Comment peut-on oser offrir aux marchands du temple l’avenir de l’Hôtel-Dieu de Paris ?

Bonjour

Voilà dans Le Monde, une question plus que dérangeante : « Hôtel-Dieu de Paris : ‘’Pourquoi céder un tel patrimoine pour des activités commerciales ?’’ ». C’est une tribune qui fait honneur à ses signataires 1. Ces derniers réclament un débat, en toute transparence : débattre collectivement du destin de ce site hors du commun, dont l’histoire se confond avec celle de Notre-Dame, son immense voisine, aujourd’hui à ciel ouvert.

«  La décision de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) de confier la rénovation de l’Hôtel-Dieu, sur l’île de la Cité, à l’opérateur immobilier Novaxia est stupéfiante, écrivent-ils. Autant parce qu’il s’agit de céder un patrimoine exceptionnel à une société commerciale que par la date de cette annonce, mi-mai, un mois à peine après l’incendie de Notre-Dame. Une précipitation étonnante alors que l’émotion est immense et que le débat est vif sur la restauration du monument. C’est un débat dont on ne peut dissocier le devenir de l’Hôtel-Dieu, tant celui-ci, qui jouxte la cathédrale, sur un site classé au patrimoine mondial de l’Unesco, lui est lié par plus de treize siècles d’histoire. Pourquoi cette hâte alors que le sujet est d’une importance nationale ? »

L’Hôtel-Dieu, bien qu’il conserve une belle activité médicale d’hôpital de jour et de consultations, est en grande partie inoccupé. Ce sont ainsi près de 20 000 mètres carrés que récupère Novaxia pour un bail de quatre-vingts ans moyennant 144 millions d’euros, une somme qui semble faible au regard du prix du mètre carré dans ce secteur, même si de gros travaux de rénovation sont nécessaires.

Impensable mais vrai : Novaxia y développera des commerces et des cafés, un restaurant gastronomique, de la restauration rapide, des espaces de coworking, un « accélérateur de design en santé », des laboratoires de biotechnologies et des entreprises du secteur médical, et, pour faire bonne figure, une crèche, une résidence étudiante et une maison du handicap. Escomptant de fructueuses retombées commerciales, son président, Joaquim Azan, exultait : « Nous sommes fous de joie, c’est un lieu mythique, le berceau de Paris ». Voici la suite de cette tribune :

« Le lieu qu’on lui cède est assurément mythique : « Trésor de misère et de charité », l’histoire de l’Hôtel-Dieu se confond avec celle de Notre-Dame. Fondé en 651 par l’évêque parisien Saint Landry, c’est le plus ancien hôpital encore en activité dans le monde. D’innombrables malades y ont été soignés. Les rois de France l’ont doté, des générations de Parisiens lui ont consacré des legs. Témoin majeur de l’histoire de France, il a toujours accueilli des malades même sous la Terreur, pendant la Commune ou lors de la libération de Paris.

« Son incendie, le 30 décembre 1772, suscita un choc considérable, lointain écho du drame récent de Notre-Dame, qui, symboliquement, relie les deux édifices, d’autant que ce sont les internes de l’Hôtel-Dieu qui, en 1871, sauvèrent la cathédrale d’un début d’incendie allumé par des communards ! Sa reconstruction à son emplacement actuel fit l’objet d’intenses débats architecturaux qui influencèrent la construction de nombreux hôpitaux dans toute l’Europe. L’Hôtel-Dieu, dont des figures majeures de la médecine ont fréquenté les salles, témoigne autant de l’histoire médicale et scientifique que de celle de la solidarité.

« Pourquoi céder un tel patrimoine pour y voir se développer des activités commerciales qui n’ont rien à y faire et qui abondent déjà à Paris ? De même que Notre-Dame n’est pas la possession exclusive des catholiques, l’Hôtel-Dieu n’appartient pas seulement à l’AP-HP, mais à toute la nation. Aussi son destin doit-il être débattu en toute transparence. L’aspect résidentiel ne pourrait-il pas être étendu à certaines catégories du personnel hospitalier ? A la place des commerces, pourquoi ne pas créer un équivalent de ce qu’est le Musée de l’Œuvre Notre-Dame à Strasbourg ou, comme le proposait le Centre des monuments nationaux (CMN), un espace d’accueil pour expliquer aux visiteurs le monument le plus fréquenté d’Europe ?

« Le CMN est légitime pour investir cet espace, comme il le fait dans l’hôtel de la Marine, place de la Concorde, un temps menacé par un projet commercial semblable. Et l’AP-HP a aussi un superbe musée qu’elle a abusivement fermé en 2012, alors que des milliers de visiteurs, dont beaucoup d’étudiants des professions de santé, admiraient ses collections. N’est-il pas temps de rouvrir ce musée sur le site de l’Hôtel-Dieu, où il remplacerait avantageusement un restaurant de luxe ? »

Et les signataires de poursuivre là où cela fait mal :

