Abandonner d’urgence la vape pour le tabac ! Comment en arriver à proférer tant d’absurdités ?

Bonjour

« Le poumon, le poumon vous dis-je ». Qui ne veut pas désespérer des médias ne devait pas, ce 7 septembre, regarder le journal de 13 heures de France 2. On y traitait des morts américains et de la cigarette électronique. Avec sujet en plateau. Absence totale de distance. Confusion générale et conclusion immanquable : détruire sa cigarette électronique, si possible en diffusant les images sur les réseaux sociaux. Puis revenir à la seule nicotine qui vaille : celle du tabac.

Mais comment a-t-on pu en arriver là ? Et comment, en tenant de tels propos, parvenir à faire comprendre que le vapotage n’est en rien une panacée ? Que la cigarette électronique n’est qu’un vecteur ? Que la réduction des risques n’est pas la disparition de ces mêmes risques ? Que le sevrage est un objectif supérieur au vapotage mais que le vapotage est incomparablement favorable à l’esclavage tabagique ?

Tout ceci devrait sans difficulté pouvoir être expliqué dans les journaux télévisés. Par des journalistes ou par des invités spécialisés. Pourquoi n’est-ce pas le cas ? Osera-t-on avancer que « c’était mieux avant » ? Et que les caricatures régressives que ces journaux nous offrent ne sont pas étrangères à la désaffection progressive vis-à-vis de ces mêmes journaux ? Pour l’heure les personnes intéressées par le sujet peuvent aussi, loin de France 2, se pencher sur The New England Journal of Medicine : Pulmonary Illness Related to E-Cigarette Use in Illinois and Wisconsin — Preliminary Report. Conclusion :

« Case patients presented with similar clinical characteristics. Although the features of e-cigarette use that were responsible for injury have not been identified, this cluster of illnesses represents an emerging clinical syndrome or syndromes. Additional work is needed to characterize the pathophysiology and to identify the definitive causes. »

Ils se pencheront ensuite sur le peu banal éditorial qui l’accompagne : Vaping-Induced Lung Injury. Conclusion :

« Until the investigation into the cause of this epidemic of vaping-induced respiratory injury is complete, no conclusions can be drawn as to which compound or compounds are the causes of injury. In light of these cases, however, efforts should be made to increase public awareness of the harmful effect of vaping, and physicians should discourage their patients from vaping. »

IgnorantusignorantaIgnorantum.  On attend toujours, à l’adresse des vapoteurs français, les réflexions-recommandations officielles. Sinon celles de la ministre des Solidarités, du moins du Directeur Général de la Santé.

A demain @jynau

Voici la « liste noire » des 93 médicaments à écarter pour mieux soigner (Prescrire, Acte VII)

Bonjour

C’est un rituel médicamenteux comme il en est des littéraires ou des gastronomiques. A la différence près qu’il faut, ici, faire une croix tous ceux qui sont cités. Pour la septième année consécutive le mensuel Prescrire (depuis sa naissance indépendant de l’industrie pharmaceutique) vient de publier (dans son n° de février) son bilan « des médicaments à écarter pour mieux soigner ». Aucune légèreté dans cette mise à l’index : ce bilan recense « des cas documentés » de médicaments « plus dangereux qu’utiles ».

L’objectif affiché est ici « d’aider à choisir des soins de qualité, de ne pas nuire aux patients et d’éviter des dommages disproportionnés ». Toutes ces spécialités pharmaceutiques (il y en a au total quatre-vingt-treize dont quatre-vingt-deux commercialisées en France) sont, assure la revue, « à écarter des soins dans toutes les situations cliniques pour lesquelles ils sont autorisés ». Et ce raison des risques sanitaires « disproportionnés » qu’ils font courir aux malades qui pourraient être concernés.

Relaxant musculaire

Parmi les médicaments ajoutés cette année à cette « liste noire », on trouve notamment le célébrissime Décontractyl® (comprimés ou baume) « relaxant musculaire proposé pour soulager les douleurs dues aux « contractures ».

« La méphénésine par voie orale (Décontractyl®) expose à des somnolences, des nausées, des vomissements, des réactions d’hypersensibilité (dont des éruptions cutanées et des chocs anaphylactiques), et des abus et dépendances ; la pommade à base de méphénésine (Décontractyl baume®) expose à des atteintes cutanées graves, dont des érythèmes polymorphes et des pustuloses exanthématiques aiguës généralisées.

Prescrire dénonce aussi les risques présentés par de nombreux anti-tussifs. A commence par L’ambroxol (Muxol® ou autre) et la bromhexine (Bisolvon®), des « mucolytiques » autorisés dans la toux ou les maux de gorge, n’ont pas d’efficacité clinique démontrée au-delà d’un effet placebo.

« Or ils exposent à des réactions anaphylactiques et à des réactions cutanées graves, parfois mortelles, telles que des érythèmes polymorphes, des syndromes de Stevens-Johnson et des syndromes de Lyell »

Quant à l’oxomémazine (Toplexil® ou autre), un anti – histaminique H1 sédatif et atropinique du groupe des phénothiazines avec des propriétés neuroleptiques, il « expose à des effets indésirables disproportionnés dans le traitement symptomatique de la toux ».

