Ecstasy : combien de temps avant qu’on l’utilise pour lutter contre la dépendance à l’alcool ?

Bonjour

Rien de tel qu’un bon verre pour aguicher les médias. Ainsi Le Monde (Raphaëlle Bacqué), depuis Biarritz et Espelette : C’est « à la demande de l’équipe de communication de la Maison Blanche », assure l’Elysée, que la First Lady américaine a goûté, chez un caviste basque, un verre d’irouléguy, alors même que son mari menace de surtaxer les vins français. Irouléguy : un goûteux timbre poste sur le chemin des pèlerins de Saint-Jacques ; deux cents hectares sur quinze commune ; classé AOC depuis 1970 ; rouge et rosés à base des cépages  tannatcabernet franc et cabernet sauvignon ; vins blancs issus de courbu blanc, du petit courbu B, de petit manseng et gros manseng.

Dans le même temps ou presque, à l’autre bout de la chaîne, The Guardian (Helena Blackstone) : « MDMA treatment for alcoholism could reduce relapse, study suggests. Researchers say drug is safe and appears more effective than conventional treatments ». Des informations glanées lors de l’International Conference on Psychedelic Consciousness (Londres, 16-18 août) – reprises et développées par Medscape France (Stéphanie Lavaud) : « Résultats prometteurs pour la 1re étude à tester la MDMA (ecstasy) dans l’alcoolisme ».

« MDMA » cette reine de la nuit 1 ? « Un ‘’revival’’ thérapeutique, rappelle Medscape. Ce produit qui a été largement utilisé de façon thérapeutique entre les années 70 et 1985. La molécule synthétique provoque des effets euphorisants et créé une vision positive et empathique des choses et des gens, ce qui lui a valu le surnom de ‘’pilule de l’amour’’. Si on ne sait pas exactement par quels mécanismes elle agit dans le cerveau, elle doit son action à un dérivé d’un produit actif tiré de la mescaline (la methylenedioxy-amphetamine or MDA). Moins hallucinogène et moins toxique que la MDA, la MDMA a connu son heure de gloire au sein du « Boston group ». A partir de 1976, ce cercle influant comprenant un chimiste, des personnes intéressées par la spiritualité et des chercheurs en intelligence artificiel du MIT (Boston), a répandu l’usage du MDMA à visée thérapeutique auprès de psychiatres et  de thérapeutes. Comme avec le LSD, l’usage a par la suite débordé le champ de la psychiatrie. Devenue très en vogue dans les clubs newyorkais en 1983, la MDMA a fini par être classée sur la liste des molécules « Schedule 1 » et interdite en 1985 par le gouvernement américain, même à titre médical. »

Aujourd’hui, donc, focus sur la maladie alcoolique. L’étude présentée à Londres portait sur huit semaines et comprenait deux sessions avec de la MDMA. Les auteurs rapportent une bonne tolérance du traitement, sans conséquences néfastes physiques ou psychiques chez les premiers participants à avoir terminé l’étude. Et The Guardian rapporte les résultats, non encore publiés, onze patients avec un suivi de neuf mois.

Zéro black Monday/blue Tuesday

« Nous avons une personne qui a totalement rechuté, revenant à sa consommation d’alcool d’origine, 5 personnes qui ne boivent plus une goutte d’alcool, et 4 ou 5 personnes qui boivent encore 1 ou 2 verres mais pour lesquelles ne s’applique plus le diagnostic de trouble alcoolique » a rapporté le Dr Ben Sessa, psychiatre, chercheur en neuropsychopharmacologie (Imperial College London) et premier auteur de l’étude. En utilisant ce que la médecine propose de mieux, 80% des gens boivent dans les trois ans qui suivent leur cure de sevrage. Et pas de black Monday ou de blue Tuesday, peu importe comment les ravers l ’appellent. De mon point de vue, [la descente que décrivent les ravers au lendemain et sur-lendemain de la prise] est un artefact du raving, mais ce n’est pas dû à la MDMA. »

Pour le Dr Ben Sessa, la MDMA n’a rien de dangereux, qui a été prescrite aux Etats-Unis (entre 1970 et 1985) et en Suisse (jusqu’en 1993) pour augmenter l’efficacité de certaines psychothérapies et qui est parfois utilisées dans le traitement du syndrome de stress post-traumatique. «Il reste désormais à étudier la possibilité de mener un essai clinique randomisé versus placebo, pour véritablement s’assurer de l’efficacité du traitement » souligne, sagement, Medscape. Peut-on raisonnablement espérer, manseng ou pas, que ces travaux puissent, aussi, être menés en France ?

A demain @jynau

1 Merlo S, Jamme S, Gatner B et al Drogues festives : quand « récréation » rime avec « consultation » Rev Med Suisse 2019; volume 15.1394-1396

Friandises au cannabis, vodka radioactive: comment maximiser au mieux les risques

Bonjour

Est-ce une version moderne de l’entrée perverse et précoce dans la dépendance ? Un objet pour spécialistes de collapsologie ? Après les antiques « cigarettes au chocolat » (interdites depuis moins longtemps qu’on le croit) voici les « bonbons au cannabis ». L’émergence de ce nouveau risque est signalée non par l’exécutif mais, via une lettre au Lancet, par le centre antipoison et de toxicovigilance de Paris. « Marketing of legalised cannabis: a concern about poisoning ».

Exposant le cas d’une jeune femme récemment intoxiquée en région parisienne après une consommation de bonbons au cannabis fortement dosés en tétrahydrocannabinol (THC), le centre antipoison de Paris met publiquement en garde contre les dangers de ces produits, en particulier pour les enfants. Interviewé par Medscape édition française (Vincent Richeux) le Dr Jerôme Langrand, premier auteur, précise les risques pour les plus jeunes de ces produits, « y compris les liquides pour cigarettes électroniques contenant du THC ».

