Bonjour
C’est juré : jusqu’en août dernier, elle ignorait que l’on buvait de l’alcool dans les loges VIP. Il y a quelques jours la ministre des Solidarités et de la Santé faisait une nouvelle confidence, de taille, sur sa connaissance de l’homéopathie. Un éclairage a contrario sur les vertus de faire venir au sein de l’exécutif d’éminents acteurs de la société civile.
Il faut, pour bien comprendre, remonter au 12 avril 2018. Ce jour-là Agnès Buzyn est l’invitée du perfide Jean-Jacques Bourdin dans la matinale de RMC/BFM TV. Deux mois auparavant, dans Le Figaro le 19 mars, des médecins s’en étaient pris avec virulence à l’homéopathie. D’autres praticiens, plus que favorables à cette pratique, ont répliqué en portant plainte devant l’Ordre des médecins contre leurs confrères signataires.
Continuer à rembourser ou pas ? L’homéopathie continuera à être remboursée avait, en souriant, assuré Agnès Buzyn. Et ce même si c’est « probablement un effet placebo » (sic). « Les Français y sont attachés, si cela peut éviter le recours à des médicaments toxiques (re-sic), je pense nous y gagnons collectivement …. ça ne fait pas de mal ! ». Et Mme Buzyn de précise que parmi les médecines « non conventionnelles » l’homéopathie était « aujourd’hui la seule à être remboursée ». Tollé immédiat chez les militants de la médecine fondée sur les preuves. Embarras en haut lieu. C’était le début d’une longue et passionnante affaire médicale, pharmaceutique et politique (que nous rapportâmes ici-même et sur Slate.fr) – une affaire qui se conclut finalement, dans la douleur, par la programmation du déremboursement des spécialités homéopathiques.
Foie de canard et piscine olympique
Comment une ministre longtemps médecin hospitalier, puis accumulant les responsabilités à la tête d’institutions sanitaires avait-elle pu s’exprimer ainsi sur l’homéopathie ? Le Point (Thomas Malher et Géraldine Woessler) revient sur cet édifiant épisode dans un portrait élogieux consacré à la ministre : « Agnès Buzyn, la meilleure d’entre eux ?». « Incollable sur les techniques de greffe et les immunosuppresseurs, l’élève brillante d’est fait recaler sur les granules appréciées des Français » écrit Le Point.
« Je viens d’une spécialité traitant de maladies graves, et l’homéopathie n’était pas dans mon champ de vision, se défend Agnès Buzyn. Et, nous dit Le Point, elle jure : « Je croyais qu’on diluait un principe actif ». Vraiment ? Avant de découvrir, « consternée », « qu’on prend un extrait de foie de canard et qu’on le dilue dans une piscine olympique, qui elle-même est diluée à l’échelon de la galaxie ». On comprendra qu’il s’agit ici d’une liquide métaphore hépatique et interstellaire qui fait l’économie du « mal contre le mal » et de la « dynamisation ». Une métaphore qui n’explique pas que ce dossier éminemment politique n’ait pas en amont été travaillé, comme il se devait, par son cabinet.
Le Point : « Assise toute droite dans le lumineux bureau de son ministère, face à la tour Eiffel, Agnès Buzyn s’anime, écartant les bras sur le mode : que vouliez-vous que je fasse ? ». Agnès Buzyn : « Une fois que j’ai su, je ne pouvais plus lâcher prise, ou bien je perdais toute crédibilité dans le champ médical ». On connaît la suite, qui vit la ministre (enfin) informée de son dossier politique ne plus lâcher prise et, ainsi, ne pas perdre de crédibilité dans le champ médical – du moins dans le champ qui ne soigne pas, parfois, grâce à l’homéopathie.
A demain @jynau