mette en cause l’ANSM. La procédure judiciaire engagée sera amenée à se prononcer le cas échéant sur les responsabilités des uns et des autres. »

Une semaine d’antibiotiques, pas plus

On n’en saura pas plus. La ministre est plus prolixe sur la question des antibiotiques dont la prescription, en France, est redevenue de plus en plus automatique. Elle annonce « un encadrement des prescriptions ». En pratique ne première prescription ne pourra être faite pour une durée supérieure à sept jours (alors qu’en moyenne  ces prescription sont aujourd’hui de dix jours en médecine de ville). Elle annonce aussi un renforcement dépistage sur l’origine virale ou bactérienne des angines par des tests rapides. Un dépistage qui, Brexit ou pas, avance à grande vitesse dans les pharmacies britanniques comme nous l’apprend la BBC: “Sore throat sufferers urged to take pharmacy test.

Rien, ou presque, sur le vertigineux dossier des prix croissants, inaccessibles, de certains médicaments (« Avec le président de la République, je porte cette question au niveau international ») à l’exception d’une pique politique (« Mais quand je vois que tous les candidats à la primaire de la droite annoncent des déremboursements massifs et qu’au Parlement, la droite a systématiquement voté contre les dispositifs de régulation des coûts que j’ai proposés, je me demande où l’on va »).

Hypothèse et question absurdes

Où allons-nous avec sa décision unilatérale est inexpliquée de ne pas dérembourser les médicaments anti-Alzheimer, que la Haute Autorité de santé a jugé inefficaces et dangereux ? Que répond-elle aux lanceurs d’alerte comme Irène Frachon (elle-a-révélé-le-scandale-du-Mediator) l’accusent  de céder au poids du lobby pharmaceutique ?

« C’est absurde ! Jamais un médicament n’a été déremboursé du jour au lendemain. Le faire plongerait les patients et leur famille dans le désarroi, alors que la qualité de la prise en charge est très variable d’un lieu à l’autre. C’est un sujet médical et humain. Je ne serai pas la ministre qui prendra une décision pour des raisons économiques. Aucun pays n’a déremboursé. Si la France décidait de le faire, elle serait la première. Ma décision est transitoire et doit permettre de faire évoluer en douceur notre système de prise en charge. J’ai demandé au professeur Michel Clanet de me faire une proposition en ce sens avant fin janvier. »

Le précédent Xavier Bertrand

Faut-il laisser sur le marché des médicaments inefficaces et dangereux au motif que les retirer « plongerait les et leur famille dans le désarroi » ? Est-ce là une politique ? Si l’on osait on dirait que la réponse de la ministre de la Santé mériterait d’être complétée, débattue, critiquée.

Sur ce sujet on lui conseillerait volontiers de ce reporter à l’éditorial (Bernard Gavid) de la dernière livraison de la Revue du Praticien Médecine Générale. Il rappelle que ces médicaments coûtent chaque années 180 millions d’euros à la solidarité nationale. Il s’interroge : « Comment comprendre les réticences de nos ministre de droite [Xavier Bertrand] ou de gauche [Marisol Touraine] à suivre les recommandations de la HAS ? Les intérêts des lobbies seraient-ils plus importants que ceux des patients ? ».

Nous savons désormais, grâce au Monde, que pour Marisol Touraine cette question est absurde. Nous la reposerons.

A demain

 

Tabac et cigarette électronique : soignants et usagers vont-ils enfin jouer un rôle politique ?

 

Bonjour

Ainsi donc, dans l’attente d’un diagnostic,  nous serions déjà dans « l’après-Hollande ». Une occasion supplémentaire pour s’intéresser de près à l’appel de « La Revue du Praticien » 1 : l’Appel des 100 000 contre le tabagisme . Cent mille soignants (médecins,  pharmaciens, chirurgiens-dentistes, infirmières,  kinésithérapeutes, sages-femmes) appelés à signer un « appel » contre le tabac. Ou plus précisément un appel pour dénoncer l’inaction coupable des responsables politiques contre une addiction hautement fiscalisée responsable, chaque année, de près de 80 000 morts prématurées.

« Chaque jour les soignants sont confrontés aux méfaits du tabagisme et motivent leurs patients pour qu’ils cessent de fumer. Mais ce combat est inégal et se heurte à l’immense lobbying des industriels du tabac et des buralistes.