Egalement mise à l’index, la pommade pour fissures anales Rectogesic® :

« Ce dérivé nitré autorisé dans les fissures anales, n’a pas d’efficacité démontrée au-delà de l’effet placebo pour guérir une fissure anale chronique, ni pour soulager la douleur associée. Il expose à des céphalées très fréquentes, et parfois sévères. Le traitement des douleurs liées à une fissure anale repose sur un antalgique par voie orale tel que le paracétamol et parfois sur la lidocaïne en application locale (Titanoréïne à la lidocaïne®) »

Cigarette électronique

A des degrés divers toutes les disciplines médicales sont concernées.  Notamment la psychiatrie, la cancérologie,  la gynécologie-obstétrique, ou la cardiologie. Et Prescrire prend notamment soin, en plein hiver, de  rappeler que nombre de médicaments contre le « rhume », comme les vasoconstricteurs décongestionnant par voies orale ou nasale (l’éphédrine, la naphazoline, l’oxymétazoline, la phényléphrine, la pseudoéphédrine, qui est contenue dans une dizaine de médicaments) exposent à un risque de troubles cardiovasculaires graves, voire mortels (poussées d’hypertension, AVC, troubles du rythme cardiaque). Il y a un an les autorités sanitaires françaises ont interdit la publicité destinée au grand public pour ces vasoconstricteurs, souligne Bruno Toussaint, directeur éditorial de Prescrire« C’est un petit pas qui montre que les autorités reconnaissent que ces produits posent problème, mais sans les retirer du marché », observe-t-il.

Mais tout ne va pas toujours dans le même sens. On observera ainsi que Prescrire dénonce le bupropion (Zyban®), une amphétamine autorisée dans le sevrage tabagique. Pas plus efficace que la nicotine ce médicament expose à des troubles neuropsychiques (dont des agressivités, des dépressions, des idées suicidaires), des réactions allergiques parfois graves (dont des angiœdèmes, des syndromes de Stevens-Johnson), des dépendances, et des malformations cardiaques congénitales en cas d’exposition de l’enfant à naître pendant la grossesse.

Préférer les substituts nicotiniques ? Sans doute. Mais on peut aussi choisir la cigarette électronique, et ce avec plus de chance de succès comme en témoigne une importante publication datée du 30 janvier du prestigieux New England Journal of Medicine : « A Randomized Trial of E-Cigarettes versus Nicotine-Replacement Therapy ».

Pour finir une question en forme d’espérance : l’année 2019 sera-t-elle celle qui verra, enfin, l’Agence nationale de sécurité du médicament débattre, en pleine transparence, avec Prescrire ; échanger quant aux raisons qui expliquent que cette Agence puisse maintenir sur le marché français des substances que la revue estime, preuves à l’appui, qu’elles devraient en être retirées ?

A demain

 

 

Drogues : en France les morts par overdoses peuvent aider à réparer les vivants

 

Bonjour

Tragédie et paradoxes. La dramatique épidémie d’overdoses médicamenteuses par opiacés aux Etats-Unis a permis d’augmenter le nombre d’organes disponibles pour les greffes – et ce sans risque majeur pour les receveurs. Tel est l’enseignement apporté à la communauté médicale par les six auteurs d’une correspondance publiée dans The New England Journal of Medicine. Ces auteurs ont analysé les données donneurs-greffes-receveurs aux Etats-Unis entre 2000 et 2016. Ils observent une augmentation d’un facteur 11 de la proportion de donneurs morts d’une overdose médicamenteuse (de 1,2 % en 2000, à 13,7 % en 2016). Une augmentation qui compte pour la majeure partie de l’augmentation générale enregistrée dans l’activité de transplantation des cinq dernières années aux Etats-Unis.

Selon ces auteurs, aucune différence significative n’a été observée dans la survie (à un an) des 2360 receveurs – que leur donneur soit mort d’une overdose médicamenteuse ou d’une autre cause (AVC, traumatisme crânien, usage d’une arme à feu, asphyxie, noyade…).  Au vu de ces données, certains spécialistes formulent de nouvelles préconisations pour réduire le différentiel entre « offre » et « demande » : étendre le nombre et le type des organes considérés comme « aptes à la greffe », et inclure des donneurs âgés, des personnes potentiellement (ou effectivement) infectées par le VIH, le VHC ou le VHB. Ces spécialistes soulignent que les risques encourus devront être scientifiquement évalués et que le patient devra également être pleinement informé.

Arrêt cardio-respiratoire

En France, le prélèvement de personnes décédées d’une overdose est possible. « Bien évidemment, afin de déterminer si les organes peuvent être prélevés, des tests médicaux et toxicologiques sont réalisés, a expliqué à la Revue Médicale Suisse 1 l’Agence française de la biomédecine. Les équipes médicales vérifient d’abord, par prélèvement sanguin, si le corps du donneur est porteur de maladies transmissibles (hépatite C, sida…). L’état des organes est également examiné grâce aux clichés pris par imagerie médicale (échographie, scanner) qui vont mettre en évidence la taille des organes, leur qualité mais aussi l’absence de maladies sous-jacentes. Chaque organe fait ensuite l’objet d’examens spécifiques. »

On ajoute que les cas de personnes prélevées après un décès par overdose sont « rares ». « Cela ne peut se faire que si le bilan médical toxicologique (en particulier cardiaque et hépatique) et virologique est négatif. Aucun problème n’a été signalé par la suite concernant les patients greffés » précise encore l’Agence.

