Fallait-il soigner et sauver Robert Bowers, l’auteur de la tuerie de la synagogue de Pittsburgh ?

Bonjour

La question est provocante et la réponse évidente. Elle vaut néanmoins d’être évoquée à la lumière des propos tenus par les médecins concernés – des propos rapportés notamment par Le Quotidien du Médecin (Stéphane Long). A la lumière, également, de ce que les médias donnent quotidiennement à voir  quant à l’évolution sociétale d’un pays dirigé par un Donald Trump chaque jour un peu plus désinhibé.

Le samedi 27 octobre 2018, pendant l’office matinal de shabbat  un tueur a fait irruption dans la synagogue « Tree of Life » de Pittsburgh. Selon Jewish Telegraphic Agency, le suspect est entré dans la synagogue où se préparait une cérémonie de circoncision en criant : « Tous les juifs doivent mourir ! » avant d’ouvrir le feu. Le tireur, blessé durant l’affrontement avec la police, a été hospitalisé, placé en garde à vue puis inculpé et emprisonné. Robert Bowers, 46 ans, avait tué onze personnes présentes dans la synagogue – dont un médecin âgé de 66 ans, le Dr Jerry Rabinowitz.

On devait rapidement apprendre que Robert Bowers avait été pris en charge et sauvé par des médecins juifs au Allegheny General Hospital (AGH) de Pittsburgh – précisions données par le Dr Jeffrey Cohen, président de l’AGH. Et le Dr Cohen (dont la belle-mère était présente à la synagogue lors de la fusillade) explique lui avoir rendu visite dans son hôpital.

« Les premières personnes à l’avoir pris en charge sont des juifs, a-t-il expliqué aux médias américains. Ce sont des héros, (…) ils ont fait leur travail, en accord avec leurs convictions profondes. Je suis très fier d’eux ». « J’étais curieux de voir qui il était a-t-il ajouté concernant le tueur. Et je voulais aussi m’assurer qu’on prenait bien soin de lui ».

« Mon job c’est de soigner, pas de juger »

Au journaliste qui lui demande : « Qu’avez-vous lu dans ses yeux ? », il répond qu’il s’agit d’un patient comme les autres. « Ils ont peur, ils sont désorientés. Ils ne comprennent pas ce qu’il leur arrive. Mais encore une fois, mon job n’est pas de le juger. D’autres personnes ont cette lourde responsabilité. Mon job, c’est de le soigner. »

L’honneur de la médecine résumé en quelques mots à faire entendre sur les bancs de toutes les facultés : « Le médecin doit écouter, examiner, conseiller ou soigner avec la même conscience toutes les personnes quels que soient leur origine (…) leur réputation ou les sentiments qu’il peut éprouver à leur égard ».

Reste le contexte.Un article publié le jour de la fusillade dans The New Yorker, signé Alexandra Schwartz, expose les symptômes avant-coureurs de l’attentat et la montée de l’antisémitisme aux États-Unis depuis la campagne présidentielle de 2016, avec en particulier une recrudescence de la négation de la Shoah  et l’explosion de « l’antisémitisme au vitriol » sur Internet. Selon l’auteure l’antisémitisme n’avait pas pris une telle ampleur dans la culture américaine depuis le début  années 1940.

A Pittsburgh des médecins ont soigné et sauvé Robert Bowers, 46 ans. Aujourd’hui il risque la peine de mort.

A demain

@jynau

 

Nicolas Sarkozy : addict aux sucres. Donald Trump sait-il qu’il souffre d’une grave sociopathie?

Bonjour

Démocratie. Voici le temps venu des interrogations sur la santé mentale de ceux qui entendent nous gouverner. C’est un progrès. Nicolas Sarkozy nous confie aujourd’hui être addict au sucre – et réaffirme ne jamais boire (ni avoir jamais bu) d’alcool. En mars 2011, souvenons-nous, plusieurs médias demandaient s’il n’était pas fou – comme Marianne qui réclamait (sic) une psychanalyse  du président de la République. C’était au temps où Jean-François Kahn et Guillaume Durand officiaient encore, le second invitant l’autre sur France 2.

