Stades alcoolisés: Agnès Buzyn avoue qu’elle ne savait pas que l’on buvait dans les loges VIP

Bonjour

Existe-t-il, en France, un privilège des ivresses ? Où l’on retrouve la polémique sur la permission donnée ou pas à l’alcoolisation des enceintes sportives. Les députés macroniens qui y son favorables parlent ici d’ « assouplissement de la vente d’alcool dans les stades » . Un souhait législatif que semble ne guère goûter Agnès Buzyn ministre macronienne des Solidarités et de la Santé.

Elle ne s’était ici, curieusement, que fort peu exprimée – se bornant à tweeter sur la « ferveur ».  Au point que certains postulaient un veto de l’Elysée. Or la ministre vient de dire, sur BFMTV, son opposition à toute forme d’assouplissement de la loi Evin concernant ce chapitre alcoolique. Et l’AFP/L’Express de souligner qu’Agnès Buzyn avait avoué qu’elle ne « savait pas » qu’on buvait de l’alcool dans les loges des VIP 1.

Maintien des privilèges

Alors que Jean-Jacques Bourdin (le journaliste) lui faisait observer que les « VIP » buvaient (notamment) du champagne (parfois millésimé) dans les « loges » de ces stades, la ministre des Solidarité et de la Santé a assuré qu’elle ne le savait pas. En riant, elle a souligné qu’elle n’allait pas dans ces « loges. » « Si une question doit se poser c’est plutôt celle-là, celle de supprimer l’alcool dans les loges VIP », a-t-elle répondu, toujours en souriant. Les loges et les salons VIP des stades ne sont pas soumis aux réglementations de la loi Evin mais sont régis par une loi sur la restauration, rappelle Le Parisien.

Une telle ignorance ministérielle, associée à l’hypothèse de la suppression de l’exception alcoolique, fait amplement réagir sur les réseaux sociaux. Or, selon son cabinet, « elle a simplement retourné l’argument qu’on lui opposait sous forme de boutade, assure-t-on. Il n’y a aucun projet d’interdiction de l’alcool dans les loges VIP. »

Ainsi donc il existe bien en France, en ce mois d’août 2019, des privilèges que le pouvoir en place ne semble pas vouloir abolir.

A demain

1 « VIP » ou « V.I.P. » : [Surtout dans la lang. des journalistes et des rel. publ.] Personnalité de marque, personnage très important. C’était un meeting avec tous les vip, vraiment le top, quoi (Le Point, 3 oct. 1977, p. 103, col. 2).Inter-Hôtel VIP est la carte crédit des VIP de l’entreprise (Le Point, 21 mai 1979, p. 168).

− En appos. La semaine dernière nous vous avions parlé de trois jeunes réalisatrices de talent (…) et des invités V-I-P qui bronzeront (?) au soleil de Deauville (Elle, 12 sept. 1977, p. 5, col. 1).

Prononc.: [veipe]. Étymol. et Hist. 1958 un V.I.P. (L’Aurore, 9 sept., 1d ds Höfler Anglic.); 1959 aux V.I.P. (Etiemble, Le Babélien, 1repart., p. 89); 1966 les VIPS (L’Express, 26 déc. 1966-1erjanv. 1967, 26b ds Höfler Anglic.). Empr. à l’angl.V.I.P., VIP, init. de very important person « personne très importante », att. sous les formes inv. V.I.P. puis VIPdep. 1933 et plus rarement Vip, plur. Vips, dep. 1945 ds NED Suppl.2

Christophe Castaner a-t-il commis un attentat véritable contre la langue française ?

Bonjour

C’est la polémique du jour : Christophe Castanet, ancien socialiste aujourd’hui ministre contesté de l’Intérieur est cloué au pilori des puristes politiques. Ces derniers (ils sont souvent loin du centre) l’accusent d’avoir usé du mot « attentat » pour qualifier les dégradations dont sont l’objet un nombre croissant de locaux servant de « permanences » à des élus du parti macroniste. Jusqu’ici le terme « saccage » prévalait.

« En déplacement à Perpignan le 31 juillet, Christophe Castaner a préféré parler d’’’attentat’’,  rapporte Le Figaro (Loris Boichot). En marge d’une manifestation des «gilets jaunes» dans la ville des Pyrénées-Orientales, six hommes cagoulés, vêtus de noir, avaient alors transpercé, à coups de raquette de tennis et de marteau, les vitres du local du député LREM Romain Grau. dans lequel se trouvait l’élu. L’un d’entre eux avait déversé de l’essence sur une chaise, avant d’y mettre le feu et de s’enfuir. Aucune interpellation n’a eu lieu à ce stade. »

«Le principe de l’attentat, c’est de préparer l’acte, s’est justifié Christophe Castaner devant les caméras. Là, on a des gens qui sont venus avec des bidons d’essence. Ils s’étaient équipés et ont tenté notamment d’attenter à la vie d’un parlementaire présent dans la permanence». Selon L’Indépendant, le ministre de l’Intérieur a aussi apporté son «soutien à toutes les autres victimes d’attentats tels que celui qui a été commis samedi dernier. Et ce, quelle que soit leur couleur politique». Une allusion aux plus de soixante-dix actes malveillants commis contre les députés de tous bords depuis juin 2017 –  et particulièrement pendant le mouvement des Gilets Jaunes.

Au sein du Rassemblement national (RN), le mot «attentat» est considéré comme un abus de langage. «Ce ne sont pas des attentats. (…) On voit bien [que Christophe Castaner] essaie de justifier lui-même un mot qui résonne autrement dans l’imaginaire collectif», a affirmé jeudi le porte-parole du parti lepéniste, Sébastien Chenu, sur RMC/BFMTV. Et M. Chenu, néanmoins, d’assurer «condamner» ces actes. Mêmes critiques dans les rangs de la gauche de la gauche. Pour le communiste Ian Brossat, impossible d’«[assimiler] une vitre de permanence cassée à un attentat». La fédération rennaise du parti de Jean-Luc Mélenchon, de son côté, voit dans l’emploi de ce terme l’«injonction émotionnelle disproportionnée d’un pouvoir répressif et autoritaire».