On ajoutera que depuis peu, en France, le pancréas peut être prélevé sur un donneur décédé après arrêt cardio-respiratoire (Journal Officiel du 27 avril 2018). De tels prélèvement peuvent désormais être effectués dans l’un des vingt centres ayant mis en place un programme de prélèvement d’organes sur donneur décédé – en vue de la greffe de pancréas vascularisé ou d’îlots de Langerhans. Cette modification de la législation vise à réduire la liste d’attente des candidats en greffe pancréatique. Au 1er janvier 2017, 228 malades figuraient sur la liste d’attente. Des chiffres en augmentation régulière depuis 2011.

Outre le rein, le foie et le poumon et le pancréas, il est également envisagé de permettre le prélèvement de cœur chez des patients décédés après arrêt cardiorespiratoire.

A demain

1 Ce texte a (en partie) été initialement publié dans la Revue Médicale Suisse (Rev Med Suisse 2018; volume 14.1206-1207)

Vingt-deux personnes atteintes de bêta-thalassémie guéries grâce à la thérapie génique

Bonjour

Comment ne pas se réjouir ? C’est un succès majeur de la science génétique au service de la médecine. Sans être stricto sensu une « première » c’est une avancée thérapeutique considérable que signent, dans The New England Journal of Medicine 1, un groupe international de médecins et de chercheurs dirigés par la Pr Marina Cavazzana (Hôpital Necker-Enfants malades, Institut Imagine, AP-HP/Inserm/Université Paris Descartes). Cette publication fournit la démonstration qu’il est désormais possible de corriger l’anomalie génétique à l’origine de la  bêta-thalassémie, une affection sanguine héréditaire caratérisée par un dysfonctionnement majeur de l’hémoglobine.

Les auteurs de la publication rapportent leurs travaux menés auprès 22 patients traités en France, aux Etats-Unis, en Thaïlande et en Australie dans le cadre de deux essais cliniques ; les résultats démontrent que la thérapie génique mise au point il y a plus de dix ans est efficace pour améliorer l’état de santé et guérir les patients atteints de bêta-thalassémie. « Ces deux essais cliniques ont utilisé le même vecteur thérapeutique « LentiGlobin », développé à l’université d’Harvard à Boston et au CEA de Fontenay-auxRoses par le Pr. Philippe Leboulch, en collaboration avec la société américaine bluebird bio dont il est fondateur, explique-t-on à Paris. La Pr Marina Cavazzana, cheffe du département de biothérapie de l’Hôpital Necker-Enfants malades APHP, co-directrice de laboratoire du laboratoire Inserm de lymphohématopoïèse humaine à l’Institut Imagine, et son équipe ont traité des malades qui produisent désormais une hémoglobine thérapeutique en quantité suffisante pour arrêter le recours aux transfusions sanguines mensuelles. »

Des essais sur plusieurs continents

 Ces résultats plus que prometteurs sont obtenus huit ans après la première thérapie génique dans cette maladie, réalisée par les Pr Cavazzana et Leboulch. La bêta-thalassémie est l’une des maladies génétiques monogéniques les plus fréquentes. Causée par plus de 200 mutations du gène de la bêta-globine  elle se caractérise par des anémies plus ou moins sévère. Dans sa forme la plus grave cette affection nécessite des transfusions mensuelles, et un traitement contre les dépôts de fer causés, au sein de l’organisme, par ces transfusions. Un traitement curatif est parfois possible : une greffe de cellules de moelle osseuse, quand ils ne présentent pas un état clinique trop fragile et qu’ils ont un donneur compatible dans leur fratrie, ce qui n’est possible que dans environ 25% des cas.

Dans les deux essais cliniques commencés en 2013 et dont les résultats viennent d’être publiés les chercheurs ont prélevé des cellules souches sanguines des patients puis les ont modifiées à l’aide du vecteur « LentiGlobin BB305 » pour apporter un gène sain avant de les « greffer » (via une transfusion) aux malades. Ces cellules souches thérapeutiques ont ainsi produit des globules rouges à l’hémoglobine saine en quantité satisfaisante. La vie de ces patients a déjà radicalement changé et ils ont pu reprendre leurs activités scolaires ou professionnelles.

« Après la preuve de principe thérapeutique que nous avions obtenue chez un patient thalassémique et un patient drépanocytaire, ces essais multicentriques internationaux confirment la consistance et la magnitude de l’efficacité thérapeutique de notre vecteur chez de nombreux patients. Des essais cliniques de phase 3 sont maintenant en cours sur plusieurs continents avant d’effectuer la demande de mise sur le marché de ce médicament biologique» a déclaré le Pr Leboulch.

« La thérapie génique a de nouveau montré sa puissance thérapeutique, à condition que les expertises provenant de différents domaines soient réunies souligne pour sa part  la Pr Cavazzana. Notre effort doit maintenant porter sur l’extension de cette approche à un grand nombre de patients. » Comment ne pas se réjouir ?