Marianne avait posé la même question diagnostique quant à la psyché de Nicolas Sarkozy en 2004. Sans succès. Les mêmes causes (supposées) produisant généralement les mêmes effets on retrouve l’équation sous une nouvelle présentation. On accuse ainsi l’ancien président de la République française, patron de « Les Républicains » de « trumpiser » la vie politique tandis que, de l’autre côté de l’Atlantique, les médias s’interrogent ouvertement sur l’équilibre mental du candidat républicain.

Le Figaro (Philippe Gélie) nous offre une délicieuse petite synthèse diagnostico-médiatique sur le sujet : « Quand la presse américaine spécule sur la santé mentale de Donald Trump ». Le correspondant à Washington du vieux quotidien de droite a observé ce qu’il appelle, avec les pincettes d’usage, « les allusions à la personnalité problématique du candidat républicain ». Des allusions qui, en cet été 2016, « fleurissent dans les médias de tous bords ». Où l’on voit un amuseur public en route vers les frontières qui séparent le normal du pathologique psychiatrique.  Avec, dans les médias, »des mises en causes – implicites et explicites – de sa santé mentale ».

Dictateur incontrôlable

 «Donald Trump est-il carrément fou?», s’interroge Eugene Robinson dans sa chronique du Washington Post. « Il y énumère les derniers mensonges du candidat, si grossiers qu’ils ont été dévoilés en cinq minutes: celui d’une prétendue rencontre avec Vladimir Poutine qui n’a jamais eu lieu, celui d’une lettre soi-disant envoyée par la Ligue de football (NFL) pour décaler les débats, etc. » rapporte Le Figaro.

Robinson est un «libéral» (de gauche), opposé à Trump. « Mais quand, dans le même journal, Robert Kagan, figure des néoconservateurs, proclame «Quelque chose ne tourne pas rond chez Donald Trump», c’est potentiellement plus embarrassant pour le candidat républicain, ajoute Philippe Gélie. D’autant que l’auteur n’y va pas de main morte: ‘’Le vrai problème, écrit-il, est que cet homme ne peut pas se contrôler. (…) Certaines de ses insultes sont politiquement incorrectes, d’autres sont juste puériles. Il se peut que le politiquement incorrect soit un effet secondaire de sa maladie.’’  S’il était élu, estime Kagan, ‘’les déficiences de sa personnalité seraient le facteur dominant de sa présidence». Ce qui ferait de Trump, selon lui, une sorte de «dictateur au tempérament dangereusement instable que personne, pas même lui, ne peut contrôler’’.

Il y, a aussi, le   long et glaçant portrait à charge paru dans le New Yorker  que nous évoquions ici même il y a quelques jours. Une histoire « de porc et de rouge à lèvres ». Que reste-t-il une fois que l’on a fini de démaquillé ?

Vouvray et Quarts-de-Chaume

 Il faut encore compter avec  The Atlantic qui a  confié à son spécialiste des questions médicales  (le Dr. James Hamblin) une longue analyse psychologique de l’homme qui se voit sur le trône de la Maison Blanche. Diagnostic-couperet: sociopathe: «Trouble de la personnalité caractérisé par le mépris des normes sociales, une difficulté à ressentir des émotions, un manque d’empathie et une grande impulsivité.» Sur le site du quotidien conservateur The Wall Street Journal, le chroniqueur Bret Stephens s’inquiète «d’une dimension sadique dans (son) caractère». Pour certain on est sur un trouble narcissique de la personnalité 1.

Sur MSNBC, où il présente la matinale, Joe Scarborough, ancien élu républicain de Floride, dramatise la confidence qu’il aurait reçue selon laquelle, lors d’un briefing avec un expert des questions internationales, Trump aurait demandé à trois reprises: «Pourquoi avons-nous des armes nucléaires si on ne peut pas s’en servir ?»

C’est une vraie question, autrement plus lourde de conséquences que l’addiction aux desserts sucrés non accompagnés de Vouvray moelleux. On a les Quarts-de-Chaume que l’on peut.

A demain

1 Une élue démocrate a lancé une pétition sur le site Change.org pour que le candidat républicains à la présidence des Etats-Unis subisse une expertise psychiatrique approfondie.. « Il est de notre devoir patriotique de soulever la question de sa stabilité mentale de  a indiqué Karen Bass. Les 28 000 signataires (à ce jour) estiment que Trump est « dangereux », notamment à cause de son « impulsivité » et de son « incapacité » à contrôler ses émotions. Selon Karen Bass, Donald Trump présente tous les signes d’un trouble narcissique de la personnalité (NPD). Le hashtag #DiagnoseTrump a été lancé sur Twitter pour relayer la pétition.