Gâteaux, mais aussi boissons, barres chocolatées, miel, bonbons de toute sorte ou encore liquides de cigarette électronique peuvent être enrichis en THC rappelle Medscape.  Aux Etats-Unis on assite (là où le cannabis à usage récréatif est autorisé) à une multiplication des produits à base de cannabis. Et en dépit des mesures de prévention (contraignant les fabricants à fabriquer des sachets difficiles à ouvrir pour des enfants) les cas d’intoxication pédiatriques au cannabis se multiplient outre-Atlantique.

En France, on le sait,  ces produits sont totalement interdits. Mais on sait aussi à quel point il est aisé de s’en procurer – à commencer par les « bonbons au cannabis », régulièrement en cause dans des intoxications de jeunes américains.

« Ce type de produit étant très attrayant pour les enfants, il est extrêmement dangereux d’en avoir chez soi. Il convient d’être vigilant, d’autant plus qu’on se retrouve face à une industrie qui se comporte comme celle du tabac dans les années 1950, en entretenant une image positive pour un produit toxique », commente pour Medscape édition française, le Dr Jerôme Langrand, du centre antipoison et de toxicovigilance de Paris.

Le cas rapporté dans The Lancet est celui d’une jeune adulte ayant goûté des bonbons-pastilles contenant 3,5 mg de THC. La jeune femme avait également consommé de l’huile de cannabis très concentrée (85% de THC). Elle a été prise en charge pour un malaise avec tachycardie sévère.  « Tout produit toxique potentiellement attractif pour l’enfant représente un danger. On avait déjà alerté sur le risque que représentent les mini-doses de lessive liquide, après des cas d’ingestion. Dans le cas du cannabis, il y a des décès chez l’enfant après consommation de boulettes de shit. On peut aisément imaginer le risque avec des bonbons au THC », souligne le Dr Langrand. Et ce dernier de faire le rapprochement avec … le danger potentiel des liquides pour cigarette électronique contenant du THC.

Entre 2010 et 2018, la moitié des cas d’intoxication par liquide de e-cigarette enregistrés par le centre antipoison parisien concernaient de jeunes enfants. « En général, les enfants se mettent à sucer les cartouches contenant le liquide. Souvent la quantité ingérée est faible, mais suffisante pour provoquer une intoxication à la nicotine », précise le Dr Langrand. Si les cartouches avaient contenu en plus du THC, « on aurait eu des intoxications sévères chez ces enfants », avertissent les auteurs. « Le risque de graves intoxications associé aux produits contenant du THC doit être envisagé et des mesures plus restrictives concernant ces nouveaux produits devraient être recommandées dans les pays qui prévoient de légaliser le cannabis, estime-t-il.Si on en vient à légaliser un jour le cannabis en France, il faudra être très vigilant sur l’accès à ces produits. »

Humour britannique et slavitude ukrainienne

Il faudra aussi faire preuve de la plus grande vigilance avec « Atomic », la première vodka élaborée sur le site de Tchernobyl ; trente-trois ans (sic) après la catastrophe que l’on sait.  L’affaire vient d’être rapportée par la BBC : (Victoria Gill) « Chernobyl vodka: First consumer product made in exclusion zone » et reprise par Le Monde (Maureen Songne) : « Atomik, la première vodka made in Tchernobyl ». On retrouvera là un parfum de slavitude, cette exacerbation de la sensibilité qui pousse à boire et à chanter – parfois à écrire pour se sauver 1.

Le breuvage alcoolique, apprend-on, est proposé par une équipe de scientifiques (re-sic), la « Chernobyl Spirit Company », constituée de « chercheurs britanniques et ukrainiens ». Fabriqué à partir de grains de seigle et d’eau provenant de la zone d’exclusion autour de la centrale nucléaire V.I. Lénine, cet alcool est le premier produit de consommation provenant des environs immédiats du réacteur de célèbre mémoire.

« L’équipe de chercheurs a travaillé plusieurs années dans la zone d’exclusion pour étudier comment l’environnement avait évolué depuis la plus grave catastrophe nucléaire du XXe siècle. C’est ainsi que le projet Atomik a débuté, avec le lancement d’une plantation dans une ferme située dans la zone, rapporte Le Monde. Après avoir distillé des grains de seigle légèrement radioactifs et de l’eau provenant de l’aquifère de Tchernobyl, des tests ont été conduits sur le résultat par l’Institut hydro-météorologique d’Ukraine, les laboratoires géologie des universités de Southampton et de Portsmouth, ainsi qu’un laboratoire indépendant de tests de vin et d’alcool, précise l’université de Portsmouth sur son site Internet. »

Résultat ? « Il n’y a pas plus de radioactivité que dans n’importe quelle autre vodka » (re-re-sic), se félicite le Pr Jim Smith, de l’université de Portsmouth et membre de la Chernobyl Spirit Company. Toujours selon le Pr Smith, le projet de la Chernobyl Spirit Company ne vise pas uniquement à faire du profit en vendant la vodka « Atomik ». L’essentiel des profits sera redistribué aux habitants vivant autour de la zone d’exclusion, qui souffrent d’une situation économique toujours difficile.

On ne sait pas, vu de France, s’il faut entendre les propos du  Pr Smith comme une forme moderne du traditionnel humour britannique.