« Si l’AP-HP ne veut plus de son patrimoine et oublie ses racines, pourquoi ne le cède-t-elle pas pour un euro symbolique à l’Etat puisque ce musée bénéficie de l’appellation ‘’Musée de France’’, ce qui signifie qu’il doit bénéficier prioritairement de son aide ? Ce site transformé pourrait devenir le grand musée de la santé qui manque à Paris et qui fait l’orgueil de Londres avec la Wellcome Collection et ses centaines de milliers de visiteurs annuels : un lieu où le patrimoine serait exposé et étudié et qui aurait ainsi toute la légitimité, le passé éclairant le présent, pour qu’on y débatte des grands enjeux de santé. Un système de chaires annuelles pourrait en faire, par exemple, le lieu d’un enseignement permanent sur la santé ouvert à tous, comme un ‘’Collège de France de la médecine’’. »

Question : n’y a-t-il pas là – pour le président de la République, la maire de Paris, la présidente de la région Ile-de-France, la ministre des Solidarités et de la Santé (sans parler du directeur général de l’AP-HP) – l’occasion d’un grand et noble projet qui ferait de l’Hôtel-Dieu le symbole français d’une politique de la santé à la fois humaniste et solidaire ? Serait-ce trop espérer que d’attendre une réponse ?

A demain @jynau

1 Georges Chapouthier, neurobiologiste et philosophe ; Jean Deleuze, médecin à l’hôpital Cochin, rédacteur en chef de La Revue du Praticien ; Alexandre Gady, professeur d’histoire de l’art moderne ; André Giordan, ancien professeur à l’université de Genève ; Claude Gauvard, professeure émérite d’histoire du Moyen Age ; Adrien Goetz, membre de l’Académie des beaux-arts ; Danielle Gourevitch,ancienne directrice d’études honoraire à l’Ecole pratique des hautes études (EPHE) ; Antoine Grumbach, architecte urbaniste ; Jean-Michel Leniaud, directeur d’études à l’EPHE ; Eugène Michel, écrivain et président du Comité d’honneur du projet Agora ; Claude Origet du Cluzeau, économiste du tourisme ; Elisabeth Roudinesco,historienne de la psychanalyse ; Arnaud Timbert, maître de conférences en histoire de l’art médiéval ; Jean-Michel Tobelem, professeur associé à l’université Paris-I ; Marc Viré, archéologue et historien médiéviste.

Affaire du Levothyrox : La Revue du Praticien dénonce le «mépris de la parole des malades»

Bonjour

« Un cas d’école du mépris de la parole des malades ». C’est un éditorial au canon que signent, dans le dernier numéro (juin 2019) de l’auguste Revue du Praticien, Jean Deleuze et Alain Tenaillon. Un texte original et dérangeant qui heurtera dans différentes sphères du pouvoir sanitaire et médicamenteux. Un autre regard médical sur une affaire d’une complexité reflet de notre modernité.

Où l’on reparle, hasard ou fatalité, du Levothyrox à la veille de la conférence de presse l’Association Française des Malades de la Thyroïde qui suivra (au « Café des Officiers » (sic) le 6ème « Comite de suivi » du Lévothyrox organisé au Ministères des Solidarités et de la Santé. Extraits de cet éditorial :

« Les milliers de patients qui se sont plaints de troubles variés avec la nouvelle formule de Levothyrox, ne se sont vu opposer à leur colère que des commentaires condescendants voire méprisants. L’Agence nationale du médicament et des produits de santé (ANSM) a maintenu que le médicament était fiable et n’a fourni, avec retard, que des données partielles quand celles du dossier d’autorisation de mise sur le marché lui ont été demandées. Le laboratoire Merck s’est abrité derrière la conformité réglementaire de son étude de bioéquivalence qui, fondée sur la moyenne des valeurs de biodisponibilité au cours du temps chez un peu plus de 200 sujets sains testés et qui étaient leur propre témoin, ne montrait pas de différence entre les deux formules.

« Quand les données de cette étude lui seront demandées par l’ANSM et des chercheurs, il fournira des documents images et non des données informatisées rendant quasi impossible leur analyse. Enfin d’éminents endocrinologues attribueront les troubles décrits à un effet nocebo entretenu par les réseaux sociaux et une mauvaise information des patients. Après quelques hésitations, la ministre de la Santé sera plus prudente, décidant une réintroduction temporaire de l’ancien Levothyrox et tentant de rassurer les patients et leurs associations en demandant une enquête sur l’information réalisée et la gestion de la crise, enquête qui se révèlera catastrophique pour les pouvoir publics. Au total l’ensemble des instances professionnelles, industrielles et administratives ont globalement fait bloc contre les malades sans chercher à écouter leur mal être, considéré comme imaginaire voire complotiste et en refusant de proposer la moindre étude pour essayer de comprendre. »

Pour La Revue du Praticien un « début de reconnaissance scientifique des troubles » est enfin intervenu grâce à une équipe qui a réussi à reprendre toutes les données de l’étude de bioéquivalence et a montré que si en moyenne celle-ci semblait satisfaisante, en réalité la variabilité de la biodisponibilité était importante en fonction de la formule utilisée pour 60 % des individus testés, cela dans le sens du sous- ou du surdosage, ce qui expliquait la valeur de la moyenne 1 et ainsi expliquer, compte tenu de la faible marge thérapeutique du médicament, une partie des symptômes ressentis par les malades ainsi déséquilibrés dans leur traitement.