« L’ambition de cet Appel, non partisan, porté par  »l’Alliance contre le tabac » est d’interpeller tous les élus et les futurs élus, tous les responsables politiques sur ce drame majeur, afin que cette lutte connaisse un tournant significatif. »

Hollande F. 4 février 2014

Objectif ? « Une signature massive par des milliers de médecins, de pharmaciens, de chirurgiens-dentistes, d’infirmières, de kinésithérapeutes, de sages-femmes… constituerait un événement majeur pour la santé publique. Son impact médiatique pourrait être important et empêcher que les responsables politiques ne se dérobent, comme ils le font actuellement, et comme ils l’ont fait en 2012. »

Dans la Revue du Praticien notre confrère Jean Deleuze bat le tambour éditorial sanitaire. Il dit, à sa manière, le scandale que constitue l’inaction politique française qui ne fait rien contre un Etat dealer. Le constat est encore plus accablant quand le chef de l’Etat prend lui-même l’engagement solennel de mettre en place un « Programme national de réduction du tabagisme » (François Hollande, 4 février 2014) et que rien ne suit : plus de deux ans plus tard la France fume comme si rien n’avait jamais été solennellement dit.

Sujet politique

De nombreuses personnalités ont accepté de signer de même que les sept conseils de l’Ordre des professions de santé ainsi que de nombreuses structures et sociétés savantes. Il n’est pas impossible d’imaginer que le cap des 100 000 puisse être rapidement atteint, voire dépassé.  On observera alors le poids de cette initiative sur les candidats à l’élection présidentielle. De ce point de vue on regrettera que l’énergie déployée ici ne soit pas associée à celle, considérable, fournie par les innombrables vapoteurs 2 et de nombreux addictologues  au service d’une politique de réduction des risques tabagiques.

Grâce à la cigarette électronique la lutte contre l’addiction au tabac est désormais un véritable et grand sujet politique. Pour l’heure la question est simple : des centaines de milliers de soignants et d’usagers peuvent-ils peser sur les politiques ?

A demain

1 L’auteur de ces lignes tient une chronique dans « La Revue du Praticien- Médecine Générale »

2 « L’Appel des 100 000 » doit être rapproché de « L’Appel des 1 000 vapoteurs » : « Cigarette électronique : Marisol Touraine soudain mise en demeure par mille et un vapoteurs » (Journalisme et santé publique. 19 janvier 2016)

 

 

Chômage: plus de 10 000 morts chaque année. Une « fatigue de la compassion » tend à s’installer

Bonjour

Le chômage de masse installé dans le temps est une plaie. C’est aussi, comme chacun peut le mesurer, un sujet éminemment politique. C’est aussi un sujet dont le politique, impuissant, ne veut généralement pas mesurer l’impact en termes de santé publique. Le chômage frappe, en France, 10,6 % de la population active – 5,4 millions de personnes alternent chômage et emploi précaire. Que faire ? Les gauches s’entre-déchirent. Les droites prospèrent.

Fatigues

Institution très largement décriée pour son inutilité le Conseil économique social et environnemental (CESE) vient, sur ce thème, de faire œuvre utile. Trente-cinq ans, jour pour jour, après l’accession de la gauche au pouvoir (sous la Vème République) il s’est penché sur ce traumatisme : « Séance du 10 mai 2016 : L’impact du chômage sur les personnes et leur entourage ».

« Le chômage a un impact social majeur. Il augmente le risque de séparation et d’isolement social, il impacte l’avenir scolaire des enfants (Insee, 2004), il retarde la venue d’un premier enfant (INED, 2011). Non seulement ces conséquences sont ignorées mais « une certaine fatigue de la compassion » s’exprime. Ainsi, 60 % des personnes interrogées estiment que les chômeurs pourraient trouver un emploi s’ils le voulaient vraiment (…). Pourtant, notre pays voit arriver chaque année 150 000 actifs s de plus sur le marché du travail sans que notre pays puisse créer un nombre suffisant d’emplois. »

Traumatisme et précarité

Pour le CESE entre 10 000 et 14 000 morts prématurées sont, chaque année, imputables au chômage du fait de l’augmentation de l’incidence de certaines pathologies, maladies cardiovasculaires et cancers notamment. Il multiplie le risque d’épisode dépressif. Une progression de 10 % du taux de chômage se traduit par une augmentation de 1,5 % du taux de suicide.  Au traumatisme de la perte d’emploi s’ajoute la précarité financière. Les indemnisations jouent certes un rôle d’amortisseur de la baisse des revenus mais 40 % des chômeurs ne les perçoivent pas, ou mal, et la moitié d’entre eux touchent moins de 500 euros par mois (chiffres 2014).  Et le « non-recours » à leurs droits aux prestations sociales n’est pas rare chez les personnes les plus défavorisées.