A demain @jynau

1 Sur ce thème le remarquable « J’aurais pu finir fou, j’ai préféré écrire des livres » de l’étonnant Laurent SagalovitschSlate.fr, 7 août 2019 — 

Champix® versus cigarette électronique : quand le Dr Ivan Berlin s’expliquait, avant la polémique

Bonjour

Poursuivons notre série « Champix®, Pfizer vs cigarette électronique ». Et ce grâce au site Medscape édition française qui avait, en novembre 2018, publié un entretien (Aude Lecrubier) avec  le Dr Ivan Berlin (Pitié-Salpêtrière, AP-HP), médecin tabacologue et principal investigateur de l’étude ECSMOKE. « La cigarette électronique peut-elle aider au sevrage tabagique ? Si le Royaume-Uni considère que c’est le cas, la question, en France, reste très débattue et en réalité, il n’existe pratiquement aucune donnée scientifique, aucune étude prospective, contrôlée, randomisée sur le sujet, rappelait Medscape. D’où l’importance de l’essai ECSMOKE, destiné à évaluer scientifiquement l’intérêt de la cigarette électronique comme aide au sevrage tabagique en la comparant à un médicament ayant déjà l’AMM dans cette indication, la varénicline (Champix®, Pfizer). Lancée le 17 octobre par l’AP-HP, cette étude française est très attendue. »

Medscape observait aussi que cet essai suscitait des critiques sur sa méthodologie 1 et son coût, notamment de la part de ceux qui pensent qu’une telle étude est inutile alors que de nombreux fumeurs se tournent déjà spontanément vers la cigarette électronique pour arrêter de fumer. D’où sa décision de donner la parole au Dr Ivan Berlin « pour faire la lumière sur les dessous de l’étude et répondre aux différentes interrogations soulevées par ses détracteurs ». Cinq mois plus tard, alors qu’une controverse se développe sur les difficultés du recrutement des volontaires, cet entretien a conservé toute son actualité. Extraits :

« Quel est le rationnel de votre étude ?

Ivan Berlin : On attend cette étude dans le monde entier parce qu’il n’en existe aucune de ce type. Les cigarettes électroniques sont accessibles depuis 2012 environ. Pourtant, à ce jour, on ne compte que deux essais randomisés évaluant la cigarette électronique dans le sevrage tabagique (…) En revanche, il y a eu de nombreuses études observationnelles. Certaines ont conclu que la cigarette électronique aidait à arrêter et d’autres que la e-cigarette stimulait le tabagisme. Le problème des études observationnelles est qu’elles n’étudient pas des groupes homogènes. Les résultats vont donc dans tous les sens. Il fallait donc faire une étude pivot avec une randomisation correcte, avec très peu de critères d’exclusion qui permette d’avoir des données d’efficacité mais aussi de tolérance.

Quel est l’enjeu majeur de cet essai ?

– S’il s’avère que la cigarette électronique est non inférieure à la varénicline, cela voudra dire qu’elle fait aussi bien. Si c’est le cas, elle pourra devenir un traitement de première intention. Elle pourra être considérée comme un médicament, vendue en pharmacie, délivrée sous prescription…L’enjeu est énorme. Mais, rappelons qu’on ne pourra pas extrapoler nos conclusions à d’autres cigarettes électroniques, d’autres liquides, à des doses et à des populations différentes (les femmes enceintes ou allaitantes, les moins de 18 ans…).

Quels sont pour vous les points forts de l’étude ?

– Les forces de l’étude sont le double aveugle et le double placebo, la randomisation et l’effectif élevé.  Aussi, en comparaison de la majorité des études observationnelles qui recueillent les données de façon déclarative sur internet, ici, nous avons un contrôle biologique du tabac dans les urines. On sait vraiment si les participants fument ou pas. Enfin, cette étude est complètement indépendante de l’industrie du tabac et de l’industrie de pharmaceutique. Pfizer n’a pas souhaité nous fournir gratuitement les comprimés de varénicline (sic)

Pourquoi avoir choisi la varénicline comme référence et non les patchs nicotiniques ?

– D’une part parce que la varénicline est le traitement le plus efficace dans le sevrage tabagique. Mais aussi, parce qu’il est très compliqué de faire des placebos de patchs nicotiniques. Il s’agit de vieux produits et les fabricants n’en ont plus. Ils ne veulent pas s’engager à fabriquer des placebos parce que pour cela, il faut nettoyer les machines afin d’éviter toute contamination, contrôler, c’est fastidieux. Il est beaucoup plus simple de fabriquer des comprimés placebo. Dans cette étude, c’est la pharmacie centrale des essais cliniques de l’Assistance Publique qui a pris la responsabilité de la fabrication des comprimés de placebo (…)

Quelle cigarette électronique et quel e-liquide avez-vous choisi et pourquoi ?

– Les cigarettes électroniques que nous avons utilisées sont un standard. Il s’agit de la marque Eleaf, chinoise, comme toutes les autres. Le liquide est fabriqué par une société française qui s’appelle Gaiatrend, et qui est située à côté de Strasbourg. Il s’agit de l’une des deux seules sociétés qui a répondu à notre appel d’offre. Cette société n’a aucune relation avec l’industrie du tabac, elle contrôle la qualité des lots, et elle répond à certaines normes de sécurité, notamment sur la sécurisation des bouchons pour les enfants, des conditions importantes de notre cahier des charges

Certains mettent en doute l’aveugle avec les cigarettes électroniques en disant que le participant peut facilement sentir si sa cigarette électronique contient de la nicotine en raison du « throat hit » ?

– Aux visites, les participants seront soumis à un guess test. Nous allons leur demander s’ils pensent qu’ils sont dans le groupe « placebo-placebo », « varénicline » ou « cigarette électronique avec nicotine ». Il est possible qu’ils devinent dans quel groupe ils sont. Toutefois, pour minimiser les risques, nous avons fait fabriquer des flacons non transparents et acheté des cigarettes électroniques non-transparentes avec des clearomiseurs – réservoir de e-liquide – jaunes pour voir le niveau de liquide mais pas sa couleur car la nicotine peut devenir jaune avec le temps. Ce sont des détails très importants.