Où l’on en vient à se poser la question de la définition du terme. La « préméditation » justifie-t-elle la qualification ?

Mélenchon, Robespierre et Mme de Staël

Si l’on en reste à l’essentiel, avec le CNRTL, l’attentat est une « entreprise criminelle perpétrée contre une personne ou contre une communauté, et particulièrement dans un contexte politique » . Christophe Castaner, ancien socialiste devenu macroniste appréciera comme il se doit ces deux citations :

1 « Vers ce temps, un homme, auquel il faut épargner son nom, proposa de brûler vifs ceux qui seraient convaincus d’un attentat contre la vie du premier consul. » Mmede Staël, Considérations sur les princ. événements de la Révolution fr.,t. 2, 1817, p. 38.

2. « Quelle paix peut exister entre l’oppresseur et l’opprimé? Quelle concorde peut régner où la liberté des suffrages n’est pas même respectée? Toute manière de la violer est un attentat contre la nation. » Robespierre, Discours,Sur la guerre, t. 8, 1792, p. 198.

Mais nous sommes sous la Vème et il nous faut nous pencher sur le  code pénal (article 412-1) : « Constitue un attentat le fait de commettre un ou plusieurs actes de violence de nature à mettre en péril les institutions de la République ou à porter atteinte à l’intégrité du territoire national ». L’attentat y est alors est puni de trente ans de détention criminelle et de 450 000 euros d’amende. Et les peines sont portées à la détention criminelle à perpétuité et à 750 000 euros d’amende lorsque l’attentat est commis par une personne dépositaire de l’autorité publique.

Le débat soulevé est donc le suivant: le saccage/attentat de la permanence d’un député relève-t-il de la «mise en péril des institutions de la République» ? La justice, aveugle, appréciera.

A demain

C’est alors que Rachida Dati, en marche rapide vers la mairie de Paris, se piqua de crack

Bonjour

On l’avait oubliée. La revoici, cette fois sur le front des addictions. Ancienne garde des Sceaux controversée, aujourd’hui maire du VIIe arrondissement de Paris Rachida Dati entend ravir le trône d’Anne Hidalgo. Mais il lui faut d’abord obtenir l’investiture des Républicains, parti politique en déliquescence. Comment, dès lors, faire parler de soi ? En taclant l’édile et ses proches : par exemple les accuser publiquement de ne pas en faire assez en matière de lutte contre les addictions. Et en dénonçant l’existence d’un insupportable abcès à ciel ouvert : la « colline de crack », non loin de la porte de la Chapelle. L’attaque vient d’être lancée dans « Les Grandes Gueules » (sic) sur RMC-BFMTV.

Rachida Dati aime s’indigner et se plaindre,  dire qu’elle paie de sa personne. Elle nous affirme, ici, qu’elle est montée sur la colline pour mieux voir et comprendre le problème. « Aucun élu n’est jamais allé. Quand j’y suis allé une femme femme y avait accouché là-bas sur place totalement sous crack. J’ai discuté avec tout le monde. Des gens désespérés, des gens malades… Et vous savez ce que c’est la réponse de la mairie de Paris …? Un bus de crack ».

Un-bus-de-crack…. L’affaire somme comme une sale rafale de mitraillette. On entend la distribution gratuite de substance illicite à tous les étages de la sinistre colline. Une salle de shoot sur pneumatiques. Or il faut ici remonter au  projet du « plan crack » de la ville de Paris, en août 2018.  « Il y aurait plus de 8 000 consommateurs de crack à Paris dont 200 à 500 seraient en errance, notamment entre le squat de la Colline à la porte de la Chapelle (XVIIIe), la Goutte d’Or (XVIIIe), la gare du Nord (Xe) et Stalingrad (XIXe), rapportait en août 2018 Le Parisien. Des toxicomanes sans abri en grande souffrance psychique dont la prise en charge est très difficile. ‘’C’est un engrenage : plus ces gens sont en déshérence, plus ils consomment, plus ils dealent pour consommer et les choses empirent » souligne l’adjointe à la Santé (EELV) Anne Souyris. »

Une situation d’autant plus délicate, ajoutait alors le quotidien parisien, que les fumeurs de crack ne peuvent pas avoir accès à la « salle de shoot » près de la gare du Nord qui n’autorise que les drogues par injection. D’où l’idée d’un « bus itinérant permettant l’inhalation » soumise par l’élue à la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives (Mildeca). « Un bus itinérant permettrait d’aller au plus près de consommateurs qui d’eux-mêmes ne se tournent pas vers les institutions et d’entamer un suivi » expliquait-elle.

Les lésions de la toxicomanie sont irréversibles

Une telle expérimentation nécessiterait une modification de la loi. La loi n’a pas changé. Ni Agnès Buzyn ni Anne Hidalgo ne semble vraiment passionnées par le sujet. Toutefois, fin mai 2019, un plan de neuf millions d’euros sur trois ans a  été signé (Le Parisien, Cécile Beaulieu) avec cinq acteurs majeurs (préfectures de région et de police, Ville de Paris, Agence régionale de santé et Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives -Midelca).

Le « bus de crack » évoqué par Rachida Dati est absent de ce plan. En revanche différentes mesures ont été décidées. « Les maraudes médico-sociales sur les points de fixation et dans le métro, notamment sur la ligne 12, auront désormais lieu 7 jours 7. En outre, pour favoriser l’entrée dans les parcours de soins, 80 nouvelles places d’hébergement, pérennes pour les usagers de crack, s’ajouteront aux 72 existantes, précisait Le Parisien. Le renforcement du dispositif Aurore permettra, lui, d’ouvrir 60 places de mise à l’abri à l’hôtel, avant que les hébergements pérennes s’y substituent. Objectif : limiter à tout prix l’errance des toxicomanes, qui bénéficieront, en outre, de salles de repos, à proximité des lieux de consommation. Le plan prévoit également une équipe dédiée à la médiation avec les riverains et la création d’un groupe d’enquêteurs spécialisés dans les stupéfiants, à un niveau intermédiaire entre commissariat de quartier et police judiciaire. »