Le CESE propose, entre autres mesures, la réalisation d’un bilan médical dès le premier entretien avec le conseiller Pôle emploi. Il recommande que soient diligentées des études épidémiologiques ciblées sur la population des chômeurs pour mieux cerner les facteurs de risque et l’instauration de dispositifs d’écoute offrant aux personnes inscrites à Pôle emploi la possibilité d’accéder à un soutien psychologique. Il insiste sur la nécessité de renforcer le caractère global de l’accompagnement des personnes en situation de chômage. Comment ne pas voir que la « vie de famille » est l’une des « victimes collatérales » du chômage ?

Combien de suicides ?

Le CESE ne dit rien sur la lutte à mener contre la « fatigue de la compassion » qui commence à s’installer. Depuis quand ? Comment ? Pourquoi ? A qui profite-t-elle ?

On peut, en écho, lire l’entretien accordé à La Revue du Praticien Médecine Générale (Serge Canasse) par Michel Debout, psychiatre 1. Deux extraits :

« L’Observatoire national du suicide va commencer une enquête  en se fondant sur les données des instituts de médecine légale. À partir du suivi d’une cohorte de 6 000 volontaires pendant 7 ans, Pierre Meneton, chercheur à l’Inserm, estime que le nombre de décès liés au chômage est de 15 000 à 20 000 par an, de causes très variées. Ce sont des personnes jeunes, de moins de 65 ans. »

« Avec mon expérience de médecin légiste je suis frappé par les similitudes qui existent entre l’état de certains chômeurs et celui des victimes de traumatismes (accident, agression, deuil, etc.), dont on sait depuis longtemps que leur santé est fragilisée. Elles peuvent évoluer vers une récupération totale ou des troubles psycho-relationnels ou même un syndrome dépressif. C’est ce qui se passe au moment de la perte d’emploi qui pour moi induit un psycho-traumatisme du même ordre. »

A demain

1 Le Pr Michel Debout est l’auteur de l’ouvrage « Le traumatisme du chômage Alerte sur la santé de cinq millions de personnes » (Editions de l’Atelier, 2015)

EPO : craintes de rationnement – angoisses des insuffisants rénaux

Bonjour

C’est une histoire de malades et d’argent. Une histoire de notre temps. Avec, comme moteur un médicament devenu le triste synonyme de vélo : l’EPO.

Résumons-là.  C’est une histoire qui touche beaucoup de monde. On compte, en France, entre 1,7 et 2,5 millions de personnes en insuffisance rénale chronique et environ 70.000 personnes atteintes d’insuffisance rénale chronique terminale.

Près de la moitié d’entre elles sont traitées par greffe rénale et 53% par dialyse. La moyenne d’âge des patients traités par dialyse est aujourd’hui de 71 ans. Avec le vieillissement de la population, le nombre de patients augmente, en France, de 3% par an.

Fin de la liste « en sus »

A l’exception de la greffe d’organe l’EPO (25 marques et présentations) est le meilleur traitement actuel de l’anémie induite par l’insuffisance rénale, tout particulièrement  dans sa phase terminale.  Son coût très élevé avaient naturellement conduit les autorités à l’inscrire sur la célèbre « liste en sus » (1), précieuse niche où l’on place les spécialités pharmaceutiques prises en charge « en sus » des prestations hospitalières communes.

Toujours aussi efficace ce médicament prend de l’âge. Un quart de siècle. Avec le temps les coûts de sa recherche et de son développement ont été amplement rentabilisés. Ses coûts ont baissé (ou devraient le faire) et pour les pouvoirs publics l’heure était venue de retirer l’EPO de la liste « en sus » et de la réintégrer dans le « forfait dialyse ».

L’affaire était pilotée depuis plusieurs mois par la direction générale de l’offre de soins (DGOS) en concertation avec les fédérations hospitalières, les associations de patients et les représentants des professionnels de santé et du médicament.

Oppositions des néphrologues libéraux

En pratique rien de bien compliqué : on sort l’EPO de la liste des produits facturés en sus et on l’intègre au « forfait dialyse » . Le tout avec une augmentation du prix de séance annoncée comme devant être de 26 euros. Révélé fin 2013 ce projet a suscité de nombreuses réactions – les oppositions les plus fortes forte étant exprimées par les fédérations d’établissements et le Syndicat des néphrologues libéraux (SNL). Ce dernier dénonçait alors « un projet dangereux et injuste » et estimait que cette mesure « restreindrait l’accès à ce traitement pour des raisons financières ». Il dénonçait « un blocage dogmatique de la part du ministère de la Santé et de ses services».

Négociations et marges de manœuvre

Les critiques étaient similaires de la part de la Fédération de l’hospitalisation privée de la dialyse (FHP-Dialyse) et de la  Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne privés à but non lucratif (Fehap). Il faut ici savoir (ce n’est pas un détail)  que les négociations entre ces établissements et les fournisseurs sur le prix de l’EPO offraient certaines marges de manœuvre.