A demain

1 « Gene Therapy in Patients with Transfusion-Dependent β-Thalassemia » N Engl J Med 2018;378:1479-93. DOI: 10.1056/NEJMoa1705342

A.A. Thompson, M.C. Walters, J. Kwiatkowski, J.E.J. Rasko, J.-A. Ribeil, S. Hongeng, E. Magrin, G.J. Schiller, E. Payen, M. Semeraro, D. Moshous, F. Lefrere, H. Puy, P. Bourget, A. Magnani, L. Caccavelli, J.-S. Diana, F. Suarez, F. Monpoux, V. Brousse, C. Poirot, C. Brouzes, J.-F. Meritet, C. Pondarré, Y. Beuzard, S. Chrétien, T. Lefebvre, D.T. Teachey, U. Anurathapan, P.J. Ho, C. von Kalle, M. Kletzel, E. Vichinsky, S. Soni, G. Veres, O. Negre, R.W. Ross, D. Davidson, A. Petrusich, L. Sandler, M. Asmal, O. Hermine, M. De Montalembert, S. Hacein-Bey-Abina, S. Blanche, P. Leboulch, and M. Cavazzana

Ethique dermatologique : peut-on se faire tatouer quand on ne veut surtout pas être réanimé ?

Bonjour

On peut voir là une nouvelle forme de directives anticipées. L’affaire est à lire dans la dernière livraison du New England Journal of Medicine : « An Unconscious Patient with a DNR Tattoo ». Les Drs Gregory E. Holt, Bianca Sarmento, Daniel Kett et Kenneth W. Goodman (University of Miami) y exposent (photographie à l’appui) le cas d’un homme de 70 ans avec des antécédents de pathologies pulomnaire, cardiaque et métaboliques. Arrivé en urgence, inconscient et avec un taux d’alcoolémie élevé, l’homme n’avait pas de papiers d’identité sur lu ? En revanche, un tatouage fort visible : « Do Not Resuscitate » sur la poitrine – avec le NOT surligné associé à sa signature.

Dans un premier temps les médecins américains ont décidé de ne pas respecter la consigne gravée sur la peau de l’homme et lui ont administré les soins de base que réclamait son état :

« We initially decided not to honor the tattoo, invoking the principle of not choosing an irreversible path when faced with uncertainty. This decision left us conflicted owing to the patient’s extraordinary effort to make his presumed advance directive known; therefore, an ethics consultation was requested. He was placed on empirical antibiotics, received intravenous fluid resuscitation and vasopressors, and was treated with bilevel positive airway pressure. »

Toutefois, troublés par le message tatoué, ils ont également demandé une consultation éthique spécialisée. Conclusion : le tatouage devait a priori être pris en considération. Entre-temps, l’homme avait pu être identifié et l’expression de son souhait de ne pas être réanimer avait été retrouvée dans son dossier du département de la santé de l’Etat de Floride. Puis son état  s’est rapidement dégradé et il est mort peu de temps après son admission.

Please Turn Over

 Pour les auteurs de cette communication originale ce tatouage « a apporté plus de confusion que de clarté ». L’une des questions soulevées est celle de savoir si ces messages encrés sont, le moment venu, toujours d’actualité. Ne seraient-ils pas, par exemple, une décision « prises quand la personne était sous l’influence de l’alcool ». L’équipe médicale américaine évoque le cas, publié en 2012, où un homme de 59 ans ainsi tatoué avait, après réanimation, expliqué que le message n’était pas à prendre en compte : c’était la trace d’un pari alcoolisé perdu dans sa jeunesse. L’homme n’avait jamais pensé que des médecins pourraient, un jour, le lire au premier degré.

De ce côté-ci de l’Atlantique, en 2011, une octogénaire britannique s’était ainsi fait tatouer sur le torse « ne pas réanimer » – affaire rapportée sur le site du quotidien britannique The Mirror et alors reprise par Le Nouvel Observateur. « Je ne veux pas être à moitié morte. Je veux être pleinement morte. J’ai peur que le corps médical, avec les meilleures intentions, me garde en vie alors que je ne veux pas vivre, expliquait Joy Tomkins, 81 ans habitante de Downham Market. Je ne veux pas être allongée, mourante, pendant des heures, des mois ou même des années. Je ne veux pas finir comme un légume. (…) C’est pour cela que j’ai fait ce tatouage. »

Outre, sur le torse, le tatouage « Do not resucitate » Joy Tomkins s’était également fait tatouer, dans le dos, « PTO », abréviation de « Please turn over ». Où l’on perçoit l’association parfaite de l’humour et du pragmatisme qui caractérisent les habitants d’un pays qui a choisi le Brexit.

A demain

 

L’intolérable affaire du carfilzomib, médicament refusé aux malades atteints de myélome multiple

Bonjour

Un communiqué de presse comme une bouteille à la mer, comme une accusation politique, comme un procès éthique : les membres de l’Association Française des Malades du Myélome Multiple (AF3M) « se mobilisent pour réclamer leur droit à vivre alors que les difficultés d’accès aux traitements innovants pèsent sur les chances de survie des malades ».

