Bonjour
Le Dr Nicolas Siegler s’est suicidé le 3 mars dernier. Agé de 37 ans, marié et père de deux enfants, ce chirurgien urologue exerçait au CHU de Nîmes et au centre hospitalier de Bagnols-sur-Cèze (Gard). Selon la direction de ces deux établissements l’origine de ce drame intime serait strictement personnelle. « Toute insinuation qui viserait à établir un lien de causalité avec l’exercice ou le cadre professionnel du praticien serait considérée comme une tentative de diffamation et reçue comme telle », ont aussitôt prévenu les directions de ces hôpitaux sollicitées par Le Quotidien du Médecin (Guillaume Mollaret).
Serait-ce aussi simple ? Pas pour le Dr Philippe Cathala (CHU de Montpellier) :
« (…) Je garderai de Nicolas, qui était chef de filière d’urologie lorsque je présidais l’internat de Montpellier, le souvenir d’un confrère doux et très chaleureux, que ses collègues surnommaient affectueusement « nounours » tant il disait toujours oui. C’était un excellent praticien reconnu par ses pairs et par ses patients. Il était dans une situation compliquée, confronté à une vie, notamment professionnelle, difficile et n’a pas trouvé les ressources pour se battre. Cela nous rappelle à quel point l’engagement dans leur vocation des médecins peut être total, parfois jusqu’à l’absurde et à quel point il est vital que la société sache aussi prendre soin de ceux qui habituellement s’occupent d’elle. »
« Dans un suicide, il y a toujours des causes multifactorielles. Il était le seul PH à Bagnols-sur-Cèze depuis plusieurs mois et faisait des journées de travail à rallonge. Sa charge de travail était devenue énorme. L’auto-inspection par l’institution semble un art complexe » a d’autre part déclaré au Quotidien du Médecin un confrère sous le sceau de l’anonymat.
Selon les informations du Quotidien, le Dr Siegler avait émis la volonté de s’installer dans le secteur libéral et entamé plusieurs démarches en ce sens. « Le drame du suicide d’un confrère n’est que la partie émergée et plus cruellement visible de l’épuisement professionnel de nombreux professionnels de santé », écrit dans un communiqué le Dr Jean Thévenot, président de l’Ordre régional des médecins d’Occitanie.
L’affaire n’est pas finie
Dans un premier temps deux syndicats ,Action Praticiens Hôpital (APH) et Jeunes Médecins, ont dénoncé l’ « incapacité des organisations hospitalières et des pouvoirs publics à empêcher ces drames à répétition, qui bouleversent la communauté hospitalière sans qu’aucune solution concrète ne soit mise en œuvre. A quoi bon organiser des réunions au Ministère sur la qualité de vie au travail si rien n’est fait pour prévenir sur le plan local les situations de souffrance extrême ? » demandent-ils.
Aujourd’hui quatre syndicats nationaux amplifient le mouvement : le Syndicat National des Praticiens Hospitaliers Anesthésistes-Réanimateurs-Elargi aux autres spécialités (SNPHAR-E), le Syndicat National des Gynécologues-Obstétriciens de France (SYNGOF), le Syndicat National des Jeunes Anesthésistes-Réanimateurs (SNJAR) et le Conseil National des Jeunes chirurgiens (CNJC). « Il est assez rare que chirurgiens et anesthésistes-réanimateurs cosignent des communiqués de presse. C’est dire si on en a ras-le-bol de voir nos collègues tomber… » résume la Dr Anne Geffroy-Wernet, présidente du SNPHAR-E.
« Nous refusons de parler d’’’un suicide de plus’’ » annoncent les responsables des quatre syndicats. Ils demandent à être reçus en urgence par Agnès Buzyn – et réclament à la ministre des Solidarités et de la Santé la saisine de l’IGAS afin qu’une « enquête indépendante » soit menée. Qui s’opposerait à Agnès Buzyn si elle entendait faire la lumière sur ce drame ?
Reste, il est vrai, l’étrange menace proférée, d’emblée, par les directions hospitalières : « Toute insinuation qui viserait à établir un lien de causalité avec l’exercice ou le cadre professionnel du praticien serait considérée comme une tentative de diffamation et reçue comme telle ». Pourquoi ?
A demain
@jynau