Quelles leçons tirer de ce « bras de fer avec les malades » ?

« Certes, il faut revoir et améliorer les tests d’évaluation des médicaments et de la bioéquivalence et que l’ANSM ait les moyens de contrôler les études fournies. Il faut que les autorités et les professionnels jouent la transparence en cas de crise et apprennent à sortir de leur certitude quand un problème apparaît. Mais surtout il faut apprendre à considérer les patients comme des citoyens responsables et donc à écouter leur parole. Les malades n’ont pas forcément raison, loin de là, mais s’ils posent des questions c’est parce que leur quotidien est souvent beaucoup plus difficile que ne l’imaginent les médecins. Donner corps à la démocratie sanitaire, c’est les faire participer, avec leurs représentants, à tous les niveaux décisionnels concernant la gestion de leur santé, c’est de ce fait reconnaître leur expertise sur le vécu de leur maladie et ainsi faire progresser la recherche sur leur prise en charge. »

Le « démocratie sanitaire » est un concept qui, en vingt ans, a certes fait quelques progrès. L’affaire du Levothyrox vient démontrer qu’il reste bien du chemin à faire. Elle montre surtout, écrivent Deleusze et Tenaillon, « l’importance de mettre en oeuvre rapidement les études permettant de valider ou d’invalider le ressenti des patients et non de nier leur parole ». Comment ne pas leur donner, pleinement, raison ?

A demain @jynau

1 Le même numéro de La Revue du Praticien publie un texte documenté original signé de Catherine Hill et de Martin Schlumberger Institut Gustave Roussy, Vilejuif) : « Les deux formules de Levothyrox ne sont pas bioéquivalentes La responsabilité directe du changement de formulation dans la survenue de signes et symptômes indésirables chez certains patients est donc extrêmement probable » .

Jeunes, alcools et vins: «La Revue du Praticien» en appelle à M. Blanquer et à Mme Buzyn

Bonjour

« Les enfants ne doivent pas être la cible du lobby viticole ! ». C’est le titre du vigoureux éditorial que signe, dans la dernière livraison de La Revue du Praticien, notre confrère Jean Deleuze, rédacteur en chef.  « Comment imaginer faire reculer significativement la mortalité (41 000 décès annuels), la morbidité et les violences engendrées par l’alcool alors que le lobby viticole, encouragé par la complaisance du président de la République, ne cesse de brouiller les messages de santé publique ? » demande-t-il. Et de dénoncer la propagande de Vin & Société, puissant lobby viticole, en direction des enfants est très choquante.

« La page «Éducation des plus jeunes » de son site ne cache pas ses intentions en vantant un apprentissage qui «dès le primaire, favorisera un comportement responsable chez ces adultes avertis de demain», écrit Jean Deleuze.  Le site propose films et supports éducatifs ciblés selon les tranches d’âge: 3-6 ans, 6-9 ans, 9-14 ans, plus de 14 ans. On y trouve même la promotion de mallettes pédagogiques du goût à l’usage des classes de maternelles et des cours préparatoires ! Toute cette pédagogie très subtile qui vante l’histoire, le terroir, la sociabilité, la convivialité avec force de petits personnages souriants n’a évidemment qu’un but: la banalisation de la consommation d’alcool pour recruter de futurs consommateurs. »

Des « numéros spéciaux » en ligne du Petit Quotidien (pour les 6-10 ans) et de Mon Quotidien (pour les 10-14 ans) enfoncent le clou: «Nous avons la chance en France d’avoir une bonne connaissance de la cuisine de qualité et de la façon de la déguster. La gastronomie française est en effet riche et variée : fromages, foie gras, truffes… le vin aussi en fait partie ! Le bon vin pour le bon plat. Cela fait partie de nos traditions », peut-on lire dans le second.

« Noyé dans ce contenu, on distingue un petit encadré intitulé ‘’Attention à l’abus d’alcool’’ qui indique: ‘’Les adultes boivent du vin en famille ou entre amis pour célébrer des moments importants ou accompagner un bon repas, peut-on lire adns cet éditorial. C’est l’occasion de faire la fête, de partager, de se retrouver. Mais attention aux excès… À cause de l’alcool qu’il contient, le vin bu en trop grande quantité et/ou trop vite peut avoir des effets sur le corps : vertiges, nausées, endormissement… Ces effets exposent la personne à des risques plus graves : accidents, violences…’’. »

Jean Deleuze : « Comment parents et enseignants peuvent-ils accepter cette intrusion aussi grossière du lobby viticole auprès des enfants ? Mme Buzyn et M. Blanquer, faites cesser ce scandale ! ». Il est fort peu probable que ces deux ministres oseront passer, ici, à l’action 1.

Et reste ici entière la grande question, celle de l’apprentissage des mille et une facettes des réalités alcooliques – une question qui dépasse de loin les seuls vins et la seule sphère scolaire. Pour le coup un véritable sujet de société, une belle question politique à laquelle personne ne semble, aujourd’hui en France, en mesure de s’attaquer.