Annoncé également, un local, de type Caarud (Centre d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques pour les usagers de drogues), avec une aide médicale et sociale, des sanitaires, où les consommateurs de crack pourront être reçus dans des conditions dignes et salubres. « Dormir quelques heures, cela permet d’espacer les prises, de drogue, soulignait en mai Anne Souyris, qui espère que les accueils de jour contribueront à casser la dépendance des crackeurs. »

Rachida Dati n’a pas parlé de tout ceci.  Restera, pour les auditeurs, un-bus-de-crack…. « Les lésions de la toxicomanie sont irréversibles, croit savoir l’ancienne garde des Sceaux. J’aurais voulu qu’on fasse comme à Strasbourg, qu’on essaye de les sortir de leurs addictions avec un plan médical. Rien n’est fait dans la lutte contre les addictions, c’est là qu’on doit mettre les moyens. Pour sortir les gens de leurs addictions rien n’est fait. C’est une réalité. »

Pour un peu on douterait de sa sincérité.

A demain @jynau

L’homéopathie déremboursée dès après-demain : la bien étrange intuition d’Agnès Buzyn

Bonjour

L’affaire de l’homéopathie n’est pas finie. Et il faudra décrypter les longues déclarations-justifications d’Agnès Buzyn en date de ce 10 juillet. D’abord dans Le Parisien (Florence Méréo et Elsa Mari), ensuite sur RTL (Elizabeth Martichoux) où la ministre a une nouvelle fois taclé Michèle Rivasi qui évoque le retour de l’Inquisition et des « guérisseurs sans formation » (sic). On y saisira un peu mieux les impasses dans lesquelles se débat la ministre des Solidarités et de la Santé, au croisement asphyxiant de la politique et de la science, du pouvoir et du savoir.

Pour l’heure résumons. A commencer par cette étrange confession au Parisien qui (enfin) lui demandait pourquoi elle avait radicalement changé d’avis. Rappelons (une nouvelle fois) que le 12 avril 2018, invitée de la matinale sur RMC-BFM TV, Agnès Buzyn annonçait, au début de la tourmente, que les spécialités homéopathiques continueraient à être remboursées par l’assurance maladie, même si c’est «probablement un effet placebo». «Les Français y sont attachés. Si cela peut éviter le recours à des médicaments toxiques, je pense nous y gagnons collectivement. Voilà, ça ne fait pas de mal ! », osait alors la ministre qui fut la cible d’innombrables moqueries sur les réseaux sociaux 1.

Aujourd’hui, Agnès Buzyn explique : « cette phrase que j’ai dite reposait sur une intuition ». « Depuis, les études ont parlé, ajoute-t-elle (sans dire lesquelles).Ne pas prendre d’homéopathie n’entraîne pas un report vers plus de médicaments ou d’examens. Les deux ne sont pas liés. Au contraire, les gros consommateurs d’homéopathie ont tendance à utiliser plus de soins en général. »

« Aspirine ou paracétamol, un point c’est tout »

Finalement, qui a tranché : elle ou Emmanuel Macron ? « Nous avons travaillé tous ensemble. Il s’agit d’une décision gouvernementale ». Pourquoi ne pas avoir fait un compromis en déremboursant à 15 %, comme le demandait son prédécesseur Xavier Bertrand ?

« Cela n’aurait pas de sens. Et signifierait que des médicaments dont l’efficacité clinique n’est pas prouvée pourraient quand même être remboursés. Dans ce cas-là, pourquoi ceux-là et pas d’autres ? Quand on est un homme ou une femme politique, on doit être prudent et ne pas aller contre un avis scientifique parce qu’on met alors à mal tout notre système d’évaluation du médicament. Nous devons être rigoureux pour que l’argent public, celui des Français, soit dépensé à bon escient. »

Les menaces à l’emploi des puissants Laboratoires Boiron ?  « Je suis la ministre de la Sécurité sociale, dont l’argent n’a pas vocation à soutenir des entreprises même si elles sont françaises » (sic). « Je ne crois pas pour autant que l’économie des trois laboratoires sera déstabilisée car les Français continueront à utiliser l’homéopathie. Sans compter que des marchés à l’international, notamment en Asie, sont en pleine expansion. »

Maladies qui guérissent « toutes seules »

Faut-il laisser les facultés françaises de médecine et de pharmacie continuer à enseigner un pratique qui n’a désormais, officiellement, aucune raison scientifique d’être ?

« Ce sont aux doyens des universités de trancher. Ce qui est sûr, c’est que nous avons le nombre de médecins homéopathes le plus important au monde : plus de 20 000, principalement des généralistes. Bien plus que l’Allemagne qui en compte 7 000. Mais la question qui se pose aujourd’hui est bien celle du remboursement : ni l’homéopathie, ni son enseignement n’ont vocation à être interdits. »

« Je ne passe pas tout mon temps sur Twitter où le débat s’est progressivement radicalisé, dit-elle encore. Je pense qu’il ne faut pas culpabiliser les Français qui croient en l’homéopathie. La décision de la rembourser en 1984 [par la ministre Georgina Dufoix] a favorisé leur engouement. Aujourd’hui, certains de nos concitoyens ont le sentiment que ce type de médecine complémentaire les soulage. Mon souhait est d’aller vers un usage plus raisonné, grâce à de la pédagogie. »

Et Agnès Buzyn de commencer à expliquer, pour sa part, que nombre de maladies « guérissent toutes seules ». Ainsi, pour finir, quand Le Parisien ose une question personnelle quant à savoir si la ministre est une adepte : « Non ! Je donnais d’ailleurs le moins de médicaments possible à mes enfants. Cela les énervait beaucoup quand je leur disais que la majorité des maladies se guérissent toutes seules. En cas de fièvre, ils avaient le droit à de l’aspirine ou du paracétamol, un point c’est tout. » Rien ne dit que ce soit là le point final.