 

 

Donald J. Trump ou la méchante histoire d’un nègre-plume et d’un porc avec rouge à lèvres

 

Bonjour

On y verra une basse vengeance, une petite mesquinerie bien tardive. Ou, peut-être mieux, un réflexe citoyen, une affaire de santé publique. Elle est racontée dans The New Yorker (‘’DONALD TRUMP’S GHOSTWRITER TELLS ALL’’) et sur LePoint.fr. C’est aussi la preuve par neuf que les auteurs doivent se méfier de leurs nègres comme de la peste.

Le nègre, la plume, c’est Tony Schwartz, un homme à qui Donald J. Trump doit (pour partie) en sa gloire. Nègre et plume Tony Schwartz est aussi maçon : il a construit, façonné, lustré et peaufiné le mythe Trump, ce cocktail imbuvable de dollars à foison et de désinhibition médiatique. Tony S. était l’auteur véritable du best-seller Trump, the Art of the Deal paru en 1987. « J’ai appliqué du rouge à lèvres à un cochon » dit-il aujourd’hui.

Masquer les tares

Il y a trente ans c’était l’amour, aujourd’hui la peur – et, plus que la haine, le ressentiment. En 1987 c’était le charismatique self-made-man, le dithyrambe, la romance appuyée. Il taisait les tares. Aujourd’hui le nègre-plume estime avoir aidé à la création d’un monstre. Frankenstein le vrai – Donald J. Trump ou le Prométhée américain /

Tony Schwartz deux siècles après Mary Shelley :

« Je pense sincèrement que si Trump gagne et obtient les codes nucléaires, il y a de grandes chances que cela entraîne la fin de notre civilisation. Il n’y a pas un Trump privé et un Trump public. […] Tout ce qu’il veut, c’est de la reconnaissance extérieure, toujours plus. »

« Les millions de personnes qui ont voté pour lui et croient qu’il représente leurs intérêts apprendront […] qu’il se fiche complètement d’eux (…) comme un gamin de maternelle qui ne peut pas rester tranquille en cours (…) incapable de méditer plus de quelques minutes sur un sujet qui ne concerne pas son auto-glorification.  Il a, plus que n’importe quelle autre personne que j’ai connue, cette capacité à se convaincre lui-même que tout ce qu’il dit est vrai, ou à moitié vrai, ou, au moins, devrait être vrai »,

« J’ai de profonds remords d’avoir contribué à faire de [lui] quelqu’un de plus attirant qu’il ne l’est réellement, et à lui avoir donné un public élargi (…) Il n’y a aucune façon de le réparer. »

Royalties

L’ex-journaliste avait empoché plusieurs millions de dollars de royalties après la publication du manuscrit. Contacté par le New Yorker  Donald J. Trump, 70 ans  juge quant « très déloyal » son ancien collaborateur qui n’était que le « coauteur », selon lui, d’un texte qu’il jure avoir écrit (ce que dément la maison d’édition).

Schwartz-Shelley aimerait aujourd’hui « racheter son âme ». Il  prévoit de verser sa part du gâteau à des ONG spécialisées dans la défense des personnes « dont Trump veut réduire les droits ». Il aimerait que l’on donne un nouveau titre à l’ouvrage : « Le Sociopathe ». Tout est dit. Mais rien n’est joué. Il n’est pas trop tard pour relire Frankenstein or, The Modern Prometheus. Surtout la fin.

Rappelons la trame : la création par un savant suisse, Victor Frankenstein, d’un être vivant assemblé avec des parties de chairs mortes, « le monstre », qui, doué de sensibilité, se venge d’être délaissé par son géniteur et persécuté par la société des humains.

A demain

Cannabis au lycée : faudra-t-il, demain, dire merci au député (UMP) Eric Ciotti ?

Bonjour

Faudra-t-il bientôt organiser le dépistage obligatoire des propositions de loi qui n’en sont pas ? A titre préventif et  au nom de la santé des finances publiques. A l’heure où nous écrivons ces lignes les espaces médiatiques se font l’écho de la dernière initiative en date de M. Eric Ciotti, député (UMP, Alpes-Maritimes). M Ciotti, 48 ans, est un habitué des écrans-plats où il incarne avec bonheur et componction l’aile dite dure de l’UMP.