A demain

@jynau

1 On attend toujours le résultat des interminables négociations entre le gouvernement et les représentants du lobby viticole quant à la forme et à la taille du futur logo « zéro alcool durant la grossesse » qui devrait remplacer l’actuel (microscopique) sur toutes les bouteilles de boissons alcooliques.

 

« Trois nouveaux cas » : l’affaire désormais sans fin, dans les médias, des bébés nés sans bras

Bonjour

Cette fois l’information est à découvrir en exclusivité dans Le Parisien : « Bébés nés sans bras : une nouvelle affaire dans les Bouches-du-Rhône » (Marc Payet avec E.M.).  Où l’on apprend l’existence de « trois nouveaux cas »  de « bébés sans bras ». Où l’on retrouve aussi Emmanuelle Amar, « lanceuse d’alerte » fortement médiatisée dont l’action et les démêlés avec les autorités sanitaires sont au cœur de cette nouvelle affaire sanitaire.

« Selon nos informations, il s’agit bien ‘’d’un cas groupé’’, encore appelé cluster. En effet, la survenue de trois malformations de ce type dites « agénésie transverse des membres supérieurs » (ATMS), à quelques kilomètres de distance, et en peu de temps, est supérieure statistiquement à ce qui devrait survenir, selon les données de la littérature scientifique, explique Le Parisien. Ce que confirme Emmanuelle Amar, la première à avoir révélé l’affaire des bébés sans bras dans l’Ain, grâce à une enquête du Registre d’étude des malformations en Rhône-Alpes (Remera) dont elle est la directrice. Il s’agit de trois petites filles, nées en juin, août, novembre 2016, dans un rayon de 30 km autour de Vitrolles (Bouches-du-Rhône) à Salon de Provence, Septèmes-les-Vallons, à Gignac-la-Nerthe ».

Point notable : ce sont les familles elles-mêmes qui ont lancé l’alerte. « Les données ont été transmises à Santé Publique France », explique Emmanuelle Amar. Interrogé par Le Parisien dans la soirée du 20 janvier le ministère de la Santé explique que « de la même manière que des enquêtes ont été diligentées dans L’Ain, le Morbihan et en Loire-Atlantique, tous les nouveaux clusters doivent être investigués sur la base d’informations concordantes, suivant une méthodologie précise, et permettant d’en tirer des conclusions scientifiques ». Et d’assurer au quotidien qu’Agnès Buzyn  suit de « près le dossier » et insiste sur « l’accompagnement des familles ».

Etang de Berre et Yannick Jadot.

 Autre point notable : dans les Bouches-du-Rhône, les parents des trois enfants vivent tous à proximité de sites industriels polluants et pollués. « J’ai regardé les dossiers. Effectivement, les cas apparaissent autour de l’Etang de Berre, dans une zone qui est connue pour être très polluée, avec des risques pour la santé. Cela mérite une enquête plus approfondie pour comprendre ce qui s’est passé », explique le Dr Annie Lévy-Mozziconacci, généticienne, responsable du centre de médecine fœtale de l’hôpital-Nord, et conseillère municipale PS à Marseille. Pour l’heure, en toute rigueur et n’en déplaise à l’écologiste Yannick Jadot aucun lien de causalité n’a été démontré.

Dernier point à souligner, en dépit du suivi rapproché du dossier parAgnès Buzyn : le retard pris par les autorités sanitaires. Une enquête nationale a été lancée par les autorités sanitaires, dont les premières conclusions doivent être divulguées fin janvier. Mais selon les informations du Parisien, alors que plusieurs médecins épidémiologistes de Sante Publique France tentent de déterminer, département par département, combien de « bébés sans bras » naissent chaque année  le « Comité scientifique » et le « Comité d’orientation et d’information » annoncés le 29 octobre 2018 n’ont toujours pas été constitués.

Que conclure ? On peut, pour saisir la complexité du sujet, se reporter à la publication signée, dans Le Revue du Praticien 1, par l’épidémiologiste Catherine Hill connue pour sa liberté d’expression et ses engagements citoyens au service de la santé publique. Mme Hill s’est notamment penchée sur les données du réseau européen de surveillance des anomalies congénitales « Eurocat » qui  rassemble les données de cinquante-et-un registres couvrant 1,7 million de naissances par an.

« Au total, 165 clusters ont été identifiés dans Eurocat, sans qu’aucune cause n’ait jamais été identifiée, résume-t-elle en reprenant les conclusions d’une publication spécialisée 2.  Les auteurs recommandent que la stratégie des autorités vis-à-vis de ces clusters soit proactive et transparente plutôt que d’attendre pour réagir et faire des investigations que des clusters soient identifiés par le public et les médias. Les autorités françaises ont fait exactement le contraire. »

Il reste encore à comprendre pourquoi.

A demain

@jynau

1 Hill C.  Agrégation dans le temps et dans l’espace de naissances d’enfants sans avant-bras. La Revue du Praticien 2018 ;68.

2 Dolk H, Loane M, Teljeur C, et al. Detection and investigation of temporal clusters of congenital anomaly in Europe : seven years of experience of the EUROCAT surveillance system. Eur J Epidemiol 2015;30:1153-64.