A demain @jynau

1 Voir « La guerre de l’homéopathie touche peut-être bientôt à sa fin » Slate.fr 4 avril 2019

Communiqué officiel:

 » En France, le bien fondé du remboursement des médicaments par l’assurance maladie est évalué par la Haute Autorité de Santé (HAS) afin de s’assurer qu’ils présentent un intérêt thérapeutique suffisamment important. La commission de la transparence (CT), composée d’experts indépendants, de la Haute Autorité de Santé a ainsi récemment évalué le service médical rendu par les médicaments homéopathiques, à la demande de la ministre.

À partir de l’ensemble des données médicales et scientifiques disponibles, elle a mis en évidence que ces médicaments n’avaient ni démontré leur efficacité dans les affections pour lesquels des données sont disponibles, ni démontré leur intérêt pour la santé publique notamment pour réduire la consommation d’autres médicaments

L’évaluation scientifique de la Haute Autorité de Santé a donc conclu que l’intérêt clinique de ces produits était insuffisant pour justifier leur prise en charge par la solidarité nationale.  Conformément à ses engagements, la Ministre des solidarités et de la santé suivra l’avis de la HAS et initiera dans les prochains jours la procédure visant à radier les médicaments homéopathiques de la liste des médicaments pris en charge par l’Assurance Maladie au 1er janvier 2021.

Une étape intermédiaire est prévue et consistera à abaisser le taux de remboursement de 30 à 15% au 1er janvier 2020. Cette démarche en 2 temps témoigne de la volonté de la Ministre de permettre aux patients, prescripteurs et industriels concernés de s’adapter progressivement au déremboursement total au 1er janvier 2021. La ministre recevra les industriels, les associations de patients et les professionnels de l’homéopathie dans les prochains jours. »

Homéopathie, argent et politique : la suite du feuilleton, avec Agnès Buzyn et Emmanuel Macron

Bonjour

Comment s’en lasser ? Si l’on en croit Les Echos, après plusieurs jours d’hésitations, le chef de l’État aurait « conforté ce 9 juillet  » Agnès Buzyn dans son choix de dérembourser totalement l’homéopathie. « Dix jours après les conclusions de la Haute Autorité de Santé, Emmanuel Macron a finalement opté pour un déremboursement total de l’homéopathie, et non partiel comme le préconisait notamment Xavier Bertrand », affirme le quotidien économique.   

« Si cet arbitrage est définitivement confirmé, il s’agirait d’une victoire politique pour Agnès Buzyn qui a pesé de longue date en faveur du déremboursement, assure Le Quotidien du Médecin.  Ce 9 juillet, lors d’une séance de questions devant le Sénat, la ministre a indiqué qu’elle s’exprimerait sur le remboursement de l’homéopathie demain10 juillet. »

« Victoire » pour Agnès Buzyn qui serait « confortée » ? C’est là une bien étrange façon de réécrire l’histoire. Le 12 avril 2018, invitée de la matinale sur RMC-BFM TV, Agnès Buzyn annonçait, au début de la touremnte, que les spécialités homéopathiques continueraient à être remboursées par l’assurance maladie, même si c’est «probablement un effet placebo». «Les Français y sont attachés. Si cela peut éviter le recours à des médicaments toxiques, je pense nous y gagnons collectivement. Voilà, ça ne fait pas de mal ! », osait alors la ministre qui fut la cible d’innombrables moqueries sur les résaux sociaux 1.

Puis cette même ministre assura qu’elle ne déciderait pas mais qu’elle s’en remettrait à l’avis de la Haute Autorité de Santé. Et aujourd’hui elle « aurait pesé de tout son poids » ? On en reste coi.

Et puis ces mots d’Agnès Buzyn, dans Le Parisien du 10 juillet : « Pourquoi je dérembourse l’homéopathie » (sic)

« J’ai toujours dit que je suivrais l’avis de la Haute Autorité de santé (HAS), j’ai donc décidé d’engager la procédure de déremboursement total. Il sera effectif au 1er janvier 2021. Mais pour se laisser le temps de la pédagogie et accompagner les patients, j’ai souhaité organiser une période de transition. À partir du 1er janvier 2020, nous mettons donc en place une année de remboursement intermédiaire à 15 %, contre 30 % aujourd’hui. Cela laissera aussi le temps aux industriels de s’organiser.

« La règle est que tout ce qui est financé par la solidarité nationale est d’abord évalué par la HAS, qui renouvelle son avis sur le service médical rendu tous les cinq à dix ans pour la grande majorité des traitements. Seuls les médicaments homéopathiques y ont échappé. En 1984, la ministre des Affaires sociales de l’époque [Georgina Dufoix], a décidé de son remboursement sans passer par cette procédure. C’était un choix (…)  Face à l’actuelle controverse dans l’opinion publique, j’ai saisi la HAS le 1er août 2018 (…) Je suis donc son avis qui recommande le déremboursement. »

« Plus d’un million de Français ont exprimé leur désaccord dans une pétition. Ce sera une mesure impopulaire. Vous serez « la » ministre qui dérembourse… » avance Le Parisien. Agnès Buzyn :

« Oui, je l’assume. Car, déjà, une grande partie de ces médicaments ne sont pas remboursés. Pour les 1200 autres, consommés par environ 7 millions de Français en 2018, la somme moyenne remboursée est de 18 euros par an, soit moins de 1,5 euro par mois. L’an passé, les plus grands consommateurs n’ont reçu que 25 euros de l’Assurance maladie. Ils représentent moins de 1 % des Français. Je ne pense donc pas que cette mesure freinera le recours à l’homéopathie. »

Dérembourser sans freiner ? Nous y reviendrons.

A demain @jynau

A demain @jynau

1 Voir « La guerre de l’homéopathie touche peut-être bientôt à sa fin » Slate.fr 4 avril 2019

Homéopathie française vilipendée : pourquoi n’enseigne-t-on pas l’astrologie à l’Université ?

Bonjour

Plus Agnès Buzyn tardera, plus l’incendie anti-rationaliste gagnera.  Plus le gouvernement atermoiera, plus les esprits s’échaufferont. Un nouveau stade a déjà été franchi : on ne parle plus seulement du déremboursement des spécialités homéopathiques mais bien de l’enseignement de cette pratique ; un exercice médical voué aux gémonies – traîné dans la boue par les esprits rationalistes ne voyant là, au mieux, qu’un effet placebo induit par de l’eau diluée dans de l’eau.