L’étude est aussi critiquée pour son coût, autour de 900 000 euros… Que répondez-vous ?

– Les essais thérapeutiques sont très onéreux. Cette étude est moins coûteuse que si elle avait été réalisée dans le privé. Nous avons acheté les comprimés de varénicline à Pfizer. Il fallait payer une société pour qu’elle fabrique le placebo, et conditionne tous les comprimés. Il a fallu aussi acheter les appareils de cigarette électronique, les résistances, le liquide. Rien qu’en matériel et médicament nous en avons eu pour pas loin de 500 000 euros. Et, comme il s’agit d’une vaste étude, plusieurs personnes y travaillent, il y a donc des salaires à couvrir. »

Au terme de cet entretien au terme Medscape précise que « le Dr Ivan Berlin déclare des liens d’intérêt avec Pfizer ».

A demain

@jynau

1 ECSMOKE devrait inclure au minimum 650 personnes fumant au moins 10 cigarettes par jour, âgées de 18 à 70 ans et souhaitant arrêter de fumer. Les femmes enceintes et allaitantes étaient exclues. Des médecins de 12 consultations de tabacologie de plusieurs hôpitaux à Angers, Caen, Clamart, Clermont-Ferrand, La Rochelle, Lille, Lyon, Nancy, Nîmes, Paris, Poitiers et Villejuif prendront en charge chaque participant pendant 6 mois.

Les participants seront randomisés en double aveugle entre 3 bras : groupe placebo : 4 comprimés de placebo/j et e-cigarette avec liquide sans nicotine ; groupe nicotine : 4 comprimés de placebo/j + e-cigarette avec nicotine (12 mg/mL) ; groupe varénicline (référence) : 4 comprimés de varénicline/j et e-cigarette sans nicotine

L’arrêt du tabac devra survenir dans les 7 à 15 jours suivant l’inclusion du participant dans l’étude. Une consultation aura lieu avant le démarrage de l’étude, puis 6 visites seront programmées. L’évaluation du sevrage tabagique se fera à travers des examens cliniques, biologiques et par questionnaires. Les patients qui seraient amenés à rechuter resteront dans l’étude avec le même suivi.

Le critère primaire d’évaluation est le taux d’abstinence tabagique continu au cours des quatre dernières semaines d’une période de traitement de 3 mois.

L’étude devrait permettre de répondre à deux questions : Est-ce que la cigarette électronique contenant de la nicotine est supérieure à son placebo ? Est-ce que la cigarette électronique contenant de la nicotine est non-inférieure au traitement de référence du sevrage tabagique qu’est la varénicline ?

En parallèle, les chercheurs espèrent recueillir des données sur les risques associés à la cigarette électronique, notamment chez les plus de 45 ans, âge à partir duquel la majorité des fumeurs a déjà un trouble de santé lié à son tabagisme.

 

 

 

Bras de fer du tonnerre à Saint-Brieuc : cent-vingt médecins défient leur direction hospitalière

Bonjour

Comment « manager » un hôpital contre son corps médical ? Phénomène sans précédent au centre hospitalier de Saint Brieuc (Côtes d’Armor) :  près de cent-vingt médecins, dont les quarante-huit membres de la commission médicale d’établissement (CME), viennent de démissionner de leur fonction administrative dans les différentes commissions (médicale, matériel, gardes et astreintes, lutte contre les infections nosocomiales) de l’établissement. Tous ont écrit et signé un courrier que le président de la CME a remis sur le bureau de la direction. « C’est près d’un tiers des personnels médicaux de l’hôpital qui signifie ainsi leur désapprobation. Tous continuerons en revanche leur activité de soins » résume Le Quotidien du Médecin (Martin Dumas Primbault).

Pourquoi ? A cause, dit-on, de « plusieurs décisions controversées de la direction ». A commencer par le non-remplacement de quarante-deux CDD au sein de différents services de l’établissement  (1 247 lits et places répartis sur deux sites principaux). Mais celle qui agace le plus les médecins, c’est le projet de création d’un nouveau pôle ambulatoire qui coûterait 25 millions d’euros, explique au « Quotidien » le Dr Christian Brice, urgentiste au sein de l’hôpital. « À côté de cela, aucun autre projet proposé par la communauté médicale n’avance », se désole le praticien encarté à l’Association des médecins urgentistes de France. Dans son service, huit postes ont été supprimés dont celui de l’agent de sécurité chargé de protéger les personnels des violences aux urgences.

Objectif de la démission groupée : « rompre tout lien médico-administratif » avec une direction privilégiant une transmission verticale. Pour sa part la direction a pris acte de la démission des médecins qu’elle attribue à « un contexte de déficit important depuis l’année dernière, situation que l’établissement n’avait pas connue depuis de nombreuses années ». Elle se propose aussi de « faire évoluer le management de l’établissement et relever les enjeux de l’hôpital de demain ».

Une grave crise du management

L’affaire est également traitée par Medscape France : « Médecins du CH de Saint-Brieuc : les vraies raisons de leur démission » (Philippe Anaton). Où l’on apprend que les démissionnaires ne remettent pas en cause les projets de restructuration portés par le centre hospitalier. Bien au contraire. Dans un communiqué expliquant leur geste, la communauté médicale de Saint-Brieuc dit ainsi approuver, par exemple, « le projet de bâtiment ambulatoire, projet qui a été mené en concertation avec les soignants ».