 

 

 

 

 

Blog: en 2018 « Journalisme et Santé Publique » a flirté avec les 550 000 visites. Merci

Bonjour

Quelques chiffres pour dire les liens qui nous unissent. « Journalisme et santé publique »: il y a quatre ans nous faisions état  de 330 000 « visites » pour l’année 2014. Un an plus tard, les statistiques officielles (celles de « Wordpress.com ») recensaient, pour 2015, un peu plus de 500 000 « visites »  (et de près de 300 000 « visiteurs »).

Les mêmes méthodes statistiques annonçaient, pour l’année 2016, un peu plus de 585 000 visites (et près de 350 000 visiteurs). Pour l’année 2017, léger recul avec un peu plus de 540 000 visites (pour une activité moindre) et pratiquement le même nombre de visiteurs.

Stabilité à nouveau pour 2018 – avec augmentation du nombre des visiteurs. Plus qu’un succès, une reconnaissance. L’expression chiffrée d’un soutien de celles et ceux qui « visitent » et relaient ce blog. Celles et ceux qui critiquent… s’énervent… s’indignent… commentent… apprécient… ne disent rien mais n’en pensent pas moins…

Le soutien, aussi, de tous les confrères – de tous les titres – que nous citons, de tous ceux nous aident dans notre quête. Sans jamais oublier Slate.fr (Christophe Carron, Hélène Decommer) , le Club des médecins blogueurs (Dominique Dupagne), la Revue médicale suisse (Bertrand Kiefer), La Revue du Praticien (Jean Deleuze), SOS Addictions (William Lowenstein & C°). Sans jamais oublier, non plus, Antoine Flahault qui sut nous mettre le pied à l’étrier.

2019 : l’objectif ne variera pas. Ni la méthode. Liberté de ton, de sujet, de titraille, d’expression et de longueur. Montrer, jour après jour, que le blog peut, aussi, être un formidable espace journalistique. Un espace pour raconter. Pour expliquer. Pour commenter. Au risque de déranger, d’irriter. Continuons, ensemble, à en user.

A demain

Tempêtes annoncées sur l’insuffisance rénale : conflits d’intérêts ou savoir raison garder ?

 

Bonjour

Editorial éclairant dans la dernière livraison de La Revue du Praticien (février 2017). Le Dr Alain Tenaillon y brosse le tableau d’un monde médical (celui de la prise en charge, de l’insuffisance rénale chronique) confronté à quelques sérieuses tempêtes. Des tempêtes médiatiquement relayées et amplifiées. Il y eut ainsi, en 2015, « un rapport à charge de la Cour des comptes »,  puis en 2016 une tribune sur la dialyse publiée dans Le Monde usant de la métaphore carcérale puis un rapport critique du Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie . Plus récemment Mediapart dénonçait les incohérences de la prise en charge de l’insuffisance rénale chronique terminale.

« La communauté néphrologique peut légitimement vivre cela comme un acharnement, alors que sa compétence n’est pas en cause et que les inégalités sociales dénoncées dans la prise en charge de l’insuffisance rénale sont celles que l’on observe pour toutes les maladies chroniques » écrit, fort justement, l’éditorialiste. Le sujet est éthiquement et économiquement redoutable. Extrait :

« Le coût important et croissant de la dialyse et de la greffe équivaut à 2,1 % du budget de l’assurance maladie (pour 0,12 % de la population). « Le paradoxe est que si la greffe, quand elle est possible, a les meilleurs résultats en termes de qualité et de durée de vie, c’est aussi et de loin le traitement le moins cher et encore le moins utilisé (malgré une nette progression), alors que cet acte est peu rentable pour les hôpitaux publics seuls habilités à le pratiquer ; en revanche, la dialyse est un traitement médical entrant dans la tarification à l’acte, ce qui la rend très rémunératrice tant dans le public que dans le privé d’autant que les patients sont captifs. Une situation source de conflits d’intérêts potentiels dans le choix thérapeutique entre greffe et dialyse ou entre les diverses formes de dialyse plus ou moins rémunératrices, ce que dénoncent les différents rapports ou articles. »

Débordements néfastes

Ce qui, hier, serait resté dans les coulisses ne peut plus l’être. A commencer par la confrontation des intérêts entre la greffe et la dialyse. Dans la dynamique de la démocratie sanitaire les associations de patients sont, ici, entrée sur la scène. Qui songerait, désormais, à faire sans elles ?

« Bien informées, actives, tenaces et parfois virulentes leur but n’est pas de faire la guerre aux néphrologues mais d’améliorer à tout prix la transparence et la qualité de vie des malades : en cherchant à développer par tous les moyens la greffe et ses conditions de suivi, quitte à dénoncer certains manquements ; en essayant d’améliorer les conditions de la dialyse en fonction de chaque cas (dialyse autonome, nocturne, longue…) pour favoriser le maintien dans la vie active, quitte à demander de modifier le fonctionnement de certains centres et à réaffecter une partie de la masse budgétaire attribuée à la dialyse au profit de ces améliorations ; en essayant d’obtenir une information et une prise en charge globale et coordonnée des malades entre les médecins traitants et les divers secteurs de la néphrologie pour permettre le meilleur choix thérapeutique ; enfin, en demandant une prise en compte plus fine de tous les aléas qui affectent la vie quotidienne des patients (par exemple pour les assurances ou pour faciliter l’accès aux consultations de diététique, de psychologie, de kinésithérapie… dans les centres). »

« Plutôt que de s’insurger face à ces critiques, ne vaudrait-il pas mieux les analyser, les comprendre, et agir pour s’en trouver tous ensemble grandis et éviter les débordements néfastes » demande, calmement,  l’éditorialiste. Il est, ainsi, des éditoriaux et des éditorialistes qui aident à prendre date.