A l’opposé les associations de malades (la Fédération nationale d’aide aux insuffisants rénaux et Renaloo) n’étaient pas a priori contre cette évolution dès lors que le supplément de 26 euros semblait compenser le coût réel de l’EPO ; et que la puissance publique assurait  un suivi de son utilisation (notamment pour en garantir le bon usage et prévenir les risques de contournement-détournement  en ville).

Pas de menaces

« Les médecins craignent des baisses de financement mais avec le supplément de 26 euros, le financement n’est pas menacé » estimait encore, début 2014, Yvanie Caillé, directrice et fondatrice de Renaloo.

Malheureusement, tout est aujourd’hui remis en question avec la publication définitive de la mesure et des tarifs réels de compensation du prix de l’EPO : des 26 euros on est tombé  à des montants très inférieurs  de 7 à 15 euros. Ce qui laisse tout redouter quant au juste accès à l’EPO.

 Démocratie sanitaire

Les associations de malades sont à la fois inquiètes et dépitées : Sylvie Mercier Présidente de Renaloo et Jean–‐Pierre Lacroix Président de la FNAIR (Fédération nationale d’aide aux insuffisants rénaux) viennent d’écrire à Jean Debeaupuis, directeur général de la DGOS.

On lira ici leur courrier daté du 21 mars. Et on percevra entre ces lignes le désarroi, l’angoisse du possible rationnement. Et, plus encore peut-être, le dépit de ne pas avoir été considérés comme des interlocuteurs adultes. On peut entendre là une forme de colère – une colère assez paradoxale à l’époque de la démocratie sanitaire.

A demain

(1)     Les médicaments administrés durant un séjour hospitalier sont généralement financés dans le cadre des tarifs des prestations d’hospitalisation. Toutefois un  dispositif dérogatoire (article L162-22-7 du code de la sécurité sociale) est prévu. Son objet est de garantir le financement des produits particulièrement onéreux. Ces spécialités sont inscrites sur la liste dite « liste des médicaments facturables en sus des prestations d’hospitalisation ».  D’où l’expression « liste en sus ».

Ce texte reprend des éléments de notre tribune « l’EPO des hémodialysés : à quel prix ? » publié dans le dernier numéro (Tome 28, n°918, mars 2014) de La Revue du Praticien-Médecine Générale.

Blog ou pas le « je » et le « moi » sont haïssables

 

Retrouvez ce blog sera sur

https://jeanyvesnau.com/

 

Nous achevons (aujourd’hui 31 décembre 2013) une étape de notre aventure-blog. Une autre s’ouvre sur un autre hébergeur.

Une occasion pour  quelques réflexions et répondre à une question existentielle : le moi est-il haïssable sur la Toile ?

Dans un récent numéro de La Revue du Praticien Médecine Générale (1) Philippe Eveillard tranche dans le vif du style : il faut dire « je » et le dire dès la première phrase d’un post. Si nous tombions dans le piège qu’il nous tend nous nous précipiterions pour dire non. Nous ne traiterons pas ici de ses innombrables biais : Jaddo est « la référence », « je » est un « gage d’authenticité, un « gage de spontanéité », un « gage de sensibilité », voire un gage « d’aisance dans l’écriture ». On réclame ici des points de suspension. Se méfier comme de l’aisance comme de la peste. Rien de pire que la fausse aisance.

Faire ultra-court

Spécialiste et critique de l’art du blog l’auteur  grave les tables de la Toile : un post (un billet) doit être  court (jamais plus de « trois écrans d’ordinateur »). Pourquoi ? Pour ne pas solliciter « excessivement » l’ascenseur. La encore le bât blesse et le syllogisme jésuitique pointe à l’horizon du clavier : il faut un « je » parce qu’il faut être court car sinon on est trop long et dans ce cas on passe de la « confidence » à la « confession ». Qui comme chacun sait à Rome ne saurait se faire en public.

Chasser le commentaire

La vérité est peut-être plus profonde. A peine cachée derrière une lapalissade. Ecrire pour autrui c’est écrire pour être lu. A fortiori sur la Toile et, en l’espèce, au sein du « Club des médecins blogueurs » de Dominique Dupagne. Ecrire pour être lu c’est d’une manière ou d’une autre tenter de créer de l’émotion.

Les blogs sont jeunes,  tous les styles sont permis et la notoriété se mesure à l’aune des « commentaires ». Du nombre des commentaires, plus ou moins «modérés ». On y voit l’intérêt de la provocation, de l’accusation, de la diatribe, du scandale. On y entend gronder les foules.