La communauté médicale de Saint-Brieuc n’a pas non plus démissionné pour protester contre un manque de personnel. « La démission collective des médecins de Saint-Brieuc est le résultat d’une crise du management vieille de dix-huit mois, analyse Medscape. Cette crise a débuté en mai 2017, suite à une réunion médicale exceptionnelle organisée par le président de la CME, Benoit Moquet, et la vice-présidente, le Dr Cinthia Garignon. Cette réunion avait pour but de répondre à un malaise grandissant dans la communauté médicale. Quatre-vingt médecins réunis avait alors exprimé leur défiance vis-à-vis de la direction de l’établissement (…) »

Nouvelle crise aujourd’hui, et nouvelle mobilisation des médecins qui ont de nouveau fait part de leur inquiétude quant à l’évolution de leur établissement et du GHT des Côtes d’Armor auquel il appartient. La direction a proposé de nouveau une médiation, rejetée du revers de la main par la communauté médicale. « Plutôt qu’une médiation, nous demandons qu’un véritable diagnostic soit porté sur le mode de gouvernance de cet établissement », écrivent les médecins dans leur communiqué. Comment mieux dire ?

Si l’on en croit l’Agence de Presse Médicale, la direction aurait indiqué avoir « entendu les attentes exprimées par la communauté médicale et souhaite retrouver rapidement la voie d’un travail collaboratif en confiance ». Pour autant la situation est plus bloquée que jamais. Et voici Paris qui s’inquiète : une enquête de l’Inspection générale des affaires sociales a été ouverte.

A demain

Quel sera le prix du jour de migraine mensuelle évité grâce à Aimovig® 70 mg auto-injecté ?

Bonjour

On attend, déjà, la campagne de publicité qui suivra : à Londres l’Agence européenne du médicament (EMA) vient de donner son feu vert à l’érénumab (Aimovig®). C’est le premier (et pour l’heure le seul) médicament d’une toute nouvelle classe de médicaments qui cible spécifiquement le calcitonine gene related peptide (CGRP). L’affaire est résumée, depuis Bâle, dans un communiqué du laboratoire Novartis.

Autre nouveauté : ce traitement préventif est auto-administré toutes les quatre semaines grâce au stylo injecteur SureClick® toutes les 4 semaines. La décision de l’EMA s’applique aux vingt-huit pays européens membres de l’Union Européenne plus l’Islande, la Norvège et le Liechtenstein. Aimovig® avait déjà été approuvé aux USA, en Suisse et en Australie.

Le site Medscape France (Stéphanie Lavaud) rappelle qu’en juin dernier le Comité des médicaments à usage humain de l’EMA avait donné un avis favorable à la mise sur le marché de l’Aimovig®. Comme la FDA, 15 jours auparavant. L’EMA a retenu les résultats de deux études pivots. L’une a porté sur 667 personnes souffrant de migraine chronique et l’autre sur 995 victimes de migraine épisodique.

Opinion des migraineux

« Après 3 mois de traitement, les patients souffrant de migraines chroniques ont bénéficié d’une réduction de 2,5 jours de migraine par mois en moyenne par rapport au placebo, résume le site. Ceux avec une migraine épisodique ont, quant à eux, connu une réduction de 1,3 à 1,8 jours de migraine, en fonction de la dose prise. L’effet indésirable le plus fréquent a été une réaction au site d’injection, la constipation, des spasmes musculaires et un prurit. »

On pourrait penser qu’une réduction de un à deux jours de crise est une bien maigre avancée. Les migraineux auront sans soute une opinion inverse. En pratique Aimovig® 70 mg ne sera indiqué que pour les personnes souffrant au minimum quatre jours de migraine tous les mois. Elles pourront s’injecter elles-mêmes cet anticorps monoclonal après avoir été formées au geste. Dans un premier temps toutefois la prescription de l’anticorps devrait être réservée aux médecins expérimentés dans le traitement de la migraine.

Aimovig® est le premier « anti-CGRP » commercialisé. D’autres sont actuellement en développement, dirigés contre le ligand (éptinézumab, frémanézumab, galcanézumab). C’est à l’évidence, au vu de la prévalence des migraines handicapantes, un nouveau marché hautement prometteur. Un marché qui sera modulé par les prix à venir, le respect des indications et les données d’efficacité à long terme. Sans oublier l’impact des publicités.

A demain

Modifier les génomes : les ciseaux thérapeutiques CRISPR sont-ils correctement affûtés ?

Bonjour

Trop simple pour être vrai ? Trop dangereux pour continuer ? « Alors que les premiers essais cliniques de thérapie génique utilisant les ciseaux génétiques CRISPR Cas 9 débutent cette année, une nouvelle étude montre que la technique révolutionnaire pourrait endommager l’ADN qui se situ autour de la zone à modifier, et ce dans des proportions inattendues » résume le site Medscape France.

Ces données a priori inquiétantes viennent d’être publiées dans la revue Nature Biotechnology : « Repair of double-strand breaks induced by CRISPR–Cas9 leads to large deletions and complex rearrangements ». Cette étude, qui a porté sur des cellules de souris et des cellules humaines, établit que la technique CRISPR/Cas9 induit fréquemment des mutations étendues.

On ne présente plus CRISPR/Cas9, outil vanté comme une possibilité quasi-miraculeuse de ré-éditer à la demande les génomes des organismes vivants. Une technique qui fait fantasmer les transhumanistes, dont les brevets sont âprement discutés, utilisée en recherche fondamentale et considérée aujourd’hui comme une nouvelle possibilité dans le champ de la thérapie génique 1.