A demain

 

Qui abonnera à la «Revue du Praticien» le président du Comité économique du médicament ?

Bonjour

Nous évoquions il y a peu l’opacité antidémocratique du Comité économique du médicament – et la nécessité d’offrir une attachée de presse à son président. Complétons notre suggestion avec un abonnement à l’excellente Revue du Praticien. Dans sa dernière livraison (février 2017) elle consacre à la colère des professionnels de la cancérologie une tribune qui vaut d’être lue. Tribune signée de trois voix fédératrices 1. Au chapitre de la transparence on y lit ceci concernant la fixation des nouvelles et insupportablement coûteuses molécules anticancéreuses :

« L’élément notable de ce processus complexe est que l’étape pratique et ultime de fixation du prix se fait dans un face-à-face entre l’administration publique et l’industriel sous le sceau de l’opacité la plus totale : opacité sur les coûts de R&D du médicament candidat, opacité sur les termes de la négociation, et en l’absence de tout représentant des médecins et des patients.

« L’un des éléments clefs de toute réforme à venir est donc l’obtention de la part des industriels de la transparence sur les coûts de R&D des médicaments. Cette information permettrait de prendre en compte les investissements réels dans ce domaine, mais aussi la contribution d’un financement public lorsque celui-ci a participé à la recherche ou à des étapes du développement thérapeutique, et donc d’aboutir à la définition d’un prix juste et équitable.

Colère montante

« Il faut noter qu’une telle approche, loin d’être maximaliste, est actuellement sérieusement considérée par de nombreux États des États-Unis, certains proposant même de rendre publics les profits effectivement réalisés par les compagnies pharmaceutiques, pour rendre l’évaluation encore plus transparente. La transparence doit également concerner la procédure permettant de définir les prix en y associant des représentants des médecins et des patients. La tenue récente d’un débat public autour de cette question, le 28 janvier 2016 à l’institut Paoli-Calmettes de Marseille, a permis de constater l’intérêt d’une confrontation démocratique sur le sujet. »

On rappellera que plusieurs spécialistes en onco-hématologie ont, ces dernières années, collectivement exprimé leur crainte que les prix exorbitants des nouveaux anticancéreux puissent menacer l’accès universel aux progrès thérapeutiques émergents. En France, un appel de 110 professeurs des universités, cancérologues et hématologues, a été suivi par plusieurs pétitions et campagnes d’interpellation publique portées par la Ligue contre le cancer ou plus récemment (et de manière spectaculaire) Médecins du Monde.

La colère monte. Elle a, ici, de nobles raisons médicales et éthiques. Il serait bon qu’on le sache au sein bunker du Comité économique des produits de santé .  Il est grand temps d’offrir un abonnement à la Revue du Praticien à son président,  Maurice-Pierre Planel. Demain il sera trop tard.

A demain

1 « Médicaments du cancer : les raisons de la colère » Anthony Gonçalves, Dominique Maraninchi (Département d’oncologie médicale et centre de recherche sur le cancer, institut Paoli-Calmettes, Inserm U1068, CNRS 7258, Aix-Marseille Université, Marseille) Jean-Paul Vernant (Service d’hématologie clinique, hôpital Pitié-Salpêtrière, université Pierre-et-Marie-Curie, Paris –  jean-paul.vernant @aphp.fr). Revue du Praticien, février 2017.

L’auteur de ces lignes tient une chronique dans La Revue du Praticien Médecine Générale.

Nouveaux dons d’organes : risque de futurs scandales à fort retentissement médiatique

Bonjour

Editorial de la dernière livraison de La Revue du Praticien : « De nouvelles modalités pour les prélèvements d’organes » (sur abonnement). Le  Dr Alain Tenaillon y fait le point sur ce qui change. C’est un condensé de pédagogie qui s’achève par une proposition dérangeante. Résumons ce qui, depuis quarante ans, oscille entre le consentement présumé et la quête de l’explicite.

« Depuis 1976, la loi postule en France qu’un prélèvement d’organes, en vue d’une greffe, peut être réalisé chez tout sujet décédé dès lors que de son vivant il n’avait pas marqué d’opposition à cette éventualité » rappelle l’éditorialiste. La référence ici est faite à la loi Caillavet, du nom de Henri Caillavet (1914-2013), homme politique trop méconnu, athée et rationaliste, passionné par les questions dites « de société ».