Une confidence

Les blogs et la Toile babillaient hier encore. Aussi le « Je », dans sa prime jeunesse, sort grandi de l’usage que l’on fait de lui. Bien sûr cela ne durera pas. Le « On », dans sa maturité, peut le laisser s’ébattre. Les «Nous » le regardent. Les « Ils », déjà, plissent leurs sourcils. Quant au « Tu », la nostalgie est déjà là, camarade.

Nous atteignons les limites du post. Confidence publique :

« J’ai commencé ce blog en août 2011 . Près de 30 mois et plus de 550 textes plus tard je quitte l’hébergement offert par l’Ecole des hautes études de la santé publique (Ehesp). Antoine Flahault, alors directeur de ce bien bel établissement, m’y avait proposé de tenter l’aventure du blog. Qu’il en soit remercié.

J’ai tenté, j’ai essuyé quelques difficultés, je n’ai jamais regretté. En parallèle de cette autre aventure, collective, qu’est Slate.fr et l’écriture pour un « pure player », j’ai beaucoup appris. 

Les temps changent et c’est tant mieux. Je poursuis aujourd’hui l’aventure sur un autre site avec toujours le même et passionnant objectif ; croiser le « journalisme » et la « santé publique ». Continuer à faire le passeur entre ces mille et un mondes. Et, bien immodestement, tenter de nous aider à nous comprendre. Bien immodestement aussi tenter de mettre le clavier là où l’on pense devoir le placer. Sans aucune méchanceté,  mais au risque de ne pas flatter.  

2014

En un mot: continuer à remplir une tâche qui fait que le « Je » est, sinon « haïssable » (comme il l’était jadis au sein des colonnes du Monde), du moins à proscrire. Un pronom trop personnel qui dessert son utilisateur –  à s’interdire autant que faire se peut. Nous nous en expliquerons peut être sous peu. Par exemple en 2014. Bonne année à celles et  ceux qui lisent ces lignes et à ceux et celles qui leurs sont proches.

(1) « Confidences sur blog ». Revue des blogs. La Revue du Praticien Médecine Générale (Tome 27, n° 911, décembre 2013)

 

Il suffit d’un verre (pour le sperme) et d’une paille (pour le faire)

Faut-il  toujours lire le prolixe Jacques Testart ? Biologiste de la reproduction, ce « pionnier » de « l’assistance médicale à la procréation » est  une personnalité atypique. Il aime et sait provoquer, ce qui n’est pas si fréquent dans ce milieu. Depuis un quart de siècle il mène quelques combats qui lui sont chers. Mais il le fait souvent en boucle, de manière un peu répétitive;  sans   faire l’économie, parfois, de quelques contradictions.

 Il en va différemment avec sa tribune publiée aujourd’hui dans Le Monde. Elle apporte quelques lumières dans la confusion grandissante et peu réjouissante à laquelle donne lieu l’examen par l’Assemblée nationale du projet de loi sur le « mariage pour tous ».

AMP ou PMA ? L’affaire est plus importante que pourrait le laisser penser l’inversion des trois majuscules. « En 1994, lors de la réflexion pour élaborer les premières lois de bioéthique, le législateur avait choisi de substituer le terme AMP (assistance médicale à la procréation) à PMA (procréation médicalement assistée), utilisé jusque-là, se souvient Jacques Testart.  Son argument était que la procréation ne constitue pas le sujet médical, la médecine ne pouvant qu’aider à réaliser cette fonction. Jamais autant qu’aujourd’hui politiques et médias n’ont adopté PMA plutôt qu’AMP, comme si on avançait dans une ère où s’affirme la fabrication technique de l’enfant. »

Est-ce avancer dans une nouvelle ère que de voir ainsi embouchées, quinze années plus tard, les trompettes de la PMA de préférence à l’usage qui était fait de l’AMP ? D’autres pourraient aussi, sans hésitation, parler de régression. Là où l’on peut rejoindre sans difficultés Jacques Testart c’est dans ce qui se joue aujourd’hui en France : les nouvelles demandes de procréation adressées à la biomédecine émanant de personnes généralement potentiellement fertiles.

Monopole des blouses blanches

« Tout a commencé dans les années 1970, quand la congélation du sperme a permis le développement de l’insémination artificielle avec donneur (IAD), les gamètes masculins pouvant alors voyager dans l’espace et dans le temps, une condition nécessaire à des prescriptions éthiques (anonymisation) et sanitaires (sélection et attribution des donneurs) » souligne Jacques Testart dans Le Monde. La France fêtera-t-elle cette année le quarantième anniversaire des Cecos créés par le Pr Georges David ? On sait ce qui suivit via la Fédération des Cecos : l’IAD devint  une pratique thérapeutique de professionnels spécialisés, « créant les banques de sperme, décidant des principes éthiques, gérant cette activité dans toutes ses dimensions, psychologiques, économiques, biologiques ».