Cancer de la moelle osseuse, le myélome multiple (maladie de Kahler) est une affection peu connue du grand public. Elle touche chaque année près de 5 000 nouvelles personnes et on estime que 30 000 personnes sont aujourd’hui affectées en France.

« Parmi ces patients, certains pourraient voir leur vie prolongée dans de bonnes conditions grâce à de nouveaux traitements, innovants et efficaces, expliquent les responsables de l’association. Pourtant ces médicaments ne leur sont pas accessibles, en raison d’incompréhensibles et inquiétantes lenteurs administratives. »

Service médical rendu important

Le dossier le plus emblématique est celui du carfilzomib, un médicament autorisé depuis 2012 par la Food and Drug Administration américaine et commercialisé sous le nom de Kyprolis®

Le carfilzomib est un médicament qui a reçu son AMM pour être prescrit en association avec deux autres médicaments, le lénalidomide et la dexaméthasone dans le traitement du myélome multiple chez les adultes ayant reçu au moins un traitement antérieur. Le 25 mai 2016, le « Comité de transparence » de la Haute Autorité de Santé a classé ce médicament comme assurant un « service médical rendu important » et une « amélioration du service rendu » de niveau IV (mineur) – voir ici le document de la Haute Autorité de Santé.

« A ce titre, le carfilzomib remplit toutes les conditions pour être inscrit sur la liste dite ‘’en sus’’, permettant un remboursement aux hôpitaux par l’assurance maladie, soulignent les responsables de l’AF3M. Il est disponible et pris en charge dans plusieurs pays européens dont la Belgique, l’Espagne, l’Italie et l’Allemagne. Pourtant, alors que le ministère de la Santé aurait dû procéder à cette inscription de manière quasiment automatique avant le début de l’année, les discussions sont toujours en cours. »

Ils ajoutent, pudiquement, que ce retard est d’autant plus déplorable que les données présentées par le laboratoire Amgen dans les études Aspire et Endeavor ont montré une amélioration de la survie globale moyenne de 8 mois pour les patients traités par carfilzomib. « Cela signifie que depuis près d’un an, des patients actuellement privés de ce traitement auraient pu voir leur vie prolongée » ajoutent-ils.

Réponses laconiques

Que dire de plus ? Qu’il s’agit d’une affaire financière ? Que le prix demandé par la firme Amgen est trop important ? Que, devant cette situation pour elle intolérable, l’AF3M a rédigé en mars 2017 une lettre ouverte à l’adresse de Marisol Touraine, alors ministre de la Santé (« Myélome : Autoriser des médicaments est une question de survie pour les patients ») ? Qu’à la suite des élections présidentielles, l’association a adressé plusieurs courriers à Madame Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé – sans plus de succès ?

Qu’au cours de l’été, les adhérents de l’AF3M ont sensibilisé par le biais de courriers et de rendezvous de nombreux députés qui ont directement saisi de leurs inquiétudes Mme Byzyn, spécialiste de cancérologie hématologique, en posant une trentaine de questions écrites ? Qu’un rendez-vous auprès de Mme Buzyn a de nouveau été sollicité en urgence en amont de la Journée d’information nationale sur le myélome multiple, organisée par l’AF3M, qui a eu lieu le 14 octobre dans vingt- cinq villes en France ?

« Résultat de ces actions : rien. Aucune rencontre, aucun relais de nos revendications, aucune avancée, si ce n’est une réponse laconique du ministère de la Santé aux questions écrites signalant que le processus est en cours, sans nulle précision d’une échéance d’aboutissement. Du côté de nos dirigeants, personne ne semble s’émouvoir du fait qu’en refusant aux malades l’accès à ces nouveaux médicaments, les autorités cautionnent de fait une perte de chances pour des patients qui pourtant pourraient être traités »

« Au total, la population cible incidente de Kyprolis® serait de l’ordre de 2 350 à 2 500 patients » estimaient, en mai 2016, les membres du Comité de transparence de la Haute Autorité de Santé. Un communiqué de presse comme une bouteille à la mer.

A demain

 

Une équipe française a mis au point avec succès une thérapie génique de la drépanocytose

 

Bonjour

Un éclair d’espoir dans un monde en souffrance. Une équipe médicale française dirigée par le Pr Marina Cavazzana (Institut des maladies génétiques Imagine, Inserm, hôpital Necker/Assistance publique-Hôpitaux de Paris) a mis au point, pour la première fois au monde, une thérapie génique de la drépanocytose, maladie héréditaire due à une malformation de l’hémoglobine responsable de formes graves d’anémie chronique. Ce travail est publié aujourd’hui dans le New England Journal of Medicine « Gene Therapy in a Patient with Sickle Cell Disease ». Une publication historique signée par vingt-sept auteurs 1.