Pas de panique

« Jusqu’ici, d’après les observations sur plusieurs variétés de cellules, les chercheurs pensaient que les mécanismes naturels de réparation de l’ADN suivant la coupure du Cas9 n’induisaient que des petites insertions ou délétions de moins de 20 paires de bases ou des modifications de quelques centaines de nucléotides dans de rares cas, précise Medscape France (Kate Kelland, Aude Lecrubier). En conséquence, Cas9 a été considéré comme raisonnablement spécifique et des premiers essais cliniques utilisant les ciseaux génétiques Cas9 ont été autorisés (clinicaltrials.gov: NCT03081715, NCT03398967, NCT03166878, NCT02793856, NCT03044743, NCT03164135). »

Et le site d’ajouter une citation du Pr Allan Bradley (Wellcome Sanger Institute, RU), co-auteur de l’étude : « Nous avons observé que les modifications de l’ADN avaient été sérieusement sous-estimées. Toutes les personnes qui pensent utiliser cette technologie pour de la thérapie génique’’ doivent procéder avec beaucoup de précautions et être très attentives ‘’ afin de repérer d’éventuels effets délétères ».

Medscape a aussi interrogé Robin Lovell-Badge, spécialiste des cellules souches au Francis Crick Institute (Royaume-Uni). Selon lui  que ces travaux soulignent l’importance de travailler avec beaucoup d’attention pour « vérifier que les altérations de la séquence ADN sont bien celles qui sont attendues et seulement celles-là ». Il ajoute : « Ces résultats ne doivent pas créer la panique ou faire perdre la foi en ces méthodes lorsqu’elles sont réalisées par des gens qui savent ce qu’ils font ».

Paniquer ? Perdre la foi ? Savoir ce que l’on fait ? En France la technique CRISPR Cas 9 et les usages qui peuvent ou pourraient en être fait n’ont malheureusement pas encore suscité les larges débats éthiques qui, en toute logique démocratique, devraient être menés.

A demain

1 Les papiers de ce blog consacrés au CISPR sont disponible à cette adresse :  https://jeanyvesnau.com/?s=CRISPR

 

Hypertension artérielle : quand Emmanuel Macron honorera-t-il sa promesse de campagne ?

Bonjour

Flash d’actualité (24 avril 2018) : en France l’hypertension artérielle (HTA), loin d’être éradiquée, demeure un fléau majeur. Une situation inacceptable au regard des outils disponibles et de notre maillage médical. C’est le principal enseignement des résultats (rendus publics aujourd’hui par Santé publique France) de l’étude « Esteban » – une enquête transversale menée en France entre 2014 et 2016 auprès d’adultes âgés de 18 à 74 ans. Conclusion : la prévalence de l’HTA était de 30,6%, plus élevée chez les hommes que chez les femmes (36,5% vs 25,2%) et augmentait avec l’âge. 1

« Seule une personne sur deux avait connaissance de son hypertension. Parmi les personnes hypertendues, 47,3%  étaient traitées par un médicament à action antihypertensive. Parmi les personnes traitées, seulement 55,0% avaient une pression artérielle contrôlée (44,9% chez les hommes et 66,5% chez les femmes). »

« Depuis 2006, aucune diminution de la prévalence de l’HTA n’a été observée en France, avec toujours un adulte sur trois hypertendu. De plus, aucune amélioration du dépistage et de la prise en charge de l’HTA n’a pu être mise en évidence. Chez les femmes, la prise en charge thérapeutique s’est même dégradée sur la période. »

 Rappels : faut-il redire quelques vérités ? Que l’HTA constitue le principal facteur de risque d’accident vasculaire cérébral et un facteur de risque important de morbi-mortalité cardiovasculaire – avec une relation linéaire entre le niveau de pression artérielle et le risque cardiovasculaire quel que soit l’âge. Que la mortalité cardiovasculaire double pour chaque augmentation de 20/10 mm Hg de la pression artérielle systolique/diastolique. Que l’HTA est aussi la cause de nombreuses autres pathologies, tout aussi invalidantes  : insuffisance rénale, insuffisance cardiaque, anévrysme artériel, dissection aortique, arythmie, démence …

Or c’est aussi une pathologie qui peut formidablement répondre à la prévention et à la prise en charge thérapeutique : mesures hygiéno-diététiques (perte de poids, réduction des  apports nutritionnels en sel, de la sédentarité…) et/ou prescription d’un traitement antihypertenseur.

« Ces  mesures ont démontré leur efficacité sur la morbi-mortalité cardiovasculaire dans de nombreux essais thérapeutiques  avec, notamment, une réduction de 7% et 10% du risque de mortalité par coronaropathie et accident vasculaire cérébral pour une réduction de 2 mmHg de la pression artérielle.

« Et pourtant, une proportion encore trop importante d’hypertendus n’est aujourd’hui pas dépistée ; ceux qui sont dépistés ne sont pas toujours traités et les personnes traitées n’ont pas toujours une pression artérielle normalisée. »

La faute médicale de Xavier Bertrand (juin 2011) : contre le bon sens et en dépit des alertes lancées par les meilleurs spécialistes 2 une forme grave d’HTA (l’hypertension artérielle dite « sévère ») était retirée de la liste des « affections de longue durée » – et ce au motif que l’hypertension sévère était un facteur de risque et non une maladie avérée La décision avait été prise via un décret signé, pour François Fillon, Premier ministre, par Xavier Bertrand, ministre du Travail, de l’Emploi et de la Santé, François Baroin, ministre du Budget, des Comptes publics, de la Fonction publique et de la réforme de l’Etat, porte-parole du Gouvernement – sans oublier Nora Berra, secrétaire d’Etat chargée de la Santé.

La promesse d’Emmanuel Macron et du Pr Jean-Jacques Mourad : soit une affaire qui date de mars 2017 ; l’affaire dite « Jean-Jacques Mourad », du nom d’un spécialiste de l’hypertension artérielle qui occupait un poste de « conseiller santé » dans le mouvement « En Marche ! » d’Emmanuel Macron  – affaire alors justement résumée par site Medscape (Jean-Bernard Gervais) : « Fin de campagne pour le Pr Jean-Jacques Mourad pour cause de conflits d’intérêt ».