Celui que l’on continue parfois à présenter comme le « père » du premier enfant né après conception in vivo ajoute que les partenaires de l’IAD (donneurs et couples receveurs) « se trouvaient dûment canalisés, analysés, évalués, appariés, archivés, remboursés ». « Nul ne protesta contre cette prise de pouvoir parce qu’il est plus confortable et rassurant d’être pris en charge par des spécialistes qualifiés que de trouver soi-même une solution ». Ce qui n’est sans doute ni faux ni en soi condamnable. Mais Jacques Testart (qui nourrit de nombreux griefs à l’endroit des docteurs en médecine) va plus loin : « et surtout parce que le nouveau monopole des blouses blanches sur la procréation masquait une évidence : nul besoin du corps médical pour déposer du sperme dans un vagin ! ». En blouse blanche ou pas, un biologiste de la reproduction aurait-il pu ?

Le nouveau droit réclamé (non pas à la PMA mais à l’IAD) par les couples composés de deux femmes vient réveiller cette vérité étrangement oubliée. Un sujet aujourd’hui très rarement évoqué et que nous avons pour notre part abordé sur Slate.fr et dans La Revue du Praticien Médecine Générale (N°894-janvier 2013).

Asepsie sexuelle exigée

Jacques Testart : « Depuis toujours, des couples infertiles ont recouru à l’insémination naturelle par un donneur ou un proche mais, si l’asepsie sexuelle est exigée, elle est à la portée de tous. Un réceptacle (un verre) pour  recueillir le sperme, puis une paille ou un cathéter pour l’administrer  si possible avec  l’aide  d’un spéculum, voilà à quoi peut se résumer la « technologie » ». On ajoutera que le franchissement du col n’est pas indispensable pas plus que le spéculum. On ajoutera aussi qu’aucun médecin concerné ne soutient qu’il réalise  ici une prouesse technologique.

Pourquoi dès lors faire appel au « pouvoir médical » ? Pour ne pas prendre les responsabilités qui s’imposent quant au choix du donneur, proche ou anonyme. Pour bénéficier aussi des garanties médicales (infectieuses et génétiques) et d’un profil phénotypique.

« Quand le débat actuel semble placer la GPA (gestation pour autrui) hors de la PMA, il oublie que la GPA implique l’IAD pratiquée sur la future mère porteuse, ajoute Jacques Testart. Dans les deux revendications (l’IAD pour les homosexuelles et la GPA pour les homosexuels) le geste technique est le même et peut se  de l’assistance médicale. » Ce qui là encore est pratiquement inaudible dans le concert médiatique actuel.

Le rêve des pèlerins

Jacques Testart peut aujourd’hui se prévaloir d’une forme de cohérence : s’agissant de couples hétérosexuels, il n’avait jamais approuvé la médicalisation de l’IAD et il est aujourd’hui  fermement opposé à la GPA, se rangeant dans cette fraction de la gauche souvent éloignée des extrêmes qui voit là une forme moderne d’esclavage. Mais comme souvent avec lui les choses sont toujours un peu plus complexes. Et le co-père d’Amandine, 31 ans,  rêve éveillé  à une situation politico-sociale différente (encore largement utopique reconnaît-il) où la convivialité prendrait une place réelle, le geste solidaire d’un ami pour aider un couple de femmes en offrant sa semence, ou même celui d’une sœur ou d’une amie pour prêter son utérus à un couple d’hommes ne le « choquant pas ».

Pour l’heure une chose est certaine : à écouter la qualité des débats en cours à l’Assemblée nationale point n’est besoin d’être devin pour savoir qu’il est encore loin, le paradis de l’Utopie. Mais il est vrai que les utopistes situent généralement leurs écrits dans des lieux imaginaires. Souvent  pour éviter la censure politique ou religieuse. C’est un pays lointain et mythique. C’est une  île inconnue par exemple ou encore une montagne. Généralement  inaccessible, mais qui a le mérite de faire rêver les pèlerins. Et les lecteurs.

 

 

 

Location des utérus humains : un petit problème pratique

La gestation pour autrui envahit les ondes, agite les corps et les consciences sur fond de médicalisation de la procréation. On trouvera ici quelques éléments permettant, notamment, de  prendre date.    