Objectif, donc, des « anti » : bouter l’enseignement homéopathique hors des amphithéâtres médicaux – le chasser hors de l’Université. Et certains médecins généralistes ne sont pas les derniers. Vendredi 5 juillet  le Collège national des généralistes enseignants (CNGE) a pris officiellement position. Il l’a fait dans une lettre adressée non pas à Agnès Buzyn, mais à Frédérique Vidal, ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Frédérique Vidal.

Le Pr. Vincent Renard, président du CNGE, rappelle tout d’abord que  des enseignements d’homéopathie existent « encore » (sic)  dans la moitié des facultés de médecine en France et dans de nombreuses facultés de pharmacie.

« La Haute Autorité de Santé a rendu l’avis qui était attendu quant au déremboursement, tellement la situation est claire au plan scientifique. Cet avis corrobore l’avis de la communauté scientifique nationale et internationale, le point ayant été très bien résumé dans l’article de référence de la revue francophone de médecine générale 1 écrit-il. Au-delà même de cet avis, l’absence de tout modèle théorique sur lequel pourrait reposer l’homéopathie, invention datant du 18e siècle, l’absurdité des contenus de la ‘’médecine homéopathique’’, des indications comme des thérapeutiques, devrait imposer de protéger les étudiants contre ces déviances pseudo scientifiques. »

« On ne peut pas à la fois recommander à ces derniers des contenus fondés sur les données de la science, imposer qu’ils soient formés à la lecture critique, et en même temps leur proposer des enseignements véhiculant des aberrations grossières aux antipodes de la démarche scientifique. Une enquête sur les contenus de ces enseignements délivrés dans les murs des facultés serait la bienvenue car elle aurait des conclusions accablantes si jamais elle était conduite 2.

Les médecins généralistes universitaires sont très attachés à ce qu’il n’y ait plus de place pour l’homéopathie à l’université. Ce type de pratique nuit principalement à la médecine générale en détournant de jeunes médecins des bonnes pratiques et en véhiculant une image archaïque de la discipline. La responsabilité de l’université est également de ne pas encourager les patients dans de fausses croyances qu’il convient de discuter avec empathie sans les accréditer ; nous rappelons ici qu’un des produits homéopathiques les plus vendus est un pseudo vaccin contre la grippe détournant les patients des thérapeutiques efficaces.

La moitié des facultés de médecine propose encore des diplômes universitaires d’homéopathie ainsi que certaines facultés de pharmacie. Nous en demandons donc la suppression car il serait aujourd’hui coupable de continuer à délivrer ce type d’enseignement par l’Université, voire de délivrer des diplômes universitaires. Avec pour objectifs l’intérêt de l’Université, celui des patients comme celui des étudiants, nous comptons sur votre action. »

Agnès Buzyn n’a que trop tardé

Dans le camp adverse on s’active. « Il est important que l’homéopathie soit prescrite par des médecins et que son enseignement continue à être délivré dans un cadre universitaire », assurait, mi-juin, Charles Bentz, président du Syndicat national des médecins homéopathes français, lors de la présentation d’un « livre blanc » de l’homéopathie. Mieux encore les firmes (Boiron, Lehning et Weleda) associées aux organisations d’homéopathes, ce document préconise d’intégrer dans la formation des médecins, notamment généralistes, « un module d’enseignement sur les médecines complémentaires, dont l’homéopathie ».

Aujourd’hui cet enseignement n’est qu’optionnel et fait l’objet de diplômes universitaires (DU) ou interuniversitaires, (DIU).  Certaines y ont toutefois renoncé et l’AFP a mené l’enquête. En septembre dernier, la fac de Lille avait suspendu le sien dans l’attente de l’avis de la HAS, et celle d’Angers l’avait carrément supprimé. Depuis, Lille a décidé d’abandonner définitivement cette formation de deux ans. Pour sa part l’université François-Rabelais de Tours a décidé de fermer la première année du DIU homéopathie. Mais la seconde année est « encore maintenue » pour « permettre aux étudiants de terminer leur cursus ». Tours proposait jusqu’ici ce DIU conjointement avec Poitiers… Que fera Poitiers ? A Bordeaux, l’homéopathie n’est plus enseignée depuis 2009.

A l’opposé d’autres facultés s’accrochent bec et ongles à leur diplôme d’homéopathie. Lyon-I qui propose un DIU en partenariat avec Brest et Reims, n’envisage pas sa fermeture « sans une demande officielle de la part de la Conférence des doyens ou du ministère ». « Les soins par l’homéopathie sont une réalité en France, il est donc du ressort de l’université de pouvoir accompagner des formations qui sinon seraient faites à l’extérieur sans aucun contrôle », fait valoir la faculté lyonnaise, voisine des puissants laboratoires Boiron. L’université de Strasbourg a déjà fait savoir qu’elle n’entendait pas mettre fin à son DU. Quant à Paris-XIII, elle, « attend une concertation entre tous les doyens de médecine pour une éventuelle prise de décision commune ».

Or les représentants des doyens des facultés de médecine et de pharmacie ont récemment jugé que l’homéopathie devait pouvoir continuer à être enseignée… Où l’on comprend que la rationalité n’est pas toujours, en France, la chose la mieux partagée au sein de l’Université.

Joint par Le Quotidien du Médecin le Pr Vincent Renard accuse :  « La Conférence des doyens préfère que ces enseignements se passent au sein de l’université que dehors. C’est une très mauvaise stratégie. C’est comme si on intégrait les enseignements de l’astrologie à ceux de l’astronomie ».

Voilà un bon sujet pour cet été : pourquoi n’enseigne-t-on pas l’astrologie à l’Université ? Pour l’heure le gouvernement soupèse l’affaire du déremboursement avec ses trébuchets :  Sibeth Daye, porte-parole tonitruante a expliqué sur RMC-BFMTV que la décision finale dépendait d’une « balance » entre les « considérations scientifiques et les conséquences sur l’emploi ». Aussitôt contredite, sur RTL, par Gérald Darmanin, ministre des Comptes publics. Agnès Buzyn n’a que trop tardé, l’incendie a gagné. Qui osera jouer les pompiers ?