Il n’en reste pas moins vrai que, sur son engagement dans le « pôle santé » d’Emmanuel Macron, le Pr Mourad expliquait s’être borné à s’investir dans quatre thèmes – dont le rétablissement à 100% de la prise en charge de l’HTA sévère. (« Nous rétablirons le remboursement à 100% du traitement des formes sévères d’hypertension artérielle») .

Un an après le président Macron, champion de la prévention, se souvient-il du Pr Mourad ?

A demain

 1« L’hypertension artérielle en France, prévalence, traitement, et contrôle, en 2015 et évolutions depuis 2006 », Anne-Laure Perrine , Camille Lecoffre , Jacques Blacher, Valérie Olié

2 « L’hypertension, nouveau symbole d’une politique de santé court-termiste et choquante » de Nicolas Postel-Vinay Slate.fr 30 juin 2011.

Combien de maternités françaises vont-elles devenir pleinement bienveillantes ? 

Bonjour

Sujet de Noël rêvé. Il est à lire sur Medscape France (Stéphanie Lavaud) : « Un label ‘’maternité’’ pour faire de la bienveillance une priorité ». Où l’on apprend que, sous la houlette de son président le Pr Israël Nisand, le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) a décidé de mettre en place un « label maternité » –  label décerné aux établissements qui répondront à un certain nombre de critères relatifs à l’information des femmes et à la bienveillance de l’accueil.

Il faut voir dans cette initiative une (heureuse) réponse aux accusations de violences gynécologiques qui ont émergé cet derniers mois dans les médias, sur les réseaux sociaux – des accusations amplifiées qui plus est avec les déclarations plus qu’approximatives de Marlène Schiappa, secrétaire d’Etat à l’Egalité des femmes et des hommes concernant, notamment, les épisiotomies. Au final un « gynéco-bashing » face auquel la profession a choisi de réagir : les praticiens du CNGOF ont décidé, comme l’a expliqué le Pr Nisand, « d’upgrader la qualité – non pas technique, car la France est déjà dans le peloton de tête sur la sécurité des naissances – mais en termes de bientraitance ».

Pourquoi tant de violences ?

« Upgrader » la qualité, donc, plutôt que rester à dénoncer les accusateurs et leurs violences. Progresser plutôt que de pester contre un déferlement vécu comme une punition collective. Israël Nisand : « l’alerte que nous avons eu tout du long de l’année, nous en tenons compte, même si ce n’est pas nous qui sommes violents. La naissance est une violence, et nous devons l’atténuer encore mieux que nous ne l’avons fait jusqu’à présent ». Medscape France :

« Si les gynéco-obstétriciens disent avoir été meurtris par les accusations portées par certaines femmes, ils n’en reconnaissent pas moins « qu’ils ont parfois du mal à y mettre les formes. ‘’Dire que la femme et l’enfant se portent bien, c’est le minimum minimorum mais ça ne suffit plus. Nous avons tellement avancé sur la sécurité que l’on peut passer à la vitesse supérieure. C’est-à-dire veiller à l’équilibre psychique et à l’intégrité de la femme ‘’ reconnait le Pr Nisand.

 « De son côté, le Dr Amina Yamgnane (gynécologue-obstétricienne, Neuilly) rappelle que ‘’l’accouchement est un moment de charge émotionnelle intense pour tous, famille et accoucheurs ». Lors de  »situations extrêmes, les accoucheurs, qui sont des êtres humains, peuvent parfois tenir des propos violents dans le feu dans l’action. Sous l’effet du stress, il peut y avoir des sorties de route langagière.’’ C’est pourquoi, ‘’il faut toujours revoir la patiente, à froid, pour aller discuter avec elle de ce qui s’est passé’’ estime la chef de service de la maternité de l’Hôpital américain. Avant d’ajouter que ce qui s’est passé cet été ‘’ne questionne pas le savoir-faire des soignants mais le savoir-dire et le savoir-être’’ ».

 Combien d’épisiotomies ?

En pratique le label sera proposé aux maternités qui souhaitent « améliorer leur qualité et leur accueil ». Pour être labellisées, les maternités volontaires devront s’engager à respecter quatorze critères (afficher leur taux d’épisiotomies, de césariennes, d’extractions instrumentales, élaborer un projet de naissance pour la maman, s’assurer de la formation de son personnel médical et paramédical à la bienveillance et à la bientraitance, etc.). De plus les femmes qui accoucheront dans ces maternités « bienveillantes et bientraitantes »  bénéficieront d’une application grâce à laquelle elles recevront en temps et heure tout au long de leur grossesse une information « neutre et collective. » Cette application les incitera aussi à « élaborer un projet de naissance réaliste et compatible avec la sécurité ».

Ce label devrait commencer à voir le jour durant l’été 2018 et le Pr Nisand espère que la moitié des 513 maternités françaises pourront l’obtenir. Une belle issue après la polémique ; un sujet de rêve pour le prochain Noël.

A demain

Brexit : le Viagra® en vente libre dans toutes les bonnes pharmacies du Royaume-Uni

Bonjour

Vingt ans plus tard, le Viagra en automédication… C’est une information de la BBC ( « Viagra can be sold over the counter »), reprise par le géant Pfizer et Medscape France (Aude Lecrubier) : « Le Royaume-Uni autorise le Viagra sans passer par la case médecin ». L’affaire devrait être conclue au printemps prochain.

C’est l’agence britannique du médicament, la Medicines and Healthcare products regulatory agency (MHRA) qui a mené les débats et accordé au sildénafil 50 mg (Viagra Connect®) le statut de médicament en vente libre – à la condition qu’il soit délivré uniquement en pharmacie d’officine.

« Le Royaume Uni n’est pas le premier pays à avoir autorisé la petite pilule bleue OTC (over the counter). Il a été précédé par la Nouvelle Zélande en 2014, et la Pologne en 2016 (avec un générique), rappelle Medscape.