Dignité ? Comme on pouvait le prévoir les débats parlementaires autour du projet de loi sur le « mariage pour tous » n’ont pu toujours la respecter. Tout avait été mis en place pour que le droit à la  PMA ne viennent pas perturber ces débats. Las, il fallut compter avec la désormais fameuse « circulaire Taubira ». Le président  François Hollande vient de déclarer que cette  circulaire sur la nationalité des enfants nés de « mère porteuse » ne constitue « en aucun cas une reconnaissance de la gestation pour autrui », à laquelle il se déclare « formellement opposé ».

Cette lettre, adressée au chef de file des députés UMP Christian Jacob, a été lue par ce dernier dans l’hémicycle au quatrième jour de l’examen du projet de loi sur le mariage homosexuel. Christian Jacob, qui avait écrit lui-même  au chef de l’État contre la circulaire Taubira, n’a pas résisté à souligner que l’hostilité de François Hollande à la GPA, réaffirmée dans cette lettre était opposée à la position de certains de ses ministres. L’UMP reproche à trois ministres, Najat Vallaud-Belkacem (porte-parole du gouvernement), Alain Vidalies (Relations avec le Parlement) et Aurélie Filippetti (Culture) de s’être déclarés en 2010, dans une tribune libre au Monde, favorables à la GPA.

Dans son courrier, que l’Agence France-Presse (AFP) a obtenu, François Hollande souligne que la circulaire de la ministre de la Justice n’a pas « pour objet d’autoriser l’octroi de la nationalité à un enfant qui ne la posséderait pas déjà, ni celui de modifier la filiation de l’enfant » et « ne change rien au droit des personnes ». En effet, rappelle-t-il, « l’article 18 du Code civil dispose qu’est français l’enfant dont l’un des parents au moins est français ». « Il ne s’agit donc en aucun cas d’une reconnaissance de la gestation pour autrui à laquelle, je suis comme vous le savez, formellement opposé. Permettre à des enfants d’attester de leur nationalité est conforme à leur intérêt supérieur auquel je suis, tout comme vous, attaché », poursuit le président de la République. Celui-ci « souhaite que le débat sur le projet de loi sur l’ouverture du mariage de même sexe, qui ne contient aucune disposition sur la procréation médicalement assistée ou sur la gestation pour autrui, puisse se dérouler dans des conditions de respect mutuel conformes à nos traditions parlementaires ».

Selon Christian Jacob, le fait d’avoir des ministres qui, officiellement prennent un avis contraire à celui du président de la République,  justifie que le Premier ministre « vienne dans l’hémicycle et s’explique sur le sujet ».

Problème :

Etant entendu que

1 Le Code civil français va reconnaître de facto la pratique de la gestation pour autrui quand elle est mise en œuvre à l’étranger.

2 Le président de la République est désormais ouvertement personnellement opposé à la pratique de la gestation pour autrui.

3 Trois des ministres du gouvernement actuel ont déclaré publiquement (il y a deux ans) qu’ils étaient favorables à cette pratique.

La grossesse pour autrui va-t-elle être prochainement autorisée en France ? Dans quels délais ?

On pourra autant que de besoin consulter les documents suivants :

1 « Mères porteuses: une polémique en gestation au PS »

Deux camps s’affrontent désormais violemment au sein du Parti socialiste à propos de la légalisation de la «gestation pour autrui». http://www.slate.fr/story/30969/meres-porteuses-ps-contradictions

 2 « PMA, GPA, IAD… Les poupées russes de la procréation »

Permettre aux couples homosexuels de procréer provoquerait un séisme dans l’architecture de la législation française de bioéthique. Les couples homosexuels étant stériles par nature, une avancée médicale vient aujourd’hui nourrir un différend éthique majeur. Etat des lieux. http://www.slate.fr/story/67813/pma-gpa-iad-les-poupees-russes-de-la-procreation

 3 « 19 décembre 2012 : la guerre utérine est déclarée »

L’abcès est enfin collecté. Nous entrons dans un épisode qui sera douloureux. Après le noble combat des idées on en vient au corps à corps. Et à la seule question qui vaille : la femme a-t-elle ou pas l’usufruit de son utérus ? C’est là une question très clivante, pour ne pas dire assez déchirante. http://blog.ehesp.fr/mediasantepublique/2012/12/19/19-decembre-2012-la-guerre-uterine-est-declaree/

4 « « Mariage pour tous » : pourquoi PMA ne vaut pas »

Dans tous les débats et les médias ce sigle est devenu le synonyme d’un nouveau droit. Mais c’est aussi une forme d’abus de langage. Mieux vaudrait, pour mieux se comprendre, que l’on sépare la « PMA »: en « IAD » d’une part, en « GPA » de l’autre. Voici pourquoihttp://blog.ehesp.fr/mediasantepublique/2013/01/26/mariage-pour-tous-pourquoi-pma-ne-vaut-pas/