A demain @jynau

1 Denis Pouchain, Gérard Le Roux, Vincent Renard, Rémy Boussageon, et le Conseil scientifique du Collège national des généralistes enseignants « Approches théorique, scientifique et réglementaire de l’homéopathie ». exercer 2018 ; 148 : 460-4.

2 Précisément: pourquoi cette enquête n’a-t-elle jamais été menée par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche ?

Homéopathie remboursée : Agnès Buzyn prochainement désavouée par le gouvernement ?

Bonjour

Il est des qui oreilles sifflent. La décision de dérembourser l’homéopathie est loin d’être acquise et les lobbies sont à la manœuvre. Tout dépend désormais d’une « balance » entre les considérations « scientifiques » et « économiques » -entendre par là  les conséquences sur l’emploi. C’est ce  qu’a annoncé, sans sourciller, le 2 juillet la porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye. Sur RMC-BFMTV. En ces termes :

« Il y a une balance qui doit être réalisée entre l’apport scientifique, ce qu’on sait scientifiquement de l’apport de l’homéopathie, des questions évidemment économiques, puisque derrière il y a des emplois, forcément, mais aussi (le) bien-être de la population française ».

Où l’on perçoit la complexité de l’équation à laquelle s’est soumis le pouvoir exécutif. La réponse scientifique a été apportée le 28 juin par la Haute Autorité de Santé (HAS). Après un an de travaux elle a (sans surprise) estimé que les produits homéopathiques « n’ont pas démontré scientifiquement une efficacité suffisante pour justifier d’un remboursement ». Agnès Buzyn avait dit haut et fort (après avoir déclaré le contraire) qu’elle se rangerait à cet avis et tout le monde avait compris que cela en était fini du remboursement.

C’était oublier sans le poids des lobbies et l’attachement déclaré d’une part importante de la population française à cette pratique dont les homéopathes refusent de dire qu’elle emprunte au magique et à l’effet placebo. C’était oublier, aussi, que la décision finale revient au gouvernement – qui peut suivre ou non l’avis de la HAS.

Wauquiez-Collomb-Bertrand-Boiron, même combat

Or les firmes homéopathiques assurent qu’un déremboursement menacerait 1.300 emplois (1.000 chez le français Boiron, leader mondial, et 300 chez les deux autres, le français Lehning et le suisse Weleda). Mieux encore ces firmes sont soutenues par des élus de poids : Laurent Wauuiez, président de la région Auvergne-Rhône-Alpes et Gérard Collomb, toujours maire de Lyon et proche d’Emmanuel Macron (le siège de Boiron est en région lyonnaise), ainsi que Xavier Bertrand, président des Hauts-de-France (où Boiron a un site).

La décision finale « n’a pas encore été prise par le gouvernement », a assuré Mme Ndiaye, en indiquant que ce dernier était « en train d’instruire » l’avis de la HAS, « y compris en interministérielle ». Les trois firmes ont demandé au gouvernement de « ne pas suivre » l’avis de la HAS. Elles réclament un « débat parlementaire, suivi d’un débat public », en jugeant les conclusions de la HAS « totalement incohérentes avec les enjeux majeurs de santé publique ».

Face à cette puissance homéopathique : le collectif de médecins anti-homéopathie Fakemed 1. Il appelle l’exécutif à « suivre l’avis » de la HAS et à « dérembourser l’homéopathie ». Une décision inverse « serait un revers majeur pour la crédibilité des institutions scientifiques de notre pays, a écrit le collectif dans une lettre ouverte à la ministre de la Santé Agnès Buzyn et au président Emmanuel Macron – lettre publiée par le journal L’Opinion. Cela « serait la preuve que le lobbying et la connivence peuvent avoir raison contre les intérêts de la population, contre la santé et contre les finances de la solidarité nationale ».

La HAS n’a pas, depuis la publication de son avis, pris la parole. Agnès Buzyn non plus. Bercy-Matignon-L’Elysée phosphorent. Sifflements d’oreilles.

A demain @jynau

1 Un des plus actifs « anti-homéopathie » est le Dr Mathias Wargon, médecin urgentiste et mari de la Secrétaire d’Etat à l’Ecologie, Emmanuelle Wargon. « De quoi poser des questions sur l’impartialité gouvernementale dans ce dossier ultra-sensible » estime le site safe-med.fr

Déremboursement des produits homéopathiques : Agnès Buzyn prisonnière de sa politique

Bonjour

Du secret de Polichinelle on est passé à l’information officielle, celle de la Haute Autorité de Santé : « Médicaments homéopathiques : une efficacité insuffisante pour être proposés au remboursement » :

« A la demande du ministère des Solidarités et de la Santé, la Haute Autorité de Santé a évalué le bien-fondé du maintien au remboursement des médicaments homéopathiques. Au terme de la première évaluation scientifique française de ces médicaments, la commission de la transparence rend un avis défavorable à leur prise en charge par l’assurance maladie. »

La réplique lobbyiste n’a pas tardé.Celledu collectif MonHoméoMonChoix qui réclame « un moratoire pour engager une évaluation adaptée de l’homéopathie et préserver l’ensemble d’une filière d’excellence ».

« Les membres du collectif MonHoméoMonChoix contestent l’avis de la HAS recommandant de ne plus rembourser les médicaments homéopathiques. Compte tenu du manque d’expérience de la HAS pour évaluer cette thérapeutique, du manque d’experts en homéopathie au sein de la commission, de la non prise en compte des spécificités des médicaments homéopathiques, et compte tenu des irrégularités qui ont entachées cette procédure, les membres du collectif appellent solennellement le gouvernement à ne pas tenir compte de cet avis et demandent un moratoire afin de : mettre en œuvre une évaluation, à partir des données du système national de santé, qui tienne compte de la spécificité de l’homéopathie à travers un partenariat public-privé ; lancer un débat parlementaire et un débat public permettant de tenir compte de l’avis des Français.