Prudente, le Pr Marina Cavazzana se refuse à parler de « guérison ». Elle dispose toutefois aujourd’hui d’un recul de plus de quinze mois pour un adolescent âgé de 13 ans traité avec cette nouvelle technique qui permet de corriger l’anomalie génétique. Elle précise que son patient est dans une situation totalement stable et que les données actuelles laissent espérer que la rémission obtenue va se poursuivre pendant des années.  Le jeune garçon souffrait d’une forme très sévère de drépanocytose à l’origine des crises extrêmement douloureuses causées par l’occlusion de petits vaisseaux sanguins par des globules rouges déformés. La correction génétique apportée fait que les transfusions sanguines ne sont plus nécessaires, que le taux d’hémoglobine est normal et que l’enfant mène une vie normale.

Bluebird Bio

La drépanocytose est la maladie génétique la plus répandue dans le monde : elle touche plus de cinq millions de personnes. Elle est particulièrement fréquente dans les populations d’origine antillaise, africaine et méditerranéenne. Elle est également présente en Inde, en Amérique du Sud (surtout au Brésil). En France, la prévalence à la naissance (nombre de cas chez les nouveaux-nés à un moment précis) est en moyenne d’une sur 3 000 naissances, mais varie beaucoup d’une région à l’autre, selon la répartition des communautés à risque : 1 sur 16 000 à Lille et 1 sur 550 à Saint-Denis en région parisienne, par exemple. Il y a environ 400 nouveaux-nés atteints par an, principalement issus de la communauté africaine ou antillaise. En Afrique Noire, la prévalence peut atteindre 1 naissance sur 30 et, aux Antilles, une sur 280.

Le vecteur de la thérapie génique mise au point par l’équipe française est un lentivirus, dans lequel a été introduit un gène spécifique (antisickling β-globin gene). Il a été élaboré par le Pr Philippe Leboulch (CEA, Brigham and Women’s Hospital and Harvard Medical School, Boston). Ce vecteur est mis en contact avec des cellules-souches sanguines du patient puis réinjectées après une chimiothérapie. Le vecteur « LentiGlobin BB 305 » est développé par la société américaine Bluebird Bio, fondée par le Pr Leboulch, qui a financièrement soutenu ce travail avec l’Assistance Publique–Hôpitaux de Paris et l’INSERM.

« Ce patient s’inscrit dans une étude de phase I/II, qui prévoit sept malades, tous pris en charge à l’hôpital Necker », a précisé le Pr Marina Cavazzana. Cinq – dont quatre atteints de thalassémie, autre forme de malformation de l’hémoglobine ont déjà été traités, avec des résultats positifs.  Pour l’heure, le coût de cette thérapeutique est très élevé, de l’ordre de 500 000 euros par patient, selon le professeur Cavazzana. Ce montant devrait, selon elle, fortement diminuer dans les prochaines années, avec l’automatisation des procédés. Comment ne pas l’espérer ?

A demain

1 Jean-Antoine Ribeil, M.D., Ph.D., Salima Hacein-Bey-Abina, Pharm.D., Ph.D., Emmanuel Payen, Ph.D., Alessandra Magnani, M.D., Ph.D., Michaela Semeraro, M.D., Ph.D., Elisa Magrin, Ph.D., Laure Caccavelli, Ph.D., Benedicte Neven, M.D., Ph.D., Philippe Bourget, Pharm.D., Ph.D., Wassim El Nemer, Ph.D., Pablo Bartolucci, M.D., Ph.D., Leslie Weber, M.Sc., Hervé Puy, M.D., Ph.D., Jean-François Meritet, Ph.D., David Grevent, M.D., Yves Beuzard, M.D., Stany Chrétien, Ph.D., Thibaud Lefebvre, M.D., Robert W. Ross, M.D., Olivier Negre, Ph.D., Gabor Veres, Ph.D., Laura Sandler, M.P.H., Sandeep Soni, M.D., Mariane de Montalembert, M.D., Ph.D., Stéphane Blanche, M.D., Philippe Leboulch, M.D., and Marina Cavazzana, M.D., Ph.D.

N Engl J Med 2017; 376:848-855March 2, 2017DOI: 10.1056/NEJMoa1609677

 

Un cas inquiétant de la forme humaine de la maladie de la vache folle au Royaume-Uni

 

Bonjour

C’est une lettre (médicale et scientifique) qui inquiète. Elle vient d’être publiée dans le dernier numéro du New England Journal of Medicine. La voici : « Variant Creutzfeldt–Jakob Disease in a Patient with Heterozygosity at PRNP Codon 129 ». Un groupe de treize spécialistes dirigés par le célèbre Pr John Collinge (University College London Institute of Neurology) évoque la possibilité de l’émergence d’une deuxième vague de l’épidémie de variante humaine de la maladie de Creutzfeldt-Jakob. (Il existe trois formes de la maladie de Creutzfeldt-Jakob : héréditaire, sporadique et la ‘’variante’’ acquise lors d’une contamination par un prion pathologique PrPSc). On se souvient de cette épidémie atypique survenue dans l’ombre portée de l’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB ou maladie de la « vache folle »). C’était il y a vingt ans.

L’inquiétude vient aujourd’hui d’un cas qui n’aurait jamais dû survenir si l’on s’en tient aux acquis génétiques élaborés lors de la première vague de l’épidémie : ce malade présente en effet une signature atypique de la maladie et un génotype jusqu’ici considéré comme une forme de protection contre la pathologie.