5 Procréation Massivement Assistée (tribune parue dans La Revue du Praticien Médecine Générale N°894-janvier 2013 )

Le début de l’année 2013 voit se développer en France une controverse de grande ampleur. Elle trouve son origine dans un engagement (numéroté 31) pris par François Hollande lors de la campagne présidentielle : « J’ouvrirai le droit au mariage et à l’adoption aux couples homosexuels ». Cet engagement a rapidement été traduit sous l’appellation  du droit « mariage pour tous », ce droit incluant dans le projet de loi le droit à l’adoption d’enfants par les couples d’hommes ou de femmes unis par les liens du mariage civil. L’engagement du président de la République était tenu.

 Au risque de choquer

Mais on a aussi rapidement vu se greffer une autre revendication : au-delà de celle sur l’adoption, le droit à la procréation de ces mêmes couples. Et la « PMA » est aujourd’hui devenu le synonyme de ce nouveau droit. Ou plus précisément le droit revendiqué pour les couples mariés constitués de deux femmes homosexuelles de pouvoir procréer. On observera que ce sigle avait progressivement été abandonné au profit de celui d’AMP. Ainsi à partir de la fin des années 1990 on ne parla plus d’assistance médicale à la procréation  mais bien de procréation médicalement assistée. Le nouvel usage fait aujourd’hui du sigle PMA n’est pas un simple retour nostalgique au siècle dernier. Il marque au contraire un saut pratique et conceptuel. Il ne s’agit plus de la prise en charge médicale et biologique réservée, comme le veut la loi de bioéthique, aux couples constitués souffrant de stérilité  et « composés d’un homme et d’une femme en âge de procréer ». Il s’agirait désormais aussi de pallier, par les mêmes techniques, la stérilité de couples constitués de deux femmes mariées en âge de procréer.

On observera, au risque de choquer, que la question de la médicalisation de ce nouveau droit n’est jamais ou presque soulevée dans ce débat. On gomme ainsi collectivement une réalité : les couples de femmes pourraient concevoir sans avoir recours à la pratique de l’insémination artificielle avec le sperme d’un donneur (IAD) ; une pratique codifiée, pratiquée et développée depuis trente ans, en France, au sein de la fédération des Cecos. On ajoutera que la pratique de l’IAD impose, toujours du fait de la loi de bioéthique, l’anonymat du donneur. Or une majorité des militants du droit à la PMA pour les femmes homosexuelles revendiquent également  le droit à la connaissance de ses origines biologiques.

Les femmes ayant voulu, obtenu la conception après IAD et élevé ces enfants ne pourront en effet pas masquer  que la conception n’a pu être obtenue que grâce à un « tiers donneur ». Et ce qui pouvait être non dit dans le cas des couples hétérosexuels ne pourra plus, ici, être masqué. C’est ainsi que les partisans du droit à la connaissance des origines trouvent dans ici une nouvelle opportunité pour développer et défendre leurs arguments en faveur de la transparence biologique. Qui l’emportera ?

Les milieux fémininistes  profondément divisés

Autoriser par la loi les couples de femmes à avoir accès à l’IAD soulève également, en cascade, plusieurs autres questions majeures. L’une d’elles concerne la prise en charge ou non par la collectivité des coûts inhérents à cette pratique ; soit environ un millier d’euros la tentative. La même logique développée au non du principe d’égalité conduit également à poser  la question de « grossesse pour autrui » (GPA), une pratique aujourd’hui interdite en France mais autorisée ou tolérée dans plusieurs pays plus ou moins éloignés. Quels arguments trouvera-t-on pour autoriser en la légalisant la pratique de la PMA pour les femmes et refuser la GPA pour permettre aux couples d’hommes homosexuels de procréer ? Pourquoi les impossibilités biologiques de la différence des genres seraient-elles dépassées dans un cas et pas dans l’autre ?

La perspective de la légalisation de la GPA divise profondément  les milieux féministes français. Certaines y voient une extension naturelle du droit de la femme à disposer de son corps. D’autres y perçoivent une nouvelle forme, insupportable, d’esclavage. Aucun consensus ne semble pouvoir être trouvé sur ce thème. Le projet de loi sur le mariage pour tous sera examiné à partir de la fin janvier. Après différentes tentatives visant à inclure ces nouveaux droits le gouvernement est revenu au seul engagement du candidat Hollande. La question de la PMA et de la GPA reviendra en mars dans le cadre d’un nouveau projet de loi « sur la famille ». Tout est ainsi en place pour voir perdurer les polémiques autour de l’extension médicalisée d’un droit à procréer. J.-YN.