Histoire de la médecine

Pour ce collectif « aujourd’hui, c’est la voix de plus de 1.100.000 Français ayant signé sa pétition qui se fait entendre pour le maintien du remboursement des médicaments homéopathiques. Au-delà de la question du pouvoir d’achat, c’est leur liberté de recourir à une thérapeutique efficace, sûre et économique que les patients veulent faire respecter. Par ailleurs, l’homéopathie est une filière d’excellence française reconnue, performante et créatrice d’emplois. Largement implantée dans nos territoires elle innerve toutes les régions françaises en s’appuyant sur une multitude de sous-traitants. »

« La thérapeutique homéopathique fait partie de l’histoire de la médecine, ses vertus bénéfiques sont reconnues par 72% des Français, ajoutent les lobbyistes. Il est impératif de la laisser dans les mains des professionnels de santé pour qu’elle garde sa place dans l’offre de soins française, en complémentarité avec les médicaments conventionnels. »

Il faut aussi compter avec Les Généralistes (CSMF) qui déplorent que le comité d’experts de la HAS ne se soit basé que « sous l’angle des critères d’evidence based medecine » et qui regrettent que « la démarche de la HAS n’ait pas pris en compte l’ensemble de la démarche du médecin homéopathe ». Ils rappellent que l’homéopathie ne se substitue pas aux autres thérapeutiques mais qu’elle en est complémentaire. Aujourd’hui 34 % des médecins généralistes en prescrivent quotidiennement. Les enquêtes d’opinion montrent que les Français y sont très majoritairement attachés.

Les médecins homéopathes « appellent donc la ministre de la Santé et le Premier ministre à prendre en compte l’ensemble de ces éléments avant de prendre une décision qui pourrait avoir des conséquences importantes sur la santé des Français. »

Où l’on comprend qu’après ses multiples atermoiements de l’an dernier 1 suivi de son engagement à « suivre l’avis de la HAS » Agnès Buzyn est aujourd’hui prise au piède de sa politique. Le destin ne l’homéopathie française n’est plus entre ses mains mais dans celles des locataires de Bercy, de Matignon et du Palais de l’Elysée.

A demain @jynau

1 Le 12 avril 2018, invitée de la matinale sur RMC-BFM TV, Agnès Buzyn annonçait que les spécialités homéopathiques continueront à être remboursées par l’Assurance-maladie, même si c’est «probablement un effet placebo». «Les Français y sont attachés. Si cela peut éviter le recours à des médicaments toxiques, je pense nous y gagnons collectivement. Voilà, ça ne fait pas de mal!», osait alors la ministre. Voir « La guerre de l’homéopathie touche peut-être bientôt à sa fin » Slate.fr 4 avril 2019

Feu vert d’Agnès Buzyn au croisement de fichiers policiers et des données psychiatriques

Bonjour

Psychiatres et policiers œuvrant la main dans la main au service de la lutte contre la radicalisation ? Tout commence en août 2017, comme ce blog le garde en mémoire. Gérard Collomb, alors ministre français de l’Intérieur, annonçait au micro de RTL qu’il explorait la piste d’une collaboration avec les services psychiatriques et psychiatres libéraux. Objectif : « repérer » les terroristes potentiels ; renforcer la détection des profils à risque, notamment des personnes développant des « délires autour de la radicalisation islamique ». Puis il précisa sa pensée : impliquer davantage les psychiatres dans la « prévention » des passages à l’acte terroriste. Le ministre s’exprimait ainsi sur RMC/BFMTV :

« Dans le fichier des signalements pour la prévention et la radicalisation (FSPRT), nous considérons qu’à peu près un tiers des personnes présentent des troubles psychologiques (…)  Il est clair que le secret médical, c’est quelque chose de sacré, mais en même temps, il faut trouver le moyen qu’un certain nombre d’individus, qui effectivement souffrent de troubles graves, ne puissent pas commettre des attentats ».

Pour sa part le Dr David Gourion (psychiatre libéral, ancien chef de clinique à l’hôpital Sainte-Anne) soulignait dans une tribune parue dans Le Monde que « le lien entre maladie mentale et terrorisme n’est pas avéré », que « la loi sur le secret médical n’est pas compatible avec la mise en place d’une « collaboration » entre psychiatres et services de police » :

« M. Collomb a dit qu’il fallait travailler à repérer les personnes en voie de radicalisation. Il y a une réalité qui est la réalité psychiatrique qui est que la plupart des patients qui font des épisodes délirants ont l’impression que Dieu leur parle ; ça veut dire que les personnes de confession musulmane qui vont avoir un délire mystique pourraient être catégorisées comme ‘à risque’. Pour le coup, il ne faut absolument pas le faire, c’est dangereux. Le psychiatre n’a pas vocation à collaborer avec le ministère de l’Intérieur. Ce n’est pas son rôle. Nous sommes des médecins et pas des collègues des policiers ».

L’Ordre des médecins avait déjà travaillé ce délicat sujet. « Il sera du plus grand intérêt de connaître la position du Dr Agnès Buzyn, collègue de Gérard Collomb en charge de la Santé » écrivions-nous en août 2017.

Deux ans plus tard Gérard Collomb a laissé sa place à Christophe Castaner. Des médecins s’élèvent contre le fichage des personnes hospitalisées blessées lors de certaines manifestations contre la politique gouvernementale. Et Agnès Buzyn vient, pour le Premier ministre, de signer un décret qui permet le croisement de données médicales avec les fichiers policiers : Décret n° 2019-412 du 6 mai 2019 modifiant le décret n° 2018-383 du 23 mai 2018 autorisant les traitements de données à caractère personnel relatifs au suivi des personnes en soins psychiatriques sans consentement 

 « Publics concernés : agences régionales de santé (ARS) ; représentants de l’Etat dans le département ; personnes faisant l’objet de soins psychiatriques sans consentement. 
Objet : mise en relation, pour certaines finalités entre certaines informations enregistrées dans les traitements de données à caractère personnels dénommés HOPSYWEB d’une part et FSPRT d’autre part. 
Entrée en vigueur : le texte entre en vigueur le lendemain de sa publication. 
Notice : le décret autorise la mise en relation entre les données enregistrées dans les traitements HOPSYWEB et FSPRT. Cette mise en relation concerne uniquement les informations transmises au représentant de l’Etat dans le département sur les admissions en soins psychiatriques sans consentement prévues par le code de la santé publique et le code de procédure pénale et a pour objet la prévention de la radicalisation. »