Changements de personnalité

Les spécialistes britanniques rapportent ainsi le cas d’un homme de 36 ans qui, en août 2015, ce patient est adressé au centre de référence du prion du Royaume-Uni (United Kingdom National Prion Clinic). Au cours des neuf mois précédents, cet homme présentait des changements de personnalité marqués notamment par une irascibilité marquée, des pertes de mémoire, une ataxie, des crispations involontaires. L’examen clinique objective des mouvements oculaires anormaux. Un tableau compatible avec la variante de la maladie de Creutzfeldt-Jakob. L’IRM met pour sa part mis en évidence des anomalies (ganglions de la base, hypothalamus, insula, et noyau médial du thalamus).

L’état du patient a continué à se détériorer. Décès en février 2016. L’autopsie confirme le diagnostic de variante maladie de Creutzfeldt-Jakob (présence de plaques dans le cervelet et le cortex cérébral, agrégats de PrPSc retrouvés dans les tissus hépatiques.

Premier d’une seconde vague

Autant d’éléments qui, réunis, troublent les spécialistes britanniques. Le tableau ne correspond pas à la définition codifiée de la maladie acquise par contamination alimentaire, les données d’imagerie plaidant en faveur d’une forme sporadique à la différence de la signature moléculaire. Les auteurs ne peuvent qu’avancer une hypothèse qui pourrait avoir de redoutables conséquences : ce malade pourrait être le premier d’une seconde vague de malades contaminés par voie alimentaire longtemps après une consommation de viande d’animaux atteints d’ESB.

Cette inquiétude résulte plus précisément de la génétique : depuis 1996, tous les cas de variante de la variante de la maladie de Creutzfeldt Jakob sont survenus chez des personnes dites « hétérozygotes 129 Met/Met » du gène codant pour la protéine prion. Aussi les génotypes « 129 Val/Val » ou « 129 Met/Val » étaient-ils jusqu’à présent considérés comme « protecteurs » contre la maladie. Or le cas rapporté par les chercheurs anglais est celui d’un un génotype « 129 Met/Val ». « Il est possible que ce génotype ne fasse qu’allonger l’incubation de la maladie », suggèrent les auteurs. Le phénomène avait déjà été observé dans une pathologie neurodégénérative voisine : le kuru. Cette hypothèse n’est en rien rassurante. Le génotype «129Met/Val » est le plus fréquent dans la population générale au Royaume-Uni. Les auteurs de cette lettre souligne l’importance d’une vigilance accrue.

A demain

Essai clinique mortel de Rennes : The New England Journal of Medicine ne lève pas le mystère

Bonjour

Pour connaître la suite de l’affaire sans précédent de l’essai clinique mortel conduit par la firme Biotrial de Rennes il faudra se reporter au New England Journal of Medicine. Dans la livraison du 3 novembre 2016 de cette prestigieuse revue on pourra trouver cette publication: “Acute Neurologic Disorder from an Inhibitor of Fatty Acid Amide Hydrolase” 1. Malheureusement, seuls les abonnés peuvent avoir accès à l’intégralité. On croit comprendre que le mystère demeure entier :

“An unanticipated severe neurologic disorder occurred after ingestion of BIA 10-2474 at the highest dose level used in a phase 1 trial. The underlying mechanism of this toxic cerebral syndrome remains unknown.”

Les auteurs ajoutent, dans l’ordre: “We thank Ms. Sara Calmanti for her help in writing the first draft of this article and Ms. Elizabeth Portier for her help in editing an earlier version of the manuscript; the family of the patient who died and the three other patients for consenting to the publication of their clinical and MRI data; and the staff at Rennes University Hospital for caring for the patients.”

Rien sur le site de l’Agence nationale de sécurité des médicaments.

A demain

1 Anne Kerbrat, M.D., Jean-Christophe Ferré, M.D., Ph.D., Pierre Fillatre, M.D., Thomas Ronzière, M.D., Stéphane Vannier, M.D., Béatrice Carsin-Nicol, M.D., Sylvain Lavoué, M.D., Marc Vérin, M.D., Ph.D., Jean-Yves Gauvrit, M.D., Ph.D., Yves Le Tulzo, M.D., Ph.D., and Gilles Edan, M.D., Ph.D.

N Engl J Med 2016; 375:1717-1725November 3, 2016DOI: 10.1056/NEJMoa1604221

From the Departments of Neurology (A.K., T.R., S.V., M.V., G.E.), Radiology (J.-C.F., B.C.-N., J.-Y.G.), and Infectious Diseases and Medical Intensive Care (P.F., S.L., Y.L.T.), Centre d’Investigation Clinique–Plurithématique, INSERM 1414 (P.F., Y.L.T., G.E.), and EA 4712 Comportement et Noyaux Gris Centraux Laboratory (M.V.), Rennes University Hospital, and the Vision, Action, and Information Management System in Health team, Institut National de Recherche en Informatique et en Automatique (A.K., J.-C.F., J.-Y.G.) — all in Rennes, France.

Address reprint requests to Dr. Edan at CHU Hôpital Pontchaillou, 2 rue Henri Le Guilloux, 35033 Rennes CEDEX 9, France, or at gilles.edan@chu-rennes.fr.