En revanche, l’agence européenne du médicament (EMA) et l’ANSM en France restent réticentes à la délivrance de médicaments contre la dysfonction érectile sans prescription médicale en raison des contre-indications, des effets secondaires possibles et des risques de mésusage. »

Contre les contrefaçons

Rappelons ici, à titre de précaution, ces contre-indications :

« Ce médicament ne doit pas être utilisé dans les cas suivants : fragilité cardiovasculaire contre-indiquant l’effort que représente l’acte sexuel (angine de poitrine grave, insuffisance cardiaque grave…) ; situations dans lesquelles l’effet du médicament n’a pas été étudié : insuffisance hépatique grave, hypotension grave, antécédent récent d’accident vasculaire cérébral ou d’infarctus du myocarde, maladie grave de la rétine (rétinite pigmentaire) ; altération de la vision due à une atteinte du nerf optique ; en association avec des vasodilatateurs nitrés (voir Interactions médicamenteuses). »

Quels sont, dès lors, les arguments de ceux qui prônent l’automédication ? Ils font valoir (Pfizer en tête) qu’un accès facilité au Viagra® dans les pharmacies, pourrait limiter l’usage de contrefaçons potentiellement inefficaces ou dangereuses. « Il est important que les hommes sachent qu’ils peuvent avoir un accès rapide […au traitement] sans sentir le besoin de se tourner vers des contrefaçons vendues en ligne qui pourraient avoir des effets secondaires sévères, » explique pour sa part Mick Foy, chef du département de la pharmacovigilance de la MHRA.

Medscape ajoute que, pour Pfizer, les pharmaciens d’officine sont bien placés pour fournir aux hommes des conseils utiles et appropriés pour gérer leur dysfonction érectile. Bien placés, aussi, pour leur conseiller de consulter un médecin s’ils jugent que l’état de santé client nécessite un examen plus approfondi. Autant d’arguments que l’on peut tenir pour être d’une particulière fragilité.

Nonobstant, le géant vient de lancer un programme d’éducation des pharmaciens britanniques en prévision du lancement , au printemps, de son Viagra Connect® OTC.

A demain

L’étrange affaire du Levothyrox : un simple faux ou un véritable scandale sanitaire ?   

Bonjour

Comment comprendre l’étrange quand il sonne à votre porte ? Page 39 d’un Journal du Dimanche plus macron-centré que jamais on trouve une tribune signé d’André Grimaldi, diabétologue redoutable, bien connu des médias et de Jacques Young, endocrinologue. Sous le titre « Le faux scandale du Levothyrox ,» ces deux spécialistes avancent une hypothèse qui ne manque pas de déranger. Ils estiment en substance que le phénomène qui a pris le nom de cette spécialité pharmaceutique n’est que le fruit d’un effet nocebo associé à un emballement collectif né de l’activité des médias donnant écho à « certains leaders d’opinions (artistes ou autres) ».

« Et si les déclarations alarmistes, voire complotistes, avaient déclenché un effet nocebo massif ? » demandent les deux spécialistes – qui, non sans paradoxe, s’interrogent sur la question (essentielle) de la décrédibilisation des « experts ». Décrédibilisation corollaire des décideurs institutionnels et politiques. Et de qualifier d’ « absurde » la mise en cause de deux ministres (Agnès Buzyn et Bruno Le Maire) de même que celle de l’Agence nationale de sécurité du médicament.

L’absurdité n’est peut être pas là où on pourrait, rapidement, la situer. Il faut ici souligner que l’affaire Levothyrox française a connu, au minimum, un précédent comme le rapportait le site Medscape (Stéphanie Lavaud) le 13 octobre dernier.

Détresse émotionnelle

« Ce qui s’est passé en France n’est pas sans rappeler l’épisode néo-zélandais qui s’est déroulé en 2007 où un changement dans la composition d’un médicament contre l’hypothyroïdie a entraîné un boom des signalements d’effets indésirables (1400 en 18 mois contre 14 en 30 ans). La situation a fait l’objet d’un article dans le British Medical Journal  . Des analyses du médicament ont montré que la nouvelle version était bioéquivalente à l’ancienne. Et si 5% des patients pouvaient avoir expérimenté des effets secondaires liés au nouveau produit, il a été considéré que la composition de la nouvelle formule ne pouvait expliquer la majorité des effets.

« D’autres facteurs ont été suggérés pour expliquer cette recrudescence soudaine d’EI parmi lesquels le manque d’information des patients, des rumeurs autour de la production du nouveau produit, l’absence d’alternative médicamenteuse, la couverture médiatique et la relative fragilité des patients.

« ‘’Les personnes avec des plus hauts niveaux de détresse émotionnelle et d’anxiété sont plus susceptibles d’attribuer des symptômes physiques à une intervention médicale ou à une maladie, ont considéré les auteurs dans leur analyse. Les patients souffrant d’hypothyroïdie, même ceux qui prennent un traitement de substitution, sont connus pour avoir plus de stress et de symptômes qu’une personne en bonne santé’’». Selon les chercheurs, des symptômes secondaires au traitement ‘’pourraient avoir été perçus à tort comme des effets indésirables nocifs plutôt que comme un signe de la nécessité d’une réévaluation du dosage’’».

L’ANSM qui (comme la ministre de la Santé) a fait la même analyse, omet de rappeler l’antécédent néo-zélandais. Pourquoi ne l’a-t-elle pas anticipé ? Pourquoi n’a-t-elle pas pris la mesure des effets désormais hautement dangereux des effets nocebos potentiels – associés au bouillon de culture des réseaux sociaux ? De ce point de vue la mise en cause de cette agence – et celle des représentants de l’exécutif – est-elle véritablement une absurdité ?

A demain