Humanisation encadrée

Et ensuite ? « Les lois de bioéthique de 1994, 2004 et 2011 ont encadré et en quelque sorte humanisé ce principe, dit du consentement implicite ou présumé, en exigeant qu’avant toute décision les coordinateurs de prélèvement d’organes s’entretiennent avec les proches du défunt, non seulement pour les informer de cette possibilité, mais aussi et surtout pour s’assurer par leur témoignage que la personne décédée n’y était pas hostile de son vivant. » C’était bien le moins et il est remarquable que cette nécessaire « humanisation » ait été jugée nécessaire. A commencer par « l’entretien avec les proches du défunt ».

« Cet entretien avait un rôle majeur en termes d’empathie et de lien avec les personnels de santé pour préparer le deuil dans ces circonstances particulièrement douloureuses, résume Alain Tenaillon. Tout refus de prélèvement signifié par les proches au nom du défunt était respecté, quel que soit son mode d’expression, le plus souvent oral, les équipes ayant également l’obligation de vérifier qu’une telle opposition n’était pas inscrite sur le registre national informatisé des refus (RNR), mis en place en 1998. »

On connait le contexte et son évolution : le manque récurrent d’organes (du fait du grand nombre de personnes malades en attente de greffe), le taux élevé des oppositions au prélèvement, un peu plus de 30 % (malgré le faible nombre d’inscrits sur le RNR). Autant d’éléments qui ont amené les parlementaires à voter l’an dernier un amendement à la loi de bioéthique de 2011. Il s’agit, pour le dire clairement comme le fait Alain Tenaillon, de « limiter les oppositions orales aux prélèvements, qui semblaient plus être celles des proches que celles des sujets décédés ».

Douloureux formalisme

Puis les modalités possibles d’expression du refus ont fait l’objet d’un décret applicable depuis le 1er janvier. Où en sommes-nous ? En pratique, la nouvelle loi autorise tous les modes de refus dès lors qu’ils émanent effectivement de la personne dont le corps est l’objet. A cette fin l’inscription sur le RNR est privilégiée et sera facilitée par une procédure sécurisée accessible sur Internet, mise en place par l’Agence de la biomédecine. La suite est plus compliquée :

« Toute autre opposition devra avoir été signifiée par un document écrit, signé du vivant de la personne, et remis aux responsables du prélèvement. Si l’expression de ce refus par le défunt était orale, ses proches au cours de l’entretien qui reste obligatoire devront en attester les circonstances par écrit. »

« Le changement peut paraître modeste, mais son formalisme imposé, sous-tendu par une suspicion à peine voilée vis-à-vis de la parole des proches, pourrait au début, dans ce moment de grande souffrance, générer tensions et conflits, observe, fort justement Alain Tenaillon. De plus, rien n’empêchera certaines familles de s’opposer en leur nom au prélèvement (il n’y a pas de sanctions, fort heureusement…) et l’on voit mal comment les coordinateurs pourraient passer outre, au risque d’un scandale au fort retentissement médiatique qui ne pourrait que desservir la cause des prélèvements d’organes. »

L’affaire Tesnière

Tout ceci est parfaitement écrit. Réparer les vivants, bien sûr; mais pas à n’importe quel prix. Et pour avoir connu (et participé, via Le Monde, en 1992) à un « retentissement médiatique » de ce type (affaire Tesnière) nous pouvons témoigner de la violence tragique, dévastatrice, inhérente à ce genre d’affaire. « In fine, pour que cette évolution législative porte ses fruits, et on ne peut que l’espérer, il faut d’une part que médecins et infirmiers coordinateurs se l’approprient et apprennent à adapter leur attitude pour rassurer proches et familles et que le dialogue reste celui de l’empathie et non celui de la simple application de la loi ; d’autre part que les médias en relation avec l’Agence de la biomédecine jouent un rôle positif pour transmettre cette information sans affoler la population » conclut l’éditorialiste de la Revue du Praticien.

Au risque de le désespérer nous pensons que l’éditorialiste pèche ici, pour ce qui est des « médias », par excès d’optimisme.

A demain

E-Cigarette : qu’en aurait dit Fagon, Premier médecin du Roi et premier ennemi juré du tabac ?

 

Bonjour

Fléau du tabac, comment en sommes-nous arrivé là ? Dans la dernière livraison de La Revue du Praticien notre confrère Jean Deleuze nous éclaire : « Comment, au XVIIème siècle, la dépendance au tabac s’est mondialisée ». Où l’on apprend que le puissant Vatican aurait (là aussi) pu mieux faire :

« Il y eut un moment de rejet. L’Église condamna au XVIème siècle l’usage du tabac (un rite païen et démoniaque) et des mesures répressives apparurent un peu partout : on empala les fumeurs en Iran, on leur coupa les lèvres en Russie (l’incendie de Moscou en 1650 fut attribué à l’imprudence d’un fumeur), on les réduisit à l’esclavage au Japon, on les décapita en Chine… mais rien n’y fit : partout l’usage massif du tabac s’imposa. Cela d’autant – et c’est probablement là le cœur du problème – que les États commencèrent à y trouver leur compte en le taxant. »

Formidable Revue du Praticien, où l’on redécouvre le Dr Guy-Crescent Fagon (1638 -1718). Ah Fagon… Il fut nommé premier médecin du roi Louis XIV en 1693 après le renvoi d’Antoine d’Aquin (1620-1696). Il fut aussi le premier médecin au monde à mettre en doute les bienfaits du tabac sur la santé. En guerre ouverte, avec La Revue, contre le tabagisme le Dr Jean Deleuze nous ressuscite  le bon Fagon.