Maladie de Lyme: et si elle était la petite cousine de la syphilis, cette «grande simulatrice» ?

 

Bonjour

Lyme : la reprise en main politique éteindra-t-elle la polémique ? Fera-t-elle au contraire flamber celle qui se développe  et s’amplifie en France autour de la maladie de Lyme. Comment calmer un jeu ? Peut-être en se nourrissant des conclusions de la séance consacrée à cet abcès, le 20 septembre dernier, par l’Académie nationale  de médecine. Ces conclusions viennent d’être rendues publiques. Les voici :

1 D’abord l’essentiel : au sens strict du terme la maladie de Lyme est une maladie infectieuse bien individualisée sur le plan microbiologique (Borrelia), épidémiologique, clinique, sérologique. Et ce si les tests permettant les diagnostics sont, à ce jour, imparfaits. Un autre acquis est que la sensibilité des Borrelia aux antibiotiques adaptés permet un traitement efficace – du moins à la condition de respecter posologies et durée, notamment dans les formes primaires. Pour l’Académie le célèbre « érythème migrant » est suffisant pour porter le diagnostic et la confirmation sérologique n’est pas nécessaire. Les formes secondaires (phase de dissémination du germe pathogène) comportent de façon variable des localisations neurologiques, articulaires, cardiaques et/ou cutanée.

2 Il ne fait aucun doute que des difficultés peuvent apparaître à la phase tertiaire (correspondant à une forme non diagnostiquée précocement et/ou non traitée, caractérisée par des signes le plus souvent objectifs cutanés, neurologiques ou articulaires). La réponse au traitement antibiotique est alors plus lente et plus aléatoire « en raison d’une participation immunologique à l’origine de la symptomatologie ».

3 Il ne fait aucun doute, non plus, que les controverses concernent surtout ce qu’il est désormais convenu de nommer un « Lyme chronique » : une phase tardive que l’Académie rapproche des phases tertiaires de l’infection. Elles sont caractérisées par des signes cliniques le plus souvent subjectifs et persistants (douleurs articulaires, musculaires, céphalées, asthénie, troubles du sommeil, perte de mémoire…). A ce stade ce sont des données sérologiques parfois positives, ailleurs incertaines, voire négatives, souvent polémiques qui conduiraient à incriminer la maladie de Lyme.

4 « Le débat se dégrade si l’on tente d’intégrer dans la maladie de Lyne des tableaux neurologiques s’apparentant à des scléroses en plaques (SEP), à des scléroses latérales amyotrophiques (SLA), ou même à la maladie d’Alzheimer – et ce que la sérologie soit positive, douteuse, voire négative… » observe l’Académie. Une observation qui suscitera l’ire de certaines associations.

5 Comment répondre à la question de fond concernant la responsabilité de l’entité maladie de Lyme dans les « formes chroniques » qui lui sont attribuées ? Pour l’Académie plusieurs éléments doivent être soulignés.

Il faut d’abord reconnaître le « polymorphisme » de cette maladie  qui en fait une infection complexe. Pour l’Académie on en peut pas ne pas faire un parallèle avec une autre spirochétose, la syphilis, cette « grande simulatrice » à laquelle l’Académie a consacré, en son temps, d’innombrables travaux et qui, sexe oblige, alimenta de considérables passions. Puis l’Académie entre dans le dur :

« Même si les Borrelia sont extra et intra cellulaires, susceptibles de se modifier, d’échapper partiellement au système immunitaire, même si des réactions immunes éventuellement excessives peuvent survenir dans ces ‘’formes tardives’’, on comprend mal pourquoi cette maladie infectieuse à germe sensible serait une exception, au point de nécessiter des mois de traitement ou davantage, des cures successives, ou des associations d’anti-infectieux avec des antiparasitaires ou des antifungiques ou avec des immunomodulateurs, prescriptions que certains préconisent. 

 « Les tests diagnostics sont certes imparfaits, mais la communauté internationale reconnaît la validité de certains d’entre eux, recommandés dans tous les pays, en Europe, y compris en Allemagne par les organismes officiels.

Il faut rappeler qu’une sérologie positive vis-à-vis d’un germe ne témoigne que d’un contact antérieur avec ledit agent infectieux mais qu’elle n’est pas obligatoirement le signe d’une maladie infectieuse évolutive. L’efficacité supposée des traitements prolongés ou associant diverses molécules n’a jamais été démontrée dans la littérature scientifique. A contrario, une récente étude néerlandaise parue dans The New England Journal of Medicine a montré l’inefficacité et même les dangers des traitements prolongés dans ces ‘’ formes chroniques’’. »

Essais cliniques

Progresser ? Pour cela il faut  poursuivre des recherches sur la responsabilité d’autres agents infectieux ; améliorer les tests de diagnostic ; mettre en place de protocoles thérapeutiques contrôlés contre placebo à partir de choix rationalisés de molécules avec des malades volontaires sélectionnés. Pour l’Académie cette démarche longue et difficile est à la fois raisonnable et éthique. Au vu de la nature et de l’intensité de la  polémique il n’est pas dit que la raison l’emportera de sitôt.

A demain