« Le texte autorise un croisement, pour les noms, prénoms et dates de naissance, entre le Fichier de traitement des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT) – qui comptait début avril 20.904 individus inscrits, dont 11.152 fiches «actives» – et le fichier médical des personnes faisant l’objet de ‘’soins psychiatriques sans consentement’’, résume Le Figaro  (Jean Chichizola).  Si un individu du second fichier se trouvait également dans le FSPRT, le décret prévoit qu’en soit averti le représentant de l’État dans le département en question (le préfet ou le préfet de police de Paris). Pour les services de l’État, c’est une nécessité pour repérer des individus qui sont à la fois des personnes souffrant de réels troubles psychiatriques et qui, dans le même temps, trahissent un comportement radicalisé visible lors de crises mais aussi au moment où les patients sont ‘’stabilisés’’ par leur traitement. La mesure est en revanche critiquée par nombre de médecins psychiatres. »

En août 2017 le Conseil national de l’Ordre des médecins avait clairement pris position contre ce dispositif  : Risque terroriste : l’Ordre rappelle les principes fondamentaux de l’exercice médical :

 « Suite aux déclarations du ministre de l’Intérieur Gérard Collomb, au sujet d’une éventuelle coopération entre les autorités policières et les services psychiatriques pour lutter contre la radicalisation, l’Ordre national des médecins tient à rappeler sa position sur le risque terroriste et le secret professionnel du médecin.

Pleinement conscient, comme l’ensemble de la société, des dangers liés à la radicalisation, l’Ordre des médecins a pris des positions précises et détaillées sur le sujet depuis plusieurs mois, positions dont les autorités ne s’étaient jusqu’à présent pas saisies.

L’Ordre des médecins rappelle la nécessité absolue de préserver les principes fondamentaux de l’exercice professionnel, en particulier celui du secret médical. En effet, le code de déontologie est très clair : la confidentialité entre le médecin et le patient est absolue. C’est un principe essentiel dans la relation de confiance qui lie les professionnels à leurs malades.

Toutefois, dans certaines circonstances exceptionnelles, la loi permet aux médecins de passer outre au secret médical en cas de danger probable. C’est pourquoi l’Ordre préconise la pleine application des textes en vigueur, et en particulier ceux du code pénal qui s’adressent à tout citoyen, plutôt que de créer de nouvelles dérogations au sujet desquelles on ne peut mesurer les possibles dérives ultérieures. Enfin, dans un régime de libertés, la coopération des médecins ne peut se faire qu’avec les autorités de justice. Il en va du respect des principes fondamentaux de notre République. »

Mai 2019 : ainsi donc, au nom de la « prévention de la radicalisation », le Dr Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé n’a pas entendu le rappel  solennel de l’Ordre des médecins.

A demain

@jynau

Autisme et politique : Sophie Cluzel regrette-t-elle vraiment d’avoir insulté les psychiatres ?

Bonjour ?

Sophie Cluzel, 58 ans, est depuis près de deux ans, secrétaire d’Etat chargée des Personnes handicapées. Le 1er avril, sur les ondes de RMC   elle déclenchait une violente polémique en succombant avec délice à l’invite « anti-psy » de Jean-Jacques Bourdin. C’était le début d’une affaire sans précédent connu, affaire qui est loin d’être terminée.

Dix jours plus tard, ce communiqué : « Pédopsychiatres et psychiatres du service public exigent des excuses à la suite des propos outranciers de Sophie Cluzel, Secrétaire d’Etat au Handicap ». Un texte adressé à Sophie Cluzel avec copie « à Monsieur le président de la République à Madame la ministre des Solidarités et de la Santé ». Ire comparable au sein du Syndicat national des psychiatres privés – ainsi que du Conseil national professionnel de psychiatrie (qui regroupe l’ensemble des sociétés savantes et syndicats de psychiatrie) « condamnant à l’unanimité et avec la plus grande fermeté les propos irresponsables et scandaleux de la secrétaire d’Etat aux personnes handicapées .»

 Qui allait pouvoir effacer l’outrage ? Agnès Buzyn vient de faire un premier pas. La ministre des Solidarités et de la Santé visitait, le 12 avril, l’Établissement de santé mentale de l’agglomération lilloise (EPSM-AL). Elle y a rencontré, le Dr Patricia Do Dang, cheffe de pôle du secteur 59I04 et de la Clinique intersectorielle de l’adolescent. Cette soignante lui a déclaré que, comme nombre de pédopsychiatres, elle avait été très heurtée par les propos de la secrétaire d’État chargée des Personnes handicapées.

Totale confiance dans la psychiatrie et les psychiatres

Des propos « disqualifiants voire insultants » qui démontraient, selon la pédopsychiatre, une ignorance des réalités de terrain. Des paroles, rapporte Le Quotidien du Médecin (Géraldine Langlois), qui  révélaient également selon elle le « manque de soutien du plus haut sommet de l’Etat » envers les professionnels.

Réponse d’Agnès Buzyn, les propos de Mme Cluzel faisaient référence « à un vieux reproche fait par des familles sur la prise en charge des enfants autistes dans les années 1980, qui culpabilisaient les familles ». Et, selon la ministre, la secrétaire d’État « doit regretter d’avoir heurté » les pédopsychiatres. « Nous avons totalement confiance dans la psychiatrie et les psychiatres dans la prise en charge » de ces enfants, a assuré la ministre des Solidarités et de la Santé.

Ce « nous » ministériel, en toute logique républicaine, s’impose désormais à Sophie Cluzel, secrétaire d’Etat. Cette dernière, désormais n’a plus le choix si elle entend continuer à assumer ses responsabilités : il lui revient, au plus vite, de présenter ses regrets à la communauté des soignants qu’elle a « heurtés » Et de s’expliquer.

A demain

@jynau