 Squelettiques 

« Aussi la plupart des jeunes gens, qui prennent trop de tabac, sont attaqués de tremblements dès leur jeunesse même. Leurs mains mal assurées n’agissent plus avec la même vigueur, leurs pieds chancelants semblent se reculer au poids du corps, les parties nobles se flétrissent, les fibres spirales du cœur n’ont presque plus de jeu, ou ne jouent que par saillies : la texture et la trame des parties se déchire, ou se relâche ; la machine vivante se détruit ainsi peu à peu, son mouvement, sans lequel elle ne peut subsister, s’affaiblit de plus en plus, en sorte que la mort, qui sans l’usage immodéré du tabac aurait été moins prompte, vient d’un pas précipité terminer une vie, qui ne fait que commencer. Donc le fréquent usage du tabac abrège la vie. »

Ce texte (traduit du latin) est extrait de « Savoir si le fréquent usage du tabac abrège la vie ». Il s’agissait d’une « Question agitée le 26 de mars de l’année 1699 aux Écoles de médecine de Paris, sous la présidence de M. Fagon , conseiller du Roi en tous ses Conseils d’État, premier médecin de sa majesté. ».

On se prend à rêver. Fagon et la réduction des risques…  Fagon et la cigarette électronique… Donc le fréquent usage du tabac abrège la vie.  On écrira ce que l’on voudra -mais on reconnaîtra qu’il y a là une autre matière, une autre densité que celle des slogans squelettiques de notre « Moi(s) sans tabac ». Il  commence demain 1er novembre de l’année 2016. Et il oublie la cigarette électronique.

A demain

Tabac et cigarette électronique : soignants et usagers vont-ils enfin jouer un rôle politique ?

 

Bonjour

Ainsi donc, dans l’attente d’un diagnostic,  nous serions déjà dans « l’après-Hollande ». Une occasion supplémentaire pour s’intéresser de près à l’appel de « La Revue du Praticien » 1 : l’Appel des 100 000 contre le tabagisme . Cent mille soignants (médecins,  pharmaciens, chirurgiens-dentistes, infirmières,  kinésithérapeutes, sages-femmes) appelés à signer un « appel » contre le tabac. Ou plus précisément un appel pour dénoncer l’inaction coupable des responsables politiques contre une addiction hautement fiscalisée responsable, chaque année, de près de 80 000 morts prématurées.

« Chaque jour les soignants sont confrontés aux méfaits du tabagisme et motivent leurs patients pour qu’ils cessent de fumer. Mais ce combat est inégal et se heurte à l’immense lobbying des industriels du tabac et des buralistes.

« L’ambition de cet Appel, non partisan, porté par  »l’Alliance contre le tabac » est d’interpeller tous les élus et les futurs élus, tous les responsables politiques sur ce drame majeur, afin que cette lutte connaisse un tournant significatif. »

Hollande F. 4 février 2014

Objectif ? « Une signature massive par des milliers de médecins, de pharmaciens, de chirurgiens-dentistes, d’infirmières, de kinésithérapeutes, de sages-femmes… constituerait un événement majeur pour la santé publique. Son impact médiatique pourrait être important et empêcher que les responsables politiques ne se dérobent, comme ils le font actuellement, et comme ils l’ont fait en 2012. »

Dans la Revue du Praticien notre confrère Jean Deleuze bat le tambour éditorial sanitaire. Il dit, à sa manière, le scandale que constitue l’inaction politique française qui ne fait rien contre un Etat dealer. Le constat est encore plus accablant quand le chef de l’Etat prend lui-même l’engagement solennel de mettre en place un « Programme national de réduction du tabagisme » (François Hollande, 4 février 2014) et que rien ne suit : plus de deux ans plus tard la France fume comme si rien n’avait jamais été solennellement dit.

Sujet politique

De nombreuses personnalités ont accepté de signer de même que les sept conseils de l’Ordre des professions de santé ainsi que de nombreuses structures et sociétés savantes. Il n’est pas impossible d’imaginer que le cap des 100 000 puisse être rapidement atteint, voire dépassé.  On observera alors le poids de cette initiative sur les candidats à l’élection présidentielle. De ce point de vue on regrettera que l’énergie déployée ici ne soit pas associée à celle, considérable, fournie par les innombrables vapoteurs 2 et de nombreux addictologues  au service d’une politique de réduction des risques tabagiques.

Grâce à la cigarette électronique la lutte contre l’addiction au tabac est désormais un véritable et grand sujet politique. Pour l’heure la question est simple : des centaines de milliers de soignants et d’usagers peuvent-ils peser sur les politiques ?

A demain

1 L’auteur de ces lignes tient une chronique dans « La Revue du Praticien- Médecine Générale »

2 « L’Appel des 100 000 » doit être rapproché de « L’Appel des 1 000 vapoteurs » : « Cigarette électronique : Marisol Touraine soudain mise en demeure par mille et un vapoteurs » (Journalisme et santé publique. 19 janvier 2016)