Aux médecins scolaires de jouer

M. Ciotti a fait sa bibliographie : selon l’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies, la France est après la République tchèque le pays où la consommation de cannabis est la plus élevée chez les 15-16 ans. Conclusion : M. Ciotti vient de faire savoir qu’il venait de déposer une proposition de loi visant à ce que les lycéens soient «obligatoirement soumis, périodiquement, et au moins une fois par an, à un examen médical de dépistage de produits stupéfiants». Une question de santé publique – à traiter par la médecine scolaire.

Vertus des interdits

Vincent Peillon, ministre socialiste de l’Education (qui s’est politiquement brûlé les ailes en 2012 avec le cannabis et sa dépénalisation) est d’accord pour évoquer la « santé publique ». Mais selon lui  cette mesure  ne suffirait pas. Il faut selon lui une réponse «globale» –  propos rapportés par l’AFP. Et commentés par M. Ciotti que l’on peut écouter ici sur RTL. Politique de la dissuasion-prévention  et maintien des interdits.

Alcool, cigarettes et grossesses

«Si une fois par an suffisait à régler un problème d’addiction qui est très lourd en France, ce serait facile, a commenté M. Peillon. La question, vraiment, est la prévention de cette addiction-là, et des autres aussi. Pourquoi uniquement nous parler de cette consommation-là ? Il y a beaucoup trop de consommation de cigarettes, d’alcool. Il y a des difficultés d’alimentation. Il y a aussi des difficultés de prévention des grossesses précoces.» On reconnaîtra volontiers que l’on ne peut tout dépister.

Vincent Peillon ouvert à tous

Mais on peut agir. « On a une initiative pour la santé des jeunes à prendre, elle est globale», a estimé le ministre, qui a rappelé qu’il préparait pour 2014 avec la ministre de la Santé Marisol Touraine une initiative pour la santé des jeunes, a révélé M. Peillon. Dans cette initiative je suis ouvert à tout, je verrai avec la ministre de la Santé, les spécialistes de ces questions, comment nous pourrons progresser. Je ne crois pas que c’est simplement un dépistage sur un sujet qui peut permettre de résoudre le problème, même si je n’ai pas non plus de point de vue radicalement opposé. Ce n’est pas la bonne façon d’entrer dans le sujet, il faut le prendre de façon beaucoup plus massive et complète».

Marijuana échappatoire

Sous le jeune slogan « Pas de pipi pour Ciotti » le syndicat lycéen Fidl estime que la proposition du député « n’apporte qu’une réponse répressive et délaisse l’action pédagogique et préventive sur ce sujet». Mais le même syndicat ajoute : « Pour autant le problème de la consommation de cannabis est bien présent dans les lycées, les lycéens et les jeunes de manière générale se tournant de plus en plus vers ce genre de produit qui leur sert souvent d’échappatoire à des situations familiales et sociales compliquées».

Mais la Fidl reprend la balle au bond : elle propose de donner un cadre légal à la vente ainsi qu’à la distribution du cannabis en France qui permettrait à l’État d’avoir un contrôle sur les modes de consommation ainsi que sur la composition des produits vendus et donc d’avoir une garantie sanitaire.

Pas moins dangereux que l’alcool

Barack Obama ne connaît sans doute pas pas M. Ciotti. Mais les médias font le lien. Le Colorado, avant l’Etat de Washington, vient d’autoriser la consommation de cette drogue. C’est le moment choisi par  le président américain pour dire que fumer du cannabis n’est pas plus dangereux que boire de l’alcool. Il l’a dit dans un entretien accordé au célèbre magazine The New Yorker – ajoutant toutefois qu’en consommer était «une mauvaise idée». Comprendra qui pourra M. Obama dit en substance Eric Ciotti

Qui fait quoi contre le tabac ?

Où l’on voit qu’il ne faut pas se moquer des propositions de loi. Médiatisées à l’excès elles peuvent jouer un rôle salvateur, celui de révélateur. On aimerait incidemment que MM. Ciotti et Peillon (ainsi que Mme Touraine) fassent preuve de la même imagination républicaine pour le tabac. Le dépistage ne ferait que confirmer les faits : à 17 ans un jeune Français sur trois en consomme régulièrement. Que serait-ce si la vente n’était pas totalement interdite aux mineurs